À l'époque d'une B.N.P. (1), aux antipodes d'un Monde d'après-guerre, il n'est pas inutile d'entendre le témoignage d'un ancien de ce Monde-là ! Laurent Greisalmer était hier l'invité de Jean Lebrun et de sa marche de l'Histoire (2). Greisalmer "adjoint" d'Eric Fottorino quand ce dernier dirigeait Le Monde avant que le journal soit "acheté" en 2010 par le trio dont l'acronyme fleure "bon" la banque. Soit un monde absolument honni par Hubert Beuve-Mery le fondateur du journal à la Libération.
En décembre 1945, De Gaulle n'a plus "Le Temps" (3) et il voudrait toujours l'avoir… (pour gouverner) et pour le lire. Ainsi commence l'histoire d'un journal dont Lebrun et Greisalmer brossent les vingt-cinq premières années…
Hier France Inter a passé la journée au "Monde". Dans la matinale Patrick Cohen recevait vers 8h40, Arnaud Leparmentier, Sylvie Kauffman et Raphaëlle Bacqué, tous trois journalistes au quotidien. Cohen sans le vouloir a fait dire à Leparmentier "C'est Alain Frachon qui écrit les éditos"… Bigre ! Autant dire qu'un "tabou" est tombé, car l'édito , jamais signé, aura dorénavant un nom.
Pour une fois j'ai écouté une matinale de bout en bout et j'ai été assez séduit d'être vraiment dans "Le Monde" et d'avoir les points de vue de celles et ceux que l'on a plus ou moins l'habitude de lire. Il s'agissait aussi de comprendre la fabrique du journal et ce qui présidait à son édition quotidienne.
Et Lebrun de dresser à 13h30 le portrait de l'icône Beuve-Mery.
Cette mécanique s'est un peu plus dévoilée à 18h15 dans l'émission de Nicolas Demorand au titre ce jour-là très raccord "Un jour dans le monde". Et de 21h à 23h, Rebecca Manzoni et Demorand ont prolongé et détaillé ce "Voyage au centre du Monde". Alors pour une fois on est passé du "format court", de la brève, à un "format long" pour approfondir un sujet avec la participation des acteurs du journal qui avaient beaucoup de choses à dire, et qui ont donné une autre image du "Monde" et de leur quotidien, même quand on le connaît bien pour le lire presque chaque jour.
Ce sont aussi les voix du "Monde" qui ont fait l'attrait de cette journée spéciale. Voilà donc le plus que la radio publique peut apporter dans le traitement "fouillé" d'un sujet en donnant à entendre ses acteurs au-delà des séquençages cadencés habituels. Un p'tit coup d'chapeau donc à Inter d'avoir "osé" un vendredi soir, consacrer deux heures à un journal qui, s'il n'est plus austère, n'en est pas devenu pour autant un modèle de fantaisie, dont on pourrait évoquer l'histoire entre deux refrains à la mode.
À l'issue de "La marche de l'Histoire" de jeudi (voir ci-dessus), Jean Lebrun cite Éric Fottorino (4) "Le Monde a rejoint la cohorte des titres renommés dont le sort est désormais lié [au capital et au bon vouloir] des capitaines d'industrie et de finance". CQFD.
Et si Beuve-Méry a pu dire «La France a eu trois chances, la Libération, De Gaulle et… Le Monde», la bonne question à se poser 70 ans après sa création est : "Le Monde en est-il toujours une ?".
Et si Beuve-Méry a pu dire «La France a eu trois chances, la Libération, De Gaulle et… Le Monde», la bonne question à se poser 70 ans après sa création est : "Le Monde en est-il toujours une ?".
(1) Le trio capitalistique Berger.Niel.Pigasse,
(2) France Inter, 13h30,(3) "Après guerre, le journal étant accusé de collaboration, ses locaux situés 5 boulevard des Italiens sont réquisitionnés et son matériel est saisi ; Le Monde, qui commence à paraître en 1944, sera le bénéficiaire de cette confiscation : la typographie et le format resteront longtemps hérités du Temps." (source Wikipédia),
(4) Créateur depuis mars 2014 avec Laurent Greisalmer de "Le 1, hebdo", un journal qui, chaque semaine, se déplie autour d'un thème.
Radioscopie, 18 février 1974
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