mardi 19 mars 2013

Pas la peine de crieur…

Daniel Kenigsberg sur le parvis © RF











En plus de 25 ans d'ancienneté à la radio, Emmanuel Laurentin a fini par prendre son envol hier matin. Pour la première fois de sa vie, sans doute, il a passé le mur du son (1). Dans la foulée, nous aurions pu imaginer que son émission d'aujourd'hui (2), il nous la crie pour être entendue le plus loin possible de la Maison de la radio ! Qu'il s'installe à la criée  
pour raconter l'histoire de Jean de Gascogne, crieur de Laon. Comme souvent, Laurentin et son équipe ont trouvé le bon angle pour l'approche de leur sujet. Ce documentaire est original dans sa forme (avec Daniel Kenigsberg dans le rôle du crieur), comme dans le fond, puisqu'il a bien fallu, d'un point de vue historique, s'appuyer sur les archives pour l'écrire et le mettre en ondes. Crieur est mort mais, qu'à cela ne tienne, les documentaristes ont mis en scène ses cris et ses apostrophes à la foule.

Hier matin, il était passionnant d'entrer dans l'histoire du son et surtout de pouvoir, "enfin", ne pas le considérer comme un ajout "banal" de création. En effet, depuis toujours, chacun d'entre nous entend du son, l'écoute et n'en prend la mesure créative qu'après avoir fait "l'effort" d'y penser pour écouter autrement. L'on comprend ,à entendre les deux invités de la "La Fabrique du son" (3), que ce n'est pas d'un claquement de doigts qu'ils participent à la création radiophonique en tant que telle. La société moderne induit un comportement de consommateur qui se satisfait et profite d'un résultat acquis, sans trop chercher à comprendre comment on en est arrivé là ! Trop peu souvent nous disposons des explications, détails, étapes présentant la démarche suivie. Quand la radio sait parler… de la radio, c'est un vrai bonheur pour l'écouteur. 

Enfin sont mis en avant les artistes qui sculptent, bruitent, designent le son. Succulent de faire "connaissance" avec les "outils", ficelles techniques, savoir-faire du/des métiers concernés. Des noms prestigieux (pour celui ou celle qui veut bien tendre l'oreille lors des désannonces des émissions) ont été cités… L'émission d'hier matin a forcément sa place dans les programmes scolaires des adolescents qui, non-éduqués au sujet, ont trop souvent l'habitude d'ingurgiter des résultats audibles sans se poser de questions. L'exemple du dessin animé (sans parole) présenté au cours de l'émission est tout à fait "parlant". (4) Quant au Crieur de Laon, il nous permet de prendre en compte l'importance de la parole et du cri dans une société qui ne possédait aucun autre moyen de communication de masse. 

Les "paysages sonores", que nous propose "La fabrique de l'histoire" cette semaine, sont aussi une très bonne occasion pour mettre en avant la radio, ses techniciens, ses artistes,… et pourrait donner lieu, à court terme, à une émission régulière qu'il ferait bon appeler "La fabrique de la radio".

Le titre de ce billet est un rapprochement audacieux entre l'émission du jour de "La fabrique" et l'émission de 16h de Marie Richeux, sur France Culture, "Pas la peine de crier".

(1) Producteur de "La fabrique de l'histoire", France Culture, du lundi au vendredi, 9h05,
(2) Jean de Gascogne dit « le rat », crieur public à Laon au XVe siècle. Un documentaire de Perrine Kervran réalisé par Séverine Cassar,
(3) Patrick Martinache, bruiteur et son invité, François Christophe, réalisateur,
(4) Écoutez Hervé Déjardin, Ingénieur du son à Radio France à la recherche de nouveaux espaces sonores, ici .

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire