Quelques années plus tôt c'était les porte-clefs qui faisaient fureur au point d'inciter deux talentueux producteurs de radio à proposer une bourse aux porte-clefs sise à la Maison de la radio elle-même (1) ! Toutes les marques proposaient leurs porte-clefs en échange de points découpés sur des produits de consommation (galopante des années 60). Alors que je viens d'écouter le podcast de Thomas Baumgartner (2), je me suis facilement imaginé que dans moins d'un quart d'heure toutes les grandes marques allaient se ruer sur le phénomène "podcast".
La société de consommation (et du spectacle, par là même) ne résiste jamais à l'air du temps et ne va pas laisser passer le train, que dis-je la fusée, susceptible d'accrocher le chaland pour l'inciter grave à se ruer sur le produit plus ou moins vanté, plus ou moins suggéré, plus ou moins annoncé dans un podcast dédié. Dans les deux mots précédents c'est "dédié" qui va faire toute la différence ! Donc demain des hordes de scénaristes, documentaristes, conteurs et autres bonimenteurs vont devoir raconter des histoires extraordinaires en séries, en épisode unique ou en sagas !
Les produits laitiers vont réinventer "Quelle était verte ma vallée", les chocolatiers nous plonger dans une flore luxuriante remplie de fèves extraordinaires, telle grande enseigne de sport nous conter les exploits de toute une myriade de sportifs ignorés, tel marchand de tapis nous endormir debout et, tel fabricant de charcuterie réécrire les aventures des trois petits cochons. Un malletier connu nous fera voyager dans la malle des Indes, les studios de cinéma nous raconteront leurs rêves (et aussi leurs cauchemars), les maisons d'édition les coulisses des comités de lecture, et un grand fabricant d'huile d'olive bio l'histoire de la Méditerranée. Et si vous convoitez le SUV "Picasso" vous avez toutes les chances d'avoir en prime l'œuvre raisonnée du peintre en 60 épisodes. Les marques ne sponsoriseront plus les podcasts elles les produiront !
Tout cela à l'appui d'historiennes, de scientifiques, de sociologues, d'artisans, d'artistes et autres poètes (et quelques marketeurs aussi) qui viendront apporter leur caution à cette "université populaire", ludique, instructive et podcastable à l'envi ! Les services publics ne seront pas en reste. La SNCF nous racontera des histoires de train (reviens Claude Villers), la Sécurité sociale les origines des maladies, la Poste des histoires de timbres, les Impôts celles de faussaires géniaux et le Ministère de la Culture la véritable histoire de Jack Lang ! Les podcasts feront partie intégrante de notre vie et dans tout ce maelström audio on aura bien du mal à écouter… la radio !
L'ipod* |
La demande va être gigantesque, l'offre pléthorique et les marchands de bouchons d'oreille devenir riches comme Afflelou, tant il sera difficile que le podcast n'accompagne pas chaque minute de notre vie. La prophétie de Sibyle Veil sur l'audio sera validée. Des hordes de rédacteurs, producteurs, réalisateurs, d'ingé-sons, d'illustrateurs sonores vont crouler sous la demande. Un studio de podcast s'ouvrira chaque jour en France, vingt en Europe, mille dans le monde. Il y aura des chaînes de podcasts-audio spécialisées par thématique, danse, sport, culture, cuisine, musiques, médias ! Les agrégateurs seront les rois du monde. Cela fera lurette que "Télé 7 jours" aura muté en "Pod 7 jours"…
Ah ben oui pour que ça se popularise rapidement podcast aura très vite été raccourci en "pod". Qui donnera lieu à un Ministère, un Master et autres diplômes indispensables à la création/gestion du phénomène de société. Pour croiser un autre phénomène de cette société : "l'individualisation à son paroxysme total" et son absolu renfermement sur soi. Alors pour parodier un très ancien autre slogan "Le Pod ou comment l'avoir…". That is the question !
Et, comme aurait pu dire André Malraux : "Le vingt-et-unième siècle sera podcast ou ne sera pas !". Bon, resteront bien sûr, à la marge, les… anti-pods !
* Podcast : contraction d'iPod, le baladeur à succès d'Apple, et de "broadcast", signifiant diffusion,
(1) En 1965, Roland Dhordain, directeur de France Inter, demande à deux producteurs inventifs, Jean Garretto et Pierre Codou, de trouver une idée pour faire venir les auditeurs à la Maison de la radio, ce sera "Bienvenue à l'ORTF" et des animations sans précédent, in situ. Pour des raisons évidentes de sécurité la Préfecture de Police mettra fin au bout de quelques mois aux animations auxquelles le public avait eu plaisir à prendre part ! Dans le grand hall, était organisée une bourse aux porte-clefs, chacun pouvait repartir avec celui de l''ORTF à condition de l'échanger avec un des siens,
(2) "Sept ans de trahisons", à partir de la publication dans Le Monde d'une série de six épisodes sur le naufrage du PS, publiée ces jours derniers… Le podcast de 5 épisodes est publié lui environ tous les deux jours, dernier épisode le 11 septembre, il fait témoigner les auteurs Gérard Davet et Fabrice Lhomme et donne à entendre différents ténors politiques du PS,
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