lundi 5 mai 2014

La radio ? Pas morte…


• Michel Serres









L'écrivain et philosophe français, pourrait être le parrain de ma nouvelle formule puisqu'il a déclaré à la Radio Télévision Belge Francophone (1) : "Le numérique ne signera pas l'arrêt de mort de la radio. Le passage au numérique est aussi important que le passage de l'oral à l'écrit. C'est une troisième étape." Je peux donc encore envisager écrire quelques "semaines" sur ce média qui continue de faire frétiller les auditeurs, les Pdg de groupe radio, les publicitaires, mais surtout ceux qui s'y engagent pour produire des émissions qui donnent du sens à un sujet, une thématique, des idées… Quant au numérique et à son corollaire la Radio Numérique Terrestre (RNT), le nouveau Pdg de Radio France, Mathieu Gallet, motivera peut-être le gouvernement à s'y intéresser ?

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• Serpent de mer 




D'un serpent de mer (la RNT) à l'autre (la radio filmée) il n'y a qu'un pas que successivement "Le Parisien" et "Le Monde" ont allègrement franchi à quelques jours d'intervalle (2). Tant qu'à faire de s'exciter avec la radio, rêvons donc d'une-radio-avec-des-images-qui-ne-serait-pas-de-la télé-mais-que-ça-serait-presque-pareil-au-final. Que nous apprend le Parisien : "En pointe chez les généralistes, Europe 1 et RTL ne cessent d'enrichir leur offre de vidéo live… aujourd'hui la vidéo est incontournable à la radio. « C'est le format roi sur Internet, le plus rémunérateur », estime Tristan Jurgensen, directeur général de Rtl. net." Le bon mot est lâché "rémunérateur". Cela concerne donc les radios… commerciales qui vont y trouver d'autres sources de profit. Mais pour la radio publique ? "France Info souhaite pouvoir proposer l'invité de 8h15 en direct avant l'été et se lancer dans «la radio visuelle» à la rentrée. « On ne peut plus se contenter de bien filmer ce qui se passe en studio, il faut enrichir ce flux vidéo de base de données associées telles des iconographies, explique Frédéric Wittner, rédacteur en chef de France Info. Ce sera plus que de la radio, pas de la télé, du Web finalement." écrit Le Parisien.



Et Le Monde de préciser : "Aujourd’hui, le débat philosophique sur “Doit-on ou non filmer la radio” est dépassé. Le vrai débat, c’est comment filmer la radio ! Il suffit de regarder ce que fait la concurrence ou comment nos enfants consomment la radio », assène Joël Ronez, directeur des nouveaux médias du groupe Radio France. Dès que je croise Joël Ronez je lui demande où a t-il entendu ce "débat philosophique" ? Par contre nous sommes quelques-uns à s'être interrogés, pas complètement convaincus de l'indispensable suprématie de l'image sur le son. Wait and see… c'est le cas de le dire. Et maintenant "la tarte à la crème" : "pour attirer un nouvel auditoire et séduire les jeunes élevés dans la culture de l’image, les radios doivent se lancer sans rechigner dans la production vidéo." écrit Alain Constant du Monde. Imparable. Yapuka !

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• Starting blocks 

L'ancien et le nouveau Pdg de Radio France













En mai, entre deux ponts… (sur la Seine), Mathieu Gallet va donc passer le gué et franchir les portes de la Maison ronde (Radio France) qu'il présidera à partir du 12. Sans attendre "Les Échos" l'ont interviewé. Comme souvent avec ce journal on pouvait s'attendre à ce que soient ignorés le people et autres épanchements affectifs dont la presse culturelle audiovisuelle aime faire ses choux gras. En titre "Je veux transformer Radio France" (3). "On" ne pourra pas dire qu'"on" n'a pas été prévenu ! Voici quelques convictions et/ou pronostics du futur Pdg :
• "N’oublions pas que la force de la radio est qu’elle continue de s’appuyer sur des talents,
• Les jeunes générations n’auront sans doute pas le réflexe «transistor», mais elles ne vont pas abandonner la radio pour autant,
• [La radio] doit s’enrichir, en mariant le son et les formats numériques comme les vidéos ou les infographies,
• Je souhaite avoir autour de moi une équipe soudée, resserrée et réactive. Elle sera construite en m’appuyant sur les remarquables expertises internes comme sur des compétences qui viendront de l’extérieur. Je veux aller vite pour impulser un changement dès mon arrivée. Dans mon équipe je nommerai un responsable en charge de la cohérence et la complémentarité de nos sept chaînes, avec l’ambition de toucher un public le plus large possible. Il devra s’assurer que l’on ne fait pas quatre fois la même matinale par exemple!
• On peut envisager des synergies entre les entreprises de l’audiovisuel public comme France Télévisions, France Médias Monde et l’INA qui ont toutes développé des plates-formes numériques performantes. Il faut d’abord travailler sur les outils et les réseaux, afin que les systèmes se comprennent, soient compatibles. Après, chacun doit pouvoir s’enrichir des contenus de l’autre, la vraie complémentarité est là,"

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• Mermet diplo… mat
Sous un titre qu'il affectionne, "Rapprocher le micro de la fenêtre", Daniel Mermet signe dans Le Monde Diplomatique du mois de mai un article surtitré "Radio France, un trésor national gâché par le conformisme". Et de commencer par enfoncer le clou d'une "vérité" entendue dans l'ascenseur "Bah ! Les auditeurs reviennent toujours !" (suite aux grèves, NDLR). On ne serait pas loin de le croire tant les habitudes et autres addictions d'écoute de la radio ne riment pas du tout avec le butinage de la bande FM. Mermet de citer trois exemples emblématiques de "fâcheries" qui n'ont jamais empêché les auditeurs de "revenir". Et d'ajouter "L'audience est devenue la seule boussole de France Inter". L'animateur de "Là-bas si j'y suis" (4) en profite pour désacraliser le slogan historique de sa chaîne "Écoutez la différence" qui, à la "sauce" d'aujourd'hui, n'a plus du tout le même sens, particulièrement quand il est affirmé par Philippe Val, le (encore) directeur de France Inter. Et Mermet de revenir sur les "débuts" de la radio publique après guerre (1944) où un certain Pierre Schaeffer… On pourrait reprocher à Mermet de "croire" qu'il n'y a pas de publicité à France Inter. Mais approuver qu'il se désole de ne disposer d'"aucune critique" du média (dans la presse au sens large, NDLR) et, qui plus est, très peu étudié par les chercheurs. "Bien peu de chose sur ce prodigieux moyen d'éducation populaire susceptible de combattre la fracture culturelle, de favoriser l'émancipation collective et l'épanouissement individuel". CQFD.

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• De Mermet à… Chloé Sanchez il n'y a qu'un pas (de deux)
Au Festival "Longueur d'Ondes" à Brest, en février dernier, nous avons pu écouter dans la soirée consacrée à Daniel Mermet "La Fabrique de Là-bas" de Chloé Sanchez, productrice de documentaires, qui comme réalisatrice de l'émission "Là-bas si j'y suis", a pu enregistrer les coulisses trépidantes d'une émission sans doute "en voie de disparition". Ses rushes montés elle les a offert à Syntone, qui les a publiés sur son site.



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(1) Invité de Matin Première le 28 mars à l'occasion des 100 ans de la radio,
(2) "Le son sans l'image ne suffit plus" Le Parisien, 16 avril 2014. "La radio veut se faire voir" Le Monde Television 27 avril 2014,
(3) Les Échos, 28 avril 2014 par Grégoire Poussielgue et David Barroux,

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