vendredi 15 mars 2013

Leroy/Manchematin…




Si je commence ce billet en lui donnant un titre qui associe le grand leader communiste et un producteur de Radio France, c'est parce qu'un concours de circonstance m'a donné envie de réécouter attentivement cette série. En effet, en commentaire de mon billet du 23 juin 2012, Jakki nous incitait à écouter les "À voix nue"  ci-dessous. Venant juste d'écouter la dernière production de Manchematin, "Le cul entre deux chaises", j'ai eu envie de retrouver ses "partis pris" . 

C'est le moment de dire que s'il existait Radio France Archives, nous serions nombreux à rebondir d'un documentaire à un autre, d'un reportage à un autre pour nourrir notre soif d'imaginaire et de culture. Laissons grand ouvert cette parenthèse…

Roland Leroy, au bénéfice de l'âge et de l'expérience, fait preuve dès son premier entretien d'une grande humanité, sans vouloir faire un jeu de mot facile. Humanité pour l'histoire de sa famille, de sa classe ouvrière, et de l'histoire en train de se faire, qu'il a vécu en résistant et en militant communiste. Ses anecdotes sont sensibles et souvent humbles. L'une d'elles évoque sa blessure profonde d'enfant pauvre, humilié par un commerçant cupide, une autre, le début de sa carrière à la SNCF avec Pierre Bérégovoy, ouvrier comme lui.

Il porte un regard lucide, critique et auto-critique sur le communisme international et sur le sien en particulier, avec chevillé au corps et au cœur un idéal dont il ne s'est jamais départi ! Leroy accepte de se mettre "à nu" et pas qu'à voix nue. Il éclaire alors les ombres tragiques de l'international communiste et par effet simultané celles du communisme français. Reconnaît que les communistes français, au cours de leur 14ème Congrès, dirigé par Maurice Thorez, "passent à côté, avec tranquilité, regrets et tristesse, de la signification des révélations du rapport Kroutchev (1956), en en négligeant la portée…".

Même 50 ans après, c'est important d'entendre ça ! Manchematin avec ses questions précises et franches, sans jamais tourner autour du pot, veut éclairer l'histoire et Leroy joue le jeu, ayant peut-être aussi l'occasion, de se "libérer" oralement du poids de ses dilemmes. Il n'échappe pas à la question cruciale de la non-déstalinisation du parti communiste français que Thorez n'a pas voulu mettre en œuvre, alors que le "stalinisme était une négation du communisme" reconnaît Roland Leroy, pour ajouter "même si ça n'a pas tué le communisme, ça l'a blessé gravement et les dommages se sont prolongés…"

Cette série d'"À voix nue" est passionnante pour qui aime l'histoire récente et celle d'un parti politique qui a rassemblé tant de français, pour aujourd'hui ne pratiquement plus exister auprès des classes populaires. Roland Leroy est touchant de sincérité en révélant son étouffement "de ne pas s'autoriser à penser ce qu'il pensait". Est-il besoin d'en écrire plus ? Je ne crois pas. Il vous faut écouter cette série en continu. Elle bouleverse quelques certitudes, "évidences" et autres vérités qui, enfin, sont bonnes à dire, et à entendre.






 Le cinquième épisode n'est disponible qu'ici.

7 commentaires:

  1. Helmut von Reblochon15 mars 2013 à 13:20

    Après Lenoir, Leroy ! Il n'y aurait pas un Leprince ou un Leblanc qui rôde pour prendre la relève ?

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    1. Bien vu ! J'avais déjà fait Lebrun, Lechat (de Créteil),.. Le Rouge ne saurait tarder...

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  2. Tant qu'il n'y a pas Leclerc de Landerneau !!

    Ti'coq'li'cot

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  3. J'aimerais que mes commentaires s'en tiennent au sujet du billet mais puisque Ti'coq'li'cot commence la bagarre avec le sire de Landerneau j'enchaîne en hors-sujet.
    Curieux de savoir ce qui se passe dans le Landerneau (le vrai pas le parisien) je fais une enquête via gougoule et je découvre avec stupeur qu'il existe un prix Littéraire Landerneau 2013.....
je sais que depuis des années M-E-L sponsorise le festival "Etonnants Voyageurs" de Saint-Malo (gloire à Michel Le Bris pape de la littérature du monde) mais un prix littéraire à Landerneau je jure - pftuuu juré-craché - que je ne le savais pas. 

    Et ce que j'ignorais - tandis que voyageurs des ondes insouciant je bouclais mes bagages pour me rendre à La Mecque, pardon à Brest pour Longueurs d'Ondes - c'est que Laure Adler en ce 6 février 2013 présidait en personne ce prestigieux jury! Grâce lui soit rendue, pas un seul "petit éditeur" n'a émergé dans cette sélection d'ouvrages et les "majors" de l'Edition Française ont brillamment posé un orteil sur le podium des lauréats putatifs. Il faut bien dire que ce prix étant une émanation des "Espaces Culturels" du même nom que M-E-L, on ne risquait pas d'y trouver un vilain petit canard de l'Edition Française égaré dans les rayons de ces espaces culturels dignes de l'Epicier de province (je ne parle pas d'Olivier Rollinger)....Faites mon Dieu (ne vous y trompez pas je parle à José Corti) que ces épiceries "culturelles" lui soient comptées comme autant de péchés mortels et d'atteintes aux bonnes moeurs littéraires! Merci mon Dieu....
    
PS: Fañch, tu n'es pas obligé de publier ce billet d'humeur mais ça m'a soulagé de l'écrire.....

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    1. Je partage tellement ton point de vue que le publier est de salut public. Puisque les choses (traou, en breton) de Landerne te sont loin, sache qu'au décès de l'épicier certain ont évoqué son passé obscur. Voilà pourquoi ma ritournelle n'était pas qu'un bon mot ! Je n'entre ni dans les épiceries du moine abbé de la conso (voir le reportage de Desgraupes dans 5 colonnes à la Une), ni dans ses bazars cultureux-fumeux.

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  4. Document extrêmement intéressant !
    Il est absolument évident que Roland Leroy aurait dû être Secrétaire Général à la place de Georges Marchais qui n'avait pas la finesse, la stature, le brio et la culture d'un Roland Leroy.
    D'aune certaine façon Roland avait TROP de qualités pour devenir Secrétaire Général ... Ainsi va l'histoire et le PCF l'a payé cher, très cher !!!

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