jeudi 30 avril 2015

L'auditeur a la parole…


















Jeudi 23 avril. Port de Brest. Un troq' banal. Vivien "rencontré" via ce blog et Twitter a bien voulu jouer le jeu de l'interview pour témoigner de sa petite histoire radio (1). Ça ne passera pas à la radio. Pas dans "Les auditeurs ont la parole" (2). Pas plus à Radio France. Et pourtant le service public ne devrait-il pas instituer un forum permanent pour que ses auditeurs témoignent ? Faut pas rêver ! Chacun chez soi et les vaches seront bien gardées. Les vaches peut-être. Les ondes pas sûr…

L'émission de Foulquier évoquée est "Saltimbanque", France Inter, 77/78, 18h05/19h, avec le Grand Orchestre du Splendide et une chronique de Pierre Desproges (Source "Les années radio", Jean-François Remonté, L'arpenteur, 1989)

(1) Dans cet interview j'ai commis une petite erreur de date. Jean-Marie Borzeix a été directeur de France Culture de 1984 à 1997. Dans l'intervalle avec la direction de Laure Adler (1999-2005) c'est Patrice Gélinet qui officiera, 
(2) RTL depuis septembre 1985. De 13h15 à 14h.

mercredi 29 avril 2015

Quand Fip inspirait Inter…

Logo 71. Plus épuré tu meurs



















Quelquefois un auditeur, un lecteur m'interrogent attendant souvent une/des réponses précises. Quelque fois je sais quelque fois je ne sais pas. Mais dans ce dernier cas je cherche. Et comme tout chercheur j'aime bien trouver. Et quand je trouve je vous en fais part mes chers auditeurs. David, très au fait de l'histoire de Fip m'interroge sur ce qui lui semble une énigme : les France-Inter-Vacances (FIV) de l'été 71. Nous supputons tous les deux de concert. L'un persuadé que Fip avait "envahi" les ondes d'inter, l'autre que c'était une formule où Garretto & Codou avaient du faire preuve de toute leur imagination fertile pour subtilement instiller du Fip à Inter.

Aujourd'hui, en cette époque particulière où les orientations de Radio France pourraient aller jusqu'à supprimer une ou plusieurs chaînes, à basculer des chaînes hertziennes en web-radio, il n'est pas inintéressant d'entendre Roland Dhordain (1), patron en 1971 de la radio au sein de l'Ortf (Office de Radio et Télévision Française), présenter les programmes d'été de France Inter qui pendant cinq semaines vont se nourrir de l'esprit de la toute jeune Fip (2). O tempora, o mores, où Dhordain jouait la synergie et non pas la concurrence entre les radios du service public. L'esprit et la lettre de Fip essaimeront jusqu'à 13 villes en France (dont certaines avec deux fréquences) pour aujourd'hui émettre à Paris, Bordeaux, Nantes et Strasbourg.

France Inter Magazine (TV), 14 juin 1971,


(1) Homme de radio, a longtemps présidé aux destinées de France Inter,
(2) France Inter Paris (Fip), sur 514 m O.M., créée en janvier 1971 par Jean Garretto et Pierre Codou, les inventeurs de "L'oreille en coin", et avec l'appui indéfectible de Roland Dhordain,

mardi 28 avril 2015

Un service public de la radio et de la télévision…



























Suite au billet de jeudi dernier, Etienne Noiseau a posté un commentaire avec une interpellation en plusieurs questions. Après lui avoir répondu je l'ai à mon tour sollicité pour qu'il nous fasse part de ses propres points de vue sur les sujets évoqués. Je reprends ici ses réponses pour tenter de prolonger le "débat".

Service public… audiovisuel
Étienne écrit : "Cela pose plus globalement la question de la pertinence d'un service public de la radio et de la télé. Non pas que je souhaite sa suppression, mais il serait intéressant de réfléchir à ce qu'on veut comme paysage médiatique, et pas toujours en tant que "consommateurs/consommatrices" qui attendent un service.

Cette question nous nous la posions déjà dans les années 60 quand, dans les Maisons des Jeunes et de la Culture, dans les organisations militantes mais aussi au Ciné-Club du collège ou du quartier, tout était prétexte à "Changer la vie" (1) Et puis les lieux de réflexion et d'engagement se sont déplacés et dans certains cas ont disparu. Pour présenter son projet de gouvernance de France TV au CSA Delphine Ernotte-Cunci s'est attaché le concours d'un conseiller en… communication et en stratégie (2). Une personne seule pense un projet de média public. Et huit personnes donnent leur imprimatur. Le champ démocratique de réflexion s'est considérablement restreint. Pour faire vite il y a quelques penseurs/décideurs et en face la masse des consommateurs. Entre les deux trois quatre herbes folles qui résistent encore aux… pesticides.

• Le "local"… uniforme partout
Étienne poursuit "Pourquoi les médias citoyens/associatifs devraient-ils être condamnés au bricolage, à la précarité, au bon vouloir des édiles locaux ? Pourquoi les locales de Radio France ne sont-elles pas des espaces d'expression, de création, ouvertes aux habitant·e·s du territoire, voire même des espaces de formation ? "

Première réponse, un état jacobin comme l'État français n'a jamais eu la vélléité de mettre en valeur quoi que ce soit des identités, particularismes et autres cultures des "ex-provinces", "territoires", et autres Régions aux contours politiques fluctuants. Si en plus les créateurs et centralisateurs de la Vème République avaient dû s'intéresser aux Régions, encore eût-il fallu qu'ils en eussent le projet politique (3). Ce qui n'était vraiment pas dans leurs préoccupations sauf à considérer les approches étatiques de la Datar (4) pour esquisser une politique régionale… depuis Paris. Pour tout mais surtout pas pour l'information et/ou la communication (5).

Pour autant les "expériences" de FR3/Radio et la volonté de Jacqueline Baudrier, Pdg de Radio France de tenter le local avec une décentralisation très expérimentale (6) auraient pu participer de ce qu'Étienne suggère dans son questionnement. L'histoire même de France Bleu montre comment en étapes successives et sur 50 ans, l'État jacobin a su recentraliser les "Bleu" jusqu'à pousser très loin l'uniformisation des programmes. Et nous ne parlerons pas ici de la syndication.

Donc dans ce système politique, imaginer "des espaces d'expression, de création, ouvertes aux habitant·e·s du territoire, voire même des espaces de formation" relève soit de l'utopie soit de combats politiques nouveaux à mener. Et comme dirait Morvan Lebesque "À chacun l'âge venu la découverte ou l'ignorance". (7)
(À suivre)

(1) Futur slogan en 1980 du candidat socialiste François Mitterrand, à la présidentielle de 1981,
(2) Denis Pingaud, le même qui est chargé de la communication de Mathieu Gallet, Pdg de Radio France,
(3) Ce n'est pas le lieu pour nuancer ce propos volontairement sans nuance et provocateur,

(4) Direction à l'Aménagement du Territoire et à l'Action Régionale) 
(5) Là je sens que Gérard Couderc, ex Radio France, ex directeur des Ateliers de Créations Radiophoniques décentralisés va vouloir entrer dans le débat récurrent que nous avons ensemble ici quelquefois fois et en dehors aussi, 
(6) "Radio Mayenne", "Melun FM", "Fréquence nord" en 1980, 
(7) "Comment peut-on être breton" Le Seuil, 1970.

lundi 27 avril 2015

(Ré)inventer l'eau chaude…

Didier Varrod














Didier Varrod est directeur de la musique à France Inter. Après avoir fait ses débuts avec Jean-Louis Foulquier puis avoir animé différentes émissions sur la chaîne. Pendant les 28 jours de grève des mois de mars et d'avril il n'a manqué aucune occasion de rappeler aux auditeurs et à la direction de Radio France qu'il… existait.

Ça commence dès jeudi 24 mars (la grève a démarré le 19) avec Le Parisien. Puis le 25 avec 20 minutes (1). Façon adroite de rappeler à l'auditeur "errant" ou en manque de programme qu'il peut rester sur France Inter. Ça pourrait aider à atténuer les effets de la grève au cas où Médiamétrie interroge le fameux auditeur qui pourra continuer à citer France Inter dans ses pratiques d'écoute régulière.

Mais c'est surtout le moment opportun pour vanter ces fameuses playlists "de secours" que d'aucuns, sans vergogne, appellent "de grève", particulièrement si un audit est en cours à France Inter justement sur la programmation musicale. Didier Varrod monte au filet et comme toujours sait se mettre en avant (2). Mais le pire est à venir. Le 16 avril sous le titre "Radio France : la grève est finie, retrouvez la playlist", Chloé Woitier du Figaro revient sur le sujet et donne la parole à Varrod.

"Le succès de la playlist de grève «a permis de souligner que le paysage musical radiophonique en France est extrêmement standardisé», estime Didier Varrod. Un réel besoin des auditeurs pour une sélection musicale alternative s'est exprimé." Avant d'aller plus loin dans sa réponse au Figaro notons d'ores et déjà que Varrod se la joue "solo". À ce moment de ses pertinentes analyses il aurait pu rappeler à la journaliste que Radio France dispose depuis 44 ans d'une chaîne dédiée aux "sélections musicales alternatives", qu'elle s'appelle FIP et est plébiscitée dans les villes où elle émet (3) ainsi qu'en streaming sur le web. Le Pdg de Radio France Mathieu Gallet a même été jusqu'à la qualifier de "pépite".















On notera donc que Varrod n'écoute pas son Pdg et n'a pas le début du commencement du fair-play pour faire la passe à Fip (4). On va vite comprendre pourquoi. Puisqu'on lui donne une tribune dans Le Figaro Varrod va enfoncer le clou : «Le conflit a été long et compliqué, mais il peut en sortir des idées. Pourquoi pas une webradio ‘France Inter Musique'." Là on se pince grave. Et ça fait mal ! Ça y est Varrod réinvente l'eau chaude. Les esprits chagrins pourraient lui reprocher en ces temps de disparition programmée d'une ou plusieurs chaînes d'en être le mauvais génie. Un coup de pot qu'il n'ait pas nommé "sa" future radio "France Inter Playlist". Des fois que d'un coup ça règle le sort de… Fip.

Pour faire bonne mesure et appuyer Varrod dans sa (con)quête musicale, Woitier conclu ainsi son article "La direction de Radio France souhaite justement développer des radios sur Internet. Gageons que les auditeurs répondront à l'appel." Le Figaro sait dribbler et faire des passes. Varrod sait juste jouer solo. Mais pas sûr que sur ce coup-là il marque le but.

(1) Puis le Huffington Post qui a le mérite de citer les programmateurs concernés, Libération, et sur le site de France Inter, sans oublier Slate qui non sans humour titre "Grève à radio France : le Top 50 de France Inter" 
(2) Lors d'un live dans l'un studios de Radio France et diffusé sur Inter est-il nécessaire qu'il s'impose "par-dessus" le présentateur ou la présentatrice, monte sur scène pour rappeler "discrètement" qu'il est la cheville ouvrière de cette soirée… exceptionnelle,
(3) Paris, Bordeaux, Nantes, Strasbourg,
(4) Pendant la grève je n'ai pas manqué sur Twitter de rappeler à ceux qui se pâmait à l'écoute de la fameuse play-list qu'ils pouvaient le faire toute l'année 24/24 sur Fip.

dimanche 26 avril 2015

Pierre Wiehn, un sage… méconnu

P. Wiehn © Radio France
















Au début de notre rencontre avec Bernard Lenoir, je lui donnais quelques nouvelles de son patron Pierre Wiehn que j'avais rencontré à Paris quelques jours plus tôt. C'est cet entretien que vous pourrez écouter ci-dessous. Pierre Wiehn a des choses très intéressantes à raconter, la pédagogie et le talent pour le faire. 

De ce fait on se demande pourquoi quand il s'agit d'audiovisuel, lui et quelques autres ne pourraient pas être consulté par les dirigeants des entreprises publiques. L'expérience, le recul, l'anticipation dont Pierre Wiehn peut se prévaloir (1) ne profitent donc pas à Radio France (ou à France Télévisions). Ce n'est certes pas de l'État dont on peut attendre qu'il créé un "conseil des sages" on pourrait le confondre avec le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA). Par contre Philippe Bailly évoquait jeudi dernier au micro de Sonia Devillers sur France Inter l'exemple de la BBC.

Pour autant quand on dirige une entreprise publique chargée de la transmission du savoir il est pour le moins surprenant qu'on ne sache pas soi-même être à l'écoute de ceux qui l'âge venu ont toute légitimité à exercer cette transmission. Au dessus du nid de coucou, du panier de crabe, ou du marigot…

(1) A exercé plusieurs fonctions dans l'audiovisuel et entre autres, directeur de France Inter de 1974 à 1981…

vendredi 24 avril 2015

État bouffon… bouffé par le pilotage de l'audiovisuel

Détail de la tour Mirabeau (CSA)
















L'honnêteté veut que je vous dise que j'ai levé mon piquet de grève hier de 9h40 à 9h58 pour écouter sur France Inter, Sonia Devillers qui recevait Renaud Revel et Philippe Bailly pour parler de la GROSSE TARTE À LA CRÈME de la nomination du Président de France TV. Je le redis pour ceux qui découvriraient ce blog, je n'ai pas la TV, je ne la regarde pas mais je m'intéresse depuis 30 ans à ce feuilleton médiatique perpétuellement entretenu depuis feu l'ORTF en 1964 (1). Cette comédie pitoyable tourne souvent au drame et donne une image clanique, préhistorique, archaïque, de l'audiovisuel public français.

Le preux chevalier Hollande à peine adoubé sur ses terres présidentielles déclarait une main sur le cœur et l'autre sur la canne du parapluie que désormais le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel (CSA) nommerait les présidents de l'audiovisuel public. Il ne ferait pas comme l'ex qui, du fait de sa toute puissance, nommait lui-même :
• ses commissaires politiques, 
• ses collaborateurs, 
• ses affidés (2) .

Renaud Revel n'envoie pas un pigeon (voyageur) dire ce qu'il pense. Qu'on en juge plutôt "Ça tourne à la mascarade. On pensait qu'il y aurait une très grande transparence, que l'audition serait publique, que les français connaîtraient les noms des candidats, leurs projets, leurs programmes. C'est pas le cas, c'est l'opacité absolue. Tout ça s'est fait à huis-clos avec 8 membres du CSA qui sont enfermés, claquemurés depuis 24 h (3) et on ne sait pas qui sortira du chapeau en fin de journée. Ça donne une image de notre démocratie assez pathétique, de notre paysage audiovisuel totalement immature et u collège du CSA pas au niveau. Pas au niveau des enjeux. Pas au niveau du respect du public. FTV est une maison financée par nous tous je trouve ça scandaleux."

Philippe Bailly n'en dira pas moins et montrera que le processus a fini par se pervertir lui-même. Et Patrick de Carolis (ex-Pdg de FTV) "On ne peut pas être à la fois arbitre et sélectionneur, juge et partie. C'est une anomalie." N'en jetez plus la cour est pleine. Vous l'aurez compris tout ça sent au minimum le souffre, la dynamite et le TNT (pas le truc TV mais l'explosif). Ça nous rapproche de l'opération "manu pulite" (4) tentée par le CSA en février 2014 pour nommer à l'unanimité Mathieu Gallet, l'actuel Pdg de Radio France. Pour cette opération à huit clos et opaque, on attend toujours de pouvoir lire le projet stratégique de l'impétrant. Le compte-rendu des débats. Et l'avis circonstancié donné au "jeune" Pdg dont on aura remarqué que la qualité essentielle avant de se colleter la grève était d'être jeune. Inexpérimenté mais jeune. Youkaïdi, youkaïda !! Les jolies colonies de vacances de l'audiovisuel public Merci Hollande, Merci Schrameck.


JACQUES DEMARTHON / AFP




















Discrédit, méfiance, amateurisme, prébendes, renvois d'ascenseurs, coups-fourrés, chausses-trappes, coups de poignards dans le dos et enfants aussi (dans le dos). Léo Scheer, je l'ai dit, est un génie. Il a seul ou presque inventé, développé et installé Canal+ en 1984. Car dès 1980 il avait compris que confier l'audiovisuel aux politiques c'était s'assurer version longue et 3D "Chronique d'une mort annoncée". On en est là, tout le carnaval que joue le pouvoir est bidon. Les masques sont tombés et les gondoles se plient en deux sur la Seine (5). Philippe Bailly propose pour sortir de la curée de "copier le modèle de la BBC, un board, un comité de sages qui n'est chargé que de ça" (la nomination des Pdg de l'audiovisuel public, ndlr). 

L'ensemble du système "audiovisuel public français" est à repenser de façon non partisane et prospective sur la longue durée. Où sont les sages qui pourraient s'y employer ? Sortis d'une "République bananière" (6) en pleine déliquescence ?

Ce matin Olivier Schrameck sera l'invité de Sonia Devillers à 9h40 sur France Inter.

(1) Dissout en 1974 par le nouveau Président de la République Valéry Giscard d'Estaing (1974-1981),
(2) Rayer les mentions inutiles… Bonjour Jean-Luc Hees, Président de Radio France (2009-2014),

(3) "Sous le pont Mirabeau coule la Seine" poétisait Appolinaire. Dans la tour Mirabeau (8éme à Paris) coule la peine,
(4) Mains propres en italien,
(5) De la tour Mirabeau est sorti hier le nom de la nouvelle Pdg de FTV, Delphine Ernotte. Son projet stratégique serait rendu public. On attend donc que celui de Mathieu Gallet le soit à son tour,
(6) Renaud Revel, 

jeudi 23 avril 2015

Auditeurs, Consommateurs groupons nous … et demain…

Graph' Médiametrie/ J'avais pas d'illus. de consommateurs…















Il semble bien que quelques auditeurs, et leurs commentaires en font foi, n'aient pas supporté cette "reprise du travail" sur les antennes de Radio France il y a maintenant une semaine. Mais comment peut-on mesurer ça ? Où sommes-nous les auditeurs ? À part dans les paniers (sic) de Médiamétrie ? Où pourrait-on entendre notre voix ? À part chez l'épicière, au café ou avec quelques voisins amateurs de radio ? 14 millions d'auditeurs de Radio France écoutent la radio quotidiennement et ce ne sont pas quelques brebis égarées, quelques moutons noirs qui peuvent faire bouger quelques lignes que ce soient.

Et pourtant nous sommes représentés par une association de consommateur au sein du Conseil d'Administration de Radio France (1). Et comment cette représentante peut-elle faire entendre nos voix ? Ou plutôt comment cette représentante peut-elle entendre nos voix ? Va falloir une grande salle pour rassembler 14 millions d'"actionnaires". Ben oui puisque c'est nous les "actionnaires" du service public.(2)

En attendant, à l'enthousiasme de façade de programmes plus sympas les uns que les autres il faut opposer les échos qui viennent par petites bribes nous faire savoir que l'ambiance interne à Radio France est plus que morose et que le personnel reste inquiet et dubitatif. Que fait le médiateur ? (3) Que fait l'intersyndicale ? Que font les syndicats ? Où en est-on du plan de départs volontaires ? Des travaux du chantier pharaonique ? De la syndication de France Bleu et des orchestres ? Du Contrat d'Objectif et de Moyens (Com) ? La radio nous informe de tout, tout le temps, mais pas de ce qui se passe à la radio.

Par contre en ce qui concerne les playlists diffusées sur les antennes pendant la grève on a gravi un échelon supplémentaire dans la désinvolture. Enguérand Renault, journaliste au Figaro et animateur du "Buzz média Le Figaro" recevait le 20 avril, Frédéric Schlesinger, directeur éditorial des antennes de Radio France. Ce journaliste pour donner sans doute une note de fraîcheur à son entretien n'a rien trouvé de mieux qu'à l'issue de celui-ci (à 12'16") de proposer à Schlesinger "d'éditer en best-of les playlist de grève de France Inter, cela pourrait participer aux nouvelles recettes supplémentaires que Radio France doit trouver" (4). 

Schlesinger a trouvé l'idée judicieuse et la Société du spectacle une nouvelle occasion de toucher le fond du cynisme, de la morgue et du mépris. Et dire que si ce type de produits existait il y aurait des consommateurs pour les acheter ! Pourrait-il surtout y avoir des auditeurs "consommateurs" pas pour acheter les playlists de grève mais pour rencontrer la représentante des consommateurs au Conseil d'Administration de Radio France ? Cette question urgente on pouvait compter sur Enguérand Renault pour ne pas la poser.

(1) Frédérique Pfrunder, Association de consommateurs Consommation, logement et cadre de vie, depuis mai 2014

(2) 14 millions ce sont les auditeurs. Tous les français sont "actionnaires" du service public radiophonique,
(3) Il n'a pas daigné répondre à ma lettre ouverte !
(4) Il serait utile de rappeler à ce journaliste que toutes les chaînes disposent de playlist utilisées pendant les grèves. De personnaliser celles de France Inter par le nom du Directeur de la musique de la chaîne est au moins un raccourci, au plus un mépris pour les programmateurs dont c'est la fonction. 

mardi 21 avril 2015

D.J. R.F.





















La radio m'a beaucoup appris. Jusqu'à quelquefois envie d'imiter ses "vedettes". L'une d'entre elles le mois dernier a de façon unilatérale décider d'utiliser ses deux heures d'antenne pour changer de métier et s'essayer à faire le D.J. Deux heures volées au service public pathétiques et minables. Reine en son média elle n'a eu à subir de la part de la direction de sa chaîne aucune sanction. Et a pu montrer comment les plus grands donneurs de leçons sont les mieux placés pour ne pas se les appliquer à eux-même.

En grève d'écoute radio j'ai aussi décidé de façon unilatérale sans en rendre compte à mon directeur (de conscience), de m'essayer à faire le D.J. sur ce blog au moins un soir. Je n'ai aucune compétence pour cela. Je sais mettre des disques sur une platine. J'essayerai avec deux platines de faire quelque enchaînement réussi. Mais ça n'irait pas beaucoup plus loin. J'ai écouté moults émissions de radio depuis les années 60. Je possède quelques vinyls, quelques CD et même une discothèque iTunes. Donc je pourrai facilement tenir jusqu'à l'aube.

Mais, au risque de vous surprendre, ce soir je vais vous parler (je ne suis pas plus rock-critic) d'un seul disque qui n'est pas encore sorti. Il sera en vente lundi et consacrera le retour de Valérie Leulliot et d'Autour de Lucie. Le 20 avril 2013 j'ai acheté le single (3 titres) "Ta lumière particulière". On est dans l'atmosphère de la pop à la fois tonique et un brun (sic) mélancolique d'un groupe séduisant qui tisse ses chansons avec délicatesse et raffinement, à la marge du lourd show-business.


Valérie Leulliot














"Ta lumière particulière" 9 titres, dont celui qui tourne déjà sur certaines radios (?). "Détache". J'ai mis hier 1,29€ dans le bastringue et comme dirait Vincent Théval à la veille de nous faire découvrir "Twenty one" de The Apartments (1), "Détache" tourne en boucle dans ma petite machine. Valérie Leulliot est pleine d'énergie, son texte est juste avec l'époque "Détache du mur le tableau, la couleur le halo qui t’emmenait loin, qui t’emmenait loin, mais loin c’est trop…" Se détacher du passé. À la fois élan, promesse, et bon coup de peps. Ça m'a stimulé une bonne partie de la journée d'hier et j'ai redémarré avec aujourd'hui. J'ai surtout envoyé ses bonnes ondes vers un petit poisson qui ne va pas tarder à traverser l'Atlantique.

Voilà mes chers auditeurs j'ai fait le D.J. et j'ai été content de vous faire partager une autre de mes passions après la radio, la musique (2). Bonne soirée et "à demain si vous le voulez bien…". Tiens ben on est demain et j'ajoute "Alabama Shakes" que Fip met en avant ce jour.

(1) Label Pop, France Musique, le lundi 22h30/Minuit. Le 15 décembre 2014 en exclu mondiale, Vincent Théval nous faisait découvrir la pop australienne de "The Apartments" avec le single "Twenty one". Le CD "No song, no spell, no madrigal" (8 titres) paraît ce mois d'avril,
(2) La publi de ce billet à 21h c'est un petit hommage appuyé au Black qui a enchanté cet horaire pendant des années sur France Inter.






lundi 20 avril 2015

Feedback (pour de vrai)…

 © L. Lorseau



















Mes chers auditeurs, pour ceux qui me lisent depuis longtemps et qui suivent ma petite musique radiophonique vous pouvez imaginer avec quelle émotion j'ai pu aborder celui qui, dès 1978 chaque soir et pendant des années à 21h sur France Inter, a ébloui nos mornes soirées d'adolescent ou de jeunes adultes. J'ai rencontré Bernard Lenoir, puisque c'est de lui qu'il s'agit, dans une jolie station balnéaire face à l'Atlantique avec le beau et chaud soleil d'un matin d'avril. Bernard a accepté l'interview. J'ai foncé. Pas intimidé. Plus le choix. En ai rêvé depuis que je fais ce blog. Va bien falloir assurer (lol).

La simplicité du Black m'a touché. L'heure a coulé tranquillement. À la réécoute je suis ému par sa gentillesse et son humilité. Bernard m'a bien fait comprendre que revenir au micro le démangeait quand même un peu. Alors si quelques programmateurs avisés… En nous quittant on s'est promis de se revoir. Lui partait piquer une tête dans la mer. Moi j'allais prendre le train pour participer à la deuxième émission de la Sparf (7 avril).

P.S. : Pierre Lattès, cité à plusieurs reprises par Bernard Lenoir est décédé en juin 2013. L'heure de 9h que j'annonce (à la façon Fip) est en fait 21h.

Mixage Hervé Hist


Captation Guillaume Hamon

Guillaume a même noté l'annonce de Lenoir ce 4 septembre 2006 :
"Et nous voici de retour... une heure plus tard... mais de retour... restons groupés ! Et un grand merci pour tous vos mails de soutien". Lenoir passe de 21h à 22h (son ancienne heure est "occupée" par… Frédéric Lodéon)

Angélisme…























Il y aurait donc eu urgence à reprendre le travail et à envoyer les ondesdans le poste. Les auditeurs n'en pouvaient plus. Les patrons de chaîne non plus. Et c'est sans doute d'un coup de baguette magique et tutélaire que les difficultés sociales vont s'aplanir, que la Maison de la radio va retrouver son lustre d'avant le chantier permanent et, que Gallet le Pdg va chanter avec la maîtrise de Radio France "Tout va très bien Madame la Ministre" sur l'air sans doute de "Tout va très bien Madame la Marquise".

Il faut sûrement une bonne dose d'aveuglement ou d'angélisme, une méconnaissance de l'histoire sociale et politique des institutions publiques, une naïveté à toute épreuve pour croire que "demain tout va changer". Et d'imaginer que des producteurs associés au sein de la Société des Producteurs Associés de Radio France (Sparf), les techniciens et réalisateurs attachés à Radio France, des journalistes pourraient infléchir une politique éditoriale dévolue au n°2 du groupe public de radiodiffusion, Frédéric Schlesinger, est au minimum risible au maximum grotesque. L'État ne se mêle pas de contenus, pas plus que les tutelles (Finances et Culture) et encore moins le Pdg. 

Quant au "reste" du désastre, la vidéo ci-dessous finira bien par convaincre les timorés que la faillite du chantier est avérée et que les conséquences sur la création radiophonique n'ont pas fini de se révéler au fur et à mesure des semaines à venir. Le Pdg peut dormir tranquille plus personne ne va parler de Radio France puisqu'en "façade" chaque chaîne va continuer à produire ses programmes. En "coulisses" ce sont d'autres résistances, d'autres luttes, d'autres enjeux qu'il va falloir défendre. Mais sans que le public ne puisse en entendre les résonances. Pourquoi ?

Parce que ça n'intéresse la presse que lorsqu'il y a événement. Parce que jusqu'à preuve du contraire des représentants d'associations de consommateurs ne siègent toujours pas au Conseil d'administration de Radio France et qu'ils ne peuvent de fait rendre compte de la situation en cours. Je veux montrer par là qu'il aurait été démocratique et indispensable de créer, même de façon temporaire et paritaire, une "chaîne d'information" sur Radio France. Une chaîne qui en temps réel rendrait compte de l'évolution des dossiers en cours. Une chaîne pour que le public et certains commentateurs sortent la tête du sable et prennent la mesure de l'enjeu sociétal en cours. Au lieu de quoi les auditeurs vont entrer dans un trou noir et tomberont des nues lors du prochain conflit social.



Quant au doc ci-dessous il permet d'aller beaucoup plus loin que tout ce qui a été écrit sur les 28 jours de grève à Radio France : un projet stratégique pour [notre] la radio de service public. Extraits des AG et des rencontres entre les salariés et la direction.
Avec les économistes Dominique Plihon (Université Paris 13), Xavier Timbeau (Ofce), Julia Cagé (Sciences-Po Paris) et Philippe Askenazy (Cnrs). Avril 2015 à Radio France.


J'ai oublié de vous dire, je tiens bon, j'ai pas remis mes oreilles dans la radio.

dimanche 19 avril 2015

"Bonjour Jean…"

Garretto, Paranthoën, Codou

C'est sur Fip, le vendredi 14 septembre 2012 à 11h50, que j'ai appris votre mort, Jean Garretto. Nous avons de fait interrompu notre correspondance tout juste établie timidement de part et d'autre. Aujourd'hui j'ai envie de vous parler. Je parle de vous souvent avec des amoureux de la radio, professionnels et/ou auditeurs. Je parle de ce laboratoire permanent que vous aviez inventé avec Pierre Codou, votre alter-ego cévenol. L'oreille en coin 1968-1990.

De deux choses l'une soit vous aviez 40 ans d'avance soit la radio vient de prendre un sacré coup de vieux. La financiarisation, la commercialisation, la chantierisation de la Maison de la radio sont en train de reléguer la production radiophonique au rang d'accessoire pour se concentrer sur une vitrine faux-nez qui cacherait bien mal le nivellement par le très bas de la qualité des programmes. L'État, les tutelles, le Pdg ne s'intéressent pas à la radio en tant que média. Ils s'intéressent à la radio pour qu'elle coûte le moins cher possible quitte à renier l'histoire des chaînes et de leur diversité.

Dans ce monde-là vous auriez été très malheureux. Nous sommes quelques-uns à l'être aussi. Vraiment. Le peuple ne supportait plus la grève. Il lui fallait son pain quotidien. Au risque qu'en ouvrant à nouveau les oreilles il ferme les yeux sur la fabrique de la radio, ses processus de création et ses métiers spécifiques. Cet état de désengagement du citoyen pour défendre un service public audiovisuel original, pluraliste et universel est le signe supplémentaire, s'il en était besoin, que la société vient encore de perdre un des repères essentiel de la démocratie.

Il est 18h Jean et les trompettes de Jim Wild Carson n'ont vraiment plus envie de résonner. Pourtant pour votre compère Pierre Codou, pour Kriss et pour ceux qui ont fait Fip 514 O.M. la vidéo ci-dessous devrait nous donner de l'espoir car là "vous partiez bien de zéro" avec la volonté farouche de faire de la radio autrement.

21 décembre 1970, 24 heures sur la 2, Préfiguration de Fip

vendredi 17 avril 2015

Un goût amer…

©Quino

15 avril 2015. Rien à voir avec le 11 juin 1936. Le "Il faut savoir arrêter une grève" n'a pas du tout ici le même sens. On ne comparera pas les grèves massives du début du gouvernement de Front populaire de Léon Blum et les 27 jours de grève à Radio France. La reprise du travail chez Renault en 36 ne s'entend pas pareil que celle sur les sept antennes de Radio France. N'en déplaise aux impatients, qu'ils soient directeurs d'antenne, auditeurs ou cet innommable animateur qui réclamait le "droit de travailler", je n'avalerai pas la couleuvre du "show must go on".

Mercredi je n'ai pas écrit sur ce blog pas plus que je n'ai écouté la radio. Un goût amer. Et encore moins si c'est pour entendre une litanie de chiffres en trompe-couillons. J'arrive pas à oublier l'envers du décor. Les conditions de travail. Les cellules d'enregistrement rénovées inutilisables. Les risques qui pèsent sur les studios moyens pour créer une porte D pharaonique. L'externalisation du service de sécurité. Une syndication augmentée pour France Bleu clouant définitivement au pilori l'aventure généreuse et utopique en 1980 de "radios décentralisées" originales : "Radio Mayenne", "Fréquence Nord" et "Melun FM". Je vous parle d'un temps

J'arrive pas à faire semblant de croire que derrière le miroir, les alouettes travailleraient dans le plus pur enchantement. Après le "Tout doit disparaître" d'un passé radiophonique décrété has been par le "jeune" Pdg de Radio France, Mathieu Gallet on va pouvoir passer au "Tout reste à faire". À commencer par le Contrat d'Objectifs et de Moyens (Com) qui donnera le cadre de fonctionnement de Radio France pour la période 2015-2019. Ça, ça mange du pain. Et de ça j'ai envie d'être à l'écoute. Comme j'ai envie d'être à l'écoute de ceux qui vont bien devoir s'expliquer sur la "faillite" d'un chantier monstrueux et dévastateur. Être aussi à l'écoute des conditions de production qui ne manqueront pas de faire évoluer les métiers de la création radiophonique.

Alors si vous voulez bien je vais commencer par faire grève (1), et ce, sans préavis. Je ne peux pas écouter ce qui sortirait de mon poste sans entendre ce qui se dit, se chuchote ou se murmure derrière. Pas plus qu'enfant et même adulte je ne supporte d'aller au cirque. Pour voir le matin celui qui tapant comme un forcené sur les pieux pour fixer le chapiteau fait tout son possible le soir pour nous faire rire. Derrière son masque je reconnais toujours le misérable qu'on oppresse.

Alors "Bas les masques". Les programmes quels qu'ils soient n'arriveront ni à me faire avaler la pilule de la Comedia d'ell arte ni les couleuvres planquées derrière le rideau de fumée. "Je suis comme je suis je suis fait comme ça" disait Prévert. J'ai encore quelques histoires d'avant à vous raconter et je vous les raconterai. D'avant oui car il y aura bien un avant et un après les "27 jours de grève de 2015 à Radio France".

Si j'ai longtemps été un auditeur passif et innocent des choses de radio j'ai décidé en créant ce blog d'être un auditeur actif. À ce titre et c'est peut-être une première je me mets en grève car dans cette société de faux-nez pas question de porter celui du clown ou de supporter au-dessus de ma tête l'anneau de l'ange béat.

En montant dans la voiture j'entends "Comme un boomerang" (2). Y'a pas de hasard. Pourtant j'aurais été inspiré d'écouter "Il quarto stato" d'Ennio Morricone (3)… Je suis en grève et ne vais pas tarder à crier le slogan de Coluche " Ce n'est qu'un combat. Continuons le début… " Si d'autres veulent se joindre à moi…

(1) Et même si vous ne voulez pas ;-)
(2) De Serge Gainsbourg, par Dani et Daho,
(3) Musique du film "Novecento/1900" de Bernardo Bertolucci.


jeudi 16 avril 2015

Grève-cœur… ou la mémoire courte

Manifestation du 19 mars 2009


















Interprétez ce titre comme vous voulez. Au cœur de la grève, la grève au cœur, le cœur grevé… Merci à celle qui me l'a donné et pour qui c'est aussi un grève-cœur. En 2009 un autre conflit social mit RFI (Radio France Internationale) à rude épreuve. Qui s'en souvient ? Puis RFI a fini par quitter les locaux de la Maison ronde pour migrer à Issy-les-Moulineaux au milieu de tout et de nulle part.

Vous trouverez l'histoire de ce très long conflit (+ de 7 semaines) sur le blog des salariés de RFI : "Riposte"… Et quelques sons issus de la journée sur le parvis de la Mairie de Paris. 6h30 d'émissions en public et la participation de musiciens et de chanteurs. Au début du conflit à Radio France des RFI sont venus témoigner avec lucidité et amertume pour ceux de leurs collègues qui partis avec le "chèque" sont aujourd'hui au RSA.





mardi 14 avril 2015

(Re)prendre l'antenne…

Une voix est cachée dans la jungle
Sauras-tu la retrouver ?






















S'il suffisait de se mettre devant un micro pour faire de la radio… C'est ce que d'aucuns croient (1). C'est ce que l'auditeur peut entendre. Sauf s'il sait la frustration, le manque, le trouble à relancer la machine. La machine de la voix, la machine des idées, la machine de la concentration. Revenir dedans. "Revenir au monde" chante Dominique A. Au monde de la radio. Dans la bulle. Dans sa bulle. Mais aussi "en ondes". Avec l'antenne. Avec sa chaîne. Avec celui ou celle qui écoute. On parle pour lui ou pour elle toute seule. Ou avec tous ceux qui écoutent. Celui qui parle sait à qui il s'adresse.

Hier la grève continuait à Radio France. Une voix de Fip en région doit prendre l'antenne à 13h. Elle connait le programme musical sur lequel elle va mettre sa voix. À 13h c'était reggae et nous aurions du entendre ça : 
"En direct, même à la Jamaïque, l’étendard du reggae est levé, il n’est pas sanglant lui. Peace and love my friends, la planète Fip prie Rastafari pour que le grand DJ nommé par une Fleur puisse nous sortir du fossé… Peste ou choléra, le débat sera cornélien mais sur Fip, le programme musical sera estival comme le temps…" (2)

Mais, grève oblige, il faudra attendre 15h14. Et quand 27' avant de prendre l'antenne l'annonce de grève superpose la musique, pas facile de se dire qu'il peut encore y avoir des auditeurs à l'écoute. La mécanique de la radio repose sur des processus continus et/ou fluides. Dès que la fluidité s'érode, l'exercice de parler devient plus difficile, plus lointain, plus stressant. Qui entend cela ?

Aujourd'hui 27ème jour de grève à Radio France… 

(1) Y'a même des journaux culturels qui sans vergogne affichent ce label "radio" pour diffuser de vagues et pathétiques interviews de vedettes pipoles,
(2) Je n'écoute pas la radio que depuis mon "poste", mon ordinateur ou mon smartphone. Quelque fois je l'écoute là où elle se fait.

lundi 13 avril 2015

Lettre ouverte à Dominique-Jean Chertier, médiateur de Radio France…

Vue du ciel, pour prendre un peu de hauteur




Monsieur le Médiateur,

Vous venez d'entrer dans la ronde maison qui depuis vingt-cinq jours n'a plus l'air mais a gardé la chanson… au cœur. L'air elle l'avait pourtant tenu depuis cinquante deux ans. Entonné sous le Général il s'est fredonné jusque sous Hollande. Ce dernier chantant faux, l'air commença à lui manquer jusqu'à l'étouffer en mars de cette année. Et voilà les auditeurs - publics - brusquement sevrés de la diversité de l'offre de Radio France. Privés de leur petite musique quotidienne au tempo du rythme des jours et des nuits qui accompagne leur vie.

Les auditeurs sont tristes, grognons, ulcérés, vengeurs, dépités, agacés. Compatissants, solidaires et inquiets. Inquiets pour l'avenir de la radio publique qui pourrait bien passer par pertes et profits de la managérite qui a gangrené le service public français. Inquiets pour la création radiophonique qui n'existe pratiquement qu'exclusivement sur le service public. Inquiets pour le son, label d'excellence de ce média, jusque là étalon de la mise en ondes, image de marque du service public. Inquiets de la brutalité avec laquelle un Pdg entonne "du passé faisons table rase" lui dont on ne souvient pas l'avoir entendu chanter l'Internationale (1).

Tout à votre écoute de l'intersyndicale et des salariés vous n'aurez sans doute pu entendre Fabrice Arfi (2) dire sa stupéfaction que M. Gallet en appelle à l'État-actionnaire alors que les actionnaires de Radio France sont les citoyens français. Les auditeurs et les autres. Cet abus de langage montre s'il en fallait le peu de cas que fait M. Gallet des auditeurs dont il pense sûrement qu'ils appartiennent à une galaxie spatio-temporelle floue. Si floue qu'il n'y aurait que Médiamétrie pour lui rappeler à date fixe que les auditeurs ne comptent pas pour du beurre.

Un désastre
La situation que vous découvrez est désastreuse. On s'apprêtait en haut lieu à rejouer "Chronique d'une mort annoncée" alors que dans le brouillard, tombé depuis le 19 mars, on aimerait bien (re)voir "Le jour se lève". Vous me pardonnerez de filer la métaphore cinématographique. Je ne crois pas manquer de références radiophoniques mais ce n'est pas le moment d'évoquer "Les riches heures de la radio publique" que vous avez sûrement pu vous-même apprécier comme auditeur.

Il n'y a pas de fatalité à la mécanique infernale qui s'est installée à Radio France. Un seul homme peut-il avoir le pouvoir de décider seul de l'avenir d'un média public au détriment de l'histoire, de la transmission, de la culture d'entreprise ? Fleur Pellerin souhaite absolument "qu'un dialogue social effectif et respectueux sur le projet stratégique de Radio France permette notamment un partage du diagnostic et un travail sur la méthode". 

Souhaitons que vous réussissiez dans cette entreprise sur le fil du rasoir d'un enjeu de société. Si vous n'y pouviez la radio publique se propulserait à la vitesse du son dans un changement d'ère radical et fatal dont les conséquences dépasseraient largement les limites de la Maison de la radio. La radio est "une action humaine, autrement dit collective" déclarait le Général de Gaulle lors de l'inauguration de la Maison de la radio en 1963. Cela nous concerne tous et concerne tous les secteurs de la société. Tous les domaines de notre vie.

Un service public essentiel
La Maison de la radio n'est-elle pas le lieu idéal de la médiation ? Et pour parodier un slogan de France TV en cours, ne pensez-vous pas qu'il y a lieu d'afficher clairement "Radio France ce service public plus essentiel que jamais"

Je ne sais pas s'il est dans les attributions de votre fonction d'écouter ceux pour qui la radio est destinée. Pourtant les auditeurs ont des choses à dire. Comme la loi les y incite les associations de consommateurs pourront bientôt siéger aux Conseils d'Administration des entreprises audiovisuelles publiques (3). En attendant, peut-être serez-vous intéressé d'entendre quelques-uns d'entre eux qui, pour une fois, pourraient vous faire part de leurs façons d'écouter, de leurs attentes, de leurs souhaits. Au-delà des "J'aime" "J'aime pas" coqueluche tendancielle à caractère contagieux.

Pour ma part, je suis prêt à vous rencontrer à votre convenance,

(1) Paroles d'Eugène Pottier, 1888,
(2) Journaliste à Mediapart, in "Le Tube" Canal+, 11 avril 2015,
(3) Les conseils d’administrations de France Télévisions et de Radio France doivent comporter désormais un représentant des associations de défense des consommateurs, agréées au niveau national, désigné par le CSA parmi les personnalités indépendantes dont la nomination lui incombe. Pour France Médias Monde, le CSA désigne un représentant de l’Assemblée des Français de l’étranger (Loi du 15 novembre 2013)