Alors que votre cerveau continue à être disponible aux séries, aux podcasts et à la propagande gouvernementale et politique tous les matins dans les matinales de la radio publique, la Présidente Directrice générale de Radio France, Madame Sibyle Veil, vient de montrer définitivement, s'il en fallait encore la preuve, qu'elle porte un coup fatal à la radio, en ne faisant rien moins que de débaptiser une création centenaire (1921-2021), s'arrangeant avec la sémantique pour, sans l'ombre d'un doute, nous prendre tous pour des audios.
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Sibyle Veil, Capture d'écran, séance du Sénat, 7 décembre 22 |
Et d'un claquement de doigt annoncer au Sénat, ce 7 décembre, "On est en train de construire un poste de radio (1) du futur ou plus exactement un poste audio qui ne se définit plus pas son support mais par la nature de ses contenus" ! C'est clair non ? À tous les petits chats et autres bisounours patentés qui moquaient notre défaitisme ou notre lucidité, à tous ceux-là il va falloir une bonne dose de clairvoyance pour accepter l'inacceptable. En effet, comment accepter une mue que je documente sur ce blog depuis 2014, dès l'arrivée de Mathieu Gallet aux fonctions de Pdg de Radio France. Mue qui n'a eu de cesse, frontalement ou insidieusement de bouleverser les mécaniques de créations radiophoniques.
La transformation numérique, tarte à la crème (validée par les plus grands pâtissiers) permettant toutes les audaces, les renoncements, les subterfuges et autres carabistouilles managériales. Madame Veil fait beaucoup plus fort que Jeff Panacloc avec sa marionnette, elle parle Frisch (2) sans même avoir besoin d'imiter sa voix !
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Il y a quelques jours à Radio France, photo publiée sur le fil Twitter de Fabienne Sintes, journaliste à Radio France |
Radio… à terre… pour ne pas dire atterrée
Cette photo tombe à pic. Comme les lettres qui composaient l'ancienne enseigne de Radio France… - à terre -, pour cause de renouvellement en couleur de la marque Radio France ! Madame Veil s'est fait une spécialité en rebaptisant la Maison de la radio. Radio France a vécu vive Audio France. Il faudra aussi, une dernière fois, dans quelques semaines faire tomber, de la façade, radio, cinq lettres d'or qui ont permis tous les voyages et tous les rêves.
Cet audio (fourre-tout) était évoqué dans un Livre Blanc, publié en juin 2019 par Radio France et qui, déjà, détaillait par le menu la casse progressive de vieux modèles pour les remplacer par la modernité numérique audio. Le rouleau-compresseur, lent et efficace, de ce management radical a fait son office et à quelques jours de fin 2022 vient sacraliser la disparition à court terme des supports (les chaînes), (3), pour s'en tenir aux contenus (identifiés et identifiables, sans doute, par couleur de genres). Il n'existera plus qu'une seule source d'émission Radio Audio France. C'est ce que je démontre depuis longtemps et qu'un billet de début d'année synthétisait.
Cet audio tombe aussi à pic pour permettre à Madame Veil de pérorer devant l'Arcom le 19 décembre, tenter de convaincre les sages du bien fondé de son renouvellement en avril 2023 à la tête de Radio France. Toute la presse mainstream nationale, régionale a déjà donné le résultat de la consultation sans jamais évoquer les effets à court, moyen et long terme du passage en force de l'audio ! Pas plus les député-e-s et les sénateurs-trices qui n'interrogent jamais la Pédégère sur ce bouleversement qui n'est pas que sémantique.
Gageons que l'Arcom ne se contentera pas des formules, des incantations et autres mantras psalmodiés par Madame Veil qui malgré tout manquent autant de convictions que de charisme et même d'incarnation. À bon entendeur, salut !
Ajout du 9 décembre, 11h30
"Le patron de la BBC brise un tabou.
Tim Davie, le directeur général du
groupe audiovisuel britannique, a
indiqué qu’il se préparait à un futur
uniquement « online », sans les fréquences radio ou la télévision, au
cours de la prochaine décennie. in "La BBC se projette déjà dans un futur sans radio ni petit écran" , Marina Alcaraz, Les Échos, 9 décembre 2022.
(1) Madame Veil elle-même n'est pas capable d'assumer, ni d'incarner cette mue en utilisant encore le terme désuet de "poste de radio" en le convertissant aussitôt avec les mots "poste audio" désincarnés autant que l'objet poste lui-même qui finira par disparaître, tôt ou tard, du paysage !
(2) Directeur du numérique et de la Production à Radio France, autant dire le grand ordonnateur de la mue,
(3) Ce sera beaucoup plus facile de "dégraisser" le personnel qui finira par fondre comme neige au soleil
Je pense que ce changement de nom pose une question plus fondamentale de celle de la séparation de l'audiovisuel public français en plusieurs sociétés.
RépondreSupprimerS'il est vrai qu'on écoute plus la radio ni ne regardons la télévision de la même façon que la génération précédente, il n'en reste pas moins un problème majeur, celui d'un audiovisuel public suffisamment uni pour être fort et parler d'une seule voix en tenant compte de ses spécificités.
Pour ce qui est du nom de "Audio France", je n'y adhère pas et probablement que je ne m'y ferai jamais.