"La radio ? Une sorte de Télévision débarrassée
de son parasite image…"
Pierre Bouteiller © Ina |
Dans ces temps "reculés" des années soixante, il suffisait presque de "tenter sa chance" pour se la voir offrir sur... Europe n°1. Finir, en 1968, ex-aecquo avec Philippe Labro (4) et… devenir reporter pour la station ! De quoi donner des ailes à un jeune homme pressé. Mais le ton, pas du tout pressé lui, du jeune homme ne fera pas l'affaire des caciques d'Europe n°1 (5). Roland Dhordain le patron de la radio publique (à l'Office de Radio et Télévision Française/ORTF) le récupère illico et lui offre, sur un plateau, dès la rentrée 69, ce qui deviendra très vite le magazine de Pierre Bouteiller, au point que je ne me souviens absolument pas Bouteiller annoncer "Embouteillages", le titre initial de son émission quotidienne.
Depuis il suffit que dans un programme de Fip ou sur France Musique, Laurent Valero ou Thierry Jousse diffusent "Girl talk" de Neal Hefti pour que les frissons me gagnent et que j'attende, en vain, le "Bonjour" incomparable de Bouteiller. C'est comme ça ! D'avoir écouté des années durant le même indicatif ça impressionne la mémoire. Bouteiller lui, s'est installé au micro et a creusé son sillon. Celui du jazz, de la chanson "à textes" comme on disait à l'époque. Dans sa quotidienne d'Inter, un matin de janvier 1978, j'attrape au vol "Four Brothers" de Manhattan Transfer. Je cours aussi sec chez le disquaire jusqu'à "user" très longtemps les deux faces de ce 33t, inusable.
©Radio France - Roger Picard |
Le réécouter chez Kathleen Evin restera un moment sympathique et émouvant. Sûr de lui mais, sans ostentation ni vantardise, le producteur, le directeur de deux chaînes de Radio France (6) appuie, sans nostalgie, sur la touche "Rewind" et ne boude pas son plaisir. Il sait rendre hommage à Roland Dhordain, le "père" de la radio, de la France Inter, celui qui baptisa les trois chaînes de l'ORTF, Inter, Musique et Culture…
Un souvenir personnel avec Pierre. Pour son dixième anniversaire, Longueur d'Ondes (Brest), en décembre 2013 avait eu l'idée de refaire un "Jeu des 1000 francs". Présenté par Louis Bozon soi-même, opposant deux équipes : Dies Blau (Ina)-Emmanuel Laurentin (France Culture) et Pierre Bouteiller-Fañch Langoët ! Intimidant. Pierre a sauvé notre équipe en répondant "Ondes Martenot" à la question (que j'ai oubliée) de Bozon. Mais en intro de ce bon moment, Louis avait un peu donné le coup de pied de l'âne à Pierre, en le saluant par "C'est drôle de te voir là Pierre car à tes débuts de directeur tu avais interrompu cette émission…". Léger malaise bien vite débordé par le rythme métronomique du mythique métallophone à quatre lames (glockenspiel).
France Inter depuis hier soir 20h a reprogrammé plusieurs émissions de Pierre Bouteiller, dont sa dernière de 1999. Avec entre autres "Le cœur des vierges" - Evin, Motrot, Pancol - et quelques bons mots entre émotion, vénération et complicité d'équipe. La programmation spéciale s'est prolongée toute la nuit. Saluons la réactivité d'Inter et suggérons à la chaîne de nous proposer bientôt "Une Nuit Averty… en vaut trois"…
Les archives magnétiques de Marc Voinchet |
Avant d'être aujourd'hui directeur de France Musique, Marc Voinchet était un petit garçon de quatorze ans… Et déjà "The voice"… Pierre Bouteiller !
Le mot de TSF Jazz, la radio sur laquelle il a poursuivi l'aventure. Et celui de Daniel Mermet que Pierre Bouteiller avait installé… "Là-bas si j'y suis", en septembre 1989. Sur ma page Facebook Radio Fanch, vous pourrez lire l'origine du titre "Quoi qu'il en soit".
(À suivre…)
(1) Pierre Bouteiller est décédé samedi 10 mars à Paris,
(2) Du lundi au vendredi, et le dimanche soir aussi. 1955-1971,
(3) Robert Laffont, 2006.
(4) Journaliste et, directeur de RTL, auteur de chansons pour Johnny Hallyday et surtout reporter présent à Dallas, quelques heures après l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy, en novembre 1963. Pour la dernière, le 2 avril 1999, le même Labro passera "un coup de fil" à l'antenne pour saluer son pote Bouteiller.
5) Bouteiller fait entendre à Jean Gorini (directeur adjoint de l'info d'Europe n°1), en cabine de montage, le canular qu'il a préparé avec Henri Tisot (imitateur du Général de Gaulle) pour faire croire à une agence immobilière que l'ex-Président de la République, - De Gaulle a quitté le pouvoir en avril 69 -, veut s'acheter un pied-à-terre à Paris. Gorini fou de rage emmène Bouteiller chez Maurice Siegel (directeur de l'info de la chaîne) qui se séparera de son journaliste. Bernard Langlois (Fondateur de Politis, à l'époque journaliste sur la chaîne) a assisté à la scène et a écrit sur son bloc-notes "… dans la station qui a pourtant inventé, avec Francis Blanche, le canular téléphonique, se moquer de De Gaulle, en 1969, reste un tabou… Quand Bouteiller sortit du bureau, une page était tournée, et Europe 1 perdait un de ses meilleurs éléments !"
(6) J'ai diffusé cet extrait le 4 février 2017 au Festival Longueurs d'Ondes de Brest, pour le faire écouter à Aude Dassonville, journaliste à Télérama, dans le cadre de notre échange sur nos fonctions respectives de journaliste et de blogueur, face à la critique radio,
(7) France MusiqueS 1999-2004, France Inter 1989-1996.
• Plusieurs annonces radiophoniques, depuis hier, citent et attribuent à Pierre Bouteiller l'émission "Qu'il est doux de ne rien faire quand tout s'agite autour de vous". Le titre complet de l'émission est "Qu'il est doux de ne rien faire quand tout s'agite autour de vous, une anti-émission de France Inter présentée par personne."
Cette émission est apparue sur la grille de la chaîne à la rentrée d'octobre 68, grille "Roland Dhordain". Le "personne" qui est cité n'est autre que José Artur lui-même, dont la voix ne peut tromper personne. J'ai tweeté cette info +Wikipedia ce matin (11.03.2017). Pour leur demander que leur fiche "Pierre Bouteiller" soit mise à jour.
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