dimanche 13 octobre 2019

Le bon plaisir de la radio… de création (7)

Il est des noms qui sonnent… avec le son ! Mais, avant de rentrer dans l'affaire, il y a l'annonce, le "premier" micro, celui qui va brosser le paysage. Et là, dans ce que vous allez entendre, il y a non seulement la "vedette" Michel Creïs, ingé-son, mais la coordinatrice de l'émission, (ne se contentant pas d'ânonner un texte insipide qui nous raconte ce qu'on va entendre…) qui non seulement incarne son émission mais sait de quoi elle parle. Avec sensibilité et attention. Irène Omélianenko aimait, vivait, pensait la radio quand tant d'autres se contentent d'en faire…  


Michel Creïs


















J'ai écrit de nombreux billets pour évoquer la fabrique de la radio et quelques uns sur les ingénieurs du son : Paranthoën, Senaux, Beurotte, Le Hors. Cet épisode de "Creation on air" est touchant et sensible quand il montre à quel point l'ingénieur du son prend en compte des dizaines et des dizaines de paramètres qui font et ont fait le savoir-faire d'une profession tirée par l'excellence. L'ingé-son joue avec le studio, les micros, les consoles, les couleurs, les réalisatrices (et réalisateurs) et une palanquée de "ratons-laveurs"… Il met tous nos sens en éveil et développe de façon aigüe notre capacité d'écoute. Qui aime la radio ne peut se contenter de l'écouter, il doit la comprendre. Il faut donc savoir la raconter par le menu et surtout la faire se raconter par ceux qui sont ses acteurs premiers.

L'époque veut qu'on s'attache aux résultats et presque plus à la démarche. Qui prend conscience en mangeant son poisson ce qu'il a fallu aux pêcheurs mettre en œuvre pour qu'il arrive dans notre assiette ? Qui en montant dans sa voiture pense à sa manufacture ? Quelle Pédègère de Radio France écoute les professionnels de la profession pour comprendre leurs métiers avant de décider ci ou ça pour eux d'une façon managériale mais certainement pas d'une façon "artistique". (1)

Je ne suis pas le premier à le dire ou à l'écrire : l'école devrait aussi nous apprendre ça, ça changerait nos façons d'écouter, de comprendre la "réalisation" de la radio, de ne plus mégoter pour une redevance indispensable aux moyens techniques et humains, de supporter sans rien dire le fait du Prince (Président de la République) et de son affidé le Ministre de la Culture prêt à jeter la radio avec l'eau du bain télévisuel, de laisser faire des député.e.s qui votent des budgets et des orientations sans ne connaître de la radio que des vedettes et des chiffres, de confier à des marketeurs et des manageurs (de moins de cinquante ans) la gestion de la création audiovisuelle qui ne se résume pas à des bilans et des comptes d'exploitation ! 

Irène Omélianenko, Michel Creïs, et tant d'autres avec eux, ont fait de la radio une université populaire. Il est urgent aujourd'hui d'en prendre conscience avant que la radio ne soit plus associée qu'à des chiffres : ceux de Médiamétrie, ceux des podcasts, ceux des moindres événements qui font la com' et la roucoule et éclipsent progressivement la radio de création qu'on a pu appeler "art radiophonique".



(1) Jacqueline Baudrier, journaliste, première Pédégère de Radio-France (1975-1981) confiait à Jacques Chancel au cours d'une Radioscopie que souvent le soir avant de quitter la Maison de la radio elle écoutait "Pas de Panique" de Claude Villers (France Inter, 1973-1975, 20h/22h).

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