2ème épisode,
Je ferme les yeux… Pas pour dormir, pour écouter avec les retours studio la voix de Claude Dominique au micro de l'Oreille en coin (voir billet d'hier). Je n'ai pas besoin de la voir. Être proche de sa voix comme si elle racontait son histoire juste pour moi. Personne dans la régie ne m'a encore vu, je ne bouge pas. J'écoute.
Je ferme les yeux… Pas pour dormir, pour écouter avec les retours studio la voix de Claude Dominique au micro de l'Oreille en coin (voir billet d'hier). Je n'ai pas besoin de la voir. Être proche de sa voix comme si elle racontait son histoire juste pour moi. Personne dans la régie ne m'a encore vu, je ne bouge pas. J'écoute.
"L'amour-1er chapitre",
avec son ton si particulier Claude Dominique commence par nous asséner quelques bonnes vérités frappées au coin du bon sens : "La clarté du verbe, la parole nette et lumineuse, la langue distincte c'était l'homme du XIXème siècle" tel que le concevait Michelet à l'époque où, de son côté Balzac écrivait "tout bonheur matériel repose sur des chiffres". Le propre du génie est de donner des idées. Un siècle plus tard, l'homme du XXème siècle semble avoir parfaitement assimilé la leçon des grands maîtres."
Quelle intro ! Comment ne pas accrocher (ou décrocher) en plein milieu d'après-midi avec, sans avoir l'air d'y toucher, un tel "lyrisme", un décalage subtil du verbe, à une époque où le vocabulaire commence déjà à "mettre les bouts" ? On a à peine le temps de "digérer" ces bonnes paroles que Claude Dominique installe son roman-chanson, - comme on dirait d'un roman-photo -. Et ce, dès ses premiers mots et les premières notes d'une chanson décalée et inconnue (1). Sa gouaille, sa culture, son allant et son humour "Toporien" (2) nous mettent immédiatement en condition de tendre l'oreille et de ne plus rien faire d'autre. Et surtout ne rien faire d'autre si l'on veut prendre toute la mesure de son art de l'incise et de la citation à juste propos.
Sa ritournelle-clin-d'-œil-à-l'-auditeur "Je suis pas amère, je suis pas aigrie mais ça me fout en rogne…" est le vrai point de départ de sa chronique qui va lui permettre de tricoter et détricoter, avec les mots des autres et les siens, un conte abracadabrantesque ! Alors qu'on entend cette chanson un peu absurde (1) qui consiste à décliner en plusieurs langues les chiffres de 1 à 5, Claude Dominique poursuit : "Ça me fout en rogne de ne pas pouvoir saisir la pensée profonde qui a animé les deux auteurs de ce compte musical intitulé "Zéro, zéro" ! Ya sûrement un message mais lequel ? Ce n'est pas la première fois qu'on utilise des chiffres dans la chanson, mais chaque fois c'était dans un sens bien précis. Il y a eu des comptes pudiques (3), il y a eu des numéros célèbres (4), des énumérations qui ont eu une portée indéniable (5), il y a eu des dénombrements pour calculateurs de tête (6), des calculs britanniquement répétitifs (7), des recherches numériques par tâtonnements (8), et même des tentatives de vulgarisation mathémathéretique (sic) (9) !!!". Voilà une langue maniée, troussée, sublimée qui me ravit tellement que les quelques notes que j'ai réussi à prendre se résument sur mon carnet à d'illisibles gribouillis. Je n'arrive pas à suivre une pensée aussi fertile, décapante et vibrionnante.
Elle poursuit. "Tous ces énoncés numériques étaient lourds de sens, mais avec "Zéro zéro" le mystère reste absolu ! À quoi peut bien rimer ce décompte "Zéro zéro" ? Au nombre éventuel d'acheteurs de ce disque, pourquoi pas ? À notre époque où l'on essaye par tous les moyens à trouver du nouveau… il s'agit peut-être là d'une manifestation de la nouvelle chanson, la chanson sans auditeur, la chanson que personne n'écoute et qui procure à son auteur le sentiment d'avoir éliminé l'impur profiteur de son œuvre,… les mouches ne viennent plus sur son miel… " Quelle plus belle démonstration de l'absurde ? Quel brio ! Quelle maestria ! Quel art de la concision éblouissante ! Je voudrai me lever, applaudir et même lui sauter au cou !
" Enfin, quoi qu'il en soit, cette chanson a au moins un avantage, elle est profondément originale et elle ne ressemble à rien, c'est un point qui mérite d'être signalé en ces temps où l'on peut souvent constater dans les domaines musicaux la présence d'une certaine interpénétration (sic)… " Je ne suis pas sûr de bien comprendre l'interpénétration, mais vous-même, demai,n y comprendrez-vous peut-être quelque chose en suivant la démonstration de Claude Dominique, qui poursuivra sa petite "chanson" avec le cinéma… ?
(1) "Zéro zéro " auteurs non cités,
(2) voir le billet du 4 novembre,
(3) "Petit bikini" Dalida, "69, année érotique" Jane Birkin,
avec son ton si particulier Claude Dominique commence par nous asséner quelques bonnes vérités frappées au coin du bon sens : "La clarté du verbe, la parole nette et lumineuse, la langue distincte c'était l'homme du XIXème siècle" tel que le concevait Michelet à l'époque où, de son côté Balzac écrivait "tout bonheur matériel repose sur des chiffres". Le propre du génie est de donner des idées. Un siècle plus tard, l'homme du XXème siècle semble avoir parfaitement assimilé la leçon des grands maîtres."
Quelle intro ! Comment ne pas accrocher (ou décrocher) en plein milieu d'après-midi avec, sans avoir l'air d'y toucher, un tel "lyrisme", un décalage subtil du verbe, à une époque où le vocabulaire commence déjà à "mettre les bouts" ? On a à peine le temps de "digérer" ces bonnes paroles que Claude Dominique installe son roman-chanson, - comme on dirait d'un roman-photo -. Et ce, dès ses premiers mots et les premières notes d'une chanson décalée et inconnue (1). Sa gouaille, sa culture, son allant et son humour "Toporien" (2) nous mettent immédiatement en condition de tendre l'oreille et de ne plus rien faire d'autre. Et surtout ne rien faire d'autre si l'on veut prendre toute la mesure de son art de l'incise et de la citation à juste propos.
Sa ritournelle-clin-d'-œil-à-l'-auditeur "Je suis pas amère, je suis pas aigrie mais ça me fout en rogne…" est le vrai point de départ de sa chronique qui va lui permettre de tricoter et détricoter, avec les mots des autres et les siens, un conte abracadabrantesque ! Alors qu'on entend cette chanson un peu absurde (1) qui consiste à décliner en plusieurs langues les chiffres de 1 à 5, Claude Dominique poursuit : "Ça me fout en rogne de ne pas pouvoir saisir la pensée profonde qui a animé les deux auteurs de ce compte musical intitulé "Zéro, zéro" ! Ya sûrement un message mais lequel ? Ce n'est pas la première fois qu'on utilise des chiffres dans la chanson, mais chaque fois c'était dans un sens bien précis. Il y a eu des comptes pudiques (3), il y a eu des numéros célèbres (4), des énumérations qui ont eu une portée indéniable (5), il y a eu des dénombrements pour calculateurs de tête (6), des calculs britanniquement répétitifs (7), des recherches numériques par tâtonnements (8), et même des tentatives de vulgarisation mathémathéretique (sic) (9) !!!". Voilà une langue maniée, troussée, sublimée qui me ravit tellement que les quelques notes que j'ai réussi à prendre se résument sur mon carnet à d'illisibles gribouillis. Je n'arrive pas à suivre une pensée aussi fertile, décapante et vibrionnante.
Elle poursuit. "Tous ces énoncés numériques étaient lourds de sens, mais avec "Zéro zéro" le mystère reste absolu ! À quoi peut bien rimer ce décompte "Zéro zéro" ? Au nombre éventuel d'acheteurs de ce disque, pourquoi pas ? À notre époque où l'on essaye par tous les moyens à trouver du nouveau… il s'agit peut-être là d'une manifestation de la nouvelle chanson, la chanson sans auditeur, la chanson que personne n'écoute et qui procure à son auteur le sentiment d'avoir éliminé l'impur profiteur de son œuvre,… les mouches ne viennent plus sur son miel… " Quelle plus belle démonstration de l'absurde ? Quel brio ! Quelle maestria ! Quel art de la concision éblouissante ! Je voudrai me lever, applaudir et même lui sauter au cou !
" Enfin, quoi qu'il en soit, cette chanson a au moins un avantage, elle est profondément originale et elle ne ressemble à rien, c'est un point qui mérite d'être signalé en ces temps où l'on peut souvent constater dans les domaines musicaux la présence d'une certaine interpénétration (sic)… " Je ne suis pas sûr de bien comprendre l'interpénétration, mais vous-même, demai,n y comprendrez-vous peut-être quelque chose en suivant la démonstration de Claude Dominique, qui poursuivra sa petite "chanson" avec le cinéma… ?
(à suivre demain, donc)
(1) "Zéro zéro " auteurs non cités,
(2) voir le billet du 4 novembre,
(3) "Petit bikini" Dalida, "69, année érotique" Jane Birkin,
(4) "Le 22 à Asnières" Fernand Raynaud,
(5) " Sur deux notes" de Charles Trenet, ici par Joséphine Baker,
(6) "Ya qu'un ch'veu sur la tête à Mathieu" Michel Polnareff,
(7) "One, two, threee…", ??
(8) "J'ai deux mains, j'ai deux pieds" Sylvie Vartan,
(9) " La vénus mathématique" Guy Béart.
(5) " Sur deux notes" de Charles Trenet, ici par Joséphine Baker,
(6) "Ya qu'un ch'veu sur la tête à Mathieu" Michel Polnareff,
(7) "One, two, threee…", ??
(8) "J'ai deux mains, j'ai deux pieds" Sylvie Vartan,
(9) " La vénus mathématique" Guy Béart.
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