Bon c'est Pâques, ce coup-ci c'est sûr (1) ! Au jardin, j'ai passé l'âge d'aller chercher les œufs. Mais j'aime toujours autant revenir dans l'histoire. Jeudi denier, au petit matin, Albane Penaranda, productrice des Nuits sur France Culture nous proposait l'épisode 1 de "L'histoire en direct" sur le Larzac, du 1er septembre 1997 (2). Comment dire ? Voilà une formidable occasion de revenir sur nos jeunes années de luttes et d'utopies. Le tout au pluriel.
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Larzac, 26 août 1973. W. Karel Gamma/Rapho via Getty Image |
Pile un mois plus tard, je me retrouvais à mille-vingt-huit kilomètres de ma chère Bretagne dans une tenue très proche de ceux qui, au Larzac, avaient envie de plus d'espace pour "jouer à la guerre". Difficile alors d'afficher sur sa veste un autocollant (pas encore créé) genre "Gardarem Lo Larzac" au risque de terminer au trou pour plusieurs jours… Las, par chance parmi quelques copains de "promo", un doux Arménien lisait Actuel, le nouveau magazine de free-press racheté par Jean-François Bizot. Et là sur fond, jaune, vert ou violet, voire entre les lignes on pouvait commençer à lire "les nouvelles du Front". On bouillait dans nos chambrées, plus que jamais solidaires avec les moutons et définitivement pacifistes face aux canons.
La chronologie de ce combat sociétal si bien raconté par ses actrices (particulièrement Marizette Tarlier) et acteurs nous rappelle que moins de trois ans après 68, la jeunesse voulait en découdre avec des politiques autoritaires au mépris de ceux qui voulaient "Vivre et travailler au pays". La mobilisation de toute la France, au travers des "Comités Larzac", des fêtes d'été sur place, de l'appui permanent d'une population locale et extra-locale a permis au "mythe" d'exister au-delà des clichés enfermant les révoltés dans un stéréotype de "babas cool" ou de "hyppies" en mal de flower-power et de Woodstock (5).
Alain Lipiez (porte-parole des Verts en 1997) : "Pour fabriquer un mythe il faut qu'il y ait de la beauté", ce à quoi José Bové (paysan du Larzac) ajoute : "Le mythe s'est construit dans l'action". Et comme le précise ce dernier "C'est en prenant l'opinion public à témoin" que la lutte a pu être menée sans relâche jusqu'à la victoire finale. En effet, le 3 juin 1981, le gouvernement socialiste de Pierre Mauroy, acte l'abandon du projet d'agrandissement du camp du Larzac. Un fait de société exceptionnel de mobilisation citoyenne contre un pouvoir politique qui n'a pas intégré les ressorts de la démocratie active.
J'ai pu remettre la main sur le n°15 d'Actuel de décembre 1971, qui dans un entrefilet évoque l'extension programmée du camp militaire du Larzac. Lire Actuel, de quoi replonger dans le ton libertaire d'une free-press indispensable pour s'extraire de la chape de plomb des années Pompidou !