lundi 4 juin 2012

Agrippine agrippante agrippée…

© Bretecher



Ah la belle pastille ! Ah les bons mots ! Quel coup de "crayon" ! Quelle langue ! Du Bretécher en feuilleton ! Savoureux ! Inattendu ! Surprenant ! Qui l'eut cru ? Si l'on a suivi, chaque semaine (autrefois), Agrippine dans le Nouvel Observateur, doivent être restés gravés le trait, l'époque, les réparties, l'insolence et/ou la naïveté touchante de cette peste d'ado. Une ado bien dans le ton de son époque (années 90), en phase. Pas du milieu rural profond bien sûr, de la Creuse (1) ou du Bas-Léon… mais citadine et jargonnante branchée, et tout à fait attachante. Lire "Heidegger au Congo" est déjà, en soi, impayable !


La bonne idée de ce feuilleton a été de ne pas "choisir la facilité d’un narrateur descriptif, … [et] préférer travailler exclusivement dans le dialogue, faire surgir le trait de crayon dans la langue et restituer de cette manière la vélocité linguistique de l’héroïne et la férocité tendre de son auteure." (2) Voilà bien la bonne alchimie. J'aime beaucoup la "vélocité linguistique" et la (ré)invention permanente des mots. On est dedans. Grâce, sans doute, à une réalisation "punchy" et à une foultitude de comédiens qui "jouent" le jeu de la bande… dessinée.

Dans le 1er épisode, téléscopage de quatre générations (par 4 femmes interposées) qui se confrontent et découvrent, de façon impromptue et désopilante, l'existence d'une… arrière grand-mère. En même temps que j'écoute, j'imagine le dessin de Bretécher et sa façon incisive, en une page magazine, de croquer la vie quotidienne et banale. Voilà de quoi, à l'issue d'une journée harassante, se vautrer dans son sofa et se détendre, bien mieux qu'à laisser défiler des images bien calibrées. (3) Une belle réussite qui montre que le feuilleton sait s'adapter à son époque, dans un format qui laisse le temps de s'installer dans l'histoire (4).

Tiens, puisqu'on en parle, sur Culture les feuilletons durent 25mn quand sur France Bleu ils ne dépassent jamais 5mn. Bigre, la différence est de taille. M'expliquera t-on un jour la prédisposition "naturelle" des auditeurs de Culture à se concentrer, opposée à celle de Bleu dont les auditeurs auraient du mal à ne pas se disperser… France Bleu aurait-elle donc une typologie d'auditeurs si marquée ou sont-ce les programmes de radio eux-mêmes qui incitent à la dispersion ? Bien amenés, bien promus, bien présentés, des feuilletons, type ceux de Culture, y trouveraient leur place. Mais qui a envie de promouvoir ce type de création sur cette chaîne ? Je lance une bouteille à la mer.

(1) Message subliminal,
(2) In le site de l'émission,
(3) France Culture, du lundi au vendredi, 20h30,
(4) Grâce à l'excellente vigie Syntone, je constate que j'avais laissé passer une série de 10 Micro-fiction, Les frustrés, diffusés fin mars sur France Culture, et réécoutables sur le site de l'émission.

9 commentaires:

  1. Il faut souligner la présence au générique de Sophie Bissantz, modeste et géniale magicienne du son et des bruits en tous genres à la radio!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Sacré Jakki quelle culture sonique ! Et tu entendras ce soir c'est une belle réussite. Nos chers auditeurs apprécieront !

      Supprimer
  2. A propos de France Bleu, en admettant à la rigueur que l'on puisse proposer des programmes relativement courts, on est en droit de se demander si cette chaîne n'est pas la championne d'un consensus mou opérant dans une absence sidérante de contenu ! Il paraît qu'il en faut, des radios de ce genre... Mais dans le cadre du service public, c'est surprenant, non ?
    Cactus

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je n'ai pas eu le sentiment que "La Campagne à vélo" soit "mollement consensuelle" ou probante en terme "d'absence de contenu" et pourtant il s'agissait bien d'une initiative du réseau France Bleu.
      J'écoute assez rarement ce réseau mais la journée proposée récemment par France Bleu Armorique autour du thème de la pêche à Saint-Quay-Portrieux ne m'est apparue ni quelconque ni particulièrement critiquable.Une journée radiophonique simple et de bon aloi vécue en direct est toujours bien agréable à écouter sans prise de tête (du moins pour l'auditeur parce que pour la chaîne c'est sûrement un peu plus compliqué à mettre en place).

      Supprimer
    2. Certes... Mais si j'ai bien compris "La Campagne à vélo" est loin d'être une production de France Bleu. C'est avant tout un "Web Doc" à l'initiative de réseaux sociaux divers, avec la participation de Raphaël Kraft connu pour ses productions sur France Inter... Sur les ondes des locales, il fallait je crois attendre 23h30 pour l'entendre dans la tranche d'Evelyne Adam, tranche nationale produite par Paris...
      Cactus

      Supprimer
    3. Raphaël Kraft et son collègue Alexis Montchovet ont eu comme "sponsors"/partenaires France TV et France Bleu. Ils sont indépendants et ont bénéficié de la promotion de leurs aventures sur une page Facebook de France Bleu et la diffusion de leurs "Web docs" sur le site de France TV. Cette campagne à vélo ne concernant pas la radio ils n'ont produit aucun reportage radio. Plusieurs jours après leur départ Kraft intervenait chaque mardi à 21h30, environ 5mn, dans l'émission "nationale" d'Evelyne Adam. Plutôt pour faire le point, annoncer leurs passages à venir et solliciter leurs accueils d'étape. Voir mes chroniques des 3, 12, 14 et 19 février.

      Supprimer
  3. Bonjour Fanch. Je lis avec attention vos billets quotidiens et je voulais vous signaler ainsi qu'à vos lecteurs, à propos de la durée des séries et feuilletons sur les radios du réseau de France Bleu, qu'il ne faut pas occulter les initiatives personnelles de certains directeurs. En effet, il y a deux ans, à l'occasion du 50ème anniversaire du lancement du paquebot France, France Bleu Loire Océan a rediffusé la série sur le paquebot France que j'avais écrite (en 1990, racontée par Claude Villers) et dont chacun des huit épisodes durait vingt minutes. Elle a été rediffusée en intégralité, et cette (longue) durée n'a apparemment déplu à personne, et surtout pas aux auditeurs ! Concernant le Titanic (que je viens d'écrire et réaliser, vous en avez parlé), sa durée de 4'20 est exceptionnelle pour la période (sic !). Elle a été possible là aussi grâce à la volonté de Gérard Coudert, directeur de l'Atelier du Grand Ouest et de Bruno Leroy, directeur de la région Normandie et Nord. Sinon, la durée du moment est de 2'30. Mais, comme je le dis souvent, la durée n'est pas un problème. Ce qui est essentiel, c'est ce que l'on raconte pendant ce temps déterminé. Et il arrive aussi que des séries de 20 à 25 minutes, tout comme des "pastilles de 2' soient ennuyeuses dès les premières secondes... Christian Clères

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour et merci beaucoup Christian Clères pour votre participation à ce débat. Il est bon que vous citiez les promoteurs d'une création de qualité MM. Coudert et Leroy. Tout à fait d'accord sur votre conclusion. Pour autant il conviendrait de ne pas diffuser les documentaires des ACR décentralisés comme, vous me pardonnerez l'expression, "des cheveux sur la soupe". Leur annonce, leur mise en ondes doivent bénéficier d'un temps particulier d'interpellation de l'auditeur, être entourés, avant et après diffusion, des meilleures attentions de la part de ceux qui les "lancent".

      Sur France Culture (comme sur Inter autrefois) le feuilleton dispose d'une case dédiée. Pourquoi ne serait-ce pas le cas sur France Bleu ? La série "Dans un an et un slow" de Claude Dominique, produite par les ACR, faisait 40 fois 15mn ! Ne serait-elle donc plus diffusable aujourd'hui ? Au prétexte de quoi ? Que l'auditeur de France Bleu en moins de 20 ans a perdu ses capacités de concentration ?

      Votre argument de créateur était utile à notre débat. J'attends maintenant des réponses de la part des responsables de la chaîne qui ont sûrement des choses à dire.

      Je vous souhaite de belles histoires à écrire et nous souhaite de les écouter bientôt en un peu plus de 2'35" de bonheur, comme le chantait autrefois Sylvie Vartan avec la complicité de Carlos (désolé de ces références un peu légères)

      Supprimer
    2. Merci Fanch ! Effectivement, vous avez parfaitement raison : une série a besoin d'être bien entourée, annoncée, bichonnée, protégée et il y a souvent beaucoup de progrès à faire ! Quant à la référence musicale, n'ayez crainte : je revendique le droit "pour tous" d'aimer à la fois Bach, Cure et (certaines chansons) de Salvatore Adamo ! Amicalement. Christian Clères

      Supprimer