mercredi 13 avril 2016

Denis décode… moi non plus



















Pour ceux qui auraient la flemme de lire



Hey Fañch, faudrait savoir, tu nous dis souvent que ne tu regardes pas la TV, et là on a vraiment l'impression que tu vas en parler. C'est vrai. Je ne regarde surtout pas la télé en tant que bloc monolithique et addictionnel. Je regarde les émissions média grâce à Séverine, jeune auditrice qui écoute France Info et Mouv’, faisant, chaque matin, un grand écart entre ses oreilles affûtées. Je m'intéresse aux médias depuis que mes bons maitres de l’éducation populaire m’ont appris à décoder. 

Décoder, en ces temps pas si lointains, où il en fallait du décodage, si l'on ne voulait pas risquer, en lisant l’"Aurore" ou "Jours de France" devenir, à 20 ans, réactionnaire ou pire encore… réac. Pareil si, entre les lignes de "Rouge" (sous la plume de Krasny/Plenel), de l’"Huma" (Claude Cabannes) ou du "Matin de Paris" (Max Gallo), la tentation était grande d'"épouser" Jaurès, Mao ou Jean-Paul Sartre (1) ! Mais j'avais bien compris que commencer par "Pilote" (2) serait la meilleure façon pour ne pas s'en laisser conter ! Ce que je fis et m'en fus, ô combien réjoui, chaque semaine, le jeudi.

Au titre de la décode, ça fait des années que je m'interroge sur cette faculté exceptionnelle de la télévision (française) à :
1) ne jamais vouloir mourir et, d'élever ses animateurs/animatrices au rang d'icônes ou au rang de saints/saintes, quand ils ont fini par mourir ou par disparaître dans les tréfonds de l'oubli,
2) être dans une auto-congratulation, auto-analyse, auto-satisfaction permanente au point de produire le feuilleton inoxydable de ses propres aventures télévisuelles.



Le mercato "tv et radio" inventé il y a moins de 20 ans, faisait frétiller toutes les rédactions médias du monde… média. Quelques semaines avant que l'été ne vienne recouvrir d'une vague bleue, des saisons "d'hiver" qu'il était temps de noyer. Et ce, pour découvrir, quels pitres allaient enflammer le paf, le pif et le pof ou le flop de "la nouvelle saison" à venir. Avec un tel timing, frappé du sceau du futur immédiat, voilà de quoi faire durer toute l'année glose, buzz et autres rumeurs trashées.

Mais "tout ça c'était avant le drame". En mars 2014, Christopher Baldelli, patron de RTL, eut la riche et maligne idée d'annoncer le remplacement de la Grosse Tête Bouvard par la non moins grosse, mais plus jeune, Grosse Tête Ruquier. Et là, l'aréopage médiatique de s'en donner à cœur joie "comment ?" "si tôt ?" "pourquoi ? " "mais alors ?" "est-ce possible ?" "M'enfin ?" "est-ce un signe ?". Et tutti, quanti et patati et patata !

Pourtant, une mécanique bien rodée est à l'œuvre depuis plusieurs années. Une émission TV commence le 1er septembre, le 2 elle est disséquée, adulée, jetée, vouée (aux gémonies et ailleurs). Le 10, on s'interroge "durera t-elle toute l'année ?". Le 30 c'est plié, ça roule et "vogue la galère", jusqu'au début du prochain été. Sauf si Finkielkraut, Onfray, Houellebecq, Angot, Valls, Taubira, où Jérémy Ferrari viennent interroger le Gotha, que dis-je la crème de la critique, avec une question (ou deux, ou trois) existentielle(s) et définitive(s) "L'émission sera t-elle encore programmée à la rentrée ?", "L'animateur s'interroge", "Les chroniqueurs se tâtent", "La ménagère a encore 50 ans (devant elle)"…



Depuis fin août 2015, la machine s'emballe, de la CPI (Chaîne publique d'info), à QuePUC-Questions pour un champion (Lepers voulait en remettre une couche), à "Envoyé spécial" vouée au ball-trappe (sic), au "Grand Journal" hagard, aux "Guignols" moribonds, et "Ron et ron petit patapon". Là, on convoque les dieux, les oracles, les prêtres en tout genre et les prêtresses cathodiques pour décrypter ou décoder. Mais, jusqu'à preuve du contraire, y'en a qu'un qui décode et qui décode à fond c'est Denis. Chaque semaine "Denis décode", juste et clair, dans "Médias Le Mag" sur France 5 (3).

Y'a donc Denis et pis y'a Bruno ! Donnet, le chroniqueur qui, dans "L'instant M" (4) a "L'après coup" pertinent, percutant et juste. Et magie de la voix, ces deux chroniqueurs n'apparaissent pas à l'image (sauf si vous regardez Donnet en vidéo la radio). Où l'on découvre alors que la voix à la TV (si c'est pas du off) ça peut être beaucoup plus fort qu'une tronche. Même, si c'est celle de premier de la classe, comme aurait "persifflé" Coluche. Mais qui le sait ? Sans doute les producteurs de "Médias Le Mag" et son présentateur, Thomas Hughes, qui viennent d'apprendre que leur émission, last but not least, après 5 ans de bonnes audiences, rejoindra la grande trappe, et le bal du même nom.

Michel Field (5), grand pourfendeur des programmes de la télévision publique, vient de s'assurer, d'autant, la une de tous les journaux TV, de toutes les émissions média, et même des chroniques pipole de l'Èlysée. Cette logorrhée n'existe que pour la TV car, dans ce média, il semble bien que les émissions aient beaucoup de mal à finir/mourir (6). Surtout quand chacun a, "for ever", et depuis 1000 ans, en ligne de mire, en haut des Champs Élysées, la statue du commandeur, Michel Drucker qui, riant sous cape rajeunit à vue d’œil.


La loco du "petit train interlude de l'ORTF"
repris par Donnet pour Média Le Mag















Les émissions médias devraient aussi se décoder. Monter dans le petit train de l’excellentissime Bruno Donnet ou prendre quelques cours à l’auto-décode avec Denis (la malice). Car, convoquer partout, et à flux tendu, la mère supérieure Barma, aux innombrables enfants médiatiques, ou appeler d'urgence Dana (Hastier) (7), ça décode à peu près autant qu'un cautère sur une jambe de bois peut guérir une plaie béante. Et oui, Machin s'en va et la terre s'écroule, un volcan se réveille, la caravane passe et le chien aboie !

Il faudrait recréer "Tournez Manège". Pas l’émission gnangnan des années cul-cul de la TV française. Non, un "Tournez Manègedes médias, (sans oublier bien sûr la queue du Mickey), que la TV sait si bien manager de main de maître. Avec ceux qui passent leur temps à s’inviter dans les émissions médias pour parler des médias et, d'eux-mêmes, médiatiquement médiatiques. Ce "tourne en boucle" permanent, permettant inlassablement d'entretenir la très grande comédie du média business de "la société du spectacle" (8). 



Alors, si jamais une reconstitution de ligue dissoute s'opère et que l'ORTF, - immolée sur l'autel de la création par Giscard-à-la-barre -, renaît de ses cendres, il faudra créer une chaîne "Tout, tout Médias". Une chaine en continu bien sûr. Qui aurait enfin réussi ce pari le plus fou, auxquels même ses inventeurs n'auraient pu penser : 


"La télé se regarde dans la TV, en couleur et en 3D"

Juste, toutefois, avant qu'elle n'implose ! 

(1) Pour Libé, il faudra attendre 1973, 
(2) Le journal hebdomadaire créé par Goscinny, 
(3) Le dimanche à 12h35,
(4) France Inter, tous les lundis et dans "Médias le Mag" aussi, 

(5) Directeur de l'information de France TV, 
(6) Ce ne sont pas du tout les quelques échos que les mêmes accordent aux "fins de contrat" à la radio qui pourraient rivaliser avec la surabondance pour ce qui concerne la TV,
(7) Directrice des programmes de France 3, 
(8) Guy Debord,

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