dimanche 30 juin 2013

Il(e), grand(e)…

En préambule à mon billet quotidien, j'aimerais dire à quel point l'auto-congratulation dont ont fait preuve Collin et Mauduit (France Inter) - et avec eux d'autres, sur d'autres chaînes -, pour sanctifier leur émission et annoncer guillerets leur retour à la rentrée, laisse un goût très amer. Collin a la mémoire très courte et a très vite oublié, qu'après une saison de "La bande à Bonnaud" (1), l'émission s'arrêtant, le chroniqueur qu'il était aurait pu disparaître des ondes. Repêché pour son talent "il a pris le melon" et évacué l'effet terrible, quand on s'est investi et "défoncé" pour faire de la radio, d'être du jour au lendemain sans voix. Ne comptons sur aucun média pour nous dire ceux qui, hormis quelques vedettes, n'auront plus de micro à la rentrée, que ce soit pour des départs volontaires ou des départs forcés. Cet état de fait est pitoyable et triste. Il installe durablement la perfide commedia dell' arte qui se joue entre les ondes.



 






La mémoire et la mer
Il semble bien que Jean-Guy Coulange ait les deux. La mémoire d'un sacré bonhomme, tailleur de son et de la mer qui va avec. Et sans doute pas que la Manche qui baignait l'Île Grande dont ce bonhomme-là était natif. Car le breton Yann Paranthoën, puisque c'est de lui dont il s'agit, avait sûrement la mer dans le sang. La mer universelle celle qui nous prend et nous habite une vie entière. "Heureux qui comme Coulange a fait un beau voyage Ou comme cestuy-là qui conquit le son"… Car Coulange fait dans le son. Il me pardonnera, après avoir paraphrasé Joachim du Bellay, de ramasser de façon aussi barbare sa façon de créateur qui quelquefois passe à la radio… et sur ce blog.

Et ce soir, les amoureux de Paranthoën, - et du son Coulange - se téléporteront sur la RTBF (2) pour ouïr la petite madeleine que ce dernier a concocté sur les traces même du poète qui n'aura jamais fini de nous surprendre. Il, grand.

(1) Septembre 2006 - juin 2007,
(2) 22 heures, La première, "Eldoradio" de Pascale Tison, puis en podcast dès lundi,
http://www.rtbf.be/lapremiere/emissions_eldoradio?emissionId=2731

samedi 29 juin 2013

Fous de ciné et de… shaker

Mercredi 5 juin, 9h, Café-Brasserie Les Ondes, Paris XVIème, face à la maison de la Radio. J'ai rendez-vous avec Christophe Payet et Tanguy Blum, deux ex-collaborateurs spécialisés de la Matinale de France Culture. Ex, puisqu'ils se préparent à passer l'été sur Inter (1) et donc à élaborer leur future émission dont j'apprendrai le titre en fin d'entretien. C'est pour avoir échangé à plusieurs reprises avec Christophe Payet sur Twitter que j'ai appris que Tanguy et lui avaient été retenus pour la grille d'été, par Laurence Bloch et Philippe Val (2), après que les deux apprentis-sorciers de la fiction cinématographique, leur aient présenté un projet original et fou qui risque de placer assez haut la barre de l' émission.

C'est leur façon à tous les deux d'évoquer et de présenter leur émission qui m'a séduit. Simples, s'exprimant avec aisance, humour et clins d'œil, les deux futurs animateurs d'Inter ont visiblement très bien pensé leur façon de s'emparer de films mythiques et "de rentrer dedans", au sens littéral du terme. Entrer dans le film c'est participer à l'action, poursuivre ou développer la fiction, mélanger les genres et en profiter pour "donner envie de réfléchir en s'amusant". Car le choix des films retenus va permettre d'aborder des thèmes de société tel que l'environnement.


"Batman" de Christopher Nolan - 2008

 




Je n'ai jamais eu l'occasion de rencontrer des producteurs avant la création d'une nouvelle émission. Ici, Christophe 25 ans, et Tanguy 29 ans sont conscients de l'enjeu et en même temps totalement excités à l'idée de parler autrement de cinéma. Ils sont fous mais très sages. On parle de films et ils m'expliquent comment ceux qu'ils vont pénétrer devaient, à la fois être des références générationnelles, mais aussi disposer d'un rythme propre à supporter les intrusions des deux animateurs. Ils reconnaissent avoir construit leur imaginaire sur le type de ciné qu'ils vont promouvoir, même si leur culture dépasse largement la bande-son des films que nous allons entendre. Car en l'absence d'images, pour entrer avec eux dans le film, il faudra immédiatement que ça nous "parle". Bien dedans, eux vont pouvoir jouer, déjouer les clichés ou surjouer les dialogues et/ou les situations.

Je leur montre mon enthousiasme, un peu comme si, enfant, on me promettait d'aller voir un fantastique film avec toutes les "attractions" autour. Val & Bloch, accrochés par leur angle de narration leur ont donné carte blanche. Mais pas question de vous révéler leurs choix cinématographiques. Sur les neuf films qui composent leur émission d'été je n'en ai vu que quatre. Leur projet est tellement élaboré qu'il a bien fallu se résoudre à réaliser les montages en amont, et leur complicité avec Ivan Beaugelet, leur réalisateur, a été totale et déterminante. Elle était indispensable à la réussite du projet qui a nécessité un important travail d'écriture. Cette réalisation qui s'élabore maintenant depuis plusieurs semaines va trouver son exposition dès aujourd'hui. Je les imagine, fébriles, heureux, épuisés mais avec la pointe d'excitation qui les a peut-être empêchés de dormir.

J'écoute à 17h et vous donne rendez-vous dès 18h, ici, pour vous faire part de mes premiers avis. D'ici là, bonne journée aux nouveaux animateurs radio qui risquent de la trouver très très longue… cette journée.

Lundi 1er juillet : j'ai réécouté. Pas toujours facile de suivre le fil. Beaucoup d'idées mais va falloir tenir l'auditeur par la main car sinon il risque de se perdre… (à suivre)

 
(1) "Au shaker pas à la cuillère", France Inter, le samedi 17h05,
(2) Directrice adjointe au programme, Directeur d'Inter, 

vendredi 28 juin 2013

Singing Lomax…

 








Depuis le 7 novembre 2012, qu'ai-je donc fait de mes nuits ? Que n'ai-je entrepris la lecture de "Le pays où naquit le blues" d'Alan Lomax (1) ? Je constate une fois de plus qu'il est bien difficile de lire (vite) les livres qu'on attrape au détour d'une émission de radio. Hier soir, sur Fip, Lomax était à l'honneur. Vous trouverez sur cette page une conférence de Jacques Vassal qui trace le portrait et l'histoire de cet "ethno-musicologue" hors du commun qui, grâce à ses collectages, a remis les pendules à l'heure de l'histoire du blues et de ce qui se passait "autour".

Quand "Fip livre ses musiques", on est sûr d'accrocher aux textes des sons qui ne s'en dissocieront plus. Mais ici comment ne pas entendre en permanence ces blues originels qui ont déchiré la musique et l'âme de ceux qui les composaient ou les écoutaient. "Sans Lomax on aurait manqué pas mal d'épisodes de la musique des États-Unis", précise l'éditeur Jean-François Bourdic.

Dans l'émission tout fonctionne la lecture des textes, la parole des auteurs, et les musiques bien sûr. Quand on entre dans l'émission on aimerait qu'elle court un peu plus longtemps car le moment est idéal pour prendre "le temps de lire". Question à Julien Delli-Fiori, directeur de Fip : "Julien, pourriez-vous, à la rentrée, revoir la durée de cette belle émission originale ?".

La semaine dernière c'était Annie Butor et son livre "Comment voulez-vous que j'oublie. Madeleine et Léo Ferré -1950/1973", Phébus, 2013. L'autre versant de la montagne Ferré.
(J'y reviendrai le 14 juillet)

Et demain 9h… un billet aussi secoué que dans un shaker !

(1) Traduit en français par Jacques Vassal, Édition "Les fondeurs de briques", Octobre 2012

jeudi 27 juin 2013

Radio Fañch : la grille d'été…

Le toaster-radio de l'été






Il y a quelques jours, Olivier, dans son Méga-Combi m'a demandé des nouvelles de la Saison 3. J'ai commencé par rire et puis annoncé que j'allais d'abord penser une grille d'été. Ce que voici présenté ci-dessous. Quant à la saison 3, c'est tentant… de tout arrêter mais c'est un peu "impossible". Impossible car je prends non seulement du plaisir à écrire, mais me suis engagé dans une mécanique dont il est assez difficile de sortir. J'ai failli, perfide, convoquer la presse et annoncer que "j'envisageais maintenant de mieux me consacrer à ma vie privée" ou qu'"écœuré par la politique des radios privées, je publierai dorénavant à 18h", mais bon, n'ayant pas le sens du ridicule, je me suis abstenu.

Donc en Saison3, je souhaite prendre une vraie journée de repos, ce sera sans doute le dimanche, la publication de la madeleine ayant lieu le samedi matin. Vos suggestions, critiques, et avis sont les bienvenus mes chers auditeurs. Cet été ne perdez pas le fil. La grille de rentrée commencera le lundi 1er septembre…

Grille d'été (à partir du lundi 1er juillet)
Lundi : À ne pas louper cette semaine à la radio, avec un son associé si disponible,
Mardi : Sélection d'un article et d'une émission (rediff.), ou actu
Mercredi : Relâche (mais juste un p'tit son)
Jeudi : Sélection d'un article et d'une émission (rediff.), ou actu
Vendredi : Relâche (mais juste un p'tit son)
Samedi : Une archive Ina (juillet), l'interview d'une voix de radio (août)
Dimanche : Relâche 
En plus, pendant toute la durée du Tour de France, un petit feuilleton vélocipédique chaque jour.

J'ai écrit ce billet en écoutant "E penso a te" de Lucio Battisti, entendu sur Fip hier, un peu comme le slow de l'été avant de partir en vacances…

mercredi 26 juin 2013

La radio…en vrac

Un peu pénible de réécrire un billet pour lequel j'avais passé un certain temps hier. Je le réécris mais synthétisé… Désolé chers auditeurs, c'est la première fois en deux ans. Replay.

Le pape

Alain Duhamel s'auto-transfert sur place à RTL et tous les sacristains sonnent les cloches. Le pape de l'édito politique du matin va devenir le pape de l'éditique polito du soir.



Colin-Maillard
Les duettistes de plus en plus pathétiques s'épuisent à fermer la porte du studio et n'en finissent pas de fanfaronner… Pénibles et prétentieux. Has been.
Ego
Les manifestations ostentatoires d'auto-célébration des-bons-moments-passés-à-faire-des-émissions-en-totale-complicité-avec-les-auditeurs n'ont-elles pas un effet boomerang sur les animateurs qui ont passé de-bons-moments-à-faire-des-émissions-en-totale-complicité-avec-les-auditeurs-mais-qui-ne-vont-pas-continuer-à-la-rentrée ? 

C. Abramowitz / Radio France




Heureusement, v'là l'Vincent
Dès le 8 juillet et jusqu'au 30 août, sur France Musique, du lundi au vendredi, à 16h55, Vincent Théval remet L'instant Pop en selle. "En quatre saisons et 175 épisodes, L'instant Pop à dressé le portrait d'une génération d'artistes émergés dans les années 2000, soucieuse de donner des couleurs à la pop, en variant les arrangements de ses chansons. Cordes, cuivres, vents, percussions et claviers à leur disposition, ces jeunes gens ont laissé leur musique s'imprégner du folk, du jazz et du minimalisme. Mais d'autres générations l'ont fait avant eux. Pour sa cinquième saison, "L'instant Pop" va piocher dans quatre décennies d'histoire de la pop : de classiques en trésors cachés, de l'émulation des années 60 à discrétion des années 90, voici une collection d'une quarantaine de chansons aux arrangements sophistiqués. On y croisera les Pale Fountains, les Zombies, Love, John Cale, Moose, Kate Bush, Emitt Rhodes ou Vashti Bunyan." (1)

Demain la grille d'été de Radio Fañch, en exclu mondiale…

(1) in dossier de presse, France Musique,

mardi 25 juin 2013

Les deux pieds (les demains) dans la France…

Bon Arte radio ça me repose, j'adore les p'tites pastilles vertes qui manquent à mon décor. Et j'aime bien le brut de Thierry Pelletier. Allez, allez, c'est le moment de fureter sur Arte. C'est le moment de sauter les deux pieds (joints)… dans la France et d'éclabousser la morosité… Yé

lundi 24 juin 2013

Cher Frédéric Bonnaud…











Je sais bien que t'es plus dans la radio puisque le 4 mars, je publiais l'interview que tu m'avais accordée, avant de prendre la poudre d'escampette du Mouv' et de t'engouffrer dans ce joyau de l'exception culturelle qu'est Les Inrockuptibles, journal intelligent et gentil (sic). Pourquoi alors te consacrer aujourd'hui une page entière de ce blog (1) ? Ben voilà, tu as forcément appris, comme moi, qu'un fauteuil venait de se libérer à Mangin (2). Un peu comme à l'Académie (3), le fauteuil vacant ne demande qu'à retrouver au plus vite, ce qu'il faut où il faut, de façon à ce que la petite musique des ondes continue, sans qu'un horrible blanc ne vienne casser le rythme. C'est là que je me suis dit que tu pourrais peut-être commencer tes visites. Ah non, pas tes visites pour solliciter la place encore chaude, non, non. Tes visites auprès des membres de ta rédaction pour voir s'ils accepteraient (sans contrepartie) de te laisser partir.

Connaissant bien la crèmerie Radio France, tu trouveras forcément que je vais bien vite en besogne. Les deux tauliers, Val & Bloch, savent comment s'y prendre, et le moment venu t'interpelleront s'il y a lieu. Mais pour ne pas être pris de court, faudrait peut-être amorcer la pompe d'un hypothétique transfert. Là, tu t'interroges. Tu te demandes bien pourquoi je peux avoir cette idée maligne qui ruinerait total ton désir de faire de la presse et que c'est quand même pas après moins de six mois d'exercice que tu vas tout chambouler (4), pour aller animer une émission d'une heure (54') en plein après-midi, à l'heure pile-poil où tu officiais sur Le Mouv' (5) ? Eh bien tu sais quoi, tu changerais rien du Plan B, tout pareil, aussi pro, aussi ouvert, aussi "international", comme Télérama qualifiait celui qui va partir vivre sa vie privée, tout ça parce qu'il allait interviewer Sting ! À pleurer ! Toi, t'avais pas de limite la culture c'était mon-dial, around the world  comme dirait CNN qu'est pas cultivée.

Bon, parce que quand même faut bien que je te l'avoue, et l'avoue à mes chers auditeurs, tu me manques vachement. Et vachement ça continue à vouloir dire "pas qu'un peu". Parce que bon, le Crénel, nickel, rien à dire, il assure total avec son Rodéo Parade, mais question littérature, cinoche, presse et tout le toutim c'est pas son truc. Enfin c'est pas son truc à la radio, dehors je sais pas. Il fait bien ce qu'il fait mais à 17h, je m'étais habitué à prévoir un Plan B, au cas où. Et ça fonctionnait. Cinq jours sur sept. Nous restait deux jours pour essayer d'absorber tout ce que tu nous avais donné envie de lire, de regarder, et de réfléchir aussi. Et comme disait GéBé "on réfléchit et c'est pas triste". Ben tiens maintenant, tu sais quoi, on y pense même plus à réfléchir ? Trop con, non !

Bon, j'ai pas l'habitude de faire dans les loges (re sic), mais quand j'ai appris la nouvelle la semaine dernière, j'ai échafaudé grave. J'ai failli appeler Chancel pour voir si, avec l'aide de Dieu, tout pouvait pas s'arranger aux petits oignons, côté Inrocks comme côté Inter. Mais bon je voulais pas te griller non plus. Je ne suis qu'un petit aficionado radio et je sais rester à ma place (et beau). Enfin j'dis (tout) ça, j'dis rien. J' t'embrasse pas, ça passe pas à la radio (6).

(1) La sept-cent-cinquante-deuxième pour être précis,
(2) Siège de France Inter,
(3) Des neufs… pas des vieux. Pour les plus jeunes "L'académie des neufs" était une émission de télé intellectuelle des années 80,
(4) Dans le métier il est vrai, on ne connaît que "La navette" (spéciale) pour faire des allers-retours quotidiens, voire hebdomadaires entre Libération et Le nouvel Obs ou plus difficile entre Le Nouvel Obs et Libération, que tu auras forcément reconnu et dont j'indique le nom pour tous les élèves des écoles de journalisme : M. Laurent Joffrin,
(5) La phrase est un peu longue je te l'accorde mais elle a du sens, non ? 
(6) Mes amitiés à Christophe Conte, sans qui ce billet aurait été bien pâle (là je me tais). Et aussi à Sianko, croisé y'a dix jours, rue Gros, en face de ton ancienne boutique au 116, avenue Kennedy…

dimanche 23 juin 2013

Le bouc (FC)…

Illus. C.Rosset/ACR Vol 540









C'est une somme. Pas par son épaisseur (correcte) mais par son fourmillement intérieur. En son for intérieur même, si j'osais paraphraser Olivier Germain Thomas. Deux-cent-soixante-quatre pages de traces que l'on croyait éphémères "sur le papier" et, qui finissent par affluer, au fur et à mesure que les sons, les génériques, les voix percutent la mémoire. Au point de laisser faire, jusqu'à ce que, tout finissant par s'imbriquer, nous ayons un moment l'illusion de reconstituer notre mémoire sonore de "ces temps-là". Mais quels temps ? Quand, un jour ou un autre, chacun, par effraction, par hasard ou par religion, est passé sur la fréquence de France Culture, - chaîne publique de la Radio Télévision Française qui porte ce joli nom depuis le 8 décembre 1963 -, pour ensuite ne plus jamais en repartir ou si peu.

Par "religion", comme l'a évoqué Brice Couturier, au micro de Marc Voinchet dans la matinale de France Culture, vendredi dernier. Par effraction, en s'énervant sur une molette, rétive à trouver notre fréquence habituelle d'écoute. Par hasard, comme moi qui, tournant ladite molette de mon transistor pour écouter France Inter, "tombe" sur la voix de Jean Giono à l'été 1986. Mais, même si ces "50 ans de France Culture", sans index, sont faits pour être picorés dans tous les sens ou par thématique, j'ai commencé à tourner toutes les pages une par une, reconnaissant ça et là, tel producteur, tel programme ou, grâce à la mise en page, m'arrêtant volontiers sur un mot ou sur un autre.

Ce qui ressort immédiatement de cette lecture survolée, c'est qu'aujourd'hui la mécanique d'antenne, de grille, de programme a presque "fini" par "figer" un modèle presque lisse. Où demain, trouver vivants, gris-gris, crayonnés, surlignés, brouillons, tentatives, essais (bienvenue au Club), qui parsèment le travail de recherche d'Autissier & Laurentin ? Tout cela (et le reste) ne faisait-il pas partie du tâtonnement expérimental (cher à Célestin Freinet) foutraque et joyeux, sévère, austère quelquefois, mais absolument riche et vivant ? Dans quels clouds trouvera-t-on ces petits éclats de verre disparates, polis, dépolis, ébréchés, translucides ou opaques ? Il aura fallu attendre cinquante ans pour qu'ENFIN l'on découvre l'envers du décor d'une chaîne qui, se gardant bien de parler d'elle, avait au-delà du son, quelque chose à en lire.

La bonne idée de ce livre c'est qu'on peut le prendre par tous les sens (en gardant surtout l'ouïe… à l'oreille). Et, pour une fois, entrer en France Culture par l'émiettement ou l'éparpillement (me) va bien. D'une lecture (écoute) linéaire et sage on peut passer à une lecture éclatée, morcelée, vivante, joyeuse. Et truffer son livre de marque-pages et autres coches subtils pour y revenir… souvent. Oui car souvent il va falloir y revenir pour comprendre l'histoire ou s'en imprégner. L'été tombe bien pour, chaque jour, prendre quelques minutes avec… Surtout (après usage) ne pas le refermer, le laisser grand ouvert, auprès, quitte à ce que les pages se tournent au gré des vents et des humeurs qui nous entourent… Se surprendre alors à lire quelque chose pour lequel rien n'avait accroché notre regard ou notre mémoire, et avoir du mal à s'en détacher. On en reparle après l'été…

Ah ! Une dernière chose : ce qui, dans ce livre, me plaît le plus c'est qu'il est "incomplet" et qu'on va pouvoir entrer dans un vrai labyrinthe mémoriel, pour chercher à retrouver tout ce qui n'y est pas et peut-être aussi ceux qui, entre les lignes sont bien là !

En illustration : le programme d'un Atelier de Création Radiophonique, Vol 540, par Jean-Yves Bosseur et Christian Rosset, 1983, dessiné par Christian Rosset ...

 

samedi 22 juin 2013

50 ans en décembre…













Radio Fañch : France Culture a publié il y a quelques jours l'album de ses 50 ans, pourtant c'est assez rare que la radio se raconte, non ?
Emmanuel Laurentin : Sans doute parce que la télévision a pris l'habitude de se célébrer sans arrêt. Par pudeur aussi peut-être. La radio a mis longtemps à comprendre les trésors qu'elle possédait à travers ses archives. Discrète, elle ne "savait" pas parler d'elle. C'était "son" histoire de famille. Pour autant la radio est le reflet permanent de la société vers laquelle elle émet (cf la radio publique grecque, par exemple). Elle participe et dit quelque chose de l'histoire sociale, économique et culturelle d'un pays.

Anne-Marie Autissier : C'est peut-être parce que la radio c'est "Ici et maintenant", la parole immédiate, comme si cette parole ne s'archivait pas. C'est un média de l'instantanéité et les gens de radio ne se racontent pas. En même temps la radio va partout, elle est interstitielle, accompagnatrice de nos vies. Elle existe dans notre intimité propre avec sa part de secret. C'est un sujet qui ne s'impose pas. Quant aux archives, à l'origine, cela a été une bagarre pour que des moyens soient dégagés. Personne ne voulait d'une concurrence avec les "émissions" fraîches.

Radio Fañch : Comment vous-êtes-vous répartis la tâche avec Anne-Marie Autissier co-auteur de l'ouvrage ?
Emmanuel Laurentin : À partir de sa thèse des années 90, nous avons réactualisé ce savoir avec l'histoire plus récente de France Culture. Nous nous sommes partagé équitablement les seize thématiques et avons finalisé l'ensemble à deux mains. C'est un travail qui nous a pris plus d'un an.

Radio Fañch : Pourquoi avez-vous eu envie d'écrire sur France Culture ?
Anne-Marie Autissier : C'est une longue histoire qui a commencé dans les années 90. Sociologue, je m'intéressais aux politiques publiques de la culture et des arts. Je voulais appréhender, pour ces politiques publiques, quels en étaient les usages par les professionnels. En 1992, j'ai démarré ma thèse. Un sujet s'est imposé : France Culture. Pour moi France Culture concentrait :
• Le contexte des politiques publiques de la culture, l'État volontaire dans son engagement pour les arts et la culture,
• Un précipité insolite de facteurs exogènes (savoir-faire techniques)
• L'évolution de la programmation (sous la direction de Jean-Marie Borzeix, 1984-1997) comme outil de politique culturelle.
France Culture réalise la synthèse d'un médium intime. Sur l'instant, il accompagne nos états d'âme. 
 
Affiche reproduite dans le livre

 




Radio Fañch : Vous travaillez à France Culture depuis 27 ans, quels sont vos propres souvenirs de radio d'avant cette période ?
Emmanuel Laurentin : Enfant, c'était RTL la chaîne qu'on écoutait à la maison. Puis adolescent et étudiant j'écoutais France Inter. C'est en entrant à France Culture que j'y ai fait ma culture radiophonique, grâce aux techniciens, aux réalisateurs, aux archives j'ai "réappris", après-coup, l'histoire de cette radio de création.

Radio Fañch : Vos souvenirs de radio avant de commencer votre thèse ?
Anne-Marie Autissier :  Pour les infos c'était France Inter. Le feuilleton c'était "La famille Duraton" (1). J'avais un total blocage pour les sports qui captaient des auditeurs fidèles. Mais ce sont les grands entretiens qui ont retenu mon attention, comme les Radioscopies de Jacques Chancel (2). Pour moi le studio est un écrin, et le pouvoir de l'intervieweur est immense qui peut ad libitum faire parler son invité. La voix, le temps qui passe nous incitent à rentrer sur la pointe des pieds dans un espace réservé.

Radio Fañch : Pour vous France Culture c'est quoi ?
Emmanuel Laurentin :  C'est de dire le monde entier par le son et la parole. C'est une radio qui n'a jamais restreint son champ d'investigation au territoire national. C'est une radio qui donne le temps à l'expression qui laisse se développer les idées.

Anne-Marie Autissier : C'est une radio qui incite à la réflexion, à l'analyse et c'est très important à l'heure actuelle. Dans un souci de résistance à la mondialisation, France Culture permet de prendre du recul, de rendre aux personnes leur libre arbitre, par exemple dans l'Union Européenne "à marche forcée". L'auditeur réfléchit avec la radio. Mais France Culture c'est aussi la création radio, la recherche sur le son, une "pâte à modeler" dans la technicité. C'est aussi l'imaginaire en poésie, une échappée dans une autre dimension, le merveilleux. C'est un monument dans le sens d'une encyclopédie sonore, d'une maison de la culture. C'est un bel édifice auxquels les directeurs successifs de la chaîne refusent d'ébranler les fondations. Ils essayent de créer des passerelles. C'est un patrimoine de cinquante ans de vie littéraire, artistique, politique mais aussi intellectuelle et scientifique. 

Radio Fañch : Pouvez-vous citer trois émissions mythiques de France Culture ?
Emmanuel Laurentin : Absolument pas, je ne peux pas faire de podium pour des émissions de radio. La radio ce sont surtout des moments et pas forcément des émissions. Ce n'est pas réductible à un type d'émission. les moments sont quelquefois plus forts que les émissions elles-mêmes et c'est ça qui nous attache à l'écoute. Quand il se passe quelque chose de frappant, quand surtout celui qui écoute arrête de faire ce qu'il fait pour ne plus rien faire d'autre que d'écouter. La radio c'est un son, une musique, une voix, qui nous accrochent et nous disent "il se passe quelque chose".

Anne-Marie Autissier : Les chemins de la connaissance, Les Nuits magnétiques, Une vie une œuvre, Le Panorama, Les Ateliers de Création Radiophonique, Sur les Docks. Mais aussi Le bon plaisir et les émissions d'histoire (Les lundis de l'Histoire, L'Histoire en direct, La fabrique de l'Histoire).

 Demain à 18h, un premier avis sur le livre, qui pèse son poids d'histoire…

L'interview des deux auteurs du livre a eu lieu par téléphone. Celui d'Emmanuel Laurentin, mardi 18 juin. Celui d'Anne-Marie Autisssier, le mercredi 19 juin. 

(1) Radio Luxembourg (future RTL) mardi, jeudi, samedi, 19h30. 1937-1966 (source "Les années radio", Jean-François Remonté, L'arpenteur, 1989,
(2) France Inter, 1968-1982 puis reprise en 1988 jusqu'en 1989,

vendredi 21 juin 2013

Tour atours (2)…

Capture "accueil" du webdoc "Tour en tête"










C'est en regardant le public se passionner pour le Tour de France que je me suis intéressé à l'épreuve, alors que pendant des années, si je n'ai pas pu ne pas entendre le nom des champions en maillot jaune ou ceux définitivement déchus, je n'ai eu ni d'yeux ni d'oreilles pour la grande boucle. Cette centième édition du Tour de France est l'occasion exceptionnelle de rassembler les souvenirs du public, des journalistes, des champions, des suiveurs et de la mémoire populaire qui a fixé pour longtemps le mois de juillet comme un "lieu de mémoire" exceptionnel. Le Tour de France, quoiqu'il arrive, c'est bien une certaine image de la France, au moment T ou le Tour entame son périple "infernal".

"Tour en tête" (1), le webdoc de Radio France qu'a signé Simon Bouisson, "c'est le Tour vu par les spectateurs - amateurs et pique-niqueurs - les intellectuels, les journalistes, tous ceux qui le regardent passer depuis 100 ans". Ce que j'ai commencé à regarder du webdoc est fidèle à ce leitmotiv. Je craignais un peu que plein de petits bouts de son, quelques pépites sonores, ou quelques voix inoubliables me laissent sur ma fin, moi qui aime tant prendre le temps d'écouter sur la longue durée. Eh bien il n'en est rien. J'ai senti, dès les premières images d'accueil, que le pari allait être gagné, que la ferveur populaire serait palpable, que les "à côtés" des résultats et des podiums, seraient aussi forts que la course elle-même et que je tenais, là, une autre "longue durée" pour recomposer l'immense fresque des cent tours, qui chacun ont forgé légendes, drames et héros.

Dans ce webdoc, où les images ont eu le bon goût de ne pas se substituer au son, j'ai entendu la radio et composé moi-même l'ordre des souvenirs et des étapes qui m'ont permis de jongler avec les archives sonores. Un temps j'ai même pu croire que mon écran était devenu transistor… Dalida côtoyait Roland Barthes, Barthes Bernard Hinault, Fignon Il diablo, Antoine Blondin L'Équipe… J'en aurais ici des noms à citer : Jean Lebrun, Jean Durry, Pierre Chany, Jean-Paul Ollivier, Georges Briquet, Olivier Beurotte et Jean-Paul Brouchon, Anne Brunel, Georges Vigarello et Daniel Mangeas.

"Tour en tête", c'est un tour alternatif, un tour des points de vue exprimés depuis l'origine à la radio" (2). Ce webdoc est une madeleine que l'on va pouvoir déguster tous les jours de juillet et longtemps encore après. Les fresques qui le composent sont justes et touchantes car, comme la radio de qualité, elles ne surjouent pas l'effet Barnum, flonflons et promotion touristique. "Tour en tête", ce n'est pas l'épopée sportive, mais ce moment, si particulier, ce re-frein des grandes vacances, que nous racontent ceux qui ne sont pas sur un vélo." (2). Ce point de vue est absolument séduisant parce qu'il touche au cœur de ce qui participe de la mythologie de cette épreuve sportive. Une certaine cohésion sociale qui, du bord des routes du Tour, aux bistrots "sportifs", en passant par les commentaires des quidams, tous plus spécialistes les uns que les autres, donne à l'épreuve ses couleurs et ses "lettres de noblesse", tout en lui préservant son caractère populaire et définitivement bon enfant. Une fête immuable que ne connaît pas la crise…

(1) tour-en-tete.radiofrance.fr
(2) extrait du communiqué de presse de Radio France,

Tour atours (1)…

Capture d'écran du webdoc "Tour en fête"




Pour une fois je commence par une image, celle que vous voyez là, à gauche, car en ouvrant le nouveau webdoc publié par Radio France, c'est cette image qui m'a touché. Elle est simple et spontanée, à l'image de la ferveur populaire qui entoure le Tour de France qui fêtera dans quelques jours sa centième édition. Ce webdoc fait mouche pour plusieurs raisons. Mais, avant de les détailler, j'ai voulu interviewer Anne Brunel, chargée de programme multimédia à Radio France.


Radio Fañch : Quelle a été votre fonction sur ce webdoc ? 
Anne Brunel : En tant que chargée de programme, mon travail a consisté à faire en sorte que l'auteur, Simon Bouisson, à l'initiative du projet, et Camera Lucida, à qui nous avons délégué la production, soient en phase et en accord avec ce que Radio France souhaite montrer de son savoir-faire : en veillant notamment à ce que le webdoc s'adresse à un public qui ne soit pas seulement celui qui manie et vit au quotidien avec la technologie numérique. Comme ce sont France Bleu et France Info, les 2 stations en première ligne sur le Tour de France, qui vont porter la promotion et la diffusion de ce webdoc, la dimension grand public était à prendre en compte.

Radio Fañch : Quelle a été votre part de prescription pour la sélection des archives ?
 

Anne Brunel : Avec le documentaliste de Camera Lucida j'ai débroussaillé tout ce qui, de ma propre mémoire de terrain et de souvenirs d'écoute vécus, pouvait permettre une recherche pointue. À cela nous avons associé la banque de données des archives sonores  et le savoir-faire des documentalistes de Radio France et de l'Institut National de l'Audiovisuel. J'y ai ajouté des sons, des archives de France Info, que l'on ne peut pas aisément retrouver à l'Ina. J'ai ainsi identifié une série de mots-clefs qui devaient permettre une recherche pertinente plus rapide.

Radio Fañch : Les archives c'est le "cœur vibrant" de votre métier et de votre expérience à Radio France depuis vos débuts à France Inter à l'été 1980…

Anne Brunel : Bien sûr ça aide beaucoup pour la recherche en amont, mais "n'importe qui", avec le concours des documentalistes spécialisés de l'Ina, peut le faire aussi bien. Cela aurait simplement été plus long, et moins ciblé peut-être.


 





Radio Fañch : Combien de sons ont été retenus ?
Anne Brunel : Finalement, ce sont 90 sons qui sont proposés. La parole des anonymes, la parole des intellectuels (Finkielkraut, Edgar Morin, Aragon), la parole des journalistes qui sur le Tour sont devenus eux-mêmes des légendes (1). Avec Simon Bouisson nous avons travaillé sur l'équilibre vidéo/sons , soit une vidéo pour neuf sons.

Radio Fañch : Depuis les premières discussions avec Bouisson, jusqu'à la publication de ce webdoc avant-hier, combien cela aura t-il pris de temps ?
Anne Brunel : Dix mois… 


Radio Fañch : Pour un tel web-doc, pas d'alternative, il fallait absolument des images ?Anne Brunel : Notre objectif aux Nouveaux Médias et à Radio France est de mettre en valeur la radio par l'image, autrement dit de lui trouver de nouveaux publics, une nouvelle audience. Pour trouver ce nouveau public, pour faire découvrir la radio autrement, nous sommes obligés de constater que 90% des usages sur Internet concernent la consultation des vidéos. Pour faire connaître nos productions et nos talents, nous nous devons donc d'être présents sur les plateformes vidéos, y poser des extraits, des teasers, ou des productions complètes parfois, et surtout de concevoir nos productions également comme des œuvres à voir, en intégrant donc de la vidéo et de l'image en général. Aujourd'hui la consommation culturelle est autonome, individuelle, indépendante et passe, de fait, par les supports qui permettent l'accès à Internet. Le mode de pensée "broadcast" - vertical, d'un émetteur unique vers une masse d'auditeurs bénéficiant du même programme au même moment - est dépassé (2). Nous voulons séduire de nouveaux auditeurs en prenant en considération ces nouveaux paramètres comportementaux.

Radio Fanch : Ce web-doc fait la part belle aux sons "isolés" de leur doc d'origine est-ce que cela veut dire que la tendance serait à consommer des "étincelles "plutôt que les docs et/ou reportages dans leur entier .Anne Brunel : Pas du tout. Le web-doc est produit pour Internet et doit mettre en appétit des gens qui cliquent. Ceux qui vont être séduits par le son pourront toujours se tourner vers les podcasts en écoute nomade ou statique at home. En imaginant qu'il y a encore des gens qui pourront prendre du plaisir, dans leur fauteuil, à ne rien faire d'autre que d'écouter. Il n'y a pas de grand écart entre les deux "systèmes".

Radio Fanch : Un exemple ?

Anne Brunel : Dans le chapitre "Instant", "Passage éclair", 2ème son (en partant de la gauche) est un fichier "ambiance", c'est le pré-générique d'un documentaire de Yann Paranthoën (3), avec tout ce qui va faire la matière sonore qui entoure la parole. On entend même Jean-Paul Brouchon (Inter) saluer Paranthoën. J'aimerais qu'après cet instant fugace les gens se disent "Qu'est-ce que c'est beau la radio" et viennent sur le site de NouvOson en entendre d'autres dans leur contexte initial. Ce web-doc c'est aussi un moyen de "ferrer" ceux qui, sensibles au son, auront envie d'aller plus loin de façon ponctuelle sur un site dédié et pas forcément en broadcast. 

La partie 2 de ce billet sera publiée à midi…

(1) Note du rédacteur : Ce n'étaient pas des légendes du Tour mais, peut-être, des légendes de France Culture. Une certaine émotion à réécouter Geneviève Ladoues dans le Pays d'Ici et Marion Thiba, deux productrices de la chaîne qui savaient faire les détours vers le vivant et le populaire…  Et Anne Brunel d'ajouter "Sans oublier l'encyclopédie vivante qu'était devenu le commentateur du service des sports de Radio France, Jean-Paul Brouchon !",
(2) Diffusion en FM ou hertzien, (merci à Thierry Voyer, de Radio Néo, d'avoir pris le temps de me briefer avec beaucoup de pédagogie sur ce fameux "broadcast")
(3) "Le Tour de la France 1989 de Vincent Lavenu, dossard 157", documentaire radiophonique de Yann Paranthoën diffusé sur France culture en août 1992.

jeudi 20 juin 2013

To Beat or not to beat…

D'emblée qu'on me pardonne ce jeu de mot, moi qui ne maîtrise pas l'anglais, et qu'on s'en tienne au joli mot de beat qui résonne et que Marie-Hélène Fraïssé propulse dans "Tout un monde" (1). Cela fait des années que chaque semaine, je mets dans un coin de ma tête une info sur un programme radio que je veux écouter. Avant le podcast, si je laissais passer le jour et l'heure, je prenais une gamelle et jurais comme un charretier de n'avoir pas eu la bonne idée de me coller un post-it sur le front. Maintenant je sais que je peux "revenir en arrière", et j'y suis revenu.


par Alain Dister.
Découvertes/Gallimard






Il y a une dizaine de jours, je savais qu'il me fallait ne pas louper l'épisode de "Tout un monde" du 4 juin. Et je l'ai loupé. Cash. J'ai une excuse, j'étais en route pour "Les ondes" le bistroc où j'allais, à 16h, interviewer un grand monsieur de la radio. Bon, j'ai réparé mon oubli et rejoint l'"Open road" de Kérouac et ses petits camarades, Allen Ginsberg et William Burroughs. Je ne me lasse jamais d'en savoir plus et d'essayer de comprendre ce mouvement de la Beat Generation. J'ai lu le Découverte d'Alain Dister en 1997. Mais ça serait l'occasion de le relire avant d'aller à Rennes voir l'expo de Jean-Jacques Lebel. C'est un plaisir renouvelé d'écouter Marie-Hélène Fraïssé, toujours "habitée" par ses sujets.

Lebel évoque l'"Autre Amérique, celle des Indiens, des poètes, des peintres, des musiciens de jazz". "Autre Amérique" que Fraïssé piste sans relâche depuis des années. Lebel a engrangé quelques pièces sonores originales et "En sa compagnie, nous parcourons la planète des "Beats": du "Village" new yorkais jusqu'à San Francisco,  du Beat Hotel de Paris jusqu'à Tanger et au Rif, en poussant jusqu'à l'Inde et au Japon...égrenant les étapes principales de cette route flamboyante, qui n'a pas fini de susciter des envies de départ..."

(1) France Culture, le mardi, 15h,

mercredi 19 juin 2013

RTF Promotion…

Bon je vous donne quelques nouvelles de la p'tite chaîne qui fêtera ses cinquante ans au mois de décembre prochain.

 










Aujourd'hui paraît, chez Flammarion, le livre écrit par Anne-Marie Autissier (1) et Emmanuel Laurentin (2), tous les deux invités de la matinale de Marc Voinchet, vendredi prochain. Pour une fois que la radio parle d'elle, puisse cette matinale pousser les cadres et "oublier", un matin, la mécanique infernale de l'enchaînement perpétuel de l'info-actu.

La presse a reçu hier matin la grille des programmes d'été. Pour ce qui concerne l'histoire de France Culture, Laurentin et Philippe Garbit (Les Nuits) proposeront, du lundi au vendredi, de 15h à 16h "France Culture, 50 ans de radio". "On y entendra tour à tour les échos des JO de Grenoble en 1968, un reportage sur le parler bruxellois, Polanski et Fellini. On y parlera d’amour, de drogue et de jeunesse dans les années soixante et soixante-dix. Raymond Aron y côtoiera Marguerite Duras, les Contis y dialogueront à distance avec un curé paysan."

Pour "finir" un NouvOson, celui que Léo Duquesne a créé pour France Culture dans le cadre d'une opération qui incitait, pour chacune des sept chaînes du groupe public, à "réaliser, après transformation et mixage, une production sonore spatialisée originale. Des contraintes étaient imposées: chaque montage devait durer au maximum trois minutes, et  entièrement réalisé à partir d'éléments sonores téléchargeables sur NouvOson."



(1) Agrégée de lettres, Anne-Marie Autissier a consacré sa thèse de sociologie à la programmation de France Culture. Elle est maître de conférences à l'Université Paris 8, dont elle dirige l'Institut d'études européennes. Elle a écrit de nombreux articles et ouvrages sur les politiques culturelles européennes et les médias enEurope, ainsi que sur la situation des artistes et professionnels de la culture,
(2) Producteur à France Culture de "La fabrique de l'Histoire" du lundi au vendredi 9h05, depuis 2004, et en hebdo de 1999 à 2004,

mardi 18 juin 2013

Une étincelle…

Stefan Sweig





Quelquefois dans le brouhaha ininterrompu, une petite étincelle vient à briller et impose le silence. Samedi matin je rédigeais mon petit florilège maritime et n'ai pas eu le bon réflexe d'écouter "Concordance des temps" de Jean Noël Jeanneney (1). Hier lundi, en rentrant d'une journée de déplacement, je découvre dans ma "boîte à coucou" un joli message m'informant qu'au cours de cette émission, Claude Dominique a dit un extrait du "Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen" de Stefan Zweig, (2). Qu'il est troublant de l'entendre "à nouveau" alors que Claude Dominique n'est jamais rediffusée sur les ondes.

Mon correspondant bienveillant me pardonnera ici de parler plus de Claude Dominique que de Stefan Sweig que je ne n'ai pas lu. Désolé, réentendre Claude Dominique, c'est comme pour l'indicatif de Staccato, ça donne la chair de poule. C'est prendre aux tripes cette voix si particulière qui, de "L'Oreille en coin" à "Dans un an et un slow," (3) a marqué la radio pour les créations radiophoniques qu'elle n'a cessé de proposer. Dans cette émission d'histoire, Claude Dominique était aussi à l'aise que dans ses émissions de bons mots et de ritournelles. Elle avait sûrement beaucoup bossé ses sujets et ses lectures n'en étaient que plus vivantes et sensibles.

Il est bon d'entendre Jeanneney la qualifier de "grande voix". Enfin un début de reconnaissance posthume. Ses émissions avec Michel Winock auraient leur place en rediffusion. Si ce n'est pas possible sur France Culture, serait-ce possible sur France Inter ? Je vais lancer une bouteille à la mer… car franchement "Le passé singulier" (4) mériterait d'être à nouveau sur les ondes.

(1) France Culture, le samedi à 10h,
(2) Initialement lue dans le cadre de l’émission « Le passé singulier » sur France Inter, le 7 novembre 1984. Cette émission faisait partie des "nouveaux programmes " d'Inter, dans la grille inventée par Jean Garretto, directeur de la chaîne, nommé par Jean-Noël Jeanneney, alors président de Radio France. Claude Dominique animait cette émission avec Michel Winock, du lundi au vendredi de 13h40 à 14h.
(3) L'Oreille en coin" 1968-1990, "Dans un an et…" France Bleu 1995,
(3) Diffusée pendant deux saisons 1983-1985.

 

lundi 17 juin 2013

Le must du pire…






On dirait que c'est la fin de la saison radio, on dirait qu'on n'en a pas dit grand chose et qu'on va essayer de faire croire qu'on peut en parler un peu, juste en agitant des sornettes, avec de grosses ficelles

À tel point que même l'interviewé, sur un support connu, annonce pas dupe, "Je sais bien que même à Télérama on a tendance à pipoliser les choses". CQFD. (1) Alors que la "rentrée" radio est à 10 semaines de là, la journaliste de Télérama interviewe le président d'Europe1, Denis Olivennes, sur cette rentrée bien lointaine, sans un seul instant évoquer, par exemple, la prochaine grille d'été. En chapeau de l'interview, Télérama annonce que "sept heures quotidiennes (voire davantage) seront renouvelées !". Et alors ? Refaire une grille de programmes ça peut provoquer encore plus de changement, non ? D'autres s'y sont employés en radio privée comme en radio publique. Et si cela permet de donner envie à des auditeurs de (re)venir écouter, pourquoi ne pas essayer !

La "pique" d'Olivennes sur la pipolisation concerne la première question. Pour Télérama trois nouvelles arrivées se traduisent par "Pourquoi tant de bouleversements ?" (sic). On imagine bien Olivennes ricanant dans sa barbichette. Insatisfait de la réponse, Télérama enfonce le clou "Thomas Sotto (2) devient tout de même la nouvelle figure de proue de la station !". Si j'avais été Olivennes j'aurai demandé "Euh, d'où tenez-vous cette affirmation ?" Mais Olivennes balance, sans rire" La figure de proue de la rentrée, ce n'est pas Thomas Sotto. C'est Europe 1, son information, ses éditos, ses angles,…". Et bam. One point.(3)

Il serait peut-être temps que Télérama arrête de confondre communication et radio, et ne se serve pas d'informations d'agences de pub, pour étayer son "pronostic" sur l'évolution d'Europe1 à la rentrée 2013. C'est sans doute la raison pour laquelle ce billet, très médiatique, a l'honneur des pages "Médias". Radio has been ? Soyez patient le pire est à venir. Sur le cas "Sotto, figure de proue", Olivennes répond : "C'est à cause du système déclaratif de la mesure d'audience par Médiamétrie. Pour que les sondés puissent cocher la bonne case, toutes les radios ont intérêt à communiquer sur un horaire et un nom, point barre. Quand nous recrutons un animateur ou un journaliste, nous choisissons la personne la mieux à même d'exprimer notre positionnement." Ouaouuuhhh ! Enfin la mise à plat d'un système d'audience dévoyé. Merci M. Olivennes de votre franchise.

Donc sur la base "un horaire, un nom", on résume une station et, le sondé, pris 
sans doute pour un demeuré, n'a pas trop le choix d'évoquer dans le désordre les noms de ceux dont il apprécie les émissions, pas forcément situées entre 7h et 10h le matin. La grosse farce "les sondages Médiamétrie sont pipés" que chacun fait semblant d'ignorer, sert la radio commerciale qui peut vendre très cher les spots de pub diffusés dans la matinale de la station. M.Sotto va donc envahir "les culs de bus" tout le mois de septembre à… Paris et dans les grandes villes de France, à des fins d'écoute optimum et de rentrées publicitaires… mirifiques. Si, si c'est Télérama qui l'a dit. En exclu même ! Enfin en ce qui concerne la communication d'Europe 1 à l'automne.







Olivennes reconnaît que la matinale de Bruce Toussaint n'a pas donné les résultats escomptés. Télérama lance : "Or la matinale, c'est 60 ou 70% de l'audience d'Europe 1." Olivennes répond :"Vous pouvez dire ça comme ça. Mais la radio, c'est un tout dont l'image doit être cohérente." C'est un tout mais c'est le matinalier qui doit être le moteur puisqu'il doit réaliser 60 ou 70 % de l'audience. Alors figure de proue ou pas figure de proue ? Par effets successifs on pourrait donc dire que les programmes comptent pour pas grand chose dans la mesure Médiamétrie, et donc que ce n'était pas si grave si l'audience d'un Drucker "rigolo" n'a pas décollé. Mais remplacé, à la rentrée, par un vrai "rigolo" ça pourrait vite mettre du "pour cent" dans les épinards et, si ce "rigolo" est aussi une figure de proue, il pourra, au pied levé, remplacer M. Sotto dans le cas où ce dernier, bien que faisant bonne figure, manquerait un peu de proue.

Voilà le must. Télérama : "Fallait-il nécessairement en passer par le remplacement de Bruce Toussaint ? " Olivennes :" Pour franchir une étape supplémentaire, il fallait qu'on radicalise notre fonctionnement. Rendre notre positionnement plus anglé, plus aigu. Même si Bruce a fait un très bon job, la matinale a besoin d'un patron plus « news » que lui — qui est plus animateur que journaliste. Il faut qu'elle soit moins « marketée », avec plus de liberté, de naturel dans son déroulé." Ça c'est du jargon, coco ! J'en conclus qu'un animateur n'a pas de liberté et manque de naturel, alors qu'un journaliste moins marketé serait naturellement libre. Oups. Là j'ai pris deux cachets d'aspirine car c'est beaucoup trop scientifique pour moi.

À quel moment les contenus des programmes ont-ils été évoqués ? Le rythme d'une journée ? Les choix culturels (sic) ? Les résultats des "reprises" d'émissions anciennes comme "Musicorama" ou l'"Europe Stop" ? À aucun moment… Ça n'intéresse ni Télérama ni Olivennes d'en parler. Les effets d'annonce, la com', les vedettes, le buzz autour de M. Sotto ça ça intéresse… les médias, mais pas les contenus de radio (4). Bilan de l'opération interview : Olivennes a donné le coup de pied de l'âne à Télérama, et Télérama a fait croire à ses lecteurs que la radio avait encore sa place dans le magazine. Il serait temps pourtant que ce dernier assume ses choix éditoriaux et adapte son nom à ceux-ci. "Téléma" conviendrait parfaitement.

(1) Telerama.fr, on notera que cet interview n'apparaît pas en page "Radio", mais en page "Médias", c'est quoi la différence ?
(2) Le remplaçant de Bruce Toussaint, matinalier,
(3) Rien de surprenant à ce que Télérama s'intéresse au plan de com' de la station plutôt qu'aux contenus des programmes. Plus surprenant est l'anticipation à l'automne pour induire qu'un journaliste va devenir "la figure de proue".,
(4) Il est bon de rappeler qu'au lancement de la nouvelle formule de Télérama en mars 2012, Madame Fabienne Pascaud, directrice de la publication avait fait le tour des popotes. Interviewée dans la matinale de France Musique et dans l'émission mainstream de France Culture "Soft power", la question de la radio n'avait jamais été évoquée, un comble nom ?

dimanche 16 juin 2013

Vian : tant de facettes…










J'avais tenté un peu vite de vous donner envie d'écouter finement le Boris qui, avec Vian, faisait une paire exceptionnelle de créateurs. "Les grandes heures" que viennent de lui consacrer Radio France et l'Ina méritent de s'asseoir pour écouter et même surtout de ne rien faire d'autre du tout (1). Si l'on voulait filer la métaphore militaire qui, pour le personnage serait vraiment mal venue, on pourrait dire que Vian tire sur tout ce qui bouge ou mieux Vian arrive à faire bouger tout ce qui d'habitude est immobile. Redire qu'on a affaire à un génie est bien plat, car si génie il est, il a le charme, la délicatesse et l'humilité de faire comme s'il ne le savait pas. D'ailleurs le savait-il ?

Vian est simple pour toutes les choses compliquées qu'il maîtrise. Vian est tellement gentil, patient, soucieux d'être compris qu'on lui doit, et c'est bien le moins, de le comprendre. Vian est technicien sans être technique. Vian est bricoleur. Vian est romancier sans chercher le scandale, qui attire la promotion, qui attire le chaland. Vian est un jazzman avec tambour et trompette. Vian est savant comme si de rien n'était. Vian improvise comme si de rien n'était non plus. Vian n'est pas dupe, de son époque, de l'humanité et des hommes qui la gouvernent. Vian est moqueur juste ce qu'il faut pour rendre sa moquerie séduisante. Vian sait défendre ses amis et quand c'est de Cocteau qu'il s'agit, il le fait avec esprit. Vian est un équarrisseur… pour tous.

Boris est un homme de théâtre. Boris est burlesque, fou et génial. Boris est intuitif et digère la société industrielle plus vite que celle du spectacle. Boris a du style pour traduire le théâtre et ne manque pas d'exercices. Boris fait la pluie et le beau temps qui sait modifier le climat de ses livres. Boris est cynique pour ne pas gober tout cru l'œuf de la modernité insatiable. Boris a l'art ménager. Boris aurait pu tenir une chronique à Charlie (hebdo) mais c'était beaucoup trop tôt. Boris dénonce l'incurie et, plein de bon sens, fustige énarques, prévisionnistes et urbanistes patentés. Boris manie l'évidence, celle-ci entendue on ne pourra plus faire l'ingénu. Boris cisèle l'absurde et lui donne des ailes. Boris philosophe avec science en ouvrant, turbulent, les disciplines figées et cloisonnées.

Boris Vian est un savant magnifique. Boris Vian fait dans la chanson et le calembour. Boris Vian est un poète. Boris Vian a inventé l'ophicléide et bouleversé mon adolescence. Boris Vian est parolier-chanteur mais aussi chansonnier. Boris Vian n'entre dans aucune chapelle sauf pour les peindre. Boris Vian sait faire dans le slogan "En avant la zizique" et "Par ici les gros sous". Boris Vian est hors-norme et a pourtant démarré dans la normalisation. Boris Vian fait des théorèmes comme d'autres enfilent les perles. Boris Vian parle vrai même si ça effraie. Boris Vian sait secouer le cocotier. Boris Vian a le sens de la formule : "Andante patafisicoso". Boris Vian est un orfèvre. Boris Vian s'engage. Boris Vian ne tourniquette pas les cheveux en quatre. Boris Vian est charmant et subversif…

Au point, sans crier gare, à trente-neuf ans, de s'arracher le cœur !

(1) Dans les deux CD fraîchement édités, vous entendrez, ébahis, tout ce que la radio pouvait "donner", bien avant les postures formatées. Sa pré-science sur la radio (CD2 - Piste 02) aurait sa place au fronton de la radio publique.

samedi 15 juin 2013

Florilège maritime du samedi…

Débarquement de l'"Atlantic", en ciré  J.P. Eymond
gardien du phare de Cordouan,
© François Teste













D'une certaine façon je ne quitte jamais la mer. La marée je l'ai dans le cœur et les marins qui vont avec. La radio aussi. Et ce qui s'accroche au large ! Vaille que vaille. Comme cette île-là ou ce port-là. Et toutes ces ondes au fil de l'eau. Et plus sensible que la plage lisse, la grève. La grève du travail et de la "cueillette". Après cette virée de bons embruns, peut-être voudrez-vous revenir à Cordouan, c'était jeudi et vendredi ? …

Demain 18h, une vraie madeleine de plaisirs intemporels…

vendredi 14 juin 2013

Cordouan off… sea movie (suite)

Ma pomme (porteur de valise), Le Hors (au son), Rosset
© Photo François Teste










Tout a commencé par une brève de juin 2012, "les deux derniers gardiens de phare de Cordouan, déposeront début juillet, sac à terre". Avec eux, définitivement, le métier originel allait disparaître (1). J'appelle Irène Omélianenko, chargée du documentaire à France Culture, pour lui communiquer l'info. Aucune équipe ne sera disponible pour se rendre au Verdon-sur-Mer. Rentrée de septembre : je ne lâche pas l'affaire. Avant d'envisager un documentaire a-posteriori, il convient de vérifier si les autorisations d'accès au phare et l'interview des gardiens est possible.

 
Je me souvenais, en effet, qu'au début de son documentaire "Le phare des roches douvres", Yann Paranthoën annonçait que, pour s'y rendre (et y passer une nuit), il lui faudrait les autorisations idoines. De la Direction de la Communication des Phares et Balises à Brest, à la Subdivision du Verdon sur Mer, je navigue à vue. Très vite les principes de faisabilité sont actés et, les gardiens en retraite, disponibles pour causer dans le poste. Du côté de France Culture, un producteur (Christian Rosset) et un réalisateur (François Teste) prennent l'affaire en main. Le Jour J, j'ai souhaité être présent à Cordouan comme l'aboutissement d'une longue (dé)marche.

L'hiver passe. Avant le déplacement des foules "sentimentales" touristiques, l'hypothèse de se rendre à Cordouan aux grandes marées d'équinoxe se précise. Très vite la date du 26 mars est retenue. Les gardiens, parés au retour sur "zone" seront de la visite, et nous voguerons avec la vedette des Phares et Balises. L'ingé-son Olivier Beurotte (2) un temps "désigné", laissera sa place à Yves Le Hors que d'aucuns disent taiseux. C'est mieux pour un preneur de son, non ? Jean-Paul Eymond, le gardien de phare, "mon" correspondant météo nous bloquera à terre, si le vingt-six mars la houle d'équinoxe était d'humeur à former des creux gigantesques.

Trois nains © François Teste







Vingt-cinq mars, je prends la route du Verdon, je me dois, comme le trio radio, d'être à pied d'œuvre, le lendemain, aux petites aurores, paré pour affronter l'Atlantique et rejoindre Cordouan, le magnifique. Quelques jours plus tôt, branle bas de combat, il nous faut trouver un esquif qui pourra nous convoyer au pied du géant, car des difficultés techniques empêchent la vedette des Phares & Balises de se rendre sur site. Jean-Paul, le gardien, se fait fort de trouver le navire de remplacement, et ce qui fût dit fût fait. La veille au soir, Serge Andron, le deuxième gardien nous apprend que des soucis familiaux de dernière minute l'empêcheront d'être avec nous.

Bernard, le patron de l'Atlantic, est à quai, les trois mousquetaires arrivent, Jean-Paul, tel un député en campagne, serre un nombre incalculable de louches, à la Subdivision, sur les pontons, à quai, tout juste s'il ne salue pas les goélands. Ce que c'est que la renommée. Le prestige du gardien de phare, sûrement. Route sur Cordouan. Bernard nous débarque sur le banc de sable. Le plus dur reste à faire. Rosset semble craindre l'eau (froide), Le Hors se rappelle du poids de ses "outils", Teste marche (dans la combine). Vous aurez écouté le documentaire hier sur France Culture.
 
La lanterne… magique

 


Pendant que les hommes de l'art s'affairent autour de Jean-Paul, je gravis les marches une à une et, rendu à la lanterne, j'appelle Irène Omélianenko pour lui donner des nouvelles… fraîches. Deux heures trente passent. Le retour à terre sera plus facile. Dans l'Atlantic je cause avec le "taiseux" (3). On parle Bretagne, St-Malo et radio. C'est lui qui m'a envoyé la photo de France Inter que j'ai publiée le 29 mars. On déjeune tous ensemble sur le port. L'équipe ira ensuite interviewer Cathy, la femme de Jean-Paul. On se salue, je prends le bac de retour pour Royan. Heureux qui comme Ulysse…


P.S. : Ce phare de Cordouan a une particularité, sa base, en couronne circulaire, est le lieu d'habitation et de vie des gardiens. Le phare lui-même n'est pas "habité". Il faut y monter (à la lanterne) pour surplomber la mer. C'est un phare de "roi", un phare de "décor", joli, qui n'a rien a voir avec l'austérité rude des phares bretons. Je n'aurais pas aimé y être gardien, j'aurais tout le temps eu l'impression d'être écrasé et minuscule parmi les éléments.

(1) Le métier initialement développé, contrôlé, et encadré par l'administration maritime des "Phares et balises",
(2) Avec Yvon Croizier et Alexandre Heraud, Olivier Beurotte était du voyage vers Molène pour un "Vif du sujet" période milieu 2000, pour lequel j'avais accompagné et "guidé" le trio auprès de ceux de l'île,
(3) Jean Lebrun (producteur à France Inter), à l'occasion, apprenant notre équipée me demandera si j'ai réussi à faire parler le "taiseux". J'ai rien réussi du tout. On a causé et bien causé. Point.