vendredi 20 juin 2025

Audiovisuel public : faire et défaire ou… cinquante ans de circonvolutions ! 1/2

Il y a cinquante et un an, jour pour jour, le 20 juin 1974, l'ORTF est en grève. Mais, à la différence de ce qui se passe aujourd'hui, au journal "Inter-Soir" (24') à 19h, 16' sont consacrées à la grève. Et, en premier, c'est le secrétaire CGT de l'ORTF qui intervient. On se pince. Aujourd'hui si les antennes sont en grève, les représentants syndicaux et ou les salariés ne peuvent intervenir à l'antenne pour faire part de la situation et exprimer leurs points de vue. Nous allons le voir, ce journal conservé par l'Ina, tente en donnant la parole à différents intervenants : hommes politiques et députés, à droite comme à gauche, de brosser l'état des lieux. Le feu couve (1). Ce 20 juin, le gouvernement de Jacques Chirac, Premier ministre, n'a que 22 jours. Ce jour-là Roger Chinaud remet son rapport sur l'ORTF. Personne ne le sait encore à l'Office mais, ses jours sont comptés…

Manifestation le 14 juin 1972,
place du Trocadéro à Paris,
contre le démantèlement de l'ORTF. Photo AFP










En décembre 1973, la commission de contrôle de la gestion financière de l’ORTF confie à M. Roger Chinaud, député (Républicains Indépendants), d’établir un rapport sur l'ORTF. Quatre mois plus tard, le 4 avril il est déposé et publié le 20 juin 1974. C'est sans doute la raison pour laquelle ce jour-là la Confédération Générale du Travail (CGT) a décidé de s'associer à la Fédération des Syndicats Unifiés (FSU) en grève depuis le 30 mai, pour durcir le conflit comme le constate Arlette Chabot, journaliste, dans l'archive INA présentée ci-dessus. André Sabas, le présentateur du journal, donne la parole au Secrétaire de la CGT, Pierre Noguera.

François Mitterrand, battu il  y a un mois face à M. Giscard d'Estaing, actuel président de la République, donne son point de vue sur l'ORTF. Il s'inquiète du flou qui s'installe sur les évolutions probables que le gouvernement va impulser, voire imposer, puisque jusqu'à maintenant ni le Premier Ministre, Jacques Chirac, ni le Président ne se sont exprimés sur le sujet !

Puis M. André Vivien (Union des Démocrates pour la République), Président de la Commission de contrôle, intervient longuement pour évoquer le rapport Chinaud. Il commence par annoncer qu'en séance plénière à l'Assemblée le débat aura lieu le 26 juin. André Sabas, le journaliste d'Inter, annonce que les députés ont voté la publication du rapport Chinaud, interviewé aussitôt à l'antenne.

Le JT de 20h du 20 juin, de la Première chaîne sans doute, présente MM. Chinaud et Vivien pour évoquer le Rapport. À cinquante-et-un an d'intervalle se rejoue l'avenir de l'audiovisuel public. Si le Gouvernement Chirac casse l'ORTF (2), le Gouvernement Bayrou s'apprêterait à la reconstitution de ligue dissoute, enfermant Radio France, France Télévisions et l'Ina dans une holding exécutive, France Médias…

C'est le 30 juin et le 1er juillet  2025, qu'est attendue au Parlement la discussion de la loi et le vote qui pourrait modifier la gouvernance des trois sociétés de l'audiovisuel public. Wait and see…

(1) Nous le verrons le 30 juin, dans la partie 2 de ce billet,
(2) Créations de sept unités indépendantes : Radio France, TF1, Antenne 2, France Régions 3, SFP, TDF, Ina,

mardi 17 juin 2025

Catherine Soullard : il est midi…

Il est midi, oui, mais à quelle heure ? Le 6 avril 1993 à 22h40 ? Le 15 juin 2024 à minuit 05' ? À ces deux heures-là, ces deux années-là, Catherine Soullard, productrice, nous proposait sur France Culture, dans les Nuits magnétiques (1), quatre digressions autour de cette heure de midi, réalisées par Bruno Sourcis. Dimanche matin, il était 5h30, le jour pointait et je me mis à l'écoute de ce temps de midi que Catherine avait bien voulu suspendre pour nous. Suspendu pour toujours ou pour quelques heures, à midi. Que l'angélus sonne. Que le soleil donne en plein comme l'a écrit Marie Susini. Que José Mauro de Vasconcelos nous raconte son bel oranger et que Giono peste en plein midi contre le poids du soleil. Alors je vais écrire et j'attendrai midi au soleil pour publier ce billet.











Un seul des épisodes de ces Nuits Magnétiques n'y suffit pas. Comment ne pas avoir envie de prendre "tout le midi" dans ses bras ? Comment ne pas avoir envie de raccourcir la course du soleil ? De rester de midi jusqu'à minuit ? De sa voix douce, Catherine Soullard pose, en rond, ses petits cailloux blancs de soleil. Là, sur la placette d'un village de Provence mais surtout dans nos imaginaires acquis au bon midi. L'angélus va sonner. Tout autour va vibrer. Et tout va pouvoir commencer.

Ça commence comme un florilège joyeux. Très vite avec les accents du midi. Ça chante dans les mots et ça sourit. On y est. C'est sûr. Même si on doit se taire quand on ne sait pas chanter les mots. Midi tremblant. Midi étouffant. Midi suintant. Le soleil pleine face. Le soleil chanté. Le soleil enchanté. Les airs ne manqueront pas de nous attraper au col ou au cœur de petites ritournelles charmantes. Catherine enfile les rayons de soleil comme d'autres les perles (de pluie). Elle sait trouver, à l'ombre douce des tumultes, les mots justes pour, même la nuit, sublimer le midi. "C'est l'heure du partage. Lumière hallucinante où les pierres vont parler, les arbres frémir et, où les esprits rôdent démoniaques ou fantomatiques, dans l'air tiède qui défaille. Midi l'excès. Tout est possible. Apparaître et disparaître…"

Et puis "midi, un petit choc psychologique dans votre vie. Midi n'a pas le même sens que les autres heures…". Alors samedi 21 juin à 4:41, ici il fera petit jour et ce sera le solstice. Lheure idéale pour se mettre à l'heure du partage. "J'écris, assis sur un banc de pierre, dans un bourdonnement vague, il est midi. Le soleil achève de tuer les lilas. Même les oiseaux ne s'affairent plus, ils ne chantent qu'à mi voix comme s'ils se parlaient à eux-mêmes, …" Merci Catherine.

Un petit cabanon










À midi, à Marseille "même celui qui fait rien, il s'arrête !…"

(1) Dans les Nuits de France Culture, ce 15 juin, sera rediffusé le 1er épisode "Le temps suspendu",

lundi 16 juin 2025

En fanfares et… sans fanfarons !

Pour entrer dans le bal de ce documentaire réalisé par Benjamin Hû, Jérôme Sandlarz, l'auteur a choisi, pour commencer, de nous faire marcher au pas et de nous mêler aux gens (d’armes). Comme par réflexe, j’ai tout de suite eu envie avec Boris (Vian) de chanter "On n’est pas là pour se faire engueuler, on est là pour voir le défilé". Un peu par provoc' bien sûr, face à ces militaires "si bien élevés" et si sérieux. Mais il est peut-être dans l’ordre des choses, et de l’histoire, de commencer ce documentaire par de la musique militaire (ça rime).


Bobby Lapointe









Après l'écoute des quatre épisodes qui balayent quelques genres de fanfare (des mineurs, des ferias, des beaux-arts, techno,…), si nous faisions un blind-test, il nous serait sans doute difficile d'en distinguer les différents types, sauf peut-être celles des militaires et des chasses à courre. Le découpage par thème par épisode (quelquefois deux genres au sein d’un même épisode) est peut-être un peu trop didactique ? Trop sage. Pour moi, la fanfare c'est débrider l'académisme de la "musique sérieuse". C'est beaucoup de joie, de folie et de liberté. Mais ce n'est pas le style de Sandlarz de fanfaronner. En nous faisant voyager de l’une à l’autre de ces fanfares, un grand mix aurait sans doute permis d’abolir les "frontières de genres", quitte à bien distinguer ceux-ci au fur et à mesure.

Le panorama proposé est riche et la diversité des musiciennes et musiciens éclectique et singulière.Tous les intervenants sont passionnants, enjoués et en forte empathie/symbiose avec la musique, leur instrument-fétiche, le groupe mais, nous aurions aimé plus les entendre jouer.  Même si dans le temps imparti il est difficile de trouver le bon équilibre, paroles et musiques…

Radio France : Fêtes, défaites… Fêtes défaites !

Le 12 juin (mais pourquoi pas le 12 mai ou le 12 mars) Radio France avait convié à 18h le personnel présent à la Maison de la radio, pour un genre de parade moderne que la société de radiodiffusion publique appelle la "Soirée Radio France". Qui, nous le verrons, cache mal la dé-fête, et met sous le tapis renoncements et dénis. La parade, le faux-semblant, l'artifice (sans le feu) sont le B.A-BA que la com' et les communicants tissent et retissent depuis plus de cinquante ans. Marcel Bleustein-Blanchet, avant guerre, avait décrété morte la réclame, inventant la publicité. Aujourd'hui, au kilomètre, les communicants font de la prose en le sachant. Même dans une "boîte" (1) comme Radio France, il faut faire croire au personnel que tout va bien quand tout va plutôt mal (2). Mais si jamais l'auditeur savait ? Qu'on en juge !




Dans un communiqué publié jeudi dernier, quelques heures avant la "fête", l'intersyndicale de Radio France dénonce :
  • Les risques sur l'indépendance éditoriale, sur la place de la radio de service public, sur les projets de filialisation de France Info et d'ICI et plus largement sur les risques concernant les conditions d'exercice de l'activité que ce projet nous réserve,

  • L'entreprise elle- même, ayant intégré ces pressions extérieures [diminution récurrente des budgets], se saborde en menant des projets contre l'intérêt des équipes

  • Les spécificités de la radio publique et de ses missions, sources de son succès sont aujourd'hui remises en cause : une production interne à 100 %, un savoir-faire incontestable dans le son au service de tous les publics, une information fiable et vérifiée, une qualité de l'offre musicale, etc,

  • Multiplication des projets de nature à affaiblir Radio France : la disparition de Mouv', la diminution de fréquences FM,  la réforme des modes de production,

  • La Direction fragilise l’identité même des locales en centralisant d’avantage les décisions, en imposant des contenus nationaux, en réduisant la part d’antenne spécifique en direct et en laissant moins de latitude aux équipes jusqu'à faire disparaitre de plus en plus de chroniques locales.

Le "surtout faire comme si" de Radio France prévaut, épargne les auditeurs d'appréhender l'envers du décor, impose les apparences faites de chiffres toujours plus mirobolants, cache les effets dévastateurs d'une mue autant sociale que sociétale, met sous le tapis dénis et renoncements et multiplie les tartes à la crème à coups de gazelle, de fêtes maquillage et autres promotions +++ de personnels venus de la TV (3).

On en est là. Le 30 juin l'Assemblée nationale examinera la PPL Lafon, soit la loi audiovisuelle qui, tel le Serpent De Mer n'en finit pas d'apparaître et de disparaître. À moins que Macron dissolve l'Assemblée, à moins qu'une panne d'électricité, à moins que la grève générale, à moins que le soleil n'ait rendez-vous avec la lune, à moins que la Seine ait débordée plus haut que les marches de l'Assemblée, à moins que…

Si les auditeurs savaient…

(1) Terme employé par Mathieu Gallet, le jour même de son arrivée à Radio France pour y prendre ses fonctions de Pdg en mai 2014
(2) On me pardonnera de ne pas citer les chiffres-paravent du producteur Collin, le faiseur de millions, sauf que : "le podcast «Ex...», porté et produit par l’animatrice Agathe Lecaron, s’impose comme une référence en France. Cinq ans après sa création, il a fidélisé plus de 30 millions d’auditeurs grâce à ses histoires d’amour marquantes" (in La Lettre de l'Audiovisuel, 5/12 juin 2025)

(3) Yasmine Oughlis quitte "La maison des maternelles" (France TV) après quatre ans dans l’émission, pour rejoindre France Inter au mois d'août. Elle y animera l’émission Grand bien vous fasse… Tout en gardant son émission "C'est ça la France" sur RMC Story (source Diverto, 12 juin 2025)

mardi 10 juin 2025

Veil-Ernotte dansent la carioca… mais moins bien que Darmon et Chabat !

Dans Le Monde (daté 8-9-10 juin), Gil Rof, journaliste, écrit : "La volonté de la Présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte-Cunci, de faire de France 3, un réseau de chaînes régional plus qu’une chaîne nationale avec des décrochage locaux…" Bigre, on ne se souvenait pas que dans notre folle jeunesse, qui se foutait du tiers comme du quart de la télé, FR3 était une chaîne régionale (1) "tenue en laisse" depuis Paris. Centralisme quand tu nous tiens ! Presque au même moment 35 des 44 antennes locales du réseau ICI (ex-France Bleu) signent des lettres ouvertes pour alerter leur direction d'une gestion trop "verticale" et d'une centralisation qui dépossèdent de plus en plus les locales d'une maîtrise totale de leur programmation. Et voilà le revival d'ICI… Paris ! Décentraliser/Centraliser le pas de deux des dirigeantes de FTV et Radio France laisse présager d'une future harmonie exemplaire pour gérer ICi (Oula !). Plus pathétique tu meurs ! 

Ça a de la gueule non ?










On en est là ! Mais inexorablement le "tunnelier" avance. Le tunnelier késaco ? La version moderne du rouleau compresseur. J'explique. Parmi ses premières annonces depuis qu'elle a été nommée pour la troisième fois consécutive Pédégère de France Télévisions, Delphine Ernotte a décidé d'accueillir les podcasts de Radio France sur la plateforme de France Télévisions. Quelle meilleure preuve d'un rapprochement pertinent entre radio et télévision ! Sauf que les revenus de la publicité accrochés à ces "milliards de podcasts" à qui iront-ils ?  On se souvient que Sibyle Veil, Pédégère de Radio France avait refusé à Majelan, l'ex-site de Mathieu Gallet, qui avait pour ambition de réunir podcasts publics et podcasts privés, de diffuser les podcasts de Radio France.

Mais attention, là on est entre gens de bonne compagnie… publique ! Et donc, tel le tunnelier dune holding/fusion, Ernotte avance pour rendre tangibles et… incontournables les collaborations de l'audiovisuel public, vues surtout depuis les intérêts de France Télévisions. Ce n'est que le début d'une pagaille monstre annoncée. 

Et quoi qu'il advienne de la PPL Lafon (proposition de loi du Sénateur Lafon pour une holding "France Médias") la fusion est en marche. En marche forcée mais en marche. Dernière minute, Madame Dati, aurait obtenu du gouvernement, la discussion de la loi entre le 17 et le 19 juin. Entre ces deux dates, le 18 juin serait favorable à Madame Ernotte à qui il ne resterait plus qu'à… faire l'appel !

(1) Chaîne de télévision généraliste française de service public à vocation régionale. C'est vrai que le "à vocation régionale" est lourd de sens et peut cacher les volontés jacobines du pouvoir,

lundi 9 juin 2025

Roland Dhordain : une façon joyeuse de faire de la radio…

Fallait oser ! Et, depuis ses débuts à la radio dans les années 50, Dhordain ose tout. La radio de nuit, les radios-vacances, France Inter Paris (Fip 514), "Les enfants d'Inter" et la découverte de tant de talents et de voix inscrites au panthéon radiophonique. En 1963, chargé de la réforme de la radio à l'ORTF, il baptisera les trois chaînes publiques : France Inter, France Culture et France Musique. Ses 24/24 sont bien 24h de programmes frais, Dhordain n'ayant jamais osé "repasser les plats "(rediffusions). En 1971, moins de six mois après la création de Fip 514, il va tenter pour la grille d'été un sacré coup.

Roland Dhordain, au micro…








Dhordain le futé (il a été scout) imagine que pour les 4 semaines d'août et la première de septembre (dites grille d'été) ce sont les équipes de Fip (les animatrices et le journaliste Jean-Luc Hees (1) qui vont prendre l'antenne de France Inter (soit genre 24/24 comme le disait le slogan!). Ça s'appellera France Inter Vacances (FIV). Je donnerai cher pour entendre à quoi ça a pu ressembler.

Joli coup éditorial. Et utilisation intelligente des potentialités maison. Une belle synergie aurait pu dire Jean-Luc Hees (2). Aujourd'hui, on n' imagine pas un seul instant que la Directrice d'Inter, Adèle Van Reeth, ait assez d'audace, d'intuition et de bon sens pour oser ça, et surtout faire une vraie grille d'été ouverte aux quatre vents, en tentant de multiples formats, de nouvelles voix voire de nouveaux genres ! Et oui le culot et la confiance de Dhordain en ses équipes ont fait des merveilles. Dhordain était un homme de radio !

(1) J'écris Jean-Luc Hees qui est bien, le premier (et le seul) journaliste de la chaîne à cette époque, mais sans savoir s'il a vraiment participé à ce F.I.V.. Mais Dhordain parlant d'équipe on peut le supposer !
(2) De 1990 à 1999, Hees animera à 18h sur France Inter, le journal de 18h et en suivant "Synergie" un genre de magazine à la Pierre Bouteiller en moins parisianiste !

jeudi 5 juin 2025

Un pied dans l'audiovisuel public, un pied dans l'audiovisuel privé : conflit d'usage ?

Où il est question de l'arrivée à la prochaine saison sur France Inter, du journaliste Benjamin Duhamel, dans la matinale, pour l'interview politique de 7h50. Le journaliste conserverait toutefois la présentation de "Tout le monde veut savoir" sur BFM -TV (du lundi au jeudi). Les syndicats (1) de Radio France (CGT, CFDT, FO, SNJ, SUD, UNSA) ont publié hier soir un communiqué qui stipule : "… la rédaction a massivement exprimé au directeur de l'information [Philippe Corbé, ex-BFM] son opposition à ce cumul inédit pour France Inter" .

Wladimir Porché










Le communiqué poursuit : "Quid des conflits éditoriaux pour ce potentiel futur collègue, appelé à officier le soir comme tête d'affiche d'une antenne concurrente de celle dont il sera l'incarnation le matin-même, à une heure d'écoute stratégique ?… Comment dès lors la direction pourra-t-elle continuer à refuser à d'autres journalistes ou producteurs de Radio France de travailler en même temps pour des concurrents privés, alors qu'ils sont tous jusque-là tenus d'obtenir l'autorisation de la direction pour toute collaboration extérieure, même bénévole ? Des questions de fond qui, au milieu du siècle dernier, avaient été tranchées radicalement.

En 1955,  Wladimir Porché, Directeur (1946-1957) de la Radio-Télévision-Française (RTF), prend la décision d'interdire aux journalistes et aux animateurs d'émissions de radio de la RTF (1) d'avoir en parallèle la même activité sur les radios privées (Radio-Luxembourg, future RTL, Radio Monte-Carlo, Europe n°1), et donc, impérativement de faire un choix entre radio publique et radio privée.

Robert Beauvais qui anime sur "Paris-Inter", "Dimanche dans un fauteuil", travaille aussi en parallèle pour Radio-Luxembourg. Contrit et contraint, il choisit la radio privée. Il faut lui trouver un remplaçant. Jean Chouquet, réalisateur, présente à Paul Gilson, Directeur de la radiodiffusion, José Artur à qui sera confié l'animation de "Dimanche dans un fauteuil". Ce sera la première expérience de José au micro (3).

(1) Texte également soutenu par la Société des réalisateurs de France Inter (SDRI) et le collectif des programmateurs et attachés de production de France Inter (CAP),
(2) Idem pour les journalistes et animateurs télé qui ne peuvent exercer en même temps les mêmes fonctions dans les radios privées,
(3) iI avait commencé par être l'assistant de Jean Chouquet.

mercredi 4 juin 2025

La fin des ondes… La fin d'un monde !

"Un siècle après l’arrivée de la télévision sur la TSF, la transformation de l’audiovisuel s’accélère en basculant de la diffusion par voie hertzienne vers le tout numérique sur les réseaux filaire désormais, le public fait sa propre programmation au risque de s’y perdre." Voilà comment Le Monde, dans son édition datée du 3 juin 2025, introduit un long article de Charles de Laubier, intitulé "Audiovisuel : l'adieu aux ondes".



Ouf ! Nous voilà "rassurés" l'adieu aux ondes concerne aussi la télévision et il n'y aura donc pas que la radio à avoir des regrets éternels. Ce que nous écrivons modestement depuis quelques années est donc validé par un état de fait de société pour lequel les politiques se sont contentés de "voir passer le train". Le mouvement, on peut même dire la révolution, est engagé depuis les années 80.

"Que de chemin parcouru depuis le démantèlement, il y a un demi-siècle de l’Office de Radio diffusion-Télévision Française (ORTF), cet établissement public qui concentrait le monopole d’état de l’audiovisuel et s’appuyait sur les infrastructures hertziennes de la TSF. Mais il a fallu attendre la loi du 29 juillet 82 proclamant, la "liberté de communication audiovisuelle" promise par François Mitterrand. La fin de l’ORTF - du monopole - a été marquée par la multiplication des émetteurs, diffuseurs et producteurs de programmes audiovisuel et des innovations, raconte Jean-Jacques Cheval, professeur émérite des universités. L'arrivée d’Internet et celle de la TNT ont joué de grands rôles, mais celui de la télécommande a aussi permis le zapping, qui a lui-même changé le langage télévisuel." (1)

La tyrannie progressiste de l'informatisation-numérisation a fini par reléguer la diffusion hertzienne au rang des antiquités. Les auditeurs-téléspectateurs organisant, à façon, leurs programmes, sans grille, sans contrainte temporelle et sans continuité formelle. The dream is over. Le rêve est fini de se laisser porter par une succession de programmes qui, si son/sa responsable était qualifié(e) donnait lieu à de nombreuses découvertes. On passe de la politique de l'offre à celle de la demande, ne se laissant plus porter par l'inattendu, l'in-entendu. La plateformisation devenue l'alpha et l'oméga du développement audiovisuel.

Wolfgang Ernst, (2) dans le même journal, sous le titre "La radio et a télévision ont perdu leur âme en tant que techniques autonomes" dit : "…Il existe une beauté particulière propre à la radio sans fil du point de vue de la philosophie des médias, être "dans les airs" [on air] renvoie à cette forme de beauté, voire de spiritualité de l’immatériel…" Comme c'est bien dit. Seulement avant que l'Organisation Mondiale des Geeks Acharnés (OMGA) ne s'en rende compte on sera peut-être revenu dans la grotte Chauvet, dessinant au charbon de bois des petits rectangles de plastique surmontés d'une antenne, devant lesquels les spéléologues du troisième millénaire, en larmes, se pâmeront en chœur.

La radio a perdu son âme dans un long processus engagé depuis 2014. À coups de dénis et de renoncements irréversibles…

(1) Le Monde, "L'adieu aux ondes", Charles de Laubier, 3 juin 2025
(2) Professeur à l'université Humboldt de Berlin, est l'un des principaux théoricien de l'archéologie des médias, 

lundi 2 juin 2025

Lundi 2 juin 1975… Radio France

Je me suis souvenu qu'il y a cinquante ans le 2 juin était aussi un lundi. Ou plutôt je me suis souvenu qu'il y a cinquante ans Radio France avait à peine six mois. Si les gens qui dirigent Radio France aujourd'hui avaient un tant soit peu d'amour pour la radio, au lieu de faire des ronds de jambe en début d'année, ils auraient pu/du prévoir, pour l'été une programmation spéciale pour Inter, Culture, Musique et Fip. Faut pas rêver ces gens-là n'en ont rien à faire de l'histoire, des voix et des émissions qui ont fait le patrimoine radiophonique de la radio publique. Tout à leur affaire de plateforme, de podcasts et de réduction des moyens de production, ils roucoulent devant des chiffres, dansent la gigue sur Mediametrie et appliquent à la serpe la diminution de la masse salariale, sans complexe, sans l'ombre d'un doute et surtout sans âme. Avoir confié à des managères de moins de cinquante ans la gestion de ce service public audiovisuel, c'était pour les pouvoirs publics l'occasion d'en finir avec la création radiophonique et des formes trop élaborées de radio. De faire entrer aux forceps la radio dans un conglomérat où sa singularité serait définitivement diluée pour ne pas dire rayée de la carte.
















France Inter, 2 juin 1975
Claude Guillaumin : 8h30, la revue de presse. Pierre Bouteiller : 9h, le magazine. Jean-Pierre Elkabbach : 13h, le 13/14. Jacques Chancel : 17h, Radioscopie (Léopold Sedar Shengor). Claude Villers, : 20h, Pas de panique. Patrice Blanc-Francard : 22h, Cool. José Artur : 23h, Le Pop-Club. Madeleine Constant : 1h, Aujourd'hui c'est déjà demain. Jean-Louis Foulquier, 2h, Studio de nuit.
(Exceptées Anne Gaillard (Inter Femmes), Eve Ruggieri  et Liliane Bordoni (Les panthères roses), Madeleine Constant, les femmes sont rares en semaine. Ce qui n'est pas le cas le samedi et le dimanche dans L'Oreille en coin)

France Culture, 2 juin 1975
Pierre Sipriot : 9h, Les lundis de l'histoire. Pierre Lhoste : 11h30, un quart d'heure avec… Jacques Duchâteau : 12:45, Panorama culturel de la France. Françoise Malettra : 13h30, Les après-midi de France Culture. Edith Lansac : 18h30, Réflexion faite. Lucien Malson : 22h30, Black and blue.
(Pas mieux pour la présence des femmes à l'antenne)

France Musique, 2 juin 1975
Philippe Caloni : 8h35, Au programme cette semaine. Claude Maupomé : 13h30, Les intégrales. Lucien Malson : 18h30, Le club du Jazz - Visages du jazz. Jean Fontaine : 1h30, Nocturnales.
(Pas mieux pour la présence des femmes à l'antenne)

















Quant à Fip, que des femmes à l'antenne. Et même si j'ai bien en tête le feuilleton de Gilles Davidas, sur les 40 ans de Fip (2011), "Vous avez loupé Marie-Martine", il est très difficile de nommer les animatrices qui étaient à l'antenne ce jour-là. Simone Hérault, Isabelle Dutilh Lafrance, Marie-Marine Bisson, Claudine Giraud,… ?

(Source programmes, Radioscope)

vendredi 30 mai 2025

Radio-Moquette (Saint-Maclou priez pour nous…)

Je vais surprendre Hedi qui tient à bout de bras le site Radioscope car, c'est sûr, il n'a pas encore recensé cette radio, dont nous ne savons pas sur quelle fréquence elle émet. Il y a quelques jours, Muriel Pleynet, nouvelle directrice de franceinfotv, évoquait à propos du mercato tv, Radio-moquette. Une journaliste TV évoquant la radio c'est assez rare non ? C'est même tellement rare que ladite Radio-Moquette n'est pas une radio !!!! Qu'est-ce donc alors ?











Radio-Moquette voudrait dire "bruits de couloir". Tiens donc ? De ce fait Pleynet aurait été inspirée en parlant de TV-Moquette. Mais pourquoi pas, plus explicitement, Radio-Couloirs ? Que vient faire ici la moquette ? On aurait pu, évidement, imaginer que Saint-Maclou se lançait dans la création d'une radio de marchand de tapis. Il n'en est rien.

Mais en faisant référence à la radio pour stigmatiser les bruits de couloirs n'est-ce pas un peu dévalorisant pour le média radio qui ne relaye pas les bruits de couloir (je parle de la radio publique, quant aux radios privées…) ? Ou est-ce la dernière occasion pour que le mot radio soit mis en avant ? Parce qu'on n'imagine pas un seul instant Laurent Frisch, (Directeur du Numérique à Radio France) parler d'Audio-Moquette ?

J'ai sans doute échappé à ce mot nouveau car je ne suis pas dans l'entre-soi média. Va pour Radio-Moquette dont il ne faudrait surtout pas se moquer, particulièrement, car Saint-Maclou est l'un des sept saints fondateurs de la Bretagne occidentale. CQFD !

jeudi 29 mai 2025

Sur les docks (30) : dans la grotte Chauvet…

Un documentaire d'Élise Gruau et Diphy Mariani du 6 octobre 2015.  Les productrice et réalisatrice ont donc pu descendre dans la grotte. Grand privilège. "Sur les sols fossilisés de la grotte Chauvet les traces des ours des cavernes, des loups et des hommes qui l’ont fréquentée nous semblent intacts. Dans un décor géologique spectaculaire, les hommes du paléolithique sont venus créer des chefs-d’œuvre. Des centaines d’animaux peints, des techniques sophistiquées de représentation, de véritables mises en scène témoignant d’une pensée symbolique inconnue jusqu’alors, faisant de ce lieu un véritable sanctuaire. Obstruée pendant des milliers d’années, la grotte Chauvet a été découverte il y a vingt ans".  (sur la page de l'émission)

© Getty-Patrick Aventurier








"Ils ont fait leurs dessins, ils sont partis, le porche de la grotte s'est effondré et hop, le temps s'est arrêté", raconte Élise Gruau. Raconté par Jean Clottes, préhistorien, son premier périple dans la grotte, un 28 décembre 1994, accompagné de Jean-Marie Chauvet, nous permet d'imaginer les spéléologues à la découverte d'un fabuleux trésor. Rappelant que l'entrée de la grotte a été obturée par les éboulis il y a plus de vingt-mille ans.

Intéressant de découvrir l'utilisation saisonnière et croisée de la grotte : en hiver les ours, au printemps et en été les hommes. L'occupation de la grotte était surtout utilisée pour faire des cérémonies. Mais il reste difficile d'imaginer la vie - et cette démarche artistique - il y a 36 000 ans. "Un sanctuaire paléolithique de l'homme moderne… pour exprimer la mémoire sur une surface et plus seulement sur l'oralité."

"Sur les docks"
En remettant en avant trente documentaires de "Sur les docks" , depuis fin mars, j'ai aussi voulu montrer que l'unitaire (un seul épisode) a toute sa place dans un programme documentaire. Le tour de passe-passe qui a consisté à imposer 4h aux documentaires de LSD est un mauvais coup pour la diversité des "points de vue" et des sujets développés. Aujourd'hui sur une saison sont produits un maximum de 44 documentaires (dont plusieurs rediffusions) alors que jusqu'en 2016, le nombre de producteurs-tournants - et de sujets - était, de fait, beaucoup plus important. On assiste donc aujourd'hui à une diminution des documentaires malgré tous les comptes d'apothicaire qu'on voudrait nous faire avaler.

mercredi 28 mai 2025

Sur les docks (29) : Les insoumis de la nuit…

[Pour m'endormir]… je me protège avec un espace sonore" nous dit le premier invité de ce documentaire de Pauline Maucort et Émilie Chaudet, réalisé par Christine Robert, diffusé le 24 septembre 2015. 

Sur les tournage des insoumis de la nuit, dans l’usine Pocheco, Christine Robert et Yann Fressy

Sur le tournage des insoumis de la nuit, dans l’usine Pocheco, 

Christine Robert et Yann Fressy. 

© Radio France - Pauline Maucort














"Ils sont seuls dans leur chambre. Il y a la radio, parfois une sirène lointaine, ou la cafetière qui ronfle à leur place. Ils sont plusieurs dans la rue, sur leur lieu de travail, ceux qui ont choisi la nuit pour de meilleurs salaires, ou pour ne pas subir l’agitation du jour. A quoi ressemblent les rêves, les angoisses, les souvenirs quand tout ralentit, quand on peut enfin entendre le silence, quand on peut enfin s’entendre soi-même." (sur la page de l'émission) 

Alors que toute la maisonnée dort, dans une certaine torpeur, "le premier réflexe c'est d'allumer la radio" dit doucement Sophie. C'est quand même un incroyable besoin, celui face au silence, au calme voire à la quiétude, de chercher une compagnie, une présence ou une diversion. Sophie qui se fait ses propres voyages en Crête en écoutant une radio crétoise.

"La nuit ça passe plus vite quand on ne regarde pas l'heure…" remarque pertinente d'un ouvrier de Pocheco. Pour l'avoir testé moi-même, on apprécie jusqu'à ce qu'on se résigne à regarder sa montre et de constater qu'on est très proche de la débauche. Je ne sais pas si l'enregistrement par Sophie de ses propres ronflements peuvent aider à s'endormir, mais c'est une très bonne trouvaille pour illustrer ce documentaire, réécouté de jour. 

Tous les témoignages entendus sont originaux, voire sensibles. D'autres témoignages pourraient constituer une petite "capsule", tous les soirs à minuit à la radio, par exemple pendant un quart d'heure… Le rendez-vous des noctambules. Pour ça il faudrait une volonté éditoriale. Elle n'existe plus. Puis il faudrait des moyens. Ils n'existent plus. Autant de renoncements qui brident la radio pour continuer à être inventive, exploratoire et présente du jour… au lendemain.

mardi 27 mai 2025

Sur les docks (28) : La Hune, le blues de Saint-Germain-des-Prés…

Cette Hune s'écrit avec un H majuscule. Et avant de faire la une des journaux pour annoncer son départ du Boulevard Saint-Germain (Paris), la librairie avait toute sa place dans ce haut-lieu littéraire et culturel. C'est ce que Maylis Besserie et Anna Szmuc nous raconte, le 23 juin 2015, sur France Culture.











"Le 21 février 2015, Le Monde annonçait la fermeture d’une librairie germanopratine du 6e arrondissement de Paris depuis 1949 : La Hune. Elle a fermé ses portes au public le 14 Juin 2015. Depuis, des plaintes se font entendre de toutes parts, tant la librairie semble incarner le quartier et son histoire. Fondée dans l’effervescence de la vie intellectuelle et artistique qui animait, après-guerre, Saint-Germain-des-Prés, elle est de ces lieux qui sont à la fois réels et imaginaires, témoins d’une époque et de ses fantômes : Merleau-Ponty, Sartre, Beauvoir mais aussi Boris Vian, Sacha Distel, Pierre Michelot, les frères Fol et bien d’autres… Autant de figures du siècle passé qui rôdent encore dans le triangle d’or, entre les cafés du Flore, des Deux Magots et la brasserie Lipp." (Sur la page de l'émission).

La Hune c'est un repère sensible dans la faune autour… du Flore. "On pouvait draguer à la Hune, c'est un endroit vivant." dit Raphaël Sorin. Miguel Dupont a travaillé à La Hune pendant vingt-cinq ans, il finissait à minuit, affirme l'endroit convivial et se souvient de ses lacunes face à des clients érudits. La Hune, comme le terme de marine, est cet endroit privilégié pour observer les mouvements ce, qu'à sa façon, la librairie à pu elle-même observer.

Nota bene : J'ai pu quelquefois fréquenter La Hune quand de passage à Paris je flânais à Saint-Germain-des-Prés, mais aussi entrer chez le disquaire Raoul Vidal… Toute une époque !






Sur le site, les années 2013 et 2014 ne sont pas présentes sous le premier icône appelé "Sur les docks", elles sont peut-être sur le second.

lundi 26 mai 2025

France Inter : attendez-vous à (ne pas) savoir…

Adèle Van Reeth, directrice de France Inter, n'a ni la faconde ni l'esprit de Geneviève Tabouis, journaliste (1892-1985) qui a fait les belles heures de Radio Luxembourg puis de RTL, dans la matinale d'info. Pour une chronique au titre savoureux "Les dernières nouvelles de demain" (1949-1967). Ses chroniques commençaient par "Attendez-vous à savoir". Van Reeth n'est plus au micro et fait, comme il est de coutume dans les médias aujourd'hui, "fuiter" quelques scoops pour préparer les esprits à s'habituer aux changement(s) de la prochaine grille de France Inter à la rentrée 2025 (25 août). C'est amusant (on pleure). Un genre de chamboule-tout avec pour point d'orgue "Kiséki animera la matinale ?", puisqu'il n'y a presque que plus que ça qui compte vraiment. Les programmes devenus accessoires. Qu'on en juge.

Adèle Van Reeth










Sonia Devillers arrête son entretien de 7h50 et retrouvera ses interviews "people et compagnie" après le journal de 9h, "promettant des récits incarnés à la première personne" dixit Le Monde le 16 mai. Assistera-t-on à un "Chancel revival" ou bien la journaliste reprendra-t-elle le fil interrompu de ses interviews dans la séquence le "9h10" (2022-2023). Devillers n'était vraiment pas à sa place pour passer tous les matins "du coq à l'âne" dans un exercice trop calibré, trop convenu, trop. Et dieu sait qu'il y a eu une palanquée de coqs et pas beaucoup moins d'ânes !

Quelques jours avant, nous avions appris, atterrés, que Claude Askolovitch quittait la présentation de la Revue de Presse. Cataclysme, consternation, tristesse après huit saisons passés à l'exercice. Quand depuis quelques années le choix avait été fait de ne plus citer les autrices et les auteurs des articles mis en avant. Visiblement Askolovitch n'avait pas pris ses leçons du côté d'Ivan Levaï (1989-1996), qui lui n'aurait jamais manqué de nommer ceux qui avaient écrit. De fait l'exercice ne servait plus à donner envie de lire telle ou tel mais s'installait dans un doux ron-ron, une ponctuation dans la matinale, un exercice de style.

Puis ce fut au tour de Blast d'annoncer les catastrophes :  Giulia Foïs serait remerciée, la chronique « La lutte enchantée », tenue par Camille Crosnier et Cyril Dion, disparaîtrait. Frédérick Sigrist, qui animait « Blockbuster », serait lui aussi écarté. Conditionnel de rigueur car "tout peut encore changer". Mais ce que tout le monde attend (lire ce que tous les médias attendent fébrilement) c'est de savoir ce qu'il va advenir de Nicolas Demorand et Léa Salamé, l'incarnation absolue de France Inter au risque de renvoyer tous ceux qui s'activent pour faire de la radio au titre d'"accessoires". 

Attendons-nous (pourtant) à ne pas savoir ou à ne rien savoir, avant sans doute la dernière semaine de juin, pour une annonce fracassante : "Demorand et Salamé restent", "Demorand animera une émission… et Salamé part rejoindre BFM TV". Mais alors kiki va animer la première matinale - cocorico- de France ? Alors là, ça suppute grave. Et autant vous le dire aucun nom en interne n'est avancé. C'est bien connu France Inter et Radio France font leur marché à la TV et il n'y a aucune raison que cette mécanique-là s'arrête !

vendredi 23 mai 2025

La radio dans l'univers audio… (Colloque GRER)

En novembre 2022, du 9 au 11 novembre, se tenait à Laval (Québec) le 10è colloque du Groupe de Recherches et d'Études sur la Radio (GRER), dont le thème était "La radio dans l'univers audio. Adaptations et mutations". On peut déjà affirmer que les temps ont changé puisqu'il y a vingt ans le thème aurait pu être "L'audio dans l'univers radio"… Les Presses de l'Université de Laval viennent de publier au mois d'avril les Actes de ce colloque…


 









Henri Assogba et Kodjo Atassé Koulette, chercheurs, animateurs et coordonateurs du colloque l'introduisent ainsi : "En ce début d’année 2024, la nouvelle fait le tour des médias au Québec, la radio numérique QUB annonce que l’ensemble de sa programmation est désormais accessible en vidéo et en direct pour le public à la télé et ce de six heures à 18h . Ainsi à travers un abonnement les auditeurs-auditrices ou désormais les téléspectateurs et téléspectatrices, pourront regarder et sous les différents plans vidéo, les animateurs, les invités et les techniciens f"aire de la radio à la télé". L'audio ne suffirait-t-il plus pour porter la voix des artisans de la radio ? Pourquoi faut-il ajouter du visuel à l’audio ? Plus qu’un changement technologique, éditorial et économique, cette actualité, marque une étape symbolique dans les mutations constatées ces dernières années au sein de la radio. On passerait ainsi de la "radio filmée", celle qui se "donne à voir", largement documentée dans la littérature scientifique et qui ne souffre plus de contestation, à la "radio télé-diffusée". Voilà parfaitement posés les enjeux pour la radio de demain, mais surtout pour la radio d'aujourd'hui.

Parmi la douzaine de communications (1) vous pourrez y lire "France Culture : de la radio globale à la radio… en miettes". C'est l'occasion pour moi (ni universitaire, ni chercheur en histoire des médias) de remercier le Grer, ainsi qu'Henri Assogba et Kodjo Atassé Koulette, de m'avoir invité à ce colloque et d'avoir accepté cette communication sur France Culture. En novembre 2022, la crise institutionnelle de la chaîne est à son point culminant. Le personnel est audité par un cabinet extérieur à Radio France, audit dont les conclusions seront implacables pour dénoncer le "management jugé brutal" de Sandrine Treiner la directrice de la chaîne (2017-2023).

Un aperçu de ces actes est consultable en ligne ici.

(1) Hervé Glevarec, Séverine Equoy-Hutin, Romain Bigay, Frédéric Antoine, Louise-Hélène Paquette et Albino Pedroia, Debastien Poulain, Chantal Francœur, Idé Hamani, Simon-Olivier Gagnon, Soumaya Berjeb, 

jeudi 22 mai 2025

Sur les docks (27) : Cinéma itinérant en Dordogne…

"Dans le département de la Dordogne, "Ciné passion en Périgord" est un circuit de cinéma itinérant qui va là où le cinéma n’est pas desservi. En se déplaçant dans les villages éloignés des salles de cinéma et en pratiquant des tarifs très accessibles, Laurent, projectionniste depuis plus de dix ans, réunit les périgourdins bien disposés à ne pas manquer cet événement." (Sur la page de l'émission)







Comme, au milieu des années 80, j'ai moi-même animé un circuit de cinéma itinérant rural, j'imagine bien les tribulations que doit vivre Laurent, le projectionniste de "Ciné passion"… Les enfants d'un des villages traversés ont construit une vraie caisse pour que ça fasse encore plus cinéma. Laurent confirme que c'est un boulot de solitaire. "On fait des choses pour les autres et on pense moins à soi".

L'itinérance a aussi à voir avec l'implication de bénévoles qui font les campagnes d'affichage et de promotion des films à venir dans chacun des villages où ont lieu les projections. En 2012, c'est l'époque où les copies argentiques en 35mm (et de fait en 16mm) vont disparaître pour être remplacées par des fichiers numériques. Cela nécessite de changer le matériel de projection (investissement lourd) "adapté" à l'itinérance quand, pour une des communes (Excideuil) un matériel fixe à pu être installé en permanence dans une salle.

C'est important que ce lien social continue à exister quand la tendance lourde est au repli sur soi sur les plates… formes !

Production : Johanna Bedeau, Réalisation : Rafik Zenine. 5 juillet 2012.


mercredi 21 mai 2025

Sur les docks (26) : Road-movie en Lozère…

"Depuis 1973, Martin de la Soudière arpente la Margeride. C’est son terrain. Le terrain d’un ethnologue en quête de ce on-ne-je-sais-quoi qui incite parfois un chercheur à remettre ses pas dans des sentiers arpentés à mille et une reprises, comme s’il s’agissait de remettre toujours et encore sur le métier." (sur la page du doc). Un documentaire de Laurent Le Gall et Fabrice Derval. Réalisation François Teste (4 juillet 2012).

Châteauneuf-de-Randon (Lozère)










Martin de la Soudière, ethnologue, évoque pour ses premiers souvenirs de 1973 en Margeride, "la difficulté de rencontrer l'autre". "Je suis un ethnologue du dehors" précise de la Soudière qui n'aime pas rentrer chez les gens sans avoir observé ce qui les entoure, jardin, animaux, arbres, village ou hameau. "Il y a de moins en moins de monde à Langogne". la restauratrice Adrienne se souvient de Martin et est très surprise quand ce dernier lui avoue avoir mis du temps à l'approcher car elle l'intimidait. On notera la délicatesse et le tact de l'ethnologue pour approcher ses objets d'étude…

Elle parle de "La tourmente" que Quentin Tenaud avait lui-même évoquée dans son documentaire diffusé au mois de mars sur France Culture. Dommage que Le Gall ou Derval ne l'ait pas incité à en dire plus plus sur ce phénomène neigeux. Martin évoque aussi ses retrouvailles avec ce pays quand au bout de six mois ou plus on revient avec quelques appréhensions. 

Le Gall et Derval interrogent un habitant sur Martin et comment il a été perçu par ceux dont il essayait de comprendre la vie. Cet habitant explique que, si avec lui ça c'est très bien passé, ce n'a pas été le cas avec tous car "sa coiffure envahissante le faisait ressembler à un hippie" (on est en 1973). Et Martin dans une profusion de paroles au débit très accéléré se souvient d'un propos de la buraliste, Mme Marco, "il faut bien que toute les régions soient habitées". Ce qui pour Martin "ne veut rien dire et tout dire, mais c'est absolument superbe."

Un autre habitant, Marcel Delpuech, qui a été l'informateur de Martin, s'est reconnu dans la publication de l'ethnologue, il a retrouvé des phrases à lui, et témoigne avec lui avoir fait la causette. C'est quoi la causette demande Le Gall ? "Oh, un peu de tout, un peu de rien". À partir d'un fait divers Martin raconte l'historique du nom "Le col des trois sœurs" (1454m). Un col non caractéristique, ordinaire mais joli et qui prend tout son relief grâce à son nom. Et Emma/Josette nomme "Un regret" : "une chanson lente, mélancolique…" qu'elle écoute sur Radio Margeride.











Martin évoque ce qui en Margeride dans une maison s'appelle "La pièce" là où tout se passe". Et Josette dans cette pièce où trône la télévision regarde chaque jour à la télévision "Les feux de l'amour" que Sylvie gasteau aurait sûrement aimé interviewer en complément de son documentaire "Louise ou les feux de l'amour"…

Et Martin citant Perec pose les termes de sa recherche "Qu'est-ce qu'il se passe quand il ne se passe rien…? Cet infra-ordinaire, ces petites choses, ces détails, ces indices vont renseigner différemment que si on ne fait que parler, poser des questions, regarder tout ce que tout le monde regarde,…" Et vous découvrirez ce que Martin de la Soudière expose comme "L'inconfort du terrain".

Toutes les rencontres de ce documentaire ont été chaleureuses et enthousiastes et si vous aimez la Margeride