lundi 5 juin 2017

Sgt Pepper : ma (petite) story…en fanfare

Quand il s'agit de diffuser, de faire découvrir de la musique la radio reste toujours très bien placée. Mais pourquoi pour le 50ème anniversaire de la sortie du "Sgt Pepper lonely heart club band" des Beatles, la radio (publique) s'est-elle pratiquement contentée de diffuser tout ou partie des 13 morceaux qui composaient l'album, mais sans presque rien dire de 'l'autour", de l'époque. Et surtout personne n'a cru bon de nous dire comment ce disque était diffusé à la radio (1) ? Et ce n'est pas parce que Radio France a conçu une jolie "expo" que ça exonère les chaînes publiques d'avoir creusé le sujet au-delà de l'écoute des chansons pop de cette inoubliable comète dans le ciel de 1967 (2).


Lennon/Harrison pendant les sessions d'enregistrement






















Si tout le monde s'est accroché à cette belle date du 1er juin 1967, personne pour autant ne se souvient, qu'à cette date, le huitième album des Beatles soit sorti en France. "On" parle plutôt de septembre. Les Beatles avaient beau être mondialement écoutables, la mondialisation industrielle en était juste à ses balbutiements. Passons. Si l'on doit l'exposition "Sgt Pepper Expérience" à Michel Orier, directeur de la musique à Radio France, à Marc Benaïche et à Benjamin Minimum, on peut se demander pourquoi, pour les 14,5 millions d'auditeurs des radios du groupe audiovisuel public, les chaines ne se sont-elles pas mises, en quatre et en sept, pour faire "The big journey for Sgt Pepper in Radio France" (3). Ça aurait eu de la gueule. Mais tout ça c'eut seulement été possible "avant le drame" !

Le drame ? Celui que l'ex-numéro 2 de Radio France, Frédéric Schlesinger, a provoqué en cloisonnant très hermétiquement les chaînes entre elles, avec la bénédiction du Pdg Mathieu Gallet (4). Schlesinger a cassé la transversalité pour sublimer la verticalité : le premier de la classe (Inter), la meilleure émission (son 7/9), le meilleur matinalier (Patrick Cohen). Dans ces conditions "valoriser les forces vives" d'un groupe, Schlesinger, du haut de sa tour (d'ivoire) et de ses intuitions éditoriales, n'en avait cure. Quand France Musique fait une journée Sinatra pour le centenaire de sa naissance, on se demande bien pourquoi l'événement planétaire du "Sergent Poivre" ne pourrait se diffuser harmonieusement sur les sept chaînes du groupe ? Hein pourquoi ?



Parce que les chaînes n'ont absolument plus l'habitude de travailler ensemble. Surtout la règle en vigueur c'est que les productrices-producteurs soient identifiés à une seule chaîne, une seule marque comme un produit, des fois que l'auditeur étourdi imagine un seul instant que Rebecca Manzoni ait rejoint France Culture ou que Philippe -hip/hop- Meyer fasse de l'esprit sur Mouv' (5). Faire ça ensemble, pourtant, ça aurait vraiment eu de la gueule. Imagine. John Lennon, Paul Mc Cartney, George Harrison, Ringo Starr, George Martin. Une journée entière dans la radio. Casser les grilles. Suivre la voie. Refaire l'histoire. Raconter par le menu. Du premier jour des cent-vingt-neuf de studio à la pochette hallucinante aux 87 personnalités. 15 heures pour 15 morceaux… Ça, ça aurait été une expérience ! I had a dream.

En 1967, dans mon propre souvenir, il était assez rare sur France Inter d'entendre des chansons en anglais dans la journée. Sauf au hit-parade avec Gérard Klein (19h25-19h55) et au Pop Club de José Artur bien sûr. Différent pour Europe n°1 qui a dû multidiffuser Penny lane, Strawberry fields forever et le titre Sgt pepper qui a donné son nom à l'album. Le flower-power n'avait pas atteint la France. Avant d'écouter l'Easy Tempo consacré à cet album-concept diffusé hier soir sur France Musique, j'ai eu envie d'appeler Thierry-Paul Benizeau, un ancien chroniqueur de l'émission qui m'a définitivement scotché avec son histoire d'Alison Steel.

TPB m'a raconté qu'à l'époque il était plutôt Stones. Fin 68, il est parti aux Etats-Unis et, ce n'est que quelques mois après la sortie de la "fanfare" des Fab four qu'il est entré dans le jeu et a apprécié la richesse et le travail des musiciens et de leur producteur George Martin. TPB reconnaît l'héritage classique des Beatles jusqu'à évoquer Purcell dont il imagine que gamins, John et Paul, n'ont pas pu ne pas entendre cette musique. Bénizeau vous parle et vous comprenez assez vite qu'il vous manque un gros chouïa de culture musicale. Nous sommes convenus de nous revoir et de détricoter "Sergent Pepper" (6).




Aujourd'hui 5 juin, les lampions se sont déjà éteints. Com' d'hab' tout le monde a sauté sur l'événement et "on" est passé à autre chose (7). Le 21 juin dans "Creation on air" sur France Culture, Jean-Michel Espitallier et Nathalie Salles, prendront la mesure du "Swinging london" et du "Flower power" réunis, autour du Sergent Poivre. Je ferai un billet ce jour-là que je mettrai en lien avec celui-ci. La mécanique médiatique est horripilante. Qu'à cela ne tienne je prolongerai ce cinquantenaire pendant tout l'été. En septembre je ferai un gâteau-pochette, j'achèterai 50 bougies et, si j'ai pu retrouver mon ampli Luxman, je passerais sur ma platine Thorenz, mon 33t en pâte rouge acheté au mitant des années 80. A day in the life…




Canal + n'a pas loupé le coche et a raconté une part de l'épopée Beatles le 31 mai en diffusant "Eight days a week".



(1) Je me souviens très bien dans l'émission "Faisons bon ménage" de Pierre Wiehn, en juin 67 d'avoir entendu "Micèle", je me vois dans ma chambre ce jeudi-là… Mais pour Sgt Pepper je n'ai pas de souvenir en juin…
(2) Le passionné pourra écouter le "Continent Musiques" que Matthieu Conquet a consacré samedi 3 juin au sujet, sur France Culture. Reconnaître en intro la voix inimitable de Jean Renoir est tout à fait touchant, voir aussi ,

(3) Si vous avez mieux en Anglais, je suis preneur. Ce sont les producteurs qui y ont été associés pas les chaînes en tant que telles,
(4) France Inter, France Culture, France Musique, Fip, France Info, France Bleu, Mouv'. Et je ne parle pas de la circulation physique à l'intérieur de la Maison de la radio. Dans l'esprit exactement contraire à ce que l'architecte Henry avait imaginé pour une circulation "ronde" des ondes et des personnels, plusieurs chaînes (Inter, Info) sont maintenant des bunkers inaccessibles à ceux qui ne disposent pas du "sésame… ouvre-toi",
















(5) Après qu'il lui fût demandé à la rentrée 2016 de choisir entre Inter et Culture, Meyer a appris fin mai qu'il ne lui serait proposé aucune émission à la rentrée prochaine sur France Culture et que son émission serait "réinventée" par d'autres,
(6) J'ai réalisé une interview de Patrice Blanc-Francard (France Inter) et de François Jouffa (Europe n°1) que je diffuserai à ce moment-là,
(7) Je n'ai pas commencé à me souvenir du Sgt Pepper quand l'industrie médiatique l'a décidé. Mi-février, je prenais contact avec Universal pour connaître les "festivités". 















Je n'ai pas encore lu le Hors Série des Inrocks "Psychédélisme et contestation, mais j'ai lu le n°1122. Et j'ai bien aimé y lire quelques stories. 


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