Les éditions Somogy publient un coffret de deux beaux livres sur les 50 ans de la maison de la radio (1). Riche idée pour le premier volume que d'avoir réédité en fac-similé ce qui en 1963 présentait l'aboutissement d'un bâtiment commencé dix ans plus tôt. D'un point de vue graphique, on est bien dans les années 60. Choix typographique rigoureux d'une police de caractère sans capitale (2), épure de style et une certaine rigueur, froideur pour présenter le tout. Peu de personnages (un caissier, deux caissières, deux hôtesses) et des lieux absolument inhabités. Il s'agissait bien de présenter "La maison" pas ses habitants. Personne ne nous dit comment il a fallu l'habiter, comment on fait les personnels qui venaient de 33 lieux différents dans Paris, comment les artistes ont-ils pu mettre un peu de chaleur dans leurs différents foyers et surtout comment circulait-on ? Pas le début d'une présentation de signalétique qui a du mettre un certain temps à se mettre en place.
Par contre "on reste sans voix" devant tant d'imagination pour avoir pensé "à tout". Quel a donc été la commande et par qui pour que Henry Bernard réussisse avec tant de mesure dans la démesure ? Comment a t-on pu passer du rien au gigantesque ? Europe n°1 et Radio-Luxembourg dans leurs minuscules locaux (3) devaient ne pas en croire leurs yeux. "mais qu'est-ce qu'ils peuvent bien faire là-dedans" devaient se demander les passants émerveillés ou éblouis par le futurisme du bâtiment ?
Le deuxième volume, brosse les étapes d'une réhabilitation commencée en 2003 et qui trouvera son apothéose à l'inauguration de l'auditorium en 2014. Les images de Claude Abramovitz, photographe maison, sont belles et fortes. Elles décrivent le gigantisme d'un chantier qui n'a pas empêché les radios d'émettre (4). Quand on aime cette grande maison, on feuillette lentement ces soixante-quatre pages et on prend la peine de décortiquer les textes qui donnent des pistes d'engagement pour les cinquante prochaines années. Reconnaissons que la radio publique a eu deux fois de la chance, qu'en pleine ascension de la télévision l'État accepte de s'engager dans une très lourde opération financière et que cinquante ans plus tard, celui-ci y croit suffisamment pour y mettre les moyens nécessaires à sa réhabilitation. La photo des pages 58 et 59 figure la démolition des studios 102 et 103 qui deviendront l'Auditorium. Cette photo donne une idée assez précise du chantier et d'une certaine façon de la puissance de la radio publique qui n'a pas pour seule fonction d'émettre des sons et des voix, mais aussi de produire de la musique.
Ce sont mes deux livres de chevet pour finir l'année, pour revenir sur le passé et rêver au futur. Après avoir lu ces livres, on ne pourra plus se représenter la radio de la même façon. Au-delà des studios, du son, la Maison de la radio est la grande ville de la radio qui fourmille et invente chaque jour une autre façon d'entendre le monde.
(1) "La maison de l'ORTF, 1963" et "La maison de la radio, 2013", Décembre 2013, co-édition Radio France,
(2) Excepté pour le discours du Général de Gaulle,
(3) Respectivement Rue François 1er et Rue Bayard, Paris,
(4) À France Inter toutefois d'émigrer "Rue du Général Mangin" avant de rentrer au bercail en mars 2014. C'est alors France Bleu qui prendra sa place…
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