mercredi 11 janvier 2023

Vœux de Radio France : un inventaire, des inventaires sans (aucune) invention !

C'est un exercice formel, un passage obligé impératif, une roucoulade désuète s'il en fut. Les vœux et particulièrement ceux de Radio France ont pris une tournure de communication optimum. En direction des salariés bien sûr. Mais surtout des tutelles (Finances, Culture) comme des concurrents et des alliés de l'audiovisuel public. Ce pourrait être un exercice de style exceptionnel, c'est tristement une litanie d'intentions, de formules/slogans et autres effets de manche. C'est à l'identique d'une mode à Radio France, présenter des émissions sous la forme - éculée - d'inventaires. Inventaires inaudibles à Prévert et sans la moindre poésie d'un raton-laveur. Autant dire d'un grand ennui.

@Tintinades (via Twitter)

Mardi 10 janvier 2023, Madame Sibyle Veil, Pédégère de Radio France s'est appliquée en une demi-heure à l'exercice. Reprise ici, par "petits morceaux" de ses propos (et pas forcément dans l'ordre). Mais rien sur l'enquête en cours sur le management de France Culture, pas plus sur la Tribune (lettre ouverte) des documentaristes, créatrices et créateurs sonores.

"On a bougé aussi vite que la société"
C'est un postulat. Ce sont des actes. Mais pourquoi la radio devrait-elle bouger aussi vite quand Veil ne manque jamais de dire qu'il faut du temps, de l'analyse, la confrontation des points de vue pour aider le public à comprendre les mouvements de société à l'œuvre? Comme la société bouge par saccades, par mimétisme, par urgence, par fatalisme, par dépit, pourquoi la radio publique devrait-elle être dans le même mouvement ? Contradiction flagrante !

• “L'élargissement radio vers l'audio”
La tarte à la crème des prochaines années qui verront la radio fondre comme neige au soleil. Et l'audio illuminer le monde entier (lire le monde francophone). D'après Veil la seule alternative à la diffusion massive des contenus passe par l'audio, au risque de mettre tous les œufs dans le même panier et de laisser tomber la diffusion hertzienne. Et patati et patata !

• “Devenir un média de conquête”
Bigre ! Conquérir dans le langage post-moderne, c'est passer devant l'autre, être toujours premier au risque de se désingulariser, de courir frénétiquement derrière les audiences Médiamétrie, de s'autocongratuler en permanence et surtout de donner des leçons de radiophonie quand on fait tout pour tuer cette même radiophonie (archaïque).

• Dans l'intervalle, Madame Veil met nommément en valeur un producteur de podcast qui, pas moins, serait exceptionnel. Je n'ai pas de mal à imaginer son malaise, particulièrement vis à vis de ses collègues productrices et producteurs qui ne déméritent pas mais qui elles et eux ne sont pas nommés !!!

• “La mue de Mouv'”
Là, de quoi s'esclaffer ! Le Mouv' c'est mue et remue, puis remue et mue pour prolonger ad vitam aeternam le fait du Prince (1997) en affichant des audiences minuscules, perdues dans la faune médiatique. Un luxe que les tutelles "acceptent" et sur lequel l'Arcom ne dit mot. Un état de fait, dans un triste état.

Mantra n°1 : “Radio France, un média qui rassemble” !
Ben voyons Léon ! Vous en connaissez beaucoup des médias dont l'objectif est de diviser ?

• “Une entreprise d'innovations"
Ah ça ! À partir du moment où l'objectif a été de développer "coûte que coûte" (donc d'y mettre de très importants moyens) le numérique, l'innovation a envahi l'ensemble de la production radiophonique, écartant progressivement au passage des savoirs-faire (réalisatrices-réalisateurs) et surtout en faisant table rase des modes de production en place au moins depuis l'inauguration de la Maison de la radio, en décembre 1963. Le site et la plateforme remplaçant à terme chaînes et programmes.

















“Un nouvel âge du numérique" (déjà ?)
"Il faut qu'on accepte de se laisser changer par le numérique !" une telle assertion sent vraiment l'impérialisme et la domination des techniques au détriment de l'humain. "L'écriture radio doit évoluer avec la modernité numérique…" Comme si un documentaire, un reportage, un débat n'avaient plus de raisons d'être dans la forme “traditionnelle” qui, a minima, a fait ses preuves ! Et pour les prix européens gagnés, reçu la reconnaissance absolue d'un art radiophonique.

“Revoir les équipes”
Veut clairement dire revoir toute la chaîne de fabrication et changer toutes les méthodes ! Même celles les plus éprouvées !

“Intra entreprenariat permanent”
C'est solliciter l'inventivité du personnel mais ce n'est pas pour autant une unité dédiée à la R&D et encore moins "Le service de la Recherche" de Pierre Schaeffer, période ORTF !

Mantra 2 : Radio France Hub de découverte de musique
"Radio France doit devenir un acteur majeur de la musique. Les studios moyens reconvertis en "studios de création" un (des) temple du son (dès 2025)". Pour illustrer la mise en valeur de la jeune scène musicale française, la musique diffusée en pré-indicatif des vœux : "Daddy cool" de Boney M. (1976) dont les premières paroles "She's crazy like a fool/Elle est complètement dingue". Vous avez dit jeune scène musicale ? La démonstration par l'exemple !

Projet "Retrouvailles"
D'ici sept 23, les derniers occupants de Mangin, du Tripod  (immeubles proches de la Maison de la radio) et des Algéco (sic), tout ou partie de plusieurs chaînes, rejoindront la Maison de la radio. Veil parle d'"unité de nos équipes" quand pour circuler d'un étage à l'autre, d'un lieu à l'autre il faut être badgé avec les "pass" correspondants. La belle circulation… circulaire, imaginée par Henry Bernard, l'architecte du bâtiment, est bridée depuis longtemps !

À ces vœux il manquait juste une incarnation. Mais ça, ça ne s'apprend pas à l'Ena !

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