à Jean Morzadec,
Le Conquet-radio en 1966 |
Biberonné à la radio depuis la mort de John Kennedy, je n'aurais jamais imaginé qu'un jour je puisse en être. En fus-je ? En suis-je ? Je sais pas. Mais j'ai été dedans. À fond, sans compter. Tout en contant. Franchement le 17 juillet 2011 je n'imaginais pas m'engager si loin, si longtemps dans l'aventure. Je me suis pris à mon propre jeu. Et j'ai voulu attraper la globalité de la chose comme souvent je l'ai fait dans ma vie professionnelle. Alors forcément à l'écoute j'ai ajouté, les rencontres in situ à la Maison de la radio (Paris), les entretiens avec les productrices et producteurs, une écoute frénétique des archives, des lectures comme s'il en pleuvait et pas que les mémoires de Dhordain ou d'Artur. À partir de là pendant sept ans j'ai mis mon pas dans celui de la radio. Radioactif aurait dit Pierre Bouteiller.
Et j'ai eu de grandes satisfactions. Grâce à la confiance de Laurent Le Gall et Anne-Claire Lainé j'ai pu, à l'occasion de plusieurs éditions du Festival Longueurs d'Ondes de Brest, faire partager aux festivaliers mes passions radiophoniques. Je l'ai écrit plusieurs fois sur ce blog, toutes ces années j'étais dans la radio par la porte ou la fenêtre et d'une certaine façon je faisais partie de la famille. C'est pour ça que Guy Senaux n'hésita pas à m'inviter à l'hommage à Jean Garretto en octobre 2012 quelques semaines après la mort de ce génialissime producteur, inventeur avec Pierre Codou de "L'Oreille en coin" et de Fip. Ma mémoire et mes recherches permanentes autour de la radio m'ont permis d'écouter les histoires aux professionnels de la profession, de leur en raconter et ainsi de constituer un petit univers en perpétuelle révolution autour des ondes.
À cela il faut ajouter ce qu'Etienne Noiseau (Syntone) a appelé mes indignations. Et elles n'ont pas manqué depuis qu'un certain Mathieu Gallet, ex Pdg de Radio France révoqué par le Csa le 1er mars 2018 (qui se déjuge face à l'unanimité avec laquelle l'officine avait nommé le Pdg en février 2014), qui a voulu avec arrogance, inexpérience et morgue bousculer violemment la radio publique. Sans aucune autre vision qu'un mantra : "Numérique is good for you" en sautoir, l'ingénu a mis sur les rails la mue de ce média avec autant de subtilité et de diplomatie qu'un éléphant du PS dans un magasin de porcelaine socialiste (époque Ming). Avec des techniques de management sans aucun rapport ni avec la chose publique ni avec l'audiovisuel. Parachuté à l'Ina par un certain Mitterrand (Frédéric) le jeune loup, pour couverture de magazine people, a réussi à mettre en grève 28 jours la Maison ronde en 2015 au début de son mandat. À l'époque ayant assisté à neuf A.G. de grève, je compris assez vite que le mouvement était lancé et que la création radiophonique était derrière nous. Pour la casse de la radio deux noms resteront dans l'histoire : Giscard fossoyeur de l'ORTF, Gallet fossoyeur de Radio France.
C'est à partir de là que mon écoute radio quotidienne a sérieusement baissé. À Radio France les programmes sont devenus un prétexte pour qu'en arrière-cuisine une armée mexicaine de manageurs et autres apprentis-sorciers numérisent à tout va, se prosternent devant l'IA (1) et n'aient plus que deux mots en bouche "média global", soit l'alpha et l'oméga de la tarte à la crème de la start-up Nation. Ajoutez à ça le rouleau compresseur de la loi audiovisuelle à venir et vous aurez tous les ingrédients d'un big bang dont la radio - média audio - ne se remettra jamais. Nous l'avons écrit avec Francine Leduc dans Libération "Ils vont tuer la radio" (2). Mais la com' étant devenue le 4ème pouvoir la radio roucoule nuit et jour pour nous faire accroire que rien n'a changé. Les programmes sont annoncés en tête de gondole particulièrement s'ils sont animés par des têtes d'affiche bankable et mutantes sur tous les supports… Têtes d'affiches qui, reconnues en TV, prolifèrent à la radio de façon virale et endémique.
Alors toutes ces conditions "réunies" il me fallait bien tirer l'échelle, constater la faillite du système, mon désintérêt exponentiel et une pointe de lucidité pour dire STOP. J'écrirai sur la rentrée radio. Sur la "réforme" de Fip et sur la loi audiovisuelle. Hormis ça, je devrai tout l'été écouter "Retour de plage" de Thierry Jousse (juillet) et Laurent Valero (août) sur France Musique (18h/20h, du lundi au vendredi)… Eux ils font vraiment la radio que j'aime !
À bon entendeur, salut !
(1) Et pas à la façon flagorneuse du nouveau directeur d'Europe 1 venu roucouler au micro de Quotidien (TMC) en essayant de nous faire accroire qu'il avait passé sa vie à fréquenter Pierre Bellemare… T'as raison Léon, mais j'aime pas trop l'usurpation et la flagornerie…
(2) Le summum du ridicule restera la prestation de Gallet à la conférence de presse 2017 qui faisant le beau sur scène roucoule "Ok Google…". À côté "Au théâtre ce soir" pouvait faire sourire, là on est proche de la tragi-comédie grecque. Quant aux directeurs de chaîne qui s'esbaudissent d'une telle pantomime c'est juste pitoyable et navrant…
(3) et son rectificatif,