Gallet et son mentor Schlesinger |
En ces périodes troublées de primaires, de primates (politiques), de médiatisation des égos, de renonciation du Prez, d'apparition de tout à chacun comme un va-tout possible dans des équipes de campagne et/ou de futures équipes ministérielles, deux titres de presse "L'opinion" et "Challenges" sortent opportunément de leur chapeau-carnet d'adresse, Mathieu Gallet, Pdg de Radio-France. Revue de détail.
Dans ces deux portraits, bien parti pour que jusqu'à ses 60 ans on s'acharne sur sa jeunesse, sa gueule et sa grève historique de Radio-France, le Pdg apparaît : droit dans ses potes (son réseau), adroit avec sa droite (Mitterand Frédéric, l'a nommé président de l'Ina en 2010), gauche avec sa gauche (Fleur Pellerin, ministre de la Culture pendant la grève n'a rien lâché). Mais vous savez quoi, le must, c'est qu'il est "provincial" (sic). Ç'est vrai qu'à Paris les dirigeantes-dirigeants des entreprises publiques, privées, des administrations sont toutes-tous Parisiennes-Parisiens, n'est-ce pas ? Alors vous pensez bien que si la presse en tient un de provincial, elle ne le lâche plus !
Les deux articles brossent surtout le-management-du-manageur-et-son-parcours-magérial-"époustouflant". Mais de radio qui s'écoute, peu. Bien peu. La radio est abordée en termes de stratégie, de structure, de bons chiffres de France Inter, de mauvais chiffres de Mouv', de bâtiment, de personnel, de podcasts pubés, de chiffres comptables et de masse salariale. Mais pourquoi donc ces deux articles s'intéresseraient-ils à la radio ? Dans les deux cas, l'angle choisi étant l'homme-Pdg et surtout pas l'homme-radio... qu'il n'est pas.
On soupèse son aura (médiatique), son entregent (politique), sa carrière (météorique) et on n'évite pas de sonder ses attentes... ministérielles, des fois qu'après avoir publié une tribune réactive dans Le Monde (1) sur les dangers de privatiser l'audiovisuel public, il faille se rappeler aux bons souvenirs de ceux qui seront aux affaires demain. Et puis franchement la radio : un épiphénomène, non ? On l'a vu, le Pdg est multi-cartes. Alors ce qui sort des "tubes" laissons-en la gestion et la parole définitive au directeur éditorial du groupe, Frédéric Schlesinger.
Pour parler radio, Mathieu Gallet n'a pas la classe de son lointain prédécesseur Jean Maheu. Ce dernier, à peine nommé en 1988, interrogea ses équipes pour savoir quelle était "cette belle voix qu'il entendait tous les jours à la radio" et dont il avait oublié le nom... On trouva vite qu'il s'agissait de Daniel Mermet tout juste viré de l'antenne par Eve Ruggieri, qui ne put faire moins que d'offrir au producteur, l'année suivante, "Là-bas si j'y suis" (1989-2014). Le même Mathieu Gallet qui, en septembre 2014, devant Yann Barthes du "Petit journal", feint d'ignorer la voix dudit producteur.
S'il avait fallu parler radio, au delà de la clinquaille des chiffres de Mediametrie, Gallet aurait dû évoquer l'ambiance délétère qui s'est installée depuis la grève dans la Maison ronde, l'inquiétude grandissante des personnels sur les moyens alloués à la production (et la future délocalisation des studios moyens pour travaux) face au développement exponentiel des cadres de l'entreprise qui, par essence, ne "font pas la radio" mais "se servent sur la bête". Parler de l'avenir de franceinfo (radio) et de celui de France Bleu (2), au-delà de la nomination de son nouveau directeur, de Fip Nantes et de l'arrêt de l'animation d'antenne les samedis et dimanches, de la rotation des mêmes invités sur au moins trois, voire quatre, des chaînes du groupe la même semaine (3). Parler boutique quoi, et ça le Pdg ne le fera jamais, ou jamais sans son éminence grise, Schlesinger.
La presse ne se lassera donc pas d'applaudir aux choix stratégiques d'un Pdg dont le projet stratégique est toujours sous embargo dans la tour d'ivoire du CSA (Tour Mirabeau, Paris XVème). E la nave va...
(1) Le Monde du 14 septembre 2016. Voir aussi la réponse de Olivier Babeau, professeur d'économie, le 17 septembre. Lire aussi la lettre ouverte de Christian Combaz du 17 septembre dans Atlantico,
(2) Syndrome provincial toujours, à la une de La lettre pro de la radio n°84, Éric Revel (directeur France Bleu), "Mes racines sont provinciales et populaires" (sic). La meilleure garantie pour diriger un réseau d'antennes locales n'est-il pas ?
(3) France Inter, France Culture, France Musique, France Info.
Demain un feedback spécial.
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