jeudi 21 juin 2012

Qu'il est doux de ne rien faire quand tout s'agite autour de vous…





Vous l'aurez sûrement entendu juste avant l'interminable "feuilleton" des Présidentielles, les médias sont sortis du "tout politique" et ont fait diversion avec Cannes (un avant-goût de vacances pour les accrédités), dont il fallait supputer le lauréat dès le 2ème jour. À peine fini le pince-fesses pipole, nous voilà transportés à Roland-Garros où il fallait donner vainqueur féminin et masculin dès le troisième jour. À peine fini ce suspens intenable, nous voilà transportés à l'est pour pronostiquer comment les bleus feraient pour ne pas finir verts (de rage) ou rouges (de honte). Et dans les interstices laissés par la tyrannie permanente des "événements", pointent des infos essentielles de Père et Mère Cato, voire même des infographies pour illustrer les mouvements de professionnels des médias qui, avant la récré de l'été, jouent dans la cour aux chaises musicales… Tragique.

En 1968, à la rentrée radio (1), Roland Dhordain, réinvente totalement "sa" chaîne France Inter et demande à José Artur, non seulement de continuer le "Pop Club" mais aussi d'animer en fin de journée (2) "Qu'il est doux de ne rien faire quand tout s'agite autour de vous, une anti-émission de France Inter présentée par personne…". Un titre magique où tout est là ! L'espièglerie d'Artur, son sens de l'actu (68 brûlait encore il y a quatre mois), de l'humour et d'une certaine dérision. Artur savait être à la marge tout en étant dedans, décalé tout en étant dans le rang. Et, même si cette émission-là ne passait sûrement pas à côté de ses marottes (3), Artur avait la grâce et la fantaisie de surprendre ! À la radio j'aimerais plus souvent avoir de ces surprises-là !

C'est pour ça que je saute en Combrailles, que je m'émeus À fleurs de peaux, que je taquine chaque jour les mots-sons, que je revisite Paranthoën, que je guette quelques Nuits rêvées ou quelques À voix nue de légende, que Radio roots me transporte et que je cherche quelques heures disponibles pour lire France Culture Papier. Pour surtout sortir de la nasse infernale de l'actu (toutes les mêmes), de l'événement sportif et culturel (tous les mêmes), de la parlotte érigée en "système radio", des médias qui parlent des médias jusqu'à la nausée…

La radio peut encore nous étonner et nous faire sortir des sentiers battus… Nous sommes quelques uns à la promouvoir quand d'autres l'enferment dans des systèmes étouffants et factices. À bon entendeur, salut !

(1) Qui pour la radio publique à lieu début octobre,
(2) 18h15 ou 18h30-19h,
(3) Je l'entends encore annoncer son émission mais j'en ai totalement oublié la teneur,

10 commentaires:

  1. Bonjour Fanch agacé-mais-toujours-en-quête-de-bonnes-émissions,

    La tyrannie de l'événement est indiscutable depuis plusieurs années. Outre l'art, seule la radio avait le front d'y résister.
    Elle n'est pourtant pas dans les gènes de la radio, si l'on en juge par le nombre de poètes qui se sont essayés à ce média (Tardieu, Bérimont, etc.)

    Prochain événement à supporter : les JO avec son chapelet matinal et radio-diffusé de "chances de médailles françaises". Bon courage...

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    1. Bonjour et merci Henri de supporter ma "mauvaise humeur", mais bon trop c'est trop ! Guettons fin juin sur le site de la Scam l'écoute de la nuit du 19 juin… Bonne fin de semaine à vous !

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  2. Bigre, je constate, une nouvelle fois, que mes goûts rejoignent ceux de fanch: ah l'immense José Artur, il manque: moi, je suis devenu un "fondu" de radio (que j'écoute presque 24/24) grâce à la découverte de José Artur et Daniel Mermet (à une époque où ce dernier m'apparaissait plus "écoutable") en 1991, sans oublier l'autre immense d'Inter, Jean-Charles Aschero: Fanch, j'imagine aussi que vous avez une statue d'Aschero dans votre jardin? Bigre la nostalgie...
    Gouzon

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    1. Bonjour Gouzon, j'espère que vous avez écouté la "Mythologie de poche de la radio de José Artur enregistrée au Quartz de Brest en décembre 2010. Vous trouverez mon billet sur le sujet en tapant "José Artur" dans la recherche.
      Quant à Aschero, sans doute une question d'heure, je n'en ai aucun souvenir sonore ! Bigre, je vais rechercher dans ma radiothèque ! Mais parlez-nous en ici Gouzon !

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    2. Hello Fanch, oui, oui, j'ai écouté et podcasté (pour conservation dans un abri atomique) cette émission: il n'a rien perdu de sa causticité ni de sa verve le José...
      Mais que lis-je? Aschero ne vous dit rien? Arghhh. Je ne pense pas toutefois - sans vous blesser - que vous soyez si jeune au point de n'avoir pas pu entendre Monsieur Jean-Charles sur Inter.
      Quand je l'ai découvert (début des années 90), il officiait le dimanche soir (grosso modo il a été "remplacé" par Brigitte Kernel), à partir de 23h jusqu'à 1 ou 2 heure du matin et mélangeait reportages in situ (souvent dans la rue) avec entretien en studio.
      D'abord sa voix m'a capté (comme celles d'Artur, de Mermet): il fait partie de cette génération de journalistes (voire d'animateurs également) qui avaient la radio dans le sang et donc la VOIX: grand reproche que je formule aujourd'hui à la plupart des journalistes et animateurs qui occupent les ondes de RF (et même des "périphériques"), c'est que beaucoup n'ont pas la voix DE/POUR la radio en plus de ne pas avoir appris la DICTION/le TON radio: c'est un métier aussi.
      Aschero, comme Artur, Villers et même Christian Barbier (autre de mes idoles radio), avait la voix qui dominait, pesait, maîtrisait le micro, le studio, les ondes et captait donc les oreilles: du poison divin! Son émission le conduisait à s'intéresser beaucoup aux marges (de la société) mais aussi du journalisme, il allait donc là où ses "confrères" n'allaient plus (inutile de dire que son périmètre s'accroissait d'année en année) et traitait ses objets, ses sujets d'émissions avec un regard perçant d'anthropologue/entomologiste pertinent, juste, entre empathie raisonnée et distance salvatrice. Alors bien évidemment, il ne correspondait plus, comme les illustres de l'époque, aux diktats de ces nouveaux (mauvais) managers qui ont colonisé RF à partir des années 90: trop indépendant, trop intelligent, trop professionnel peut-être.
      Et je me souviens d'avoir eu le bonheur de le croiser un dimanche soir, lors de son émission en direct, car je faisais alors partie du jury du Livre Inter (j'avais donc passé la nuit dans RF/France Inter pour voir de l'intérieur et y rencontrer certains "dinosaures" dont Aschero): l'homme était accessible évidemment, simple, pas la grosse tête, acceptant de discuter le bout de gras avec un jeune inconnu en pleine nuit dans un couloir d'Inter alors qu'il devait avoir envie d'aller "mettre le jambon dans le torchon"... Magique.
      Aïe, la nostalgie revient à cause de vous fanch... Ah si le numérique avait été inventé il y a bien longtemps, nous pourrions réécouter ces trésors pour éviter d'entendre du très mauvais aujourd'hui...
      D'autres l'ont-ils connu?
      Gouzon

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    3. Pour faire ma "star" je dirai que vous saurez mon âge en écoutant la "Mythologie de poche d'un auditeur" (25 août 2011) dont vous trouverez le lien ci-contre, en bas de la colonne de droite sous le titre "un mistigri à la radio".
      Magnifique : la radio dans le sang et donc dans la VOIX ! Waouhh, j'ai écrit sur le sujet mais pas avec un si beau postulat ! J'ai aussi écrit que les directeurs de chaîne appelaient au micro des hommes et des femmes pour leur "surface médiatique" et se fichaient du tiers comme du quart de savoir ou d'apprécier s'ils avaient une voix ! La palme revenant à Colombe Schneck dont Inter à du lui payer des cours d'orthophonie… pour essayer d'atténuer la catastrophe industrielle ! Il y a comme ça bien d'autre erreurs de casting. Cela participe de la défaite de la radio.

      Merci pour votre très belle évocation d'Aschero qui va me faire regretter de n'avoir "jamais écouté". Pour savoir s'il reste des traces de cette voix de radio nous allons mettre sur le coup Hervé Hist (audioblog "Atlantic") et je vais compulser mes grimoires.

      Bonne fin de semaine, chers contributeurs. Ce sujet a fait réagir et tant mieux !

      Si vous le voulez Gouzon envoyez-moi un mail à mon adresse privée indiquée sur le blog, j'aimerais échanger avec vous sur un sujet radio.

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  3. "J'ai aussi écrit que les directeurs de chaîne appelaient au micro des hommes et des femmes pour leur "surface médiatique" et se fichaient du tiers comme du quart de savoir ou d'apprécier s'ils avaient une voix ! La palme revenant à Colombe Schneck dont Inter à du lui payer des cours d'orthophonie… pour essayer d'atténuer la catastrophe industrielle ! Il y a comme ça bien d'autre erreurs de casting. Cela participe de la défaite de la radio."

    J'aurais pu écrire exactement la même chose: très vrai. Quant à s'en prendre à cette pauvre CS, je souscris: les raisons de sa promotion restent toujours aussi peu claires pour moi: en avez-vous ?
    Bon week-end radiophonique,
    Gouzon
    PS: je vais réécouter cette Mythologie de poche: c'est d'ailleurs via cette émission que j'ai découvert votre blog... Merci à T.Baumgartner qui a réussi magistralement cette série d'émissions, les Mythologies; peut-être aurons-nous droit à d'autres épisodes cet été: avez-vous des infos à ce sujet?

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    1. "Les Mythologies de poche de la radio" font une très belle collection de 60 épisodes. Pas prévu de nouveaux épisodes pour l'été, entre autre puisque T. Baumgartner commence une nouvelle émission hebdomadaire le samedi sur Inter à 9h à partir du 30 juin.

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  4. Je n'aimais pas Colombe Schneck à FI, je suis heureuse de lire que je n'étais pas la seule.
    Bonjour à vous,
    Me remémorant régulièrement, et encore la semaine dernière la phrase "Qu'il est doux de ne rien faire quant tout s'agite autour de vous", et désespérée de ne pas me souvenir qui animait cette émission, je suis arrivée sur cette page suite à ma recherche sur Internet (que cette fois, je bénis).
    Je suis heureuse également de lire que d'autres que moi sont émus au souvenir de Claude Villers (ah, les trains !!! Ah le Tribunal des Flagrants Délires), de Daniel Mermet (je viens de trouver une page qui parle de sa "résistance", je vais aller sur la-bas.org pour voir).
    Bref, nous sommes un peu nostalgiques, mais il y a tout de même encore des "bons" sur Inter. Moins mordants, certes, mais c'est le monde d'aujourd'hui, l'éducation d'aujourd'hui qui veut ça. Pour refaire le monde, il faut d'abord refaire l'école, et vu où elle en est, on n'est pas rendus ! !
    Je reviendrai sur cette page, à bientôt peut-être.
    Isabelle

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    1. Bonjour Isabelle,
      Parmi les bons Michka assayas qui vient de terminer un mois de bonheur sur Inter http://radiofanch.blogspot.com/2015/08/michka-assayas-ou-les-aventures.html…
      Merci pour votre commentaire. 100% d'accord avec vous. C'est aussi l'école qui m'a formé à l'écoute de la radio ou à l'écoute tout simplement.
      Pour prolonger "Qu'il est doux" lisez mon billet sur José Artur (18 décembre 2014). Pour sa dernière ITV nous avons bcp ri et avons évoqué "Qu'il est doux"…
      Espérant que vous lirez mon message et souhaitant que vous deveniez une fidèle lectrice…
      Belle vie à vous…

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