lundi 19 février 2018

Effets d'annonce pour l'audiovisuel public : n'en jetez plus, ça déborde !

La grande tambouille des annonces successives et quelquefois contradictoires concernant l'audiovisuel public commence à largement déborder. Ça bout depuis trois mois et ça n'en finit pas de bouillir. Une annonce chasse l'autre précédée de son effet. Effet dévastateur, tragique, superfétatoire, et plus si affinités. L'Élysée, le Gouvernement et le Ministère de la Culture jouent une partition à trois bandes dans une partie interminable, juste propre à aiguiser les nerfs et à faire perdre leur sang-froid aux dirigeants, aux salariés comme aux usagers. Usagers qui assistent béats à une séance croquignolesque de grand guignol. 

Ernotte (FTV), Gallet (RF), Saragosse (FMM), Vallet (Ina)


















Dernier avatar en date, Le Monde dans son édition de dimanche nous apprend que pour l' "Audiovisuel public : Mme Nyssen veut une présidence commune". Ben ça alors, on s'en serait à peine douté ! L'exécutif en remet une couche alors que dans le même temps un groupe de travail parlementaire (1) a pour "objectif de formuler des propositions en bonne intelligence avec tous ceux qui travaillent sur ce dossier." L'opération de communication en plan très large est à l'œuvre. Quand le gouvernement et les parlementaires auraient pu choisir de travailler "en silence" sans passer leur temps à influencer ce qui pourrait participer du fameux big-band audiovisuel annoncé pour l'automne avec une loi à la clef !

L'effet d'annonce honni par MM. Mendès-France et Rocard (2) est ici à l'œuvre soit pour préparer les esprits, soit pour déstabiliser ou calmer les ardeurs des dirigeants publics en place - fortes têtes (comme Ernotte, Pdg de France Télévisions) ou radiés comme Gallet (3) - ou le remplaçant de ce dernier (4). D'autre part, Mesdames les Députées Frédérique Dumas et Aurore Bergé ont annoncé que les Français seraient consultés. Comment ? Via la presse spécialisée ? Internet ? La dernière fois que les Français ont pu se prononcer sur la radio publique ça a fait Pschiiitt (5) !

Mais alors c'est quoi cette stratégie de l'effet d'annonce permanent ? Giscard en 1974 a, sans complexe, joué le "Tonton flingueur" en éparpillant, façon puzzle, l'ORTF en sept sociétés autonomes (6), laissant sur le sable, en plein mois d'août un Office tout juste "vieux" de dix ans. Macron, lui, étire les préliminaires et ça ne manque pas de faire hurler. Ce long temps différé entre annonce et promulgation de la loi aurait pu être utile pour lancer une très grande consultation nationale participative. Au lieu de quoi ce sont de petits cercles politiques (auxquels sont associés de façon intermittente les responsables de l'audiovisuel) qui font bouillir la marmite et sans doute demain désespérer… Billancourt.

Ce Billancourt-là étant l'ensemble des personnels concernés qui devront s'adapter, au plus tard au 1er janvier 2019 à la nouvelle donne de l'audiovisuel public pour laquelle un seul homme, le Président de la République Emmanuel Macron, aura tranché. Sarkozy voulait ceci, Hollande cela, on peut craindre, une fois encore, que le fait du Prince ne tienne lieu de politique, de projet, ou de vision. Il n'y a plus d'autre alternative qu'attendre et voir au risque que l'usager soit désinvesti de penser l'audiovisuel nouveau et que les acteurs actuels (tous types de métier confondus) ne soient jamais consultés.

Ajout du 22 février,
Communication du 21 février de Mme Nyssen au Sénat : "Pas d'entreprise unique à ce stade" que nous rapprocherons de sa précédente déclaration évoquée ci-dessus : " Audiovisuel public : Mme Nyssen veut une présidence commune".






(1) Frédérique DUMAS, Bruno STUDER, Sandrine MÖRCH, Cathy RACON-BOUZON, Pascal BOIS, Pierre-Alain RAPHAN, Brigitte LISO, Céline CALVEZ, Fabienne COLBOC, Anne BRUGNERA, Aurore BERGE, Raphaël GERARD, Marie-Ange MAGNE, Sophie METTE, Gabriel ATTAL,
(2) Mendès-France, Président du Conseil (IVème République) qui a participé aux négociations pour la fin de la guerre d'Indochine (août 1954), Michel Rocard, 1er ministre de François Mitterand (1988-1991). Ces deux hommes n'utilisant jamais l'effet-d'annonce pour mener leur politique,

(3) Révoqué au 1er mars 2018 par le CSA de ses fonctions de Pdg de Radio France (2014-2018),
(4) Jean-Paul Vergne, administrateur le plus âgé du C.A. de Radio France assurera l'intérim jusqu'à la nomination d'un nouveau Pédégé/Pédégère par le CSA avant le 14 avril 2018,

(5) "Demain Radio France" enquête participative auprès des auditeurs, lancée par le Pdg de l'époque Jean-Paul Cluzel, janvier-mars 2009, dont les conclusions n'ont jamais été mises en œuvre, le nouveau Pdg Jean-Luc Hees ayant été nommé en mai 2009 par Nicolas Sarkozy,
(6) Radio France, France 2, France 3, TF1, Ina, SFP, TDF. "Oubliant" très volontairement le "Service de la recherche" de Pierre Schaeffer.

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