Remettons d'abord l'église au milieu du village. En 1984, Jean-Marie Borzeix, à peine nommé Directeur de France Culture (1984-1997) cogite avec François Maspero (1932-2015), écrivain, ce qui deviendra "Le bon plaisir". Ce long programme (jusqu'à 3h30) du samedi après-midi proposait à une personnalité de réunir auprès d'elle, ses amis, ses affinités, quelques témoignages et surtout de tisser un parcours de vie personnel ou professionnel… À quelques jours, contraint et forcé, de quitter le navire, Borzeix, écrivait dans Le Débat (n° 95/1997) que cette émission dépassait déjà les cinq-cent "épisodes"… Las, Gélinet Directeur (1997-1999) tailla dans le lard et imposa une durée de deux heures à ce programme. Laure Adler, Directrice (1999-2005) le décima et il en fut finit du bon plaisir d'écouter France Culture le samedi après-midi…
Ce samedi matin, aux aurores, Albane Penaranda, productrice des Nuits de France Culture, nous a proposé la réécoute du "Bon plaisir d'André S. Labarthe"… Qui aime le cinéma et les cinéastes va se régaler. Et je me suis régalé. Puis je me suis demandé si une telle émission pourrait encore exister aujourd'hui ? Il est bon de rappeler que c'est Arnaud Ténèze, ancien Directeur artistique à l'ORTF, qui à la demande de Michel Boyon, Pdg de Radio France (1995-1999), établit un rapport sur France Culture. Le dit rapport y allait à la serpe. Terminées les émissions de plus d'une heure et préconisation de s'en tenir le plus possible au direct. Laure Adler ne manqua pas d'en appliquer les fondements.
Exister aujourd'hui ? Trois heures trente, non mais allo quoi ? L'équivalent d'un siècle à la mesure de Tik & Tok. À écouter comment ? Dans les transports en commun ? En plusieurs fois ? Au risque de perdre le fil ? À moins que les apprentis sorciers du charcutage (et du clic) ne décident d'en faire six épisodes de chacun 30'. Bonjour les galères des coupes en plein dialogue. Quant aux annonces et désannonces de chaque épisode, de quoi rompre définitivement avec une nécessaire fluidité.
Et pourquoi, alors, ne pas le samedi après midi s'installer dans son fauteuil, son canap' ou son transat et (re)trouver le bon plaisir de la longue durée, du temps allongé (à rebours du temps perpétuellement émietté) ? D'une pause si salutaire dans ces temps agités. Et surtout de résister à la tyrannie du temps compressé, efficace, normé, standardisé.
Merci aux Nuits de France Culture de nous donner ces respirations débridées, essentielles à notre survie radiophonique.
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