"Si je l'suis" ! Et bam ! La semaine dernière, entre deux riens, sans rire, le Président-candidat annonce, la Contribution à l'Audiovisuel Public (CAP) définitivement rayée des cartes. Bingo ! 138€ d'économies à investir direct sur les plateformes audio et visuelles privées ! C'est chic non ? Un de ses prédécesseurs, Giscard à la barre, moins de 90 jours après son élection en mai 1974, éparpille façon puzzle, l'ORTF, en sept sociétés publiques indépendantes. Radio France née de ce schisme émettra sous ce nom à partir du 6 janvier 1975. C'est une manie, les Présidents de la République n'aiment rien tant que casser les services publics. Et quand il s'agit de l'audiovisuel ils se sentent pousser des ailes !
Après cette annonce, dans l'air du temps pré-électoral, reprenant les thèmes de campagne de la droite et de l'extrême droite, les sociétés audio-visuelles publiques (Radio France, France Télévisions, Ina, France Média Monde et Arte) sont K.O. debout. Pour atténuer les effets dévastateurs sur le moral (et les finances) des troupes, le gouvernement rétro-pédale en mode "Le service public audio visuel public doit continuer d'exister" ! Oui mais comment ? Là, tout et son contraire se bafouille.
Inscrire 3,8 milliard au budget annuel de l'État comporte les risques annuels que cette somme joue tous les ans du yoyo. Autant d'inquiétudes à avoir si la CAP est remplacée par un plan de financement pluriannuel via une loi de programmation, comme il en existe dans la recherche. L'alternance politique mettant, de fait, en jeu, tous les cinq ans, la fragilité d'une telle option. Macron Président, Macron candidat, ont donc fait un énième effet d'annonce. Rocard à la suite de Mendès-France a toujours stigmatisé cette façon de faire de la politique.
L'effet d'annonce est toujours suivi du "On verra bien". Si ça c'est faire de la politique, autant dire que tout à chacun fait de la politique comme M. Jourdain fait de la prose. Quand fier-fière comme Artaban elle ou il annonce "Demain je tonds la pelouse" quand une tempête avec des vents à 130 km/heure est annoncée. Ou plus responsable "Je ne dirai du coup plus jamais du coup.". Du coup, Macron joue au poker ! Pour voir. Et entendre. Sa majorité, ses opposants, et l'audiovisuel public tout entier qui, depuis une semaine ne s'est pas ménagé pour crier "Au secours, on nous assassine !"
On notera que Madame Veil, Pdgère de Radio France contrairement à ses habitudes de communication sur les rézo n'a pas jugé utile de s'exprimer via Twitter. Quand on sait sa propension absolue, sur l'oiseau bleu, à régulièrement nous informer des événements petits ou grands qui émaillent sa Présidence. La boum organisée fin janvier dans les locaux de la Maison ronde. Tel concert exceptionnel à l'auditorium. La convention Machin signée avec Truc. Et la roucoule permanente pour telle ou telle nomination à la radio.
Bizarre non cette impasse ? M'est avis qu'elle doit être un peu gênée aux entournures quand cette annonce émane de son camarade de promotion à l'ENA. Toutefois pour ne pas être en reste, elle s'est fendue d'un communiqué à la presse pour rappeler l'impérieuse nécessité de l'indépendance financière de l'audiovisuel public. Pouvait-elle faire moins ?
Julia Cagé, économiste, spécialiste d'économie politique et d'histoire économique, a publié dans Libération le 9 mars une tribune "Suppression de la redevance télé : la honte de la République" (1). En boomerang d'un autre effet d'annonce dévastateur de Macron "L"audiovisuel public, la honte de la République". La tribune de Cagé résume parfaitement les enjeux de la disparition de la CAP. Et pointe du doigt, s'il en faut, la légèreté d'un Président de la République pour la chose audiovisuelle.
En 1965, De Gaulle en ballotage face à Mitterrand au deuxième tour de la Présidentielle n'avait pas jugé utile dès le premier tour de faire campagne à la TV. Mépris de sa part pour un média qui allait devenir dominant. Les Présidents successifs depuis lors n'ont jamais cherché à garantir la pérennité de l'audiovisuel public. "Depuis la nuit des temps" l'audiovisuel public et son financement devraient être sanctuarisés à l'abri des fluctuations politiques.
Un tel vecteur d'influence, aucun politique prêt à en assumer l'autonomie et l'indépendance financière absolue !
(1) Abonnés, https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/suppression-de-la-redevance-tele-la-honte-de-la-republique-20220309_LA356LVHZZEFTD6UHQLXVVCIIQ/
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