lundi 4 janvier 2016

Bonjour M. le Maire…

Les émissions… en vinyl



























D'habitude mon billet du lundi je commence à y penser le vendredi. Là comme samedi je me suis fendu d'un spécial pour Janis, je laisse venir. Guillaume m'a écrit un gentil petit mot où, passés quelques avis sur la radio, il se désole pour l'avenir des services publics, craignant aussi pour l'audiovisuel. Je pourrais rebondir. On sort doucement d'une certaine "trêve des confiseurs". Je ne suis pas dans ce match-là. J'écoute la radio, des archives. Je prépare notre "République des auditeurs" pour Longueurs d'Ondes (4 au 7 février - Brest). Et je jongle sur plusieurs chaînes de radio. Auditeur banal.

Samedi, Julie Gacon, productrice de "Sur la route" à France Culture reçoit Pierre Bonte. Un nom qu'"on", que je, ne peux dissocier d'Europe n°1, comme s'appelait la chaîne à l'époque et d'une émission matutinale appelée "Bonjour M. le maire" (1). Ça je ne peux pas louper. Non seulement parce que j'ai écouté cette émission plusieurs mois consécutifs, mais parce que le personnage de Bonte est absolument touchant pour sa tendresse envers l'autre. C'est l'image que j'en retiens à la radio ne l'ayant jamais regardé à la télévision.

Avant de donner la parole à Pierre Bonte, Julie Gacon a choisi de nous faire entendre l'indicatif, l'annonce du sponsor "Butagaz, le vrai Butagaz" (2) et une courte présentation pour la millième. Si le "speaker" parle de 4 ans, on est en 1963, Europe n°1 a huit ans, et elle est maintenant bien installée dans le paysage radiophonique qui, en grandes ondes, déploie France Inter (ex France-I), Radio-Luxembourg et Radio Monte-Carlo (3).



Mais, à la différence de Julie Gacon, je ne situerais pas "Bonjour M. le Maire" par rapport à un homme tronc-TV qui ânonne sur la France profonde, et encore moins sur le "Pays d'ici" (4 émissions d'une heure/semaine) qui a fait les très belles heures de France Culture pour que celle-ci s'inscrive "plus avant", dans tant de Pays de France qui avaient bien du mal à recevoir ses ondes hertziennes (4). 

Pierre Bonte, pour raconter ses débuts sur les routes passe un peu trop vite sur un détail. Bien plus que son rédacteur-en-chef qui l'y envoie, on peut imaginer, si on connaît l'histoire de la radio privée, qu'il a fallu "croiser" deux objectifs. L'un d'informer et d'irriguer les communes françaises de cette nouvelle façon qu'avait Europe n°1 de traiter l'info "sur le terrain", et l'autre de financer, donc sponsoriser, une émission qui allait représenter un investissement, en frais et en temps passé. Mais qui de l'œuf et de la poule ? Est-ce la bonne idée de reportage qui a fait chercher l'annonceur ? Ou l'annonceur qui a incité à courir la France ? 

Avant d'écrire ce qui suit j'ai, samedi soir, abandonné la lecture de mon roman, et me suis replongé dans le livre de souvenirs de Maurice Siegel (5), premier patron de l'info à Europe n°1 dès 1955. J'aimerais pouvoir confronter avec Pierre Bonte lui-même l'hypothèse qui suit. Ce qui pourrait apparaître comme une petite émission d'appel avant le journal de 7h est en fait une formidable opération de promotion et d'image de marque de la station de la rue François 1er à Paris (6). Donc, Siegel lui-même, mais dans tous les cas Jean Gorini, directeur général adjoint, ont du donner leur avis, et mieux, concevoir le principe même de l'émission.






Idée géniale en 1959 de jouer la proximité, la reconnaissance de l'édile local, et les inévitables lève-tôt, fierté d'une France en pleine "Glorieuses". Par effet induit promouvoir le transistor qui allait permettre d'écouter la radio "n'importe où".
 Pierre Bonte disposait pour son émission de deux reporters, Roger Arduin et Claude Bobin qui dénichaient les trésors de nos terroirs (5). "Bonjour M. le Maire" mieux qu'un réveil-matin est un repère horaire qui pendant 15 ans va "naturellement" fidéliser les auditeurs qui pourront, à bon compte, faire un Tour de France jusqu'à, peut-être, se croire chacun en reportage, et guettant le jour où Pierre Bonte viendrait jusque chez eux (8).




 (1)1959-1974, du lundi au vendredi, 6h20 puis 6h50,
(2) On cherche encore les faux !,
(3) Je fais volontairement l'impasse sur Sud Radio pour qu'Hervé Marchais (blog Le Transistor) nous fasse une petite leçon d'Andorre et de Sud,

(4) C'est en tout cas l'idée de Jean-Marie Borzeix, directeur de la chaîne (1984-1997), qui a voulu que France Culture infuse dans tout le pays,
(5) "Vingt ans ça suffit", Plon, 1975, (Rappelons que la publication du livre et son titre correspondent au départ brutal de Siegel de la station. Jacques Chirac, premier ministre, l'accusant de persifflage)

(6) Comme nous le rappelle Pierre Bonte à la fin de l'émission le dépositaire "Butagaz-Propagaz" de la commune était interviewé… Bingo !
(7) Source "Les années radio" Jean-François Remonté, Simone Depoux, L'Arpenteur, 1989,
(8) Et combien de femmes maires Pierre Bonte a-t-il croisées ?

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