jeudi 16 juillet 2015

Les radios régionales… 11/24











Un feuilleton d'été en 24 épisodes, du mardi au vendredi
par Gérard Coudert

11. La Province… 1959
Dans la multitude des réformes de l'audiovisuel public depuis les années 20, on aime s'amuser de la succession des noms et des sigles. Ou s'en étonner, croyant débusquer dans cet inventaire l'inconstance d'une administration frivole… Radio PTT, Radio Nationale, RDF, RTF, Ortf et plus tard pour ce qui concerne la radio, Radio France… Mais l'on oublie certains "aménagements" législatifs qui, sans grand tapage ont marqué durablement. C'est le cas de l'ordonnance du 4 février 19591.

Cette année là, la Radiodiffusion Télévision Française qui fête son dixième anniversaire et arbore un logotype bien sévère avec son T central hypertrophié, ne change pas de nom. Elle change de logo pour adopter les fameuses ellipses atomiques qui vont perdurer jusqu'en 1974, à la fin de l'Ortf. Voilà pour ce que l'on voit… Pour le reste, l'ordonnance du 4 février 59 transforme la RTF en institution juridiquement autonome certes, mais placée sous l'autorité du ministre de l'information. Ce qui permettra 3 ans plus tard à Alain Peyrefitte de nommer (ou de mettre au placard) qui lui semblera bon dans l'organigramme de la maison. Ce qui lui permettra aussi par l'entremise du "Service de Liaison Interministérielle pour l’Information" de régenter l'information, organisant entre les patrons des chaînes et les agents ministériels de véritables conférences de rédaction !













Difficile d'oublier l'hilarante interview de Peyrefitte par Léon Zitrone le 20 avril 1963 à l'occasion du lancement du nouveau JT de la RTF : "Nous avons demandé au Ministre de l’information, Monsieur Alain Peyrefitte de venir inaugurer la nouvelle formule dont il a pris lui-même l’initiative". Surveillance, méfiance… Affection chronique contractée à la veille de la déclaration de guerre, entretenue à la libération, cultivée plus tard avec son lot de chansons interdites d'antenne : "Sanguine" de Prévert par Yves Montand en 53, "Nuit et Brouillard" et quelques autres de Jean Ferrat, "Parachutiste" de le Forestier, et tant d'autres pour lesquelles on recevait des notes comminatoires d'interdiction…

Et les radios régionales, allez-vous dire… Eh bien, cahin-caha - "Va, chemine. Va ! Trottine. Va, petit âne, va !" (2) - elles survivent toujours dans les années 60, liées aux stations régionales de télévision que développe la RTF (puis l'Ortf). Onze régions sont créées de 1953 à 1965 autour des anciennes emprises : Paris-Normandie, Lille, Strasbourg, Marseille, Lyon, Toulouse, Bordeaux, Nancy, Rennes, Limoges, Dijon… Satellites de ces centres régionaux, quelques autres Bureaux Régionaux d'Information jouent le rôle de postes avancés : Nice, Grenoble, Amiens, Montpellier (3)... 

Et là, à l'ombre de la télévision et de celle du ministre de l'intérieur, se poursuit une maigre activité radiophonique composée d'un journal matin et soir et d'un modeste "programme artistique". L'air de rien, ces décrochages (4) de 40 à 90 minutes diffusés en ondes moyennes sur les émetteurs locaux du programme national (5) vont assurer pendant des années la permanence sur service public radiophonique régional. Hommage à ces anciens, rescapés de la guerre qui ont repris du service à la radio dans les années 50 et lui ont permis d'exister…

Demain "L'ORTF : un colosse aux pieds d'argile"…

(1) Ordonnance 59-273 du 4 février 1959 relative à la radiodiffusion–télévision française. J.O. du 11 février 1959,
(2) "… Va de ci de là, le picotin te récompensera." Oh, pardon ! Je me laisse aller… "Véronique", opérette de André Messager : duo de l'âne,

(3) Nous renonçons à donner systématiquement les noms des stations : ils changent selon les époques. Nous préférons indiquer le nom des villes qui les abritent,
(4) Une forme d'intrusion plus où moins bien gérée du programme local sur le programme national,
(5) RTF-Inter, Paris Inter jusqu'à 1963, puis France Inter.

© Gérard Coudert/Radio Fañch

5 commentaires:

  1. Bonjour Amis de la Radio,
    merci à vous deux ! à Fanch pour les billets de ce blog que je lis de temps en temps et qui est une mine pour moi, (et notamment un sacré bon relais d'infos pendant la grève de Radio France) et puis à Gérard Coudert pour ce feuilleton d'été dont je me régale, ignorante que je suis de l'histoire de la radio (par contre, je connais l'air du duo de l'âne ...).
    bel été à vous
    Nanou

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    1. Merci Nanou, tu liras mon billet publié cet après-midi ! Je suis au Nirvana ;-)

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    2. je viens de le lire, hé bien, je ne pouvais pas tomber mieux et je trinque de bon cœur à ce bel anniversaire, et je choisis sous "le bel oranger" car ce livre est une merveille !
      Nanou

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    3. Eh bien on dira que les bonnes ondes se propagent à la vitesse du soleil… Merci Nanou et bel été…

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  2. Un extrait de l'interview de Peyrefitte par Zitrone en 1963 se trouve là : http://www.ina.fr/video/I12153266

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