jeudi 27 octobre 2022

À voix haute, à voix basse, à voix perdue… ou comment postuler à la Présidence de Radio France !

Le 4 mars 2015, en soirée j'ai eu la mauvaise idée d'interrompre ma lecture de Truman Capote et de me plonger dans celle du rapport Schwartz qui ne pouvait rivaliser d'un point de vue littéraire,  Par contre d'un point de vue stratégique il allait marquer les années audiovisuelles qui ont suivi. On pouvait lire : "Face aux défis à venir, et aux contraintes croissantes pesant sur les finances publiques, il paraît nécessaire que l'État pèse davantage sur le dispositif des médias de service public. Si tel n'était pas le cas, il sera difficile d'écarter la tentation d'un rapprochement organique entre les sociétés ayant appartenu jadis à la même entité. La structuration actuelle qui remonte à l'éclatement de l'ORTF, à une époque où radio et télévisions publiques disposaient d'un quasi monopole, peut en effet être interrogée, à l'âge de la convergence des médias, de la transition numérique et de l'élargissement de l'univers concurrentiel à des acteurs mondiaux venus d'Internet." CQFD.

L'agora de Radio France










Il arrive qu'on me questionne sur les qualités qui me permettent de tenir un blog spécialisé radio ? Quand je précise auditeur à l'écoute tendue, je décèle sur le visage de mes interlocuteurs une moue dubitative. Je me dois alors de préciser que très vite je suis passé de la critique (d'émissions, de chaînes, de Radio France) à l'analyse de l'environnement politique, économique, culturel et social en lien avec la radio. En lisant les rapports de Com (Contrat d'Objectif et de Moyens), en suivant les séances à l'Assemblée ou au Sénat des dirigeants de l'audiovisuel public, en lisant la presse spécialisée. Après m'être constitué un réseau depuis 2011, je ne manque jamais avec ce dernier de confirmer ou infirmer mes intuitions, analyses et/ou perspectives d'avenir. Auditeur oui, blogueur oui, au fait du média dans sa globalité, oui (1). J'aborde la radio dans sa globalité pas comme une succession d'émissions.

Hier, en début d'après-midi, l'Arcom a annoncé les trois personnalités retenues pour être auditionnées en vue de postuler à la présidence de Radio France (fin de mandat Veil, avril 2023). Bim ! Untel dont on murmurait le nom n'en est pas. Telle autre non plus. Les nominés postulants sont : Florent Chatain, Sibyle Veil et Maïa Wirgin. Les dés sont jetés… Ci-dessous un premier point de vue avant de lire à fond les soixante-sept pages (cumulées) des trois postulants.

Florent Chatain


















À voix basse
Journaliste, à France Inter (2003-2010) et de la webradio de Libération, Florent Chatain annonce sa priorité pour France Bleu "C’est incontestablement le chantier prioritaire de ma présidence. La situation, tant au niveau des audiences, historiquement basses, qu’humaine avec des rapports soulignant des comportements hors du commun, requiert un travail de fond urgent."

À voix perdue
En quarante-trois pages, l'actuelle Pédégère de Radio France délaye son projet 60 propositions pour le service public. Oumpff ! Bigre. Aujourd'hui accrochée au nom de Sibyle Veil résonne son "non à la fusion" des audiovisuels publics. Mais il semble bien que l'ambition du gouvernement Macron2 soit justement la fusion. Aie ! Veil a beau être de la même promo Ena qu'Emmanuel Macron, ça ne suffit sans doute plus si on s'expose frontalement à un projet présidentiel. Nous en reparlerons.

Maïa Wirgin
















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À voix haute
C'est le titre du projet stratégique de la deuxième postulante qui a inspiré le titre de mon billet. Maïa Wirgin, secrétaire générale de la Cour des Comptes (par décret présidentiel) depuis le 28 mars 2022 et ancienne de Radio France (2), énarque (Promotion… Simone Veil) imagine vitale la coopération accrue des audiovisuels publics. "L’enjeu n’est pas de regrouper des moyens ou de fusionner les structures pour faire des économies, mais d’unir les forces, immenses, des entreprises de l’audiovisuel public et mettre la coopération au cœur de leur stratégie au service de tous les publics, pour continuer à exercer leurs missions, plus que jamais indispensables." Diriger un service public quand on vient de la Cour des Comptes ça peut aider pour tenir très serré les budgets, particulièrement quand ils risquent de prendre de sacrés coups de rabots. Son engagement dans la bataille est un signal fort pour l'Arcom qui dans un récent rapport faisait état d'avancées trop faibles en ce qui concerne les synergies entre les opérateurs audiovisuels publics (3).

Les deux femmes candidates s'inscrivent dans des stratégies politiques fortes. Comment imaginer alors que les politiques n'aient pas déjà fait leur choix ? Les auditions des trois auront lieu le 19 décembre (juste entre les boules et le … sapin), l'Arcom communiquera son choix au plus tard le 16 janvier 2023.
(À suivre)

Maintenant pour me détendre… je vais reprendre Capote



(1) Ce blog depuis ses origines en juillet 2011, traite plus particulièrement de la radio publique…
(2) En 2014, elle est nommée directrice de cabinet du Président directeur général de Radio France, puis secrétaire générale, où elle conduit les réformes stratégiques du groupe jusqu’en 2018, (les dates exactes de la Présidence Gallet),

(3) "De fait, la coopération au sein de l’audiovisuel public demeure limitée et la convergence TV-radio est très en-deçà de la situation d’autres services publics européens. Ainsi, si certains partenariats inscrits dans le COM sont effectifs (par exemple la plateforme éducative Lumni), tous n’ont pas atteint, à fin 2021, l’objectif fixé par les contrats. Il en va ainsi en particulier des partenariats dans le domaine de l’information régionale, les réalisations étant en deçà des ambitions affichées, qu’il s’agisse des matinales de France Bleu diffusées sur France 3, de la plateforme numérique d’informations locales « Ici », l’ensemble de ces projets souffrant d’une absence de projet éditorial partagé. Les projets communs dans le domaine du numérique se sont traduits principalement par la juxtaposition des contenus produits par les trois sociétés publiques (Lumni, Culture Prime, Ici, etc.). Il appartiendra à l’Etat et aux sociétés publiques de déterminer les nouveaux domaines de convergence dans les prochains COM, en s’inspirant des réflexions déjà menées sur le sujet. Des modalités efficaces de suivi et de mise en œuvre de ces chantiers communs devront également être arrêtées, qui ne peuvent reposer sur la seule initiative des entreprises". [C'est moi qui souligne]. Arcom, Avis n° 2022- du 7 octobre 2022 relatif au rapport d’exécution des contrats d’objectifs et de moyens de France Télévisions, Radio France et France Médias Monde pour l’année 2021.

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