vendredi 31 mai 2013

Ce mois, cet émoi de mai…














Le joli mai. Le joli mai 62. À moins que… À moins que ça ne suffise pas que Chris Marker… existe. À moins que toutes les radios soient concentrés sur juin. Sur un improbable Tercato. Sur autre chose que le perpétuel show. Qu'il nous manque Bonnaud (Frédéric) pour agiter le grelot, avec Agnès (Varda) qui ne parlerait pas que des chats, sur l'affiche, là. Qu'on aurait pu jouer "La fabrique de mai" à 9h sur France Culture ou bien Mer… mais, là-bas si t'y suis. J'y reste. J'y reste pour les mots qu'on émet. Les mots qu'on aimait au mois de mai. Dits par Montand, mais… Le joli mai de Chris Marker, en lumière, en noir et blanc. Le fond de l'air n'est pas rouge. Pas encore d'un autre mai.

La radio se tait. D'une certaine façon tant mieux. Elle parlera peut-être après. La semaine prochaine, je le verrai "Le joli mai". Je le verrai en vrai. Même si c'est juin. Même si j'aurais bien "vu" une longue Nuit magnétique pour fermer ce mai. L'occasion de faire une spéciale émission comme on en fait pour la chanson. On aurait pu demander à Jean-Michel Frodon (1)…

(1) Qui a réalisé l'interview de Pierre Lhomme, co-réalisateur du film,

 

Y'a d'la joie… alphabétique

On commence par le Dom'. Le Dom' A. Simple, franc, honnête qu'on a envie de partir faire la route avec lui. Et de chanter quand il chanterait pas… Pi, on irait l'aider à causer avec les radios "moutons" périphériques, et inciterait Radio Fond de France à inaugurer sa web-radio avec ce gaillard-là…


 
Pi, "tankaff", pour donner l'air de la mer à ces montagnards-là, on leur proposerait un peu de swing du Bertrand. Du Bertrand Belin. Habité. Grave, solide. Un poète qui porte les croisements, les liens, les signes et qui en joue sobrement. Quand on connaît le coin on entend la mer. Mieux Belin c'est la mer avec son vague à l'âme…

 

Et puis ça que Thomas Baumgartner a fait circuler sur Twitter

jeudi 30 mai 2013

Presse, free press…









Presse
Je ne sais pas trop pourquoi l'émission "Le secret professionnel" (1) s'appelle ainsi. Je me méfie des titres qui portent le mot "secret" et, dont l'objectif avéré est de les divulguer. Toujours est-il que dimanche dernier mon attention a été attirée par son titre "Le secret professionnel de "Sud-Ouest". Bigre, quel secret pourrait bien donc avoir un quotidien régional réputé ? J'ai écouté et n'ai pas été déçu d'apprendre que Sud-Ouest était le seul quotidien régional offrant à ses lecteurs un supplément culturel hebdomadaire, le dimanche. Ce n'est pas rien et pourtant qui en parle ? On conaît pourtant les journalistes prompts à saluer, avec un bonbon dans la bouche, les exploits de Ouest-France, premier quotidien français en terme de diffusion. On aimerait forcément qu'ils s'attardent quelquefois sur les écrivains qui ont fait profiter de leur plume les lecteurs du dit Sud-Ouest. Yves Harté (2) en parle très bien à Dantzig et donne envie de le lire quand, pour une fois, la presse ne s'engouffre pas dans la sur-promotion si facile du petit écran (3). Je guette (4).


  
Free-Press  
Il y a quelques semaines, Clo Chapuis, m'a prêté sept numéros du journal Actuel, première formule. J'ai lu au début des 70' le canard de Bizot et Burnier, mais en ce temps-là je n'épluchais pas l'ours (5). Burnier Michel-Antoine était le rédac-chef de ce mensuel, sauvage et libéré, et c'est sans doute la raison pour laquelle je n'ai rien pu y lire sous sa plume. Burnier on l'entend dans l'émission "Une vie, une œuvre" consacrée à Bizot (6). Alors que Léon Mercadet son acolyte d'écriture (et de l'équipe d'origine d'Actuel) squatte assez souvent le studio du "12-13" du Mouv', pas de trace aujourd'hui d'une intervention de sa part (7). Sur l'image ci-dessous  on découvrira comme contributeur, Patrice Blanc-Francard, actuel directeur du Mouv'.
Extrait de l'ours du n°32, juin 73, 4 francs








(1) Charles Dantzig, France Culture, dimanche 14h30,
(2) Rédacteur en chef et directeur adjoint de l’information de Sud-Ouest,
(3) Ce qu'aussi bon nombre de radios font malheureusement, 
(4) Nous apprenions la semaine dernière que Ouest-France, ayant une très haute idée de la géographie, envisageait de venir mordre sur le territoire historique de Sud-Ouest en envisageant de s'implanter à La Rochelle. C'est sûr, vu de Moscou, Brest et Hendaye sont à l'Ouest,
(5) L'ours c'est l'encart dans lequel les mentions légales concernant la publication sont inscrites (statut juridique, adresse, propriétaire, directeur de publication, commission paritaire,…)
(6) J'en profite pour ajouter que j'aurais préféré, en intro du documentaire, entendre la voix de Burnier plutôt que celle de Brice Couturier, journaliste à France Culture, qui était de l'équipe de la deuxième époque d'Actuel,
(7) Surprenant ! Puisque j'évoque ce "12-13", je continue à me désoler que Philippe Dana, producteur de l'émission fasse, 4 jours sur 5, la promotion de la TV, et jamais de la radio. De quoi faire regretter, à titre posthume, à Roland Dhordain, ex-directeur de France Inter, d'avoir distingué Dana comme "Enfant d'Inter". 

mercredi 29 mai 2013

Changer d'oreille…

© Fabienne Verdier






Est-ce que cela ne vous surprend pas quand votre émission habituelle est présentée par une autre, un autre ? N'est-ce pas immédiatement séduisant pour tout ce qui de façon "indicible" change ? L'attention aiguë que l'on porte à cette "nouvelle" voix, ou à cette voix qu'on n'entend jamais à cette heure-là ! Plutôt que l'habitude, la routine, et quelquefois un certain "ennui" ou ronron mécanique, un nouveau tempo s'installe, un autre rythme, d'autres tournures et, ce peut être alors, un enchantement. Il faut pour cela que celle ou celui qui "remplace" ait l'originalité de ne pas enfiler les chaussons encore chauds du "titulaire" et joue cette "petite cantate" comme si c'était la sienne. On peut alors assister là à de belles surprises, et pourquoi ne pas dire à de vraies émotions.

Hier matin, sur France Musique, Judith Chaine, recevait dans "sa" matinale, Fabienne Verdier, peintre. Eh bien ça change tout de la voix habituelle de… Christophe Bourseiller. Tout de suite dès les premiers mots. Car, à la délicatesse de la démarche de Fabienne Verdier (1) "répondait" la délicatesse de l'approche de Judith Chaine, et dans ce sens-là peut-être. Est-ce complicité féminine, feeling pour l'œuvre artistique et spirituelle de Fabienne Verdier, ou plus simplement une façon douce, sensible, d'aborder les choses ? Les trois peut-être, mais qu'est-ce que ça fait du bien quand la voix de l'intervieweur et de l'interviewé sont chacune dans le même ton (au diapason ?) sans accroche agressive, effets d'appui des mots, au-dessus de l'interviewé.

Pourquoi ne laisse t-on pas une respiration régulière à ceux, par exemple, qui font les matinales ? Leur rythme harassant mériterait une pause régulière sur une année et donnerait l'occasion à d'autres de s'exercer, mais  à la condition suprême qu'en radio on n'utilise jamais, pour ceux-là, le mot méprisant, en cours à la TV qui, d'un côté sublime le titulaire, et de l'autre minore le remplaçant.

Judith Chaine c'est aussi le ton France Musique quand partout ailleurs le "bruit" semble constitutif de l'époque. Et quand on vient un matin, que ça ça repose et embellit on a envie de revenir le lendemain…

(1) Entendue pour la première fois le 4 mars 2001 dans For Intérieur d'Olivier Germain-Thomas sur France Culture. Il est peu de dire que découvrir et regarder les toiles de Fabienne Verdier "change" le monde.

 

mardi 28 mai 2013

L'esprit Finky vs L'esprit Canal…











La joute qu'on attendait, ou plutôt la joute qu'attendait Alain Finkielkraut depuis longtemps pour "tordre le cou" à ce "fameux" esprit Canal, qui serait l'étalon de la chose médiatique, et qui hérisse le poil à plus d'un titre au producteur de "Répliques" (1), a eu lieu samedi dernier. Finky avait invité Guillaume Erner (2) et Olivier Pourriol, ce dernier racontant son expérience de chroniqueur dans la session du "Grand Journal" sur la chaine cryptée. Déjà en novembre 2012, les invités de Répliques avaient dit à quel point Canal+ "moquait" la campagne (4).

L'intro de Finky un petit bijou : "Canal+ n'est pas une simple chaîne de télévision. Canal + est une manière de regarder et d'habiter le monde… Canal+ est le bastion médiatique de la dérision, le chef lieu de l'impertinence, la capitale du néo-comique. C'est au Grand et au Petit Journal que se font bastonner les ringards et qu'on glorifie les vedettes du jour ou d'un jour (5). c'est là que les "Guignols de l'info" initient les jeunes à la politique et impriment sur leurs visages un sourire narquois qui ne s'effacera plus. On ne peut pas traiter un phénomène aussi important par le mépris, sous prétexte qu'on est sur France Culture."

Très bon moment de radio quand Finky découvre qu'Olivier Pourriol a, en son temps, été approché pour remplacer au "Grand Journal" Ali Baddou. "Ah oui c'était Ali Baddou !" dira Finky presque à voix basse (5). Et puis l'on découvre que l'émission (et ses coulisses disséquées par Pourriol) serait "statutaire". La définition de ce statut auto-proclamé est à pleurer et je vous laisse le découvrir en écoutant l'émission (à 15'15"). Où l'on apprend que "le pouvoir est à Canal+" (6) et que "L'hégémonie culturelle de Canal se fonde sur le maniement d'un ton ironique…" Cette "hégémonie et cet impérialisme de l'esprit Canal" que fustige Finkielkraut doit être pour le producteur un objet d'étude tant il pousse sa rigueur intellectuelle jusqu'à s'imposer déjeuner de nombreux midis devant l'émission d'Ali Baddou. "L'esprit Baddou" encore plus fort que "L'esprit Canal" ? (7)

En conclusion. Erner : semi-caution de Canal+ (il y tient chronique), semi-caution intellectuelle. Finkielkraut : aigri ne ne pouvoir en découdre tout à fait. Pourriol : cohérent avec son objet d'étude "les coulisses d'une émission de divertissement". Las, le "grand soir" de l'histoire de Canal n'était ni pour aujourd'hui, ni ne le sera demain. Il faudra sûrement laisser couler beaucoup de flots de dérision sous les ponts de la chaîne, avant sans doute que celle-ci ne devienne un objet d'étude approfondi, rigoureux et intellectuellement irréprochable. Dans un temps où, sans doute, "l'esprit Canal" ayant  fait suffisamment florès, il sera temps de retrouver ses "propres esprits".

(1) France Culture, le samedi, 9h,
(2) Docteur en sociologie et producteur de Service Public à France Inter,
(3) Philosophe, essayiste et romancier, auteur de On/Off : comédie Nil, 2013,
(4) En opposition à la ville, 
(5) Rappelons que le dit Ali Baddou a "officié" sur France Culture pour remplacer Nicolas Demorrand pour la matinale et a ensuite "produit" une émission, appelée Radio Libre ou la médiocrité poussée à son extrême,
(5) Avec un peu moins de lyrisme, Finky nous referait presque l'annonce de "Reine d'un jour" de Jean Nohain, Radio Luxembourg, 1948-1955,
(6) Ce qui du même coup déboulonne la posture et la statue d'Elisabeth Levy, enfileuse de perles, qui quand elle animait "Le premier pouvoir" sur France Culture (204-2006) ignorait superbement celui de la chaîne cryptée,
(7) Un objet d'étude aux profondeurs certainement abyssales.

lundi 27 mai 2013

Tauque toujours tu m'intéresses…

 





"Tauque… tauquetauque" ce n'est pas quand on frappe à la porte, c'est plutôt bien appuyer sur les mots pour qu'ils cognent fort ! Car, depuis dix ans ou plus, le talk s'est installé à tous les étages de la radio, si l'on en croit l'article d'Alain Constant paru samedi (1). Il faudrait immédiatement traduire talk par parlotte boulimique, diarrhée verbale ou charabia, et l'on serait dans l'ambiance de ce qui se déverse sur les ondes de RMC, dont l'acronyme ne voudrait plus dire "Radio Monte Carlo". En prévision d'une rédaction sur le sujet, je me suis infligé, d'octobre 2012 à janvier 2013, de nombreuses écoutes des sessions d'info du matin et de ce fameux talk qui court sur la chaîne de 10h à 13h (2).

J'imagine que Jean-Jacques Bourdin, l'officiant de la matinale de RMC, a du exulter samedi, en lisant l'article du Monde sur son iPad. Il a, pour cela, sûrement dû interrompre quelques instants l'écoute de France Culture, puisque chaque fin de semaine, dans ses Cévennes, l'homme se branche sur cette radio-là (3). L'écoute matutinale de la session qu'il anime chaque matin m'a été insupportable, pénible et éprouvante. Éprouvante pour les attitudes machistes des "dialogues" entre confrères, pénible pour la retape démagogique permanente des auditeurs-participatifs, focalisant et attisant les peurs, les angoisses, les incertitudes des Français, insupportable pour une ambiance de foire, de camelots et de poncifs recyclés ad vitam aeternam pour, sans relâche, charger démagogiquement et en permanence la/les politique(s) mise(s) en œuvre par le gouvernement. Poujade à côté, un enfant de chœur ! (4)

Quant aux "Grandes Gueules" c'est du même tonneau mais en pire. Le journaliste du Monde est bien complaisant, dans son article, qui fait l'impasse sur le dérapage de Sophie De Menthon (une des "Grandes Gueules") qui, à l'antenne, en début d'année, avait dépassé les bornes avec des propos ignobles à l'encontre de Nafissatou Dialo. Virée pour l'exemple. Une femme de moins sur cette antenne ça se remarquera vite. Pour qualifier ces "tauques" abrutissants, je parlerai de vociférations et d'éructations. "Ça me dégueule" aurait dit Ferré et ça me dégueule aussi. Je me demande encore comment on peut écouter quotidiennement une Radio Méchamment Conn…ue ? On me pardonnera de ne pas fournir d'exemples ou d'analyse un peu plus fouillés. Il y a des limites à la bienséance et même à l'analyse.

(1) Le Monde, "Le "talk" fait parler la radio", daté 26-27 mai 2013,
(2) À 13h "elles" laissent la place à Éric Brunet qui, sans aucune mégalomanie, a choisi d'intituler son émission - carrément Brunet - tout aussi vociférante que les "Grandes Gueules",
(3) C'est la "confidence" qu'il avait faite sur France Culture un dimanche soir, au micro de F. Martel, dans son émission de tauque "Soft Power". On imagine ce qu'aurait pu dire le journaliste en étant reçu sur "Radio Nostalgie". Martel, pour être dans le ton du mainstream, qu'il porte en bandoulière, n'avait pas hésité, quelques années plus tôt, à inviter un orfèvre des médias mainstream, Jean-Marc Morandini soi-même, camelot sur Europe 1 et sur une chaîne de la TNT. Pour ce dernier on ne sait rien de ses écoutes radio de fin de semaine…
(4) Du nom de Pierre Poujade, homme politique et syndicaliste, sous la IVème République, qui défendait commerçants et artisans contre l'invasion à venir des "grandes surfaces".

dimanche 26 mai 2013

Le temps de vivre…

Ce pourrait être le titre d'une émission de radio, de n'importe quelle radio, ou plutôt d'une radio qui elle même saurait prendre le temps de vivre. France Inter, France Musique ont su jusqu'à il n'y a pas encore si longtemps… Puis une certaine fureur, un certain tempo "moderne" ont fait disparaître des ondes une certaine lenteur, pour ne pas dire une nonchalance à laisser s'égrener le temps à la vitesse de l'invité, à la vitesse de ses chansons, de ses écrits ou de ses paroles. Ce "temps de vivre" existait sur les radios publiques, particulièrement à la fin des années 60 et jusqu'à la fin des années 70.  Pour des après-midis au long cours (1), où il faisait bon laisser "flâner ses oreilles".


Notre première "image" du pâtre grec (8)








Alors oui, il devait être bon de laisser "flâner ses oreilles", jeudi soir dernier sur France Inter qui pendant trois heures a rendu hommage à Georges Moustaki. Comme sait le faire la radio, la chaîne publique de Radio france a su bouleverser ses programmes habituels et, à la vitesse supersonique (2), proposer dès 20h, témoignages, archives, chansons du poète d'Alexandrie, qui dès l'enfance vénérait la vieillesse, la sagesse et, de fait, la lenteur pour ne pas dire la paresse. Et c'est, je crois, au titre de cette lenteur magnifique que Moustaki portait dans son corps, dans ses yeux et dans ses chansons, que je n'ai pas voulu "immédiatement" venir me souvenir de lui. J'avais besoin de laisser revenir les images, les sons, son visage, ses complicités musicales, ses amitiés, son phrasé mesuré avant d'écouter l'"après", en même temps si présent. Pas tout de suite s'il vous plaît, laissez-moi un temps de latence, un temps de réflexion, un temps de paix pour me faire à sa mort plus doucement.

Je savais inconsciemment que l'émission serait podcastable, alors je ne me suis pas inquiété, dimanche serait parfait pour t'écouter Georges. Vendredi matin, j'ai croisé Pascale (3) elle m'a dit, avec des sourires sincères dans les yeux et une belle émotion, qu'elle avait passé une très belle soirée. Je souriais, moi je passerai un bon dimanche. Et comme le dit si bien Philippe Meyer (4) au début de l'émission, Moustaki "a su admirablement transformer l'attente en un mode de vie". Tout est dit, ou presque, et me conforte dans mon choix d'écoute différée.

Dans cette émission autour de Didier Varrod (5), France Inter a montré le savoir-faire des équipes passionnées (6) qui courent "sur le fil" de l'Institut National de l'Audiovisuel (Ina), assemblent dans une très belle maïeutique les centaines de petits morceaux de verre épars qui composeront un très bel hommage. Cette façon de faire à l'intuition, au coup de cœur, aux tripes représente ce que la radio sait le mieux faire pour un événement sensible, ce qu'elle a souvent su faire, aussi bien pour les tragédies que, pour les "belles choses de la vie". Je l'écris avec une certaine forme du passé car le/les formatages d'aujourd'hui permettent difficilement la spontanéité qui sort du cadre, explose et respire en oubliant l'heure, le sacro-saint flash ou les annonceurs pour les radios privées.

Mais cet hommage que vient de nous faire vivre France Inter va-t-il demain s'instituer à chaque fois qu'un chanteur, un acteur, un artiste décédera ? Qui va choisir ? Pour quelle durée ? Aznavour six heures ? Sardou dix minutes ? Ferré une nuit ? Gréco ? Le Forestier ? C'est le coup de cœur d'une personne spécialisée qui décide ? Varrod ? Et puis bouleverser les programmes du soir, bravo (7) mais pourquoi, en plus, la demi-heure de "La marche de l'histoire" ? Pour exister face à la concurrence ? Pour surjouer le fait qu'Inter est plutôt très bonne spécialiste de la chanson ? Cette forme moderne de réaction à chaud, immédiate qui sait tout bousculer ne correspond-t-elle pas à une façon de notre temps qui ne prend plus le temps de "donner du temps au temps" ?

Et Moustaki qu'aurait-il dit de cette fulgurance de la réaction ? Dans la pétillance de ses yeux, derrière sa barbe, d'un sourire esquissé, il aurait laissé s'installer un long silence, il aurait même fermé les yeux. Puis sans presque bouger, il aurait pris sa guitare, posé deux accords et, de sa voix, même fatiguée, aurait commencé à murmurer "Nous prendrons le temps de vivre, d'être libre, mon amour…"

(1) Trois heures consécutives pour France Culture comme pour France Musique en semaine, trois heures et beaucoup pour les fins de semaine de "l'Oreille en coin" sur France Inter, trois heures le samedi après-midi, au début des années 80, pour "Le bon plaisir" sur France Culture,
(2) Georges Moustaki était décédé la nuit précédente,
(3) La dame qui m'a accompagné pour enregistrer les auditeurs-spectateurs du film de Nicolas Philibert, à Nantes le 19 mars 2013,
(4) Producteur à France Inter et à France Culture,
(5) Le sensible témoignage d'Isabelle Pasquier journaliste et celui de Maryse Friboulet, réalisatrice (entre autres des émissions de Jean-Louis Foulquier),
(6) Directeur de la musique à France Inter, producteur d'émissions sur la chanson, 
(7) En concertation avec les animateurs des émissions concernées je présume ?
(8) Cette année-là (en pleine révision du Bepc), "Le Métèque" rivalise avec "C'est extra" de Léo Ferré, difficile de réviser quand toutes les trois minutes il faut remettre le bras de l'électrophone au début du microsillon…

Must & Best…

C'est dimanche, au hasard, vous avez mis Fip à 9h. Paola vous emmène à Tahiti, fluide Le Cercle vous évoque un certain "Traffik", pas celui de vos bouchons… d'oreille, puis Chill Bump vous rappelle que dans votre "Home sweet home" il fait bon se prélasser à la mesure du Golden Gate Quartet qui nous refait le coup de "Run on for a long time". Puis vous sautez du lit et enchainez quelques pas malhabiles, voulant suggérer la grâce des claquettes de M. Fred Astaire qui, depuis son hôtel, prend son tempo sur "Puttin on the Ritz" et comme sur un petit nuage, en douceur, Harry Connick Jr swingue son "That's a plenty"…  Et un glissé superbe vers Gil Scott Heron et son "Is that Jazz" que Bertrand Belin de sa voix grave poursuit avec comme venu des nuages "Un déluge"…

 
 
 
Et puis douce voix, subtile voix qui s'insère et nous renvoie en moins de temps qu'il ne faut pour le dire à notre "Summer 74" que le Sacre du Tympan joue pour les "Teenagers by the lake", et histoire de pousser le bouchon de l'émotion un peu plus loin on explose de joie quand le Creedence Clearwater Revival pousse "Run Through the jungle". Pause langoureuse latino quand Sandra Rumolino tourne autour de son "Anaconda". Puis Charles Marie Widor et le Trio Parnassus qui tout en finesse et attention interprètent "4 pièces en trio : Humoresque". Vous pourriez dire "Oh no Oh my", si vous aviez reconnu le nom du groupe qui avec "Reeks and seeks" prolonge notre bonheur d'écoute, à se demander à chaque enchaînement comment avec autant de grâce, d'oreille et de dextérité les programmateurs réinventent, minute par minute, le projet de Fip "60 minutes de musique par heure"…

Voilà sans tapage à 9h50, Fip Actualités… On peut tendre l'oreille, on sait que sans excès, sans haussement de voix, sans effet de manche, les quelques minutes d'info seront efficaces et pertinentes… et ça repartira en finesse avec Medeski Martin and Wood et "Just like pictured it". Ça valait le coup que j'interrompe mon petit déjeuner dominical pour essayer de vous faire partager 50 minutes de grâce musicale… Yo !

samedi 25 mai 2013

Feuilleter…







Ce pourrait être comme ça un samedi sans lumière ou sans suffisamment de chaleur. Un samedi où on feuilleterait ce "journal de la radio". et à la page "Mémoire vivante" on trouverait ça. Pour temporiser, pour garder en mémoire que la radio ce sont des gestes et des regards. Oui, des gestes et des regards, pour ceux qui la font, des gestes et des regards pour ceux qui l'écoutent. Finement. Temporiser c'est s'affranchir volontairement des météorites qui s'écrasent en permanence sur nos têtes jusqu'à nous rendre sourds. Sourds à l'essentiel quand le superflu a définitivement envahi les ondes. Alors que là-bas ou ici rien n'a vraiment changé. Replay. Pouvoir, de temps en temps, ou régulièrement "revenir en arrière" approfondir, confronter, évaluer.

Ce pourrait être le temps d'une traversée, longue ou moyenne. Une traversée pour (re)découvrir ce à quoi peut-être il fallait accorder un peu d'attention. Lever la tête, nez en l'air, prendre le vent, attraper son chaos jusqu'au vertige ou mesurer combien, entre les accalmies, les silences régénèrent, stimulent, ressourcent. C'est le conteur qui vous tire de votre absence, de vos rêves ou de votre lassitude. Il enfile les perles, vous enfilez les images. Une ombre passe, vous semblez reconnaître Orson Welles. Il s'approche, se penche vers vous et murmure " L'avantage de la radio sur le cinéma, c'est qu'à la radio l'écran est plus large."

vendredi 24 mai 2013

Je me souviens de France Inter…

Je me souviens que j'aurais bien aimé me baigner "Deux fois dans le même fleuve" avec Claude Dominique et que Daniel Mermet n'arrêtait pas de me répéter, va voir "Là-bas si j'y suis", alors que, bien timide, je l'attendais encore "Dans la ville de Paramaribo" où il y a une rue qui monte et qui ne descend jamais. Et puis, je me souviens qu'au début des années 90, il n'était pas si facile que ça de passer d'Inter à Culture…

Je me souviens d'essayer de suivre le conseil de Brigitte Vincent "On efface tout et on recommence", et d'avoir fait tourner en boucle "Hey nineteen" de Steely Dan bien avant que Jean-Luc Hees ne l'"use" jusqu'à la corde pour l'indicatif de "Synergie". Je me souviens qu'en 1990, Kriss avait fait un pas de côté. Je me souviens de "L'oreille cassée" (1) de Jean Garretto et Pierre Codou après vingt deux ans de "L'Oreille en coin".

Je me souviens n'avoir jamais dit "Allo Macha…" mais me demandais si, sur son casque, elle gardait son chapeau fétiche. Je me souviens butiner en soirée un peu de "Pollen", un peu de "Lenoir" et qu'"À l'heure du pop" je m'endormais. Je me souviens que Jacques Santamaria a installé son "Zinzin", que Robert Arnaut avait la "Chronique sauvage", Olivier Nanteau l'"Euréka" spontané et Paula Jacques, tôt le dimanche, de saupoudrer les ondes, de son "Pentimento".

Je me souviens de Roland Dhordain accompagnant ses "Enfants d'Inter", pendant que Claude Villers, meilleur "Marchand d'histoires" de tous les temps, courait les marchés de Provence, de Brive la Gaillarde ou d'Arras où il faisait bon rester pendu à ses lèvres. Quant à l'autre "Cinglé du music-hall" on était Averty. Je me souviens quand "Les choses de la nuit" s'approchaient et que, déjà endormi, je rêvais…

Je me souviens des "Guetteurs" (du siècle) de Chancel et, jour après jour, "Les Jours" (du siècle) de Patrick Gélinet, Fabienne Chauvières "Sur un petit nuage" et la Kriss descendue du sien, pour nous faire son "Dimanche en roue libre". Libre Kriss qui n'a jamais fait la roue, mais qui, de concert avec Claude Dominique, aurait pu effeuiller "Les pages rousses du petit Larose". Et, Noëlle Breham, au bord du bassin du jardin du Luxembourg, s'évertuant à crier "Maman les petits bateaux" peut-être pour ne pas voir s'envoler l'enfance.

Je me souviens en coulisse de Janine Marc-Pezet et de ses archives. Je me souviens de Robert Arnaut et de ses "Histoires possibles et impossibles"… impossibles à oublier, comme les contes de Gérard Sire il y a de ça plusieurs années. Je me souviens d'avoir un peu insisté, et Claude Dominique de me répéter "Dans un an et un slow" (2).

En italique les titres des émissions de France Inter.

(1) Titre de l'article de Libération,
(2) Une série en 40 épisodes des Ateliers de Création Radiophonique Décentralisés, diffusés sur France Bleu en 1995,

jeudi 23 mai 2013

Sun records…





Ce qu'il y a de bien avec Fip, c'est que la "petite chaîne" de Radio France fait peu de tapage, quoi qu'il arrive, mais sait bien que tout aficionado de musique peut compter sur elle quand l'actualité musicale -heureuse ou malheureuse- nécessite un traitement fouillé, original et spécialisé. Que ce soit à l'antenne ou sur son site. Lundi dernier Ray Manzarek a définitivement fermé toutes les portes, dont celle qui aurait pu encore mener aux Doors. Sur son clavier les notes de "Riders on the storm" auraient fait supporter l'orage aux plus effarouchés. Les portes se referment sur quelque chose de Californie des années 60, et c'est vers Philippe Garnier que j'aimerais me tourner pour lire ce qu'il n'a sans doute pas manqué d'écrire (ou pas, gaffe avec Garnier !). Mes chers auditeurs vos lumières me seront précieuses.





P....., le v'là le soleil qui brille. Et Fip reflète bien (sic) cette lumière qui s'incrustait entre les sillons des disques vinyls que Sam Phillips produisait dès la création de Sun Records en 1950. Forcément le "Bear Cat" de Rufus Thomas est savoureux. Et de découvrir que Johnny Cash fit ses débuts dans "La maison des disques du soleil levant" (1).


 
Comme souvent voici que la tempête fit rage sous mon crâne et je dus - vite fait, bien fait - me rendre dans mon petit index radiophonique pour rechercher ce que j'avais conservé de Johnny Cash. Eurêka ! Un épisode de "Décibels" du meilleur tonneau (2), où Arno Bertina parle du "rocker" et du roman qu'il lui a consacré  "J'ai appris à ne pas rire du démon" (3). À la fin de l'émission Cash et Strummer (Clash) chantent ensemble leur propre "Redemption song"… de Bob Marley. 

Voilà donc comment, une fois de plus, les archives radio peuvent bouleverser, compléter, enrichir un sujet et le rendre présent, vivant et quelquefois… universel.

(1) Mix à ma façon entre "The house of rising sun" et "Sun records", que les anglicistes et autres passionnés de musique pardonnent cette galéjade…
(2) Productrice Jeanne-Martine Vacher, France Culture, 15 février 2007, 
(3) Naïve, 2006.

Ce jour, Georges Moustaki est décédé, la furie d'infos et d'émissions spéciales proposées, sans aucun recul, correspond-t-elle bien à l'image de sa paisibilité comme d'une certaine nonchalance qui habitait le personnage ? 

mercredi 22 mai 2013

Émile Franc… In memoriam












Le jeu des 1000 francs est mort l'année du passage à l'euro. Son principal animateur Lucien Jeunesse l'aura présenté sur France Inter de 1965 à 1995 (1), à la suite de Henri Kubnick qui l'avait créé et présenté sur Paris Inter depuis 1958 (2). France Inter prépare une opération spéciale intitulée "Le Jeu des 1000 histoires", qui risque de donner une vision un peu moins caricaturale que le dernier filmage du Jeu, paru sur les écrans au mois d'avril (3).

Le "teaser" présenté ci-dessous c'est enfin une façon de voir l'envers du (des) décor (s), cet envers du décor qui aurait pu inspirer Nicolas Philibert (4). Traiter l'ensemble des situations en accéléré redonne un bon coup de frais, de pop à une institution qui, c'est le moins qu'on puisse dire, n'aura pas pêché par excès d'innovations perpétuelles…

Feu ma grand-mère à définitivement gâché tous les repas de midi de nos vacances estivales au bord de la mer, puisque non seulement le silence était d'or, mais qu'il fallait pieusement, année après année, prier Saint Bleu, Saint Blanc ou Saint Rouge, pour encourager notre érudite locale, qui consentait à partager nos repas de pauvres petits écervelés (5). Quand aujourd'hui il m'arrive de pénétrer dans une maison à l'heure fatidique de cet "office" écouté avec tant de dévotion, je ne manque pas de sourire si mon hôtesse ou mon hôte de moins de quarante ans, sont dans un état total de ferveur et de dévotion pour "communier" avec les fidèles du rituel quotidien (6).

Guettons donc ces "1000 histoires" qui pourraient participer à désacraliser la petite chapelle, présenter quelques histoires cocasses ou inattendues, ou même nous offrir quelques clins d'œil d'auto-dérision qui ne pourraient pas faire de mal à une institution qui ronronne un peu trop sur le même ton, et qui manque cruellement de "Jeunesse"… (7)



(1) C'est Louis Bozon qui prendra la relève, Jeunesse décèdera en 2008,
(2) Initialement "Jeu des 100 000 francs" jusqu'au passage aux Nouveaux Francs en 1960,
(3) "La maison de la radio" de Nicolas Philibert,
(4) plutôt qu'il nous donne à voir des participants en pied, dont on n'avait nullement besoin, à l'écran, de voir les attitudes pour comprendre qu'ils réfléchissaient à leurs réponses… La subtilité de la suggestion aurait fait un bien énorme plutôt que d'enfoncer les portes ouvertes d'un didactisme scolaire bien lourd,
(5) Heureusement le soir on se rattrapait avec le "Hit parade" de Gérard Klein,
(6) Moins de quarante ans cela veut dire qu'ils ont été élevés au "bon grain" "d'apprendre en s'amusant", 
(7) Quelques concurrents célèbres : "un jeune garçon de 14 ans qui rêve de radio et qui donne son nom pour la première fois sur une antenne, Claude Villers" (in "Les années radio", Jean-François Remonté, L'arpenteur, 1989).

mardi 21 mai 2013

250 000…












Si je n'avais été pris d'un excès de zèle pour la science des chiffres, j'aurais pu quand même convertir en euros le nombre glacial du titre de ce billet, ne serait-ce que pour en atténuer les effets sur les lecteurs les plus sensibles de ce blog. Deux cent cinquante mille auditeurs (37 881 en euros) auraient ainsi déserté la radio, et ce annoncé comme tel, lors de la dernière vague Médiamétrie (1). Car, passée cette proclamation solennelle et définitive (jusqu'à la prochaine fois), s'en sont suivis des nuits blanches, des migraines, des "nervousse break-done" (sic)… à faire pâlir les tontons flingueurs eux-mêmes et Michel Audiard en particulier. De qui se moque t-on ? C'est quoi cet affolement bidon ? Que représentent 250 000 auditeurs sur un an quand la radio est écoutée chaque jour par 43 000 000 de personnes en France ?

Les gratte-papiers qui se sont aventurés à extrapoler sur ces chiffres avaient sans doute trouvé là un moyen de parler radio, sans pour autant s'y intéresser le reste de l'année. Récemment sur Twitter, il m'est arrivé de répondre à un twittos qui communiquait sur ce chiffre que, moi-même en mai, je constatais un léger fléchissement des visites sur mon blog, désaffection relative sans doute aux nombreux jours chômés qui permettent à chacun de vaquer à différents plaisirs de la vie, et de s'extraire temporairement de la lecture de blogs, de l'écoute radio, et autres pratiques addictives en vogue…

Les mêmes qui tentent d'épiloguer pourraient peut-être nous dire que, de temps en temps, eux-mêmes varient leurs habitudes et, que leurs propres addictions, même bien ancrées, ne résistent pas à une petite ballade au bord de l'eau, un clair de lune à Maubeuge, ou quelques jours de vacances au Kremlin-Bicêtre… Si, sur cette base tangible et relative, prenant leur calculette préférée ils tentaient quelques multiplications, ils s'expliqueraient peut-être ce qu'ils appellent, grandiloquents, un "phénomène". C'est quoi cette tyrannie qui voudrait que les chiffres augmentent dans un mouvement perpétuel ascendant et ne diminuent jamais ? C'est quoi cette absence totale de discernement ? Un usager de la radio peut-il de temps en temps s'offrir quelques plages de silence ou d'abstinence ? Et, une baisse aussi "marginale", outre le fait que ça puisse infléchir les tarifs de pub, en quoi cela concerne t-il le service public  ?

Résumons : Médiamétrie vend des chiffres, et quelques petits rigolos s'essayent à en tirer des conclusions "pseudo-chais pas quoi". Affligeant et ridicule. Prenez plutôt un bon moment à écouter ça !


 
(1) Sondage publié le 16 avril 2013,  situation entre le premier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013

lundi 20 mai 2013

La radio publique en mai 1968…












"En 1968, l’ORTF était en grève, télé et radio publiques muettes. Pour vivre en direct, minute par minute les événements du Printemps, les Français avaient donc l’oreille collée aux radios « périphériques », Europe 1 et la toute jeune et la toute jeune RTL. RTL, petite sœur de Radio Luxembourg." (1) Je me souviens très bien de tout ce que j'ai fait en mai 68, et particulièrement que je n'ai pas du tout écouté la radio. De fait, France Inter était en grève, silence radio, pas de ruban musical, et encore moins de play-list…

Pourtant le 20 mai, la radio parle aux français…


En ce mois de mai, les deux radios périphériques, RTL et Europe n°1 sont sur les barricades, à tel point que le préfet de police fera savoir à Jean-Pierre Farkas, directeur de l'info de RTL "Dites à votre ami Farkas de cesser de radioguider les manifestants, il nous complique la tâche.(2) En 2008, RTL a donc commémoré les "événements", en proposant un player avec onze sons d'archives (3). Europe 1, plus chiche propose 2'36" de sons d'archive du 10 mai. C'était bien la peine de se taper sur la poitrine et de crier "victoire" à l'information en continu (4).

Le 22 mai 1968, sur France Inter, "le programme de "musique ininterrompue" est interrompu" par un journal de 34'…

 
On pourra lire : "Mai 68, un entre deux dans l’histoire des médias et de la
radio en France", Jean-Jacques Cheval (GRER)

(1) Hervé Béroud, directeur de la rédaction de RTL, sur le site de la radio en avril 2008,
(2) in Acrimed
(3) Nous aurions aimé qu'RTL.fr ajoute une fonction export à son player !
(4) Rappelons que les archives d'Europe 1 sont en cours de numérisation et absolument inaccessibles…

dimanche 19 mai 2013

Là où finit la terre…

Île Molène






Il m'arrive de lancer une bouteille à la mer dans les archives de l'Ina, pour y trouver des choses… INAttendues. Hier, avant de mettre le cap sur La Manche, ma recherche était aussi vaste que la chanson de Charles Trenet… "La mer". Et vous ne serez pas surpris, parmi les différentes propositions, j'ai sélectionné l'archive "Là où finit la terre"… parce que ça me parle au cœur. Hors, il se trouve qu'il ya une dizaine de jours j'étais chez une amie fondue de radio, fondue d'archives, fondue de mer. Le document Ina (dont vous pouvez entendre un extrait ci-dessous) date de 1958. Je décide de tenter ma chance auprès de cette amie, aucazou !

Elle consulte dans son ordinateur, son index, régulièrement mis à jour, et trouve un enregistrement "Là où finit la terre", avec comme observation "achetée à la foire St Michel, Brest, 1973". (1) Elle file dans sa bibliothèque, trouve le petit boîtier plastique et me propose de venir illico.

Vous pouvez imaginer que l'écoute a été un moment tendu, avec l'inquiétude que la bande magnétique se déroule en dehors de son boîtier, que le son s'interrompe ou qu'il soit très altéré par la "vieillesse", voire inaudible. Les voix sont caractéristiques de l'époque, graves et solennelles. La lecture des dictons qui ouvre le documentaire "noircit le trait". "Qui voit Molène voit sa peine…"  On est dans le noir, la solitude et l'absence. Les veuves et les familles dans le deuil "permanent". Entendre un message de "Radio Conquet" et retrouver l'accent des femmes. La voix du narrateur, au ton de tragédie, pour évoquer les naufrages et autres échouages rituels des gens de mer ou de ceux de la côte. Les cimetières de bateaux. Et puis le mythe des îliens naufrageurs, le marquage des épaves rendues sur grève, les prières pour que "ça vienne de temps en temps", et le "don de Dieu" quand ça vient. 

Et le narrateur d'ajouter "et même leur radio n'est pas une radio comme les autres", (en référence à Radio Conquet), et en une jolie formule "le forum des îles c'est la café" (bistrot). 

J'étais avec eux à Molène, avec mes amis goémoniers ou dans le bistrot d'Erwan. J'étais un peu comme à la veillée quand Fine ou Job repassaient le passé. Ma bouteille à la mer n'avait pas mis longtemps à s'échouer sur la grève du Ledenez, l'ilôt de Molène aux vieilles baraques de goémoniers. Les ondes de 1958, elles aussi, avaient fini par "s'échouer" dans nos oreilles, comme la mer, la radio toujours recommencée.

(1) Comment, un tel documentaire de 1958 a pu lui aussi s'"échouer" sur une cassette audio, qui finira par être vendue par un enfant, dont elle se souvient qu'il n'avait pu, ni rien lui en dire, ni même lui avoir fait écouter… Elle même ne se souvenait plus du tout de son contenu.


 

samedi 18 mai 2013

Vous avez loupé (17)…

Un praxinoscope © Patrick Straumann













Voilà, pour ce samedi le retour du "Vous avez loupé" mélangé à un peu de florilège… Vous pourriez commencer par un tour de manège, ce mot a pour moi un pouvoir d'évocation extraordinaire. Pas tant pour l'attraction que pour la musique, ou pour le texte de Laura Alcoba. Il pourrait y avoir de l'enfance à courir dans le jardin du Luxembourg, à Paris, avec sa part de rire et sa part de mélancolie.

 
Mais pendant que la Cannes se métamorphose et se mue en cet immense Barnum avec hurleurs, équilibristes et autres clowns, il est quelques producteurs à France Musique qui savent dénicher sous le sable de la croisette "Les chansons du cinéma français". Thierry Jousse expert en "Cinéma song" nous donne à entendre quelques jolies choses qui ne tournent nulle part ailleurs. Montez sur le manège avec Anna Karina, Annie Girardot, Brigitte Bardot, Helena, Marie-France, Juliette Gréco, Nicole Croisille, Nico, et faites tourner la musique. Vous n'êtes pas prêts de redescendre… sur terre, si, avec Brasseur et Karina, vous reprenez en chœur  "La vie s'envole" (1).  

(1) Comme il serait bien là, l'hypothétique player de France Musique !

Ivre de vent et de légèreté, il ferait bon se poser dans une salle de cinéma rénovée. "Le Louxor", par exemple pour sa "gueule d'atmosphère" d'Égypte… mythifiée.



La radio filmée (2)
Comme quoi les archives de l'Ina () sont encore plus riches que la caverne d'Ali Baba. Je cherchais à vous proposer un son de Cannes, quand j'ai trouvé un "Masque et la plume"… filmé. Et filmé pour qui, pour FR3 !! Diantre, cela voudrait donc dire qu'en 1976 s'installait une certaine concurrence entre les deux médias, l'audio et le visuel. Quand donc ces "Masques" étaient-ils diffusés à la télévision ? Combien de temps l'affaire a t-elle duré ? Mes chers auditeurs, vos souvenirs m'intéressent.

Demain dimanche à 18h, une madeleine à la mer…

 

Et puis les Suisses sont moins stressés que les français, ils honorent le centenaire de la naissance de Charles Trenet le jour de sa naissance et pas dix jours avant… Clap à Benoit Duteurtre sur France Musique dans son "Étonnez-moi Benoît" du jour, et à Laurent Valero pour ses "Nuits noires de monde"…

vendredi 17 mai 2013

Passionnant…

Il est assez rare que je mette en tête de chacun de mes billets ou articles un player de réécoute et bien une fois n'est pas coutume… je vous propose de commencer par écouter.



Passionnant, pourquoi ? Hier je vous proposais de prendre la mesure de la Révolution avec Christophe Prochasson et Jean Lebrun, aujourd'hui la mesure de la crise avec Pierre Rosanvallon. Comme si, en cette période troublée et incertaine, en pré-chauffe (et pas qu'au Trocadéro), les élites (et la presse) étaient sur le qui vive… L'analyse de Rosanvallon est à écouter et puis à méditer cette pensée d'Yves Bonnefoy, qu'il cite, "Le rôle de la poésie c'est de rendre le monde plus présent". Poètes sortez du bois ! Sous les pavés la poésie.

Puisque j'évoque les pavés, le 15 mars 1968, Pierre Viansson-Ponté écrivait en une du Monde : "Quand la France s'ennuie", titre prémonitoire s'il en fût quand, sept jours plus tard, "l'étincelle de la "révolution de mai" s'est allumée" sur le campus de l'université de Nanterre. Viansson-Ponté concluait "On ne construit rien sans enthousiasme. Le vrai but de la politique n'est pas d'administrer le moins mal possible le bien commun, de réaliser quelques progrès ou au moins de ne pas les empêcher, d'exprimer en lois et décrets l'évolution inévitable. Au niveau le plus élevé, il est de conduire un peuple, de lui ouvrir des horizons, de susciter des élans, même s'il doit  y avoir un peu de bousculade, des réactions imprudentes."

Viansson-Ponté avait parfaitement senti l'état de la France. Rosanvallon aussi. Plus tard ce sont d'autres émissions d'histoire qui parleront de 2013.

Mais au titre de l'histoire se replonger dans l'histoire de Libération en dit long, à sa façon, sur l'état de la France depuis 40 ans.

 

jeudi 16 mai 2013

Flamboyant…









L'affaire se passe à une heure de grande écoute. Chaîne publique. Le producteur/animateur de l'émission est connu. Mais dès le début de son émission, qui commence par une archive, on sent une "tension" pour engager un sujet qu'il connaît et maîtrise. Son "intro" est carrée, pensée, pesée et… écrite. Ne s'agit pas là de "faire la danseuse" et de résumer goguenard une quatrième de couverture promotionnelle. 

Il fait, comme celui dont il sera question, "claquer" ses phrases jusqu'au moment de saluer son invité. Il savoure particulièrement de mettre ce dernier face à celui qui va faire l'objet de l'émission, particulièrement parce que son invité n'a ni la même analyse, ni le même parti-pris, ni même le même engagement politique. Du billard. Voilà la tension. Tenir son affaire. Ne pas déborder en conjectures futiles. Le sujet rien que le sujet. L'invité est connu dans son milieu. Il répond aux "injonctions" du producteur avec clarté, précision et discernement. Le producteur ne lâche rien. Il pousse loin son invité et attend qu'il s'engage, se dévoile et donne les clefs des différentes écoles de pensée. Les questions fusent sans le moindre temps mort. L'invité doit se situer, situer celui dont on parle et montrer que des approches différentes et complémentaires nourrissent la pensée.

L'émission sait évoquer des sujets "graves", solides, plus légers et même quelquefois carrément dérisoires. Enfin "dérisoires" dans le titre, le sujet mais jamais dans sa conduite, pour toujours en faire une émission de très bonne tenue. Du billard, vous dis-je ! Le producteur tient son sujet d'aujourd'hui avec poigne, ça s'entend jusque dans son ton, plus "sec" que d'habitude, ne voulant rien perdre des secondes qui passeraient pour "rien". L'invité joue le jeu, à la limite de la complicité, du sourire, voire même d'une certaine connivence. J'aurai tendance à dire "il connaît l'oiseau". Cette joute intellectuelle est, pour l'auditeur qui aime le sujet, un vrai moment de radio. Elle oblige à une concentration absolue pour une écoute très fine.

Si l'invité, citant celui dont il est question, dit "Une œuvre, c'est une question bien posée", s'appliquant alors à la radio, on élaguerait bien vite ceux qui s'évertuent chaque jour à poser les mauvaises questions… Et s'agissant de ce producteur on voit bien qu'il a sa place chez les bons "questionneurs". Le florilège des bonnes questions posées ce jour-là ont rendu l'émission passionnante.

Une archive passe. S'en suit une liste prestigieuse de personnalités qui ont œuvré aux mêmes causes que celui dont le profil est évoqué. En cascade ces noms renvoient à des cercles intellectuels à la thématique connue, qui en leurs temps se sont rangés derrière une option politique pleine d'espoir, en mettant leurs talents respectifs au service de la cause. On est captivé, on marche dans l'affaire, certains ont du faire leur miel, d'autres leur pelote. Et d'inviter (en archive) un homme politique de premier plan, un des rares aujourd'hui à avoir cette culture-là (1). Le reste de l'émission sera de la même veine, l'invité affirmant ses convictions, tout en justifiant une vraie reconnaissance pour celui qui ne partageait pas les mêmes analyses que lui. Une émission excellente et brillante. À collectionner !

Voilà, mes chers auditeurs, je n'en dirai pas plus. 

Demain, la "suite" qui fera pendant à ce billet aura pour titre "Passionnant"…

(1) Savoureux de constater que l'interview a été réalisé par un producteur aussi très féru de la spécialité évoquée, mais sur une autre chaîne du service public.

 

mercredi 15 mai 2013

Comme ça au passage…














Ce matin j'avais décidé d'écouter "en direct" l'invité de la matinale de France Culture, Pierre Lescure. (1) Lescure est toujours aussi captivant, précis, pédagogique et calme. À son affaire pour défendre le rapport "Acte II de l'exception culturelle" qu'il vient de remettre au Président de la République… Pas question d'en parler ici, vous (ré)écouterez ici ! Et une synthèse là.

Mais j'ai bien écouté Lescure, quand sans crier gare, il a cité une tribune sur le cinéma que Nicolas Philibert venait de signer dans Le Monde (2). J'y cours aussitôt. Le titre de la tribune est explicite "Ne laissons pas la loi du plus fort priver d'écrans le cinéma indépendant", et je partage, ô combien, les préoccupations de ces cinéastes qui doivent faire face aux pieuvres que sont les majors (3). Mais d'évoquer Philibert me rappelait que très récemment Cahuzac l'avait "tuer" (4). En effet, le 2 avril la matinale était consacré au séisme, au tsunami, à l'apocalypse que venait de déclencher, la veille, l'homme capable de "mentir les yeux dans les yeux". Làs ! Exit Nicolas Philibert qui devait venir parler de son film "La maison de la radio" qui sortait le lendemain sur "tous" les écrans de France.

Pourquoi pas ! On imagine les railleries si France Culture était passée à côté de l'affaire ! Ah bon et pourquoi ? La matinale aurait pu être divisée en deux parties, mais reconnaissons volontiers que Cahuzac et son chapelet de gros sous méritait le traitement habituel fait aux invités. Pour autant, même si Philibert a pu ce jour là écumer les rédactions (France Info, Le Mouv', France Inter) (5), on se demande pourquoi quelques jours plus tard le documentariste n'a pas été réinvité ?

Marc Voinchet, anchorman de la matinale, connaît bien le cinéma et se serait fait un plaisir de parler cinoche avec Philibert et j'aurai beaucoup aimé entendre ce dialogue, pour voir si Voinchet, dépassant "la promo France Culture", aurait posé les termes de la critique cinématographique. Est-il trop tard ? Que non ! Et quand bien même le réalisateur ne reviendrait pas, pourquoi ne pas inviter ceux pour qui le film a été fait, les auditeurs de radio.

Alors Marc Voinchet seriez-vous prêt à recevoir dans votre matinale, pour parler de "La Maison de la radio" trois auditeurs qui ont la particularité de bien connaître la radio ? Hervé Marchais anime le blog "Le Transistor", Étienne Noiseau "Syntone" et ma pomme, celui sur lequel vous lisez ce billet. Deux d'entre nous ont écrit sur le sujet (6). Mais je n'ai entendu nulle part sur les chaînes du service public, l'avis des auditeurs. J'en ai recueilli quelques-uns.

Vous pourriez même insister pour que Philibert soit présent. La contradiction ne pouvant pas lui faire du mal à entendre. Car à part Libération (7), la presse à crié au génie, au prétexte que les "images auraient sublimé les voix". Oumpfff. Ce n'est pas notre avis. Mais rassurez-vous nous n'évoquerons pas celles du couloir aux parapluies, du garage de la flotte de véhicules siglés Radio France, pas plus que le runing-gag, pesant, mettant en scène Marie-Claude Pinson. Non, on vous donnera quelques points de vue de spectateurs de cinéma, auditeurs attentifs de radio.

Alors Marc Voinchet, banco ? Une dernière chose vous avez reçu Pierre Lescure dans un studio de radio, pourquoi n'avoir rien dit de sa période radio à RTL, RMC ou Europe 1 ? Ç'aurait été raccord, non ? Lui, quand il parle de radio, il n'a pas oublié : "Souvent aussi je m'endors avec "Les nuits du bout du monde" de Stéphane Pizella, diffusées sur Inter Variétés…" (8)

(1) L'invité pas le reste.
(2) Daté 8 mai, par un collectif de Cinéastes, membres de l'Association du cinéma indépendant pour sa diffusion (ACID),
(3) "Prenons la semaine du 13 février. Sur les 5 600 écrans que compte l'Hexagone, 4 693 étaient monopolisés par dix films. Avec un tel taux d'occupation, pas étonnant que ces films se retrouvent en tête du box-office",
(4) Pour l'orthographe se reporter au billet de dimanche 11 mai 2013,
(5) Pas bégueule Le Mouv', pourtant absente du documentaire ! 
(6) Voir ici, et les trois billets qui se succèdent ici et ,
(7) Philibert a refusé de répondre à Slate,
(8) in "In the baba", Pierre Lescure, Grasset, 2012,