Tous les jours les musiciens des formations musicales de Radio France jouent dans l'Agora © C.P. |
De notre envoyée spéciale à Paris (1)
C'est une journée intermédiaire, de contrepoint. Mais j'ai bien conscience en écrivant cela que ça ou rien c'est pareil. Ou plutôt rien de suffisamment clair pour éclairer votre lanterne. Hier matin au démarrage de l'AG des personnels de Radio France au studio 105, les salariés arrivant des Régions (2) ont été applaudis. Plusieurs messages de soutien sont lus dont ceux de syndicalistes de l'Institut national de l'audiovisuel (Ina). La grève est reconduite même si la grogne de journalistes non-grèvistes s'exprime (3).
En début d'après-midi une délégation de 15 membres de l'intersyndicale est reçue à Matignon par deux conseillers au dialogue social et à l'audiovisuel (sic). Chaque syndicat a pu s'exprimer. Les réponses sont générales et s'apparentent à de "l'enfonçage de portes ouvertes". La délégation s'est entendu dire "que le gouvernement est très attaché au service public. Très attentif au mouvement en cours mais qu'il doit être tenu compte des contraintes budgétaires (re-sic)." La délégation a rappelé que la colère était très forte au sein du personnel de Radio France. Les conseillers leur ont annoncé qu'ils n'étaient pas en mesure de répondre, qu'ils rendraient compte au premier ministre Manuel Valls qui échangera avec la ministre Fleur Pellerin, et qu'ils (les ministres) reviendraient vers eux (4).
Dans l'intervalle Mathieu Gallet écrit une longue lettre au personnel "dont notre rédaction a pu se procurer un exemplaire" (5). J'en ai extrait le passage suivant :
"Pour ma part, je considère qu’il faut faire la différence entre l’analyse de notre situation actuelle, et les pistes de réformes que la juridiction [Cour des Comptes] propose pour l’avenir. Je ne peux que partager avec la Cour le constat de l’état de crise financière qui est le nôtre, sur laquelle j’ai alerté la tutelle depuis plus de 6 mois et dont je vous ai tenu informés dès l’automne. Je partage également le constat des nécessaires réformes de nos modes de fonctionnement afin de rétablir l’équilibre de Radio France aujourd’hui menacé sous l’effet combiné de la baisse de ses ressources publiques, de la hausse régulière de ses charges d’exploitation et des surcoûts liés à la réhabilitation. Je crois en revanche que la transformation de l’entreprise ne pourra se faire qu’avec vous, au service d’une ambition partagée pour Radio France et non en considération d’éléments purement comptables."
La dernière partie de la dernière phrase est croquignolesque puisque ce ne sont que des éléments comptables qui ont amené à la crise qui est en train de se vivre à Radio France depuis 15 jours. Un Comité Central d'Entreprise (CCE) extraordinaire sera convoqué le 8 avril pour débattre avec les élus du personnel du projet stratégique. D'ici là il n'y aura ni médiation, ni médiateur de nommé. C'est aussi le 8 avril que Fleur Pellerin recevra Mathieu Gallet.
L'A.G. du 2 avril au 105 © C.P. |
Et pendant ce temps-là la presse se presse aux AG du personnel pour recueillir des témoignages de la base. Une journaliste de France Info, Fabienne Sintès, s'exprime dans Libé et Le Monde, dans son édition datée du 3 avril, pond un éditorial qui n'y va pas par quatre chemins. À la question de la journaliste de Libé "Comment en sortir ?" Sintès répond : "Il faut que quelqu'un soit adulte dans la maison". Hum "Les enfants de la maison apprécieront". Quant au Monde il assène :
"Quant au mouvement de grève, il paraît incompréhensible dans une entreprise censée penser le monde d'aujourd'hui, ses enjeux et ses contraintes… Radio France est en grève pour que rien ne change à Radio France. Fascinant désir d'immobilisme, pour ne pas dire de conservatisme. Tout se passe, en réalité, comme si chacun avait oublié le sens même du service public. Celui d'une entreprise au service de ses auditeurs, qui sont aussi, comme contribuables, ses principaux financeurs. Coupable oubli."
C'était vraiment une journée particulière ce temps suspendu à la fois bref et interminable. Demain les journalistes à l'appel du SNJ-Radio France seront en grève. S'en suivra le ouiken pascal. Pour paraphraser Margaret Mitchell "Mardi est un autre jour" (6).
(1) Ça y est je peux me la péter avec ce sous-titre class'. Si l'envoyée spéciale ne signe pas ce billet c'est que ce n'est pas facile d'écrire dans les transports. J'ai le plus fidèlement possible retranscris ses propos,
(2) Fip et France Bleu,
(3) Pendant ce temps Mathieu Gallet était reçu par Fleur Pellerin pour présenter le "Projet stratégique finalisé de Radio France" remis hier par lui à la Ministre de la Culture et de la communication,
(4) Mécanique et parade habituelle de gestion de crise au sommet de l'Ètat,
(5) Formule majestueuse que j'ai le plaisir d'inaugurer,
(6) "Autant en emporte le vent". Dernière phrase du livre "Demain est un autre jour."
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire