Jean Garretto - Pierre Codou ©Roger Picard - RF -1975 |
C'est quoi ces ondes incroyables qui font que je sois dans ma voiture hier à 11h40, que j'écoute Fip (dernière station écoutée en quittant mon véhicule), que je ne tende l'oreille pour "Fip Actualités" à 11h50 que parce que j'entends le nom de Garretto et, comme si je m'y étais préparé, les mots prononcés par le journaliste ne pouvaient qu'annoncer la mort de celui qui a transcendé la radio, jusqu'à pousser loin le bouchon en créant avec son compère Pierre Codou "une radio dans la radio" (1) ? Modèle unique de liberté, d'inventivité, d'humanité. L'"Oreille en coin" avait quelque chose de libertaire sans l'afficher, peut-être le souffle de certains de ses animateurs. C'était dans tous les cas une radio libre, avec une très haute dose de création et un engagement total pour les créateurs. Une radio de "bande" sans les private-joke incessants au micro qui excluent l'auditeur. Une radio splendide pour laquelle on pouvait tout arrêter de faire et pour laquelle j'ai souvent tout arrêté.
Rien n'était convenu, attendu, ou en phase "obligée" avec l'actualité. Tout était dans une création débridée et "contenue" (format, grille, fréquence de diffusion), joyeuse et sérieuse, inventive et moqueuse. Infiniment touchante et sensible parce qu'aux manettes il y avait deux "seigneurs" (2) : Garretto et Codou qui, en chefs d'orchestre humbles, mettaient tout en musique sans jamais se mettre en avant ni prendre le micro. Mais, c'est l'annonce et la désannonce de l'émission qui, avec la trompette de Jim Wild Carson nous donnait à entendre "une émission de Jean Garretto et Pierre Codou". Et bien, quand on entend ça pendant 22 ans, on ne peut pas ne pas imaginer que derrière ces deux noms il y ait deux âmes bouleversantes, dans tous les sens du terme.
Mes chers auditeurs, je suis trop ému pour faire mieux aujourd'hui (j'écris ce billet vendredi en fin d'après-midi), j'ai besoin de laisser retomber cette émotion et de commencer à structurer mon prochain billet. Demain dimanche, je publierai le témoignage de deux personnes qui ont côtoyé et travaillé avec Garretto. Acceptez que je vous en réserve la surprise pour 18h…
Pour conclure, je dirai qu'avec la disparition de Jean Garretto, l'"Oreille" s'est doucement mais définitivement refermée, et avec elle tout ou partie de l'art de la radio.
(1) Voir biblio radio, sur ce blog,
(2) Jean-Luc Hees, journal de 13h de France Inter, vendredi 14 septembre 2012,
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