mercredi 5 avril 2017

Quelle place pour les auteurs radio ? 2/3

À la suite de mes billets sur le premier débat de la journée à la Scam du 27 septembre 2016, dont le thème était "Quelle place pour les auteurs ?", j'ai relevé les principales prises de parole de la deuxième table ronde, ici. À mon tour de formuler un point de vue.

Et Carole subtile n'a pas dit "cherche sa voix"
…avec sa jolie voix d'anglaise !























Pascale Clark, productrice affirme : "Il faudrait ouvrir les portes et les fenêtres de ces antennes qui restent très claquemurées". Si ses propos valent pour le temps présent, ils ne manquent pas de me faire réagir. On a beaucoup de mal à se souvenir que Clark ait fait autre chose ces vingt dernières années que du studio !!!!! (1) Et en quoi sortir des studios confèrerait-il mieux le statut d'auteur ? Clark précise être productrice plus qu'auteur. Elle constate l'attente des auteurs qui, sur le terrain, avec leurs productions/créations ne disposeraient plus d'espaces de diffusion et ce, plus du tout sur les chaines de la radio publique.

Pourtant France Inter a longtemps impliqué ou sollicité les auditeurs pour qu'ils "interagissent" dans les émissions. Pierre Wiehn (2) avec "Envoyé spécial" incitait les candidats journalistes à proposer un reportage. Celui-ci, s'il était sélectionné, passait à l'antenne. En 1973, et pendant deux ans, Claude Villers avec "Pas de Panique" (3) mettra à l'antenne tous les soirs l'enregistrement d'un auditeur avec l'accroche suivante : "Vous n'écoutez plus "Pas de Panique", c'est "Pas de Panique" qui vous écoute".



En 1987, Brigitte Vincent (Productrice) et Gilles Davidas (Réalisateur) créent 15-115. L'idée de Brigitte Vincent était la suivante : "Qu'est-ce qui fait la différence entre un professionnel (radio) et un amateur (auditeur) ? Le pro a quelque chose à dire tous les jours, l'auditeur a aussi quelque chose à dire une fois". 15-115 naîtra de cette idée, et chaque jour un auditeur différent aura la parole !

 

Pour la saison 1982-1983, ce sont "Les bleus de la nuit" (4) d'où "sortiront" Philippe Garbit (France Culture), Philippe Dana, Christophe Dechavanne. Alors qui a empêché Pascale Clark, depuis 1995, de faire sortir ses chroniqueurs et/ou journalistes du cadre étroit du studio ?

Marie Richeux quant-à elle s'interrogeait "La question financière est essentielle et tant qu'on ne l'aura pas réglée par des questions de transparence on ne pourra pas agir." Ce qui semble surtout incroyable c'est que les budgets en diminution rognent sur ce qui est l'essentiel de la radio publique en France, sa production. Et les moyens y afférent (studios, cellules de montage, matériel technique, équipe de réalisation/réalisateur/ingé-son, déplacements). Comment a-t-on pu en arriver la ?



Qui a pu imaginer que toute une galaxie de nouveaux métiers verraient le jour AUTOUR de la radio pour, entre autres, faire vivre les sites web, et que par "financements à la baisse induits" on diminuerait de façon drastique les moyens de vie et de développement des métiers initiaux et vitaux à la fabrique de la radio ? Comme si tout à coup la fabrique de la radio devenait "accessoire" ? Comme si elle n'était plus l'objet même de la radio ? Comme si elle n'était pas le cœur ou le poumon de la Maison de la radio ? Comme si tout d'un coup ces "vieux métiers" passaient après ceux générés par le numérique ? 




Serait-ce le plan stratégique de Mathieu Gallet connu des seuls sages du CSA ? Secret le mieux gardé de la République ! Alors comment le plan stratégique d'une entreprise publique pourrait-il être caché au personnel de Radio France et aux usagers de ce service public (5) ? Comment la ministre de la Culture de l'époque a t-elle pu cautionner un tel déni de démocratie ? Comment le Président du CSA se drapant dans la loi en vient-il à cautionner une telle forfanterie ? Comment députés et sénateurs ont pu acceptés d'être dépossédés de l'autorité qui leur est conférée pour ne pas imposer la publication de ce plan stratégique ?

Mais qui a évoqué lors de ces deux tables rondes ce point de blocage qui influe sur les orientations éditoriales et les choix financiers ? Même si Christophe Deleu a souligné : "Jamais les charges de Radio France n'ont été aussi précises que dans le texte de 1986. Et que dans ce texte figurent "documentaire, fiction et création radiophonique". Et que "la fonction de recherche d'émissions nouvelles du service public [le tâtonnement expérimental, ndlr] ne se fasse plus. Qu'il n'y ait plus ce temps de réflexion, d'ouverture. Il ne faudrait pas que ces auteurs [nouveaux, ndlr] pensent qu'ils n'ont pas leur place sur le service public."



Une fois le nouveau Président de la République connu, et la/le Ministre de la Culture, je suggérerai bien à la Scam d'organiser une nouvelle journée de réflexion sur les questions posées par Richeux et Deleu. Car pour permettre de répondre complètement à la question "Quelle place pour les auteurs ?" il apparaît clairement que l'orientation stratégique et éditoriale influence et influencera la place des auteurs dans les grilles de programme des chaînes de Radio France.
Demain Le Livre blanc

(1) Débute à France Inter en 1995 et travaillera pour la chaîne treize années jusqu'à la fin de saison 2015-2016,
(2) Avant d'être directeur de France Inter (1973-1981), Wiehn animera plusieurs émissions sur la chaîne. "Envoyé spécial" (1970-1972) sacrera Patrick Poivre d'Arvor en 1971,
(3) 1973-1975, 20h-22h,

(4) Animée par Michel Bichebois, réalisatrice Monique Bailly ; 3h-4h30,
(5) Alors que le plan stratégique de Madame Ernotte pour France Télévision a été rendu public !

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