"Un média de service public n’est pas fait pour l’audience mais pour remplir des missions qui sont de faire vivre des valeurs de démocratie, de culture et de création." Jean-Paul Philippot, administrateur général de la RTBF (Radio Télévision Belge Francophone)
vendredi 20 septembre 2013
La bergère, le berger et le petit pitron…
On va dire que depuis la rentrée 2010 j'ai porté une plus grande attention au Mouv', d'abord par ce que j'ai commencé à y écouter Bonneau qui "rentrait au bercail" (1) après son "purgatoire" à Europe 1, et ensuite pour pouvoir en parler sur ce blog. À l'époque c'était Hervé Riesen qui dirigeait l'antenne, déplacée à Paris après treize années à Toulouse. En février 2011, pour lui succéder, Jean-Lus Hees, Pdg de Radio France nomme Patrice Blanc-Francard directeur. Blanc-Francard qui a beaucoup œuvré dans le groupe public a laissé à certains de ses auditeurs le souvenir d'un homme passionné de musique, volontiers joueur (2) et placide. Trois ans se passent. Pendant cette période je ne me souviens pas que la presse se soit intéressée à autre chose qu'à l'audimat de la chaîne qui, aux yeux de ladite presse frôlait l'"accident industriel". Rien moins. Pensez-donc une chaîne écoutée par moins de 200 000 personnes/jour sur le territoire métropolitain on frôle la gabegie… médiatique. Petit rappel : les conseilleurs ne sont ni les payeurs ni les créateurs.
Donc, Blanc-Francard rythme l'antenne, lui donne des couleurs, diversifie les musiques, propulse Laura Leishman (3) et quelques pointures en musique venues de OÜI FM (4), me dit mon p'tit camarade Hervé (Le Transistor)… après qu'un certain Arthur en soit devenu le propriétaire. Hees et Blanc-Francard ont beau dire plusieurs fois par an qu' "on ne fait pas venir les auditeurs d'un claquement de doigts", les observateurs de l'ONU (2) veulent "des résultats et plus vite que ça". Hees répète à l'envi qu'il ne donne pas d'objectif d'audience au Mouv' et qu'il accorde toute sa confiance au directeur et aux équipes pour réussir l'alchimie. C'est le bon mot.
L'alchimie de quoi ? Des jeunes, des urbains, des actifs, des jeunes adultes, des connectés, des jeunes, des trentenaires et autres jeunes qui ne rentreraient pas dans ces catégories (ma pomme). Ce n'est plus de l'alchimie mais du sur-mesure qu'il faut créer pour tenter d'attraper ces publics-là. Puis patatrac, le 27 août Hees annonce le départ de Patrice Blanc-Francard et son remplacement par Joël Ronez, par ailleurs directeur des Nouveaux médias à Radio France. Un projet de Radio Numérique Totale est envisagé.
Début d'une petite comédie légère donnée sur le pavé parisien
La bergère (Arthur), propriétaire de la station Oüi FM propose de rapprocher les moyens du Mouv' et ceux de sa station pour développer les audiences sur tout le territoire métropolitain affirmant que ce serait une occasion d'optimiser la totalité des fréquences ainsi concernées (lire : augmenterait la manne publicitaire).
La réponse du berger à la bergère ne s'est pas fait attendre. Ronez, via Twitter, sûrement très agacé qu'on veuille passer le service public par "pertes et profits" (et influencer son propre projet de développement), répond sec et sans nuance (5). La bergère est mouchée, sort de ses gonds et fait surgir le petit Pitron (genre de pitre) qui se répand sur tous les supports possibles pour dire son indignation quand, son double -Arthur-, sauveur des ondes en péril, propose des solutions économiques, culturelles (et sociales ?) réalistes et immédiatement opérationnelles. Et voilà que le comique-troupier nous offre un remake ridicule de Tartuffe joué avec d'aussi grosses ficelles que celles que le bateleur de foire a l'habitude de manipuler à la télévision. Rideau.
S'il fallait une preuve que cette comédie n'avait pour autre effet, non pas tant d'attirer l'attention des pouvoirs publics sur la saturation de la bande FM, que de permettre à Arthur de s'offrir à pas cher un nouveau show d'égocentrisme, la voilà toute trouvée. Les fréquences radio du service public, dans le cas où celles-ci ne diffuseraient plus de programmes, ne peuvent faire l'objet d'une exploitation par des entreprises privées. Elles sont encadrées par "un droit de réserve" qui permet de les destiner à la diffusion de programmes publics (6). Ce qui fût le cas quand Le Mouv' quitta Toulouse, France Bleu prit sa fréquence.
Donc, méga fanfaronnades, buzz à tout va (7), publicité gratuite pour la radio privée d'Arthur et ses activités… "périphériques". Arthur, déguisé en Jehanne d'Arc ou en Batman, aura beau danser la carmagnole devant le CSA (Conseil Supérieur de l'Audiovisuel), il n'a aucune chance de se voir attribuer les fréquences du Mouv'. Quant à la saturation de la bande FM et de son corolaire, le serpent de mer RNT (Radio Numérique Terrestre), c'est aux pouvoirs publics de s'engager. Avez-vous entendu après que la farce fût (mal) jouée, le moindre bruissement venant de l'Élysée, de Matignon ou des officines de communication attachées à ces institutions ? Aucun. Silence Radio Total. Les sujets s'agitent. Las, les autorités qui ne s'autorisent rien regardent béates passer le train. Comme le disait, autrefois et si bien, Jean-Louis Ézine "Du train où vont les choses…"(8)
(1) Plan B, à l'époque deux heures consécutives de 16h à 18h,
(2) Ondes Non Utilisées,
(2) Au début de "Pas de panique" avec Claude Villers, octobre à décembre 1973 sur France Inter, jouant dans le feuilleton radiophonique maison "Le petit peintre viennois",
(3) Aujourd'hui sur France Inter,
(4) Sandrine Vendel, Christophe Crenel, Francis Viel,…
(5) Voir les gazettes spécialisées dans le buzz,
(6) Information recueillie auprès du CSA. Vous l'avez lu ça dans la presse aux basques d'Arthur ?
(7) À faire le tour des médias et pourfendre le service public Arthur a toutes ses chances pour devenir le joker des animateurs des "Grandes Gueules" sur RMC,
(8) Titre de sa chronique quotidienne sur France Culture.
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Étrange hasard : le jour où tu parles de Oüi FM, un de ses animateurs les plus notables, Gilles Verlant, se tue accidentellement. J'ai cru comprendre qu'Arthur, le nouveau patron de cette chaîne (que je n'ai jamais écoutée - mais ma fille aînée : oui), l'avait viré à son arrivée. Mais il n'y a pas que ces radios privées (de tout), il y a aussi le "service public". Je me souviens de ses chroniques sur le rock, et de ses livres sur Gainsbourg. Une figure de la radio (une voix) nous a quittés.
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