mardi 3 décembre 2013

Georges Briquet… une voix pour toutes

Georges Briquet, 1962  Crédits : Joyeux, Louis / INA
C'est un détail hier qui ayant attiré mon attention m'a donné envie d'écrire ce billet. Edouard-Vincent Caloni (un des fils de Philippe Caloni, que j'ai rencontré il y a deux ans pour évoquer la mémoire de son père) décide de me suivre sur Twitter. Je regarde les derniers tweets qu'il a rédigé et découvre qu'il cite un article, paru le 1er novembre dans l'Équipe, sur Georges Briquet, le célèbre radio-reporter. J'achète l'article (1) et vous en parle ce matin. "Ce Limougeaud trapu a personnifié l'âge d'or de « la presse parlée » : ses commentaires ont bercé, entre 1932 et 1964, plusieurs générations d'auditeurs branchés sur des postes à galène puis sur des transistors, à une époque où la télévision balbutiait, écrit Lermusiaux". Tout d'un coup l'on (re)découvre l'importance de la voix en l'absence d'images ou comment la voix savait rendre compte, grâce au texte ou à la verve du speaker, d'événements qui pouvaient galvaniser des foules entières. L'écoute est tendue et s'il sait y faire le radio-reporter s'installe lui aussi dans la mythologie de l'événement qu'il couvre. C'est ce que fit Briquet et que la mémoire populaire retint. En son temps (1898-1968) un Tour de France n'allait pas sans lui.

Le succulent de cet article est là : "il participe à un casting de voix organisé par Miroir des Sports pour Le Poste parisien, en quête de radioreporters. Son phrasé accroche l'oreille des responsables." Ne parlait donc pas qui voulait à la radio. Il fallait, une voix, un ton, un phrasé, du vocabulaire et savoir manier la langue. Si c'était le cas aujourd'hui quelques animateurs/animatrices "inaudibles" feraient un autre métier. Mais vous l'aurez vous-même constaté la voix n'est plus du tout un critère dominant et on pourrait même dire n'est plus un critère du tout. Par là-même la radio en abandonnant cette "qualité" a participé de sa propre banalisation. Et que dire des producteurs récents venus… de la télévision ?

Je n'ai pas dans l'oreille le souvenir de Briquet, même si j'aurais vraiment aimé entendre ça : "Il faisait preuve d'une verve inégalable, écrira Robert Chapatte en 1990 dans L'Équipe Magazine ; et on aurait pu l'enfermer seul dans une pièce qu'il y aurait tenu son auditoire en éveil durant plus de vingt-quatre heures s'il l'eût fallu." (2). Quand aujourd'hui c'est l'image qui devra combler l'absence d'invention, de rédaction et/ou de génie oratoire. Le pire étant atteint quand cette même voix se contentera de commenter ce que tout un chacun sera en mesure de… voir à la radio. Soit l'exact contraire de la pré-science de Briquet : "Vous devez être des photographes par la parole'', développe Daniel Pautrat [journaliste sportif]. Quand on écoutait ses reportages, on était capables de visualiser le décor dans lequel l'action se déroulait." (2)

Lermusiaux, grâce à Briquet, enfonce le clou d'un axiome d'évidence "La radio c'est la voix. Une fois pour toutes.

(1) "Georges Briquet, il était une voix", Jocelyn Lermusiaux,
(2) in, article cité,


Paris-Roubaix, 1944

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