lundi 28 mars 2016

À Radio France le médiateur… compte pour du beurre

Bruno Denaes, médiateur de Radio france














L'instant M décrypte tous les jours, sur France Inter, les médias et, quand intervient vendredi dernier le médiateur, à mon tour de décrypter ce "moment de radio" bien particulier. Cette fonction de médiation à Radio France a été créée en 2002. Dans l'historique c'est le nom de Jérôme Bouvier, journaliste, qui apparaît pour la période de décembre 2009 à novembre 2014. C'est Patrick Pépin qui a occupé la fonction de 2005 à 2008, et Pascal Delannoy de 2008 à 2009.

C'est le journal Le Monde (1), qui a inauguré pour la presse, mais sûrement aussi pour les médias cette fonction de médiation. Pour Radio France je n'ai jamais compris l'objectif de cette fonction si ce n'est de faire "comme si" ou de faire accroire que le public, l'auditeur pourrait être "entendu". Je n'ai pas oublié les envolées lyriques d'Olivier Poivre d'Arvor ou de Sandrine Treiner (2) pour justifier intégralement toutes les situations de la chaîne et surtout ne jamais rien remettre en question.

On est très proche de l'effet "Canada dry" (3). Le médiateur à Radio France c'est surtout l'occasion, par de nombreux tours de pirouette, - sa présence régulière sur chacune des chaînes du groupe - d'évoquer les avis quelquefois très virulents des auditeurs (pubs, attentats,…), de les soumettre à l'antenne à ceux les mieux à même de s'expliquer, et dans le meilleur des cas, formuler des vœux pieux, ou constater des positions définitives qui laisseront souvent les auditeurs dubitatifs voire, désemparés.


Moi aussi je fais de la pub !














L'exercice de vendredi dernier en est une bonne illustration. Qu'on en juge ! Bruno Denaes, le médiateur avant de répondre au sujet des attentats précise l'évolution du dossier sur la pub à Radio France. Et là, on s'étrangle quand il dit que "les journaux et les programmes ne seront pas interrompus par la pub", alors que le 7/9 est absolument truffé de pubs au point que ses animateurs, dont Patrick Cohen, s'en sont plaints en moquant l'une ou l'autre des publicités intempestives. 

Puis, il lit la question de John sur les délais à l'antenne entre les attentats et leur annonce sur la chaîne. Denaes a choisi, pour y répondre, Jean-Marc Four, le directeur de la rédaction de France Inter. "En fait j'ai envie d'inverser la question de John !" annonce, tout de go, Four. Pratique journalistique bien connue. Un journaliste dont le métier est de poser des questions ne peut jamais lui-même accepter des questions sans être tenté de les reformuler, des fois, sans doute, qu'elles ne seraient pas assez journalistiques !


Et quand un auditeur se plaint des sons, et des ambiances des attentats diffusés à l'antenne Four commence par dire qu'il "ne le formulerait pas comme lui". C'est une manie ! Il faudrait bien expliquer au directeur de la rédaction que quand les auditeurs ont la "parole", ils peuvent s'exprimer à leur façon et non pas à la façon qui siérait le mieux à Jean-Marc Four. Pour chacune de ses interventions Four a justifié les pratiques de la rédaction sans jamais à aucun moment douter qu'elles puissent être remises en question. 

À  quoi sert donc le médiateur, qui n'opère aucune médiation puisque l'auditeur ne pourra jamais débattre et réagir à la parole d'un acteur ou d'un système qu'il aura légitimement interpellé, et surtout auditeur qui pourra constater que sa parole n'aura servi qu'à justifier une parodie de médiation ?





(1) "Le Monde a été le premier journal en France à se doter d’un médiateur, en 1994. Le médiateur y est chargé de favoriser le dialogue entre les lecteurs et la rédaction, tout en s’assurant que le journal est fidèle à ses règles. Il allie les fonctions de réceptionniste en chef du courrier, d’avocat et de juge de paix. Si elle n’engage que lui, sa chronique hebdomadaire suppose toutefois un minimum d’assentiment et de confiance, de la part des lecteurs comme de la rédaction" (in Robert Solé, Les cahiers du journalisme n°18, Printemps 2008,)

(2) ex-directeur (2009-2015) et actuelle directrice de France Culture,
(3) La boisson dont on pouvait croire que c'était du whisky !!!!

2 commentaires:

  1. Bonjour Fanch Langoët. En réponse à votre article à propos du médiateur, je suis toujours étonné de constater que, pour certains, si l'on n'est pas du même avis, on est alors qualifié de mauvais ou d'inutile... D'autant qu'à propos de la pub, vous êtes dans le faux quand vous laissez croire que les journaux et les émissions sont interrompus par la pub. Vous confondez avec RTL, RMC ou Europe1. Citez-moi un seul journal interrompu par la publicité sur une chaîne de Radio France. Idem pour les émissions: les quelques écrans pub sont situés entre des séquences et non en plein milieu, comme sur les chaines commerciales. Pour le reste, j'ai donné la parole à JM Four pour qu'il vienne répondre aux questions des auditeurs; ce qu'il a très bien fait. La médiation consiste bien souvent à venir expliquer les coulisses de la radio, ses contraintes et son fonctionnement, que les auditeurs ne connaissent pas forcément, ce qui entraine réactions et questions. Là encore, désolé si les réponses n’étaient pas les « bonnes » pour vous… Des réponses pourtant intéressantes sur la responsabilité des journalistes, la fiabilité des informations, etc. Un peu de tolérance pour les avis différents des vôtres. Cordialement et bonne écoute. Bruno DENAES.

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    1. Bonjour Monsieur Denaes,
      Pan sur mon bec, j’ai manqué de précision, vous avez raison, il n’y a pas d’interruption de journal, mais bcp plus subtil et habile c’est, entre autres, pendant le 7/9 d’Inter que la publicité est la plus prégnante. Mais c’est de fait la meilleure cible pour la vendre, et à l’oreille elle intervient dans un flux d’infos de 7heures à 9heures. Continuez surtout à ne pas entendre la plainte des auditeurs et la moquerie sympathique des journalistes qui se fatiguent d’MMA et autres poulets du Gers.

      Puisque vous aimez la dialectique, vous avez raison de vous reconnaître la qualité d’avoir invité en la personne de Jean-Marc Four, le professionnel le plus à même de répondre. mais il y a deux choses que vous ne dites pas :
      - Four reformule les questions que vous avez sélectionnées, de quel droit ? Comme ça l’arrange ? Parce qu’il croit avec certitude et suffisance qu’il sait poser les questions auxquelles il saura répondre ! Risible ! Notez bien que je parle de son attitude face aux questions, pas de ses réponses ! Donc vos remarques sur ma tolérance tombent à plat !
      - Citez-moi, depuis que le médiateur existe, à combien d’auditeurs il a été donné la PAROLE en vis à vis de ceux à qui vous et vos prédécesseurs l’avez donnée ? Dites-nous donc ce que vous pensez d’une « médiation » qui ne donne pas l’égalité de traitement entre ceux qui disposent d’une tribune et ceux qui n’en disposent pas.

      Votre discours est archi rodé, il est conforme à ce que toutes les directions de Radio France ont voulu : une parodie de médiation. Pour preuve l’absence récurrente de ceux qui interpellent.

      Ce blog prouve, s’il en était, mon écoute aigüe de la radio, jusque dans ses moindres détails. Et je suis persuadé que peu importe la qualité de ceux que vous invitez à répondre, l’absence d’équité est absolument préjudiciable à la fonction de médiation, particulièrement quand ceux qui parlent s’attachent, neuf fois sur dix, à se justifier ou à justifier les propos et/ou les façons des journalistes et/ou animateurs de la chaîne.

      Cordialement

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