mardi 16 janvier 2018

Affaire Gallet : l'étau se resserre…














En 1984, Marguerite D. "sublime, forcément sublime" court jusque sur les bords de la Vologne (88) pour s’imprégner de l’affaire "Gregory Villemin". Plus modeste, ce lundi 15 janvier 2018, je file à Créteil où la Seine, elle, n’a pas daigné couler. Dans les différents transports en commun utilisés pour me rendre d’une banlieue à l’autre : Melun, Villeneuve Saint-Georges, Créteil Pompadour, j’ai un peu de mal à distinguer le caractère de chacune. Quant aux repères visuels pour me rendre au Tribunal de Grande Instance (TGI), à part les tours d’immeuble qui se ressemblent à quelques hauteurs près, il me plaît de héler le chaland qui passe pour trouver mon chemin.

Le bâtiment dans lequel je suis déjà venu m’est décrit comme très haut en forme de croix. De croix ? De Lorraine ? Cheminant entre quelques arbustes qui se demandent toujours ce qu’ils font là, maudissant l’urbaniste bétonneur qui en pleine euphorie des trente glorieuses les a saupoudrés par hasard, j'ai très vite peur de tourner en rond. Ce TGI qui ne ressemble pas à l’édifice de Colombey-les-deux-églises donne immédiatement envie de déjuger l’architecte qui a du hésiter entre la rigueur glaciale soviétique pré-Eltsine et l’emphase post-moderne d’une représentation rigide de la justice, froide et sentencieuse. Rez-de-chaussée recyclable opportunément en l’an 3000 en "Palais des glaces" ou en musée des désastres.

En ce lieu sordide, nous sommes quelques pèlerins venus écouter le délibéré concernant Mathieu Gallet, actuel Président de Radio France, pour une affaire de favoritisme quand il était Pdg de l’Ina. Le même qui, sur de son fait, a déclaré au Monde le 15 décembre dernier, "Mon mandat [à la tête de Radio France] court jusqu'en mai 2019 et je resterai pleinement investi jusque là" . Quelque assurance ! Quelle superbe ! Quelle morgue ! Dans l’éventualité d’une condamnation on peut compter sur le Président du CSA, Olivier Schrameck, pour continuer à mettre la tête dans le sable "le législateur n’ayant pas prévu ce cas de figure" (1).

On pouffe ! La mauvaise farce que joue Schrameck montre ce qu’est devenue la gestion (appelée aussi en langage technocrate gouvernance) des entreprises publiques, les carences de responsabilité de leurs dirigeants et de l'autorité censée les réguler. Mieux, que le dit-législateur n’ait pas prévu le cas de figure possible de condamnation des Pdg de l’audiovisuel public est visiblement une carence de l'État. Schrameck marche sur des œufs mais, tel l’ours pataud, finira bien par les écraser.

Nous voilà donc sur le banc du public attendant le verdict. Vers 13h50 il tombe "un an de prison avec sursis simple, 20 000 € d’amende, et 10 000 pour Anticor, partie civile." Verdict rendu en l’absence du prévenu qui, avec agilité (son mot préféré de l’année) a préféré aller voir ailleurs. Ce que je lis dans la presse dans les heures qui suivent m'atterre. Les journalistes constatent que le délai minima de l'appel, 12 mois, coïncidera avec l'époque du renouvellement du Pdg de Radio France où la poursuite du mandat de Mathieu Gallet si celui-ci était candidat à sa propre succession. Ben voyons !

Ce qui pourrait vouloir dire que dans le cas d'une condamnation il pourrait quand même être candidat ? Que big-bang établi il pourrait toujours être appelé à des responsabilités dans un nouvel audiovisuel public ? Mais pourquoi ne pas envisager que dans le cas d'une condamnation il ne pourrait plus exercer de fonctions dans l'audiovisuel public ? Pourquoi s'intéresser à sa succession quand le plus important concerne la poursuite de son mandat entaché d'une condamnation fut-elle renvoyée en appel ? Pourquoi ne pas s'intéresser à l'image de marque de Radio France affaiblie par une telle publicité ? Pourquoi ne pas interroger la dignité de l'homme qui vaille que vaille s'accroche à son poste sans analyser les conséquences désastreuses que cela peut avoir pour toute la Maison de la Radio et son personnel ? Pourquoi traiter ce jugement comme un épiphénomène dans une carrière qui pourrait vaciller ? 

Autant de questions que chaque citoyen est en droit de se poser et auxquelles le conseil d'administration de Radio France aujourd'hui et la plénière du CSA demain répondront peut-être. Et que fait ou que fera le Ministère de la Culture ? Sinon pas sûr que l'Élysée n'en profite pour trancher et y mette son grain de sel ou de poivre. C'est selon. "Superbe, forcément superbe"

Ajout de 10h15, 
Passés les enfilages de perles sur un 2ème mandat, le Monde révèle que pour la Ministre de la Culture "le maintien de Mathieu Gallet à la tête de Radio France n'est pas "acceptable""…

(1) Comme il l’a déclaré en décembre au micro de Nicolas Demorand dans la matinale de France Inter,

1 commentaire:

  1. Décidément beaucoup d'arrogance, peu de compétence dans ce monde de l'odieux visuel !…
    BlueMoon

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