dimanche 3 juillet 2022

Yann Paranthoën, le roi Fausto et sa Petite Reine…

Depuis le 1er juillet et, depuis trois jours, le Tour de France (109è édition) pelotonne au Danemark. Ce qui pourrait être une épopée semble bien être devenue au fil des ans une compétition sportive, très produite, comme on dirait en radio ou en TV, mais dont la part de lyrisme a disparu. Le lyrisme des suiveurs (de presse, de radio, de tv) quant au lyrisme des écrivains ((Fournel (1), Blondin, Nucera, Buzzati, Fottorino,…) soit il s'est tari, soit plusieurs de ses protagonistes sont morts, les vivants ne faisant plus de bonds de cabri à suivre les étapes à la télévision. Ce soir à 22h, France Inter diffuse par l'entremise d'Antoine Chao, deux documentaires de Yann Paranthoën sur Fausto Coppi…

Les bandes magnétiques…
originales











Les vieux briscards de la bicyclette, les passionnés de sons et de documentaires, les connaisseurs de l'œuvre de Yann Paranthoën se pincent. Se pincent grave (ou aigu c'est selon). Les filles de Yann (ses ayant-droits), Armelle et Gwenola, ont confié à Antoine Chao plusieurs bandes magnétiques (dont certaines "Prêt À Diffuser/PAD") sur le Campionisimo italien de la bicyclette, Fausto Coppi. Cela fait plusieurs années que le travail de documentariste de Paranthoën manque à nos oreilles. Manque en rediffusions et manque en inédits.

Alors ce soir est un grand jour… à défaut d'être le grand soir ;-). Vous entendrez deux pièces. "Les funérailles de Fausto Coppi" (45'47") et "Le vélo de Fausto" (26'26"). J'ai pu écouter ces deux documentaires. Dans les deux cas la "patte" de Yann est là. On retrouve le sculpteur de son. L'accordeur de voix. Et le plaisir d'entendre celle de Claude Giovannetti, qui a longtemps travaillé aux côtés de Yann, traduire en français les paroles de la famille de Fausto. Les amis du champion, les journalistes et quelques anonymes reconnaissants et admiratifs de l'homme autant que du champion. Quelquefois enregistrée vingt ans après sa mort (janvier 1960) la mémoire des témoins est intacte. Fausto discret n'en brille pas moins au Panthéon du cyclisme européen et d'abord italien. Yann, hors tous les clichés et les poncifs autour du vélo nous fait partager l'intime, l'effort et l'humanité des champions qu'il a admirés. 

Vous entendrez les témoignages de Christian Rosset (2), Claude Giovannetti, Laure Adler, Michel Creïs, Andréa Cohen, Armelle Paranthoën, Bertrand Durand, technicien son de Radio France qui a commencé sa carrière auprès de Yann Paranthoën, Daniel Mermet…

Les amateurs du Tour de France et/ou de Yann Paranthoën se souviennent de "Le Tour de France 1989 de Vincent Lavenu, dossard 157" (3). Épopée époustouflante à plus d'un Tour et même à plus d'un titre. Pour rédiger ce billet je me suis entretenu avec Claude Giovannetti. Elle m'a appris que ce "Fausto Coppi" devait faire partie d'une "Galerie de portraits des vainqueurs du Paris-Roubaix" (4). Et que depuis 1981,Yann avait  rencontré (jusqu'en 2004), d'anciens coureurs (5), des journalistes ("certains journalistes étaient des monuments" dixit Giovannetti). La "collection" d'archives et de rushes est conséquente et représente plusieurs m3 de bandes magnétiques. Pourvu que la porte ouverte par Armelle et Gwenola Paranthoên ne se referme plus…

Merci à elles pour ce qu'elles nous permettent d'entendre ce soir. Merci à Antoine Chao pour ces deux belles heures d'émissions. À Claude Giovannetti et, à France Inter de remettre en avant l'œuvre de Yann Paranthoën

Wolfgang Suschitzky
Negozio di biciclette, Sardegna 1950,
Merci à Enza Altieri de m'avoir fait
découvrir cette photo…





















Retour sur écoute (rédigé le 4 juillet)
Déjà le compresseur d'antenne est coupé. Il fallait bien que ce soit Yann Paranthoën pour obtenir une telle faveur. Merci à Emmanuel Perrot, responsable technique de l'antenne. Nos oreilles ont apprécié !

"Claude, je suis à la 208. Yann." "Où voulais-tu qu'il soit ?" dit Claude Giovannetti à Antoine Chao. Chouette dès le début de l'hommage de lui avoir donné la parole. Délicate et discrète, celle qui a accompagné longtemps Paranthoën dans ses créations radiophoniques trouve la bonne formule pour dire leur relation "Yann et la radio c'est devenu très affectif très vite"… (et en tapis sonore le générique de L'oreille en coin ne gâche rien !) "Et il était très tendre…"

Bertrand Durand, opérateur et chef opérateur du son "Yann, il faut savoir qu'il écoutait très très fort… Normal si on veut mixer correctement il faut pour des questions de rapports de fréquences et si on veut que les fréquences soient équivalentes il faut mixer à un certain volume… Et il avait une toute petite voix. C'était l'artisan et le maître artisan. Dans un temps de compagnonnage qu'on connaît bien à Radio France". Comme Giovannetti, Durand nous parle de la fabrique, du bonhomme aux manettes. De sa présence d'écouteur total pour lequel on devine un sacré manège dans sa tête ! Avec "son Nagra, son instrument, son Stradivarius, ses micros Shoeps et son parapluie (de berger)"

Christian Rosset : "Il invente cette possibilité de ne pas être dans une continuité [Celle de Pierre Schaeffer que lui suggère Antoine Chao]. Il a compris ce qu'était la radio en tant qu'outil". Il disait : "À partir du moment où on a un magnétophone, un micro, on enregistre quelque chose et après on peut tailler, coller, on peut mélanger, c'est ça la radio !"

Armelle Paranthoën : "On est d'accord avec ma sœur pour diffuser ses émissions. Un inédit [sur Fausto Coppi] c'est quand même con que ça ne soit pas diffusé !" CQFD !

(1) "Peloton maison", Le Seuil, mai 2022,
(2) "Yann Paranthoën. L'art de la radio", sous la direction de Christian Rosset, Phonurgia nova éditions, 2009,
(3) France Culture, 3 août/4 sept 1992, 25 épisodes de 15',
(4) "Yvon, Maurice et les autres… et Alexandre ou la victoire de Bernard Hinault dans paris-Roubaix 1981" ACR, France Culture, 11 juillet 1982, 2h15'50",
(5) Français, Flamands, Wallons, Italiens… (Bartali, Binda,Gimondi) et le Luxembourgeois Charly Gaul, 

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