La matinale : une mécanique machinale ?

Vincent Josse

Je redis ici ce qui me semble être une très bonne idée de la part de France Musique : décentrer sa matinale à 8h et surtout lui donner cette patte culturelle qui fit, en son temps, les belles heures de France… Culture. Mais à force de s'être habitué au tambour major des "autres matinales", publiques et privées, il faut pour entrer chez Vincent Josse s'"obliger" à pousser la porte plusieurs fois.

Mais déjà à 8h, alors que ça gronde de partout et que s'empile le fracas médiatique, les notes d'un piano (1), fraîches et légères, ouvrent la fenêtre sur un autre monde que la voix de Vincent Josse vient subtilement ponctuer. Il serait donc possible de démarrer une journée sans s'obliger à porter le fardeau qui, "de guerre lasse", n'en finit pas de la démultiplier pour ne pas dire la surmultiplier. Il serait donc possible de ne pas être montré du doigt comme un mauvais citoyen qui ne serait pas, au temps T, au fait des dernières turpitudes politiques et autres calembredaines sociétales.

Alors au début ça peut surprendre d'écouter "La matinale culturelle". Bien que celle-ci commence par mettre en lumière un court journal et un "zoom" sur un fait marquant extrait de la presse internationale, ce qui surprend c'est le TON. Et quel ton ! Pas de harangues, de gros titres, de mots sensationnels, de petites phrases au mégaphone, de clips, de claps, de clups et autres onomatopées tendance qui finissent par broyer l'info ou pire, la rendre inaudible.

"De la mesure avant toute chose" voudrait nous faire entendre France Musique pour être dans l'esprit de Verlaine et son "Art poétique"… Un contrepoint indispensable à la mécanique machinale des matinales. Il fallait tout le talent et la sobriété d'un Vincent Josse pour créer ce climat, cette ambiance matinale qui, non seulement "repose", mais pose ce qui dans la comète culturelle justifie d'être mis en exergue, loin très loin de la promotion agressive et vulgaire. Et l'invité aura le temps et le ton pour se poser sur France Musique. Josse joue sa partition et si l'on se prend à son jeu on restera jusqu'à la fin (10h).

De fait les Manzoni, Vanhoenacker, Birenbaum et autres Sintès s'écouteront en podcasts aujourd'hui, demain ou… peut-être après-demain. Dilemmes, frustrations, embarras (du choix) pourraient vite nous inciter à nous en remettre à nos bonnes vieilles habitudes et leurs ronrons "rassurants". Et pourtant il en serait une bonne que de savoir en changer. Je m'y essaye. Et doit appréhender une autre mécanique : structurer "mon petit programme radio" au risque de perdre, à l'écoute en flux, quelques "bons moments de radio" inattendus, surprenants voire indispensables. Nous en reparlerons en décembre…
(À suivre) 

(1) Générique composé par François-Eudes Chanfrault.