samedi 10 août 2013

Silence radio (à la TV) 2…

© Perspective Films, Need Productions et France 3 Picardie






Les professionnels de la profession se sont extasiés quand Valéry Rosier a reçu le Fipa d'or 2013 pour "Silence radio" un documentaire touchant, sur une radio locale rurale de Picardie et ses auditeurs accros de chanson française. Il aura juste fallu attendre 6 mois pour que France 3 Picardie, co-productrice du film, le diffuse à la télévision hier soir à minuit, pour que le public "couche-tard" s'esbaudisse à son tour. Comme le signalait @KlerviLeCozic sur Twitter "on est encore loin de la diffusion en prime time". Reconnaissons à F3 Picardie d'avoir joué le jeu de la co-production, pour une histoire qui tourne autour de la radio, ce qui n'était "pas gagné d'avance" comme nous le faisait remarquer Valéry Rosier dans l'interview qu'il nous a accordé hier. 

Dès les premières images on est, (pour qui connaît un peu les radios locales), en pays de connaissance. Les bénévoles (dont plusieurs personnes âgées) qui se succèdent au micro sont concentrés, un peu inquiets, attentifs, s'épaulent entre eux et "jouent le jeu" d'animer une radio locale dont on comprendra bien vite qu'elle crée du lien social, et les conditions optimum d'une complicité-fidélité qui s'est installée en Picardie depuis vingt-neuf ans. L'argument principal du documentaire tournant autour de la chanson française, les protagonistes s'en donnent à cœur joie pour pousser la chansonnette dans les conditions réelles de leur vie quotidienne, au risque de faire remonter les souvenirs les plus douloureux de leur existence.

Le documentaire de Rosier est touchant de sincérité et de tendresse. De simplicité aussi. Comme si rien n'était joué. Comme si c'était tellement les situations de la vie habituelle qu'il n'a pas été trop dur pour les auditeurs-acteurs de jouer les scènes de leur vie quotidienne jusqu'à l'intimité la plus crue. Que ce soit dans la salle de bains ou dans la salle de bal. Dans ces deux lieux c'est la musique qui "tient compagnie" face à la solitude. Le transistor et l'orchestre jouent chacun sur les sentiments, le désir de l'autre. Sentiments qui s'expriment dans des gestes mesurés, d'autres qui se refoulent inexorablement. Avec beaucoup de pudeur et de tact, Rosier a su montrer comment la détresse de la solitude pouvait s'accrocher aux branches des relations sociales sans qu'il soit besoin de démonstrations appuyées.

La voix des animateurs de radio, celle des chanteurs "oubliés", est la marque la plus forte du rôle qu'une radio locale peut jouer pour souder un pays, une communauté et devenir un repère incontournable. Jusqu'à ce que le silence radio s'installe et "tout est dépeuplé". Au point d'ajouter à la solitude un peu plus de détresse. Rosier a réalisé un documentaire absolument incarné sans aucune faute de goût ni aucun artifice. Vous ne verrez ici aucun couloir désert alignant quelques parapluies siglés, pas plus que d'horloge électronique dans un studio sans lumière. Mais vous vous prendrez peut-être à fredonner ou aurez à votre tour envie de "mettre les mains dans le cambouis". 

On peut bien imaginer que bon nombre de radios aimeraient avoir ce type de "retours" avec leurs auditeurs, soit quelque chose qui irait un peu plus loin que les minutes d'antenne où les auditeurs sont censés avoir la parole. Je suggérerais bien aux organisateurs du festival "Longueur d'ondes" à Brest, d'inviter en février prochain Valéry Rosier et son "Silence radio" qui j'espère, d'ici là, fera beaucoup de bruit. Il le mérite vraiment.

1 commentaire:

  1. Merci Fañch de nous avoir permis, en en faisant le sujet de ton billet d'hier, de découvrir ce beau film dédié à l'amour de la radio, touchant à plus d'un titre, aussi bien pour l'auditeur que pour celui à qui les coulisses de cette petite station locale évoquent des souvenirs personnels pour s'être trouvé quelques années de l'autre côté du transistor.

    Quelles que soient les considérations portant sur la notion de co-production et de "risque" lié à l'audience potentielle d'un sujet, le choix d'un horaire aussi disqualifiant en dit long d'une manière générale sur le peu d'estime de la télévision envers sa grande soeur la radio.
    On est loin de l'époque où les caméras étaient régulièrement braquées sur les studios de production et de diffusion de la radio mais je parle ici d'une époque où le petit écran était versé dans la création et non dévolu aux diktats des annonceurs. Une autre époque, presque une autre planète. Mais tout en écrivant ces mots, j'ai conscience du fait que France 3 a tout de même le grand mérite d'avoir investi dans le projet, permettant à Valéry Rosier de nous concocter ce très beau et très humain documentaire. Tout n'est donc pas perdu.

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