mercredi 18 décembre 2013

Monsieur le Président…

 © Présidence de la République











Monsieur le Président [de la République], je vous fait une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps. Vendredi dernier, 13 décembre, pour le concert du cinquantenaire de la maison de la radio, Jean-Luc Hees, Pdg de Radio France a bien fait de dire, avant de vous laisser la parole, que Radio France était sensible à ce qu'un Président de la République l'honore de sa présence et de sa parole pour fêter son cinquantenaire. Je vous ai bien écouté Monsieur le Président, et au-delà de la description de la situation que vous avez faite de la radio publique, et de ses enjeux pour les années à venir, deux choses ont attiré mon attention.

Vos souvenirs personnels d'auditeurs rejoignent sûrement ceux de la plupart des auditeurs de la radio publique de votre génération. Vous avez cité des noms prestigieux et des émissions qui ne le sont pas moins (1), mais je pensais inévitablement aux autres noms et aux autres émissions des deux autres radios publiques d'origine - France Culture et France Musique - qui, elles aussi, ont participé à façonner la diversité de l'offre publique de radio et qui ont laissé des traces durables dans la mémoire collective des auditeurs. Même si vous n' étiez pas auditeur de ces chaînes, - qui pourrait vous le reprocher ? -, il eût été bon de les mettre aussi en avant. Vos habitudes d'écoute et de fidélité ressemblent beaucoup à celles des Français qui, quand ils ont fait le choix d'une chaîne ont beaucoup de mal à "aller écouter ailleurs". Si c'est bon pour la chaîne la plus écoutée (France Inter) c'est dommage pour le Groupe Radio France et pour la diversité de son offre. Vous-même devriez de temps en temps, en vos rares moments de loisir, tenter la découverte.


© Présidence de la République








Quant aux autres chaînes du Groupe il y a encore beaucoup de choses à faire pour inciter les auditeurs à aller plus souvent picorer hors de leurs propres sentiers battus. Peut-être conviendrait-il d'abandonner l'autopromotion d'une chaîne (sur sa propre chaîne) en la remplaçant par la promotion systématique de toutes les chaînes de Radio France ? Car, voyez-vous, quand on réécoutera votre discours dans cinquante ans, on ne pourra s'empêcher de constater que vous étiez un auditeur de France Inter et que vous êtes peut-être passé à côté de très bonnes choses sur les autres stations du Groupe.

Quand vous avez évoqué le chapitre des mutations, vous avez, à deux reprises, parlé de "Grand service public audiovisuel" en osant rapprocher la radio et la télévision publique. Vous avez du en estomaquer plus d'un dans la salle (2). Cette idée, évoquée sans avoir l'air d'y toucher, est surprenante, inattendue et certainement un tout peu peu déroutante pour ceux qui travaillent dans l'un ou l'autre de ces médias. Permettez-moi de croire que ce n'était pas une "idée en l'air", juste pour lancer une piste ou pour tester à chaud des réactions. Par contre à froid ça risque de donner ! Et l'on a pas fini de se souvenir de ce 17 décembre 2013 qui aura - peut-être ?- posé les jalons du mariage du siècle. Refaire l'ORTF (Office de Radio et Télévision Française) ce serait réinventer ce que Giscard (3), d'un coup de loi en 1974, avait fait voler en éclats. Vous réinventeriez l'eau chaude et, d'ici que la TV vienne filmer la radio en continu il n'y aurait qu'un pas que beaucoup, au titre de l'"évolution normale de la radio" (sic), aimeraient voir franchir sans état d'âme. Nous prendrons soin de regarder comment ce ballon-sonde que vous avez lancé évoluera dans le Paysage Audiovisuel Français. Ou il fera "Pschittt", ou il préfigurera les grandes manœuvres de l'audiovisuel public. Wait and see. Mais rappelez-vous, vous avez vous-même cité Orson Welles. Autant que pour le cinéma "L'avantage de la radio sur [la TV] , c'est qu'à la radio l'écran est plus large» 

(1) Jeunesse, Chancel, Artur, Bouteiller, Villers, Desproges, Vendroux, Foulquier,…
(2) Je crois que M. Pfimlin, Pdg de France Télévision était dans le studio 104,
(3) Président de la République, 1974-1981, qui verra l'ORTF éclater en 7 sociétés audiovisuelles distinctes,



On nous prend pour des pommes (ajout du 22 décembre 2013)
Pas du tout calculée la proposition de rapprocher "RF/FTV" annoncé en loucedé lors du discours du cinquantenaire ? Le lendemain Aurélie Filippetti en rajoutera une couche en imaginant le rapprochement des sites internet des deux institutions de l'audiovisuel public. Le président envoie le missile, la Ministre de la Culture les billes. On attend avec impatience l'avis du régulateur, M. Olivier Schrameck soi-même, président du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel.

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