dimanche 30 décembre 2012

Quel hommage (2)…

Jean Garretto, Robert Arnaut, Claude Dominique…







Le 25 octobre, au studio 105 de la Maison ronde, était rendu un hommage à Jean Garretto (1) disparu le 14 septembre à l'âge de quatre-vingts ans. Cette soirée suggérée par Guy Senaux, ingénieur de son pendant dix-huit ans à l'Oreille en Coin (France Inter), n'aurait pas eu lieu si David Sadoun (2) n'avait spontanément mis à disposition, les compétences de son personnel et le mythique studio 105 (Charles Trenet).

Aujourd'hui je regarde la vidéo qui a fixé ce moment fugitif. Cette réunion était émouvante a plus d'un titre. Calé au fond d'un fauteuil de ce fameux studio, je regardais et écoutais les témoignages qui, fidèles à l'esprit que Jean Garretto et Pierre Codou avaient su insuffler à leurs équipes, n'avaient rien de convenus. La soirée, emmenée par Thomas Baumgartner (3), a vu défiler plus de vingt ans de création radio et quelques-uns des "piliers"-acteurs d'une Oreille en coin (4) qui, d'une certaine façon, allait définitivement se refermer ce soir-là.

Pierre Wiehn (5), qui nous annonce avoir quitté Radio France il y a trente deux ans, a l'impression que cela ne fait que… trente deux jours, particulièrement parce que, sans doute ce soir-là, il reprenait contact avec tous ceux avec qui il avait travaillé. Le témoignage de Wiehn est émouvant. Émouvant car, avec beaucoup de simplicité et de sagesse, il a su rendre hommage à ce qui faisait la quintessence même du couple Garretto-Codou : le génie créatif. Et Wiehn de rendre aussi hommage à Roland Dhordain qui aura permis "l'épanouissement de Jean Garretto et Pierre Codou". L'épanouissement, quel joli mot, quel sens extraordinaire pour laisser le temps faire son œuvre. Laisser Garretto & Codou faire la leur. Ancrée pour toujours dans la mémoire de la radio.

Et Wiehn d'ajouter "Il y a toujours eu la volonté chez Garretto et Codou d'être avec les autres. On n'est pas en démonstration. On ne fait pas des produits pour consommer. On fait des choses pour partager." (6) Et d'expliquer que "le week-end [à la radio] vous pouvez avoir de l'audace" les rituels de la semaine étant bouleversés (7). Pierre Wiehn éprouve une satisfaction (discrète) à rappeler qu'en prenant la direction d'Inter et recevant en "héritage" L'Oreille en coin, il n'allait pas commencer par mettre toute l'équipe dehors ! Et de s'interroger sur ce directeur d'Inter, qui lui, chassa de l'antenne Garretto, lui même ex-directeur de la chaîne ! (8)

Après celles de Simon Monceau et François Jouffa, ce sera au tour des "voix" bien présentes de Marie-Odile Monchicourt, Paula Jacques, Leila Djitli, Katia David, et Christine Lamazières de venir "mimer" sur scène l'ambiance survoltée, potache, chamailleuse, fraternelle, débordante de créativité. S'ajoutera à ce quintet un raton-laveur surgit de "nulle part" Michel Gonzales (dit aussi, pour son nom de radio, "Emmanuel Den"), compagnon et co-créateur avec Kriss de quelques émissions inoubliables. Mais ce que je retiens du témoignage de Gonzales, c'est son étonnement à ce que l'expérience, le laboratoire (9) de l'Oreille en coin, ne fasse ni école, ni ne soit enseigné dans les écoles de radio. Car de ces vingt-deux ans d'antenne sans interruption il "reste" un formidable terreau d'inventions, de techniques, de créativité individuelle et collective, d'esprit d'équipe et d'impertinence (10) sans qu'aucun de ces principes n'aient été revendiqués en même temps qu'ils passaient à l'antenne (11).

J'ai bien conscience, mes chers auditeurs, que ce doit être un peu frustant que je vous parle de quelque chose que vous ne pouvez ni écouter, ni regarder. Peut-être un jour un Festival comme celui de Longueur d'Ondes, pourra en proposer une projection ?

C'est dimanche, il est 18 h, écoutez ça ! Quoiqu'il arrive et longtemps encore j'écouterai Jim Wild Carson le dimanche à 18h ! Merci Jean Garretto & Pierre Codou. Merci.

(1) Producteur à France Inter et co-créateur avec Pierre Codou de L'oreille en coin (1968-1990) et de Fip (1971),
(2) Chef de centre à Radio France du Département de Production Studio (DPS), 
(3) Producteur à France Culture et auteur de "L'oreille en coin", une radio dans la radio",
(4) Manquaient Denis Cheissoux, Robert Arnaut, Daniel Mermet, Agnès Gribes… Et Kriss, Édouard Camprasse, Yann Paranthoën, Pierre Codou, Claude Dominique retenus par ailleurs… Claude Dominique, et je l'ai regretté, qui n'a jamais été citée au cours de cet hommage,
(5) Journaliste, directeur de France Inter, 1975-1981,
(6) Encore une pensée qui aurait sa place au fronton de la Maison ronde, 
(7) Où est-elle l'audace aujourd'hui, en fin de semaine, sur les 7 chaînes de Radio France ? 
(8) Lire ici,
(9) Le tâtonnement expérimental aurait dit Célestin Freinet, pédagogue, inventeur de la méthode Freinet à l'Éducation nationale,
(10) Le témoignage de Jacques Mailhot,
(11) L'exact contraire de ce qui se fait en radio aujourd'hui, où l'on vend d'abord le concept, dont on force souvent le trait, quitte à essayer de faire ensuite "coller" le contenu au contenant,   

2 commentaires:

  1. Pierre Wiehn est très brillant et toujours sympa. Mais ne réécrivons pas l'histoire. Il était directeur des programmes de France Inter sauf ... du samedi après-midi, du dimanche matin et du dimanche après-midi. Les patrons de ce no-directeur land, étaient Garretto-Codou. Point barre. Touche pas à nos postes. Une radio dans la radio. Ce territoire, où il ne pouvait pénétrer, ne lui faisait pas plaisir. En bon professionnel (ancien animateur-producteur), il appréciait nos qualités. Mais il a souvent cherché à nous coincer. Ainsi, Jouffa-Monceau ont été virés par lui, contre l'avis de Jean Garretto et Pierre Codou, pour une faute certes mais une broutille, et ils ne sont revenus sur l'antenne de l'Oreille en Coin que lorsque Wiehn a été viré à son tour. Je n'ai jamais eu une langue de bois, je n'ai jamais politiquement parlé correctement, aussi je ne voudrais pas que la nostalgie nous/vous fasse oublier que le duo Garretto-Codou n'a pas toujours eu la vie facile dans la Maison Ronde. Mais, ils ont toujours tenu bon, et ils nous ont toujours protégés.
    François Jouffa

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    1. Il fallait que ce soit dit et il n'y avait que vous pour le dire aussi clairement. Au-delà des bons souvenirs, il y a bien sûr les faces cachées et les faces douloureuses. C'est ça aussi la radio ! Merci de votre contribution.

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