mardi 8 décembre 2015

Pop-Musique ou Pop-Club ?

Préalable : à la fin de la saison 14/15 ou au début de celle-ci Poivre d'Arvor (ex-directeur de France Culture) ou Treiner (nouvelle directrice) ont annoncé que la musique, délaissée depuis 5 ans, allait retrouver sa place sur la chaîne (1). De tels aveux laissent pantois ! Jeanne-Martine Vacher fut jetée sans mesure, j'en passe et des pires…
La dernière de J-M.V. du 20 juillet 2013,



José Artur fringant… (Sans doute ©Roger Picard)















Culture-Musique au risque du Pop-Club…
Nous sommes quelques-uns à avoir tendu l'oreille à l'annonce d'un "Culture Musique" (2) sur le Pop Club. Je dis quelques-uns car, dans notre petit monde de fadas de radio, on s'échange nos "trouvailles" (3). C'est pas tous les jours quand même que France Culture fait la promotion des riches heures de France Inter.

Mais autant l'avouer j'étais assez dubitatif avant l'écoute. Pourquoi ? Tout simplement par ce que je pensais qu'il était/serait difficile de mettre en exergue le sujet "monstre" du Pop Club et son "monstrueux" animateur et la musique diffusée pendant quatre décennies dans cette émission. L'un ou l'une (Artur et l'émission) ne risquait-il pas d'escamoter l'autre (la musique) ? Mais comme d'hab' j'ai joué le jeu de l'écoute.

À l'issue du premier épisode j'ai échangé avec Matthieu Garrigou-Lagrange coordinateur de l'émission, lui ai fait part de mon "a priori", ai écouté son point de vue et nous sommes convenus que j'échangerais avec la productrice à l'issue des quatre émissions. Ce que je fis jeudi dernier. Garrigou-Lagrange m'a expliqué que le "pari" de Merryl Moneghetti l'intéressait comme une expérience et qu'il conviendrait de voir à l'issue de la semaine si celle-ci pourrait être reproduite d'autres fois au cours de la saison.


©Ina


















Pour ce qui concerne l'écoute des trois premières émissions je pense que mon intuition était bonne. En tant qu'auditeur de l'ex-Pop-Club j'avais envie de réécouter José, sa façon, ses façons, sa gouaille, son impertinence, son humour et sa complicité totale avec ses invités. La musique devenait alors "accessoire". Je n'avais pas besoin de l'entendre pendant l'émission. Je pouvais y revenir après. Mais l'émission s'appelle "Culture musique" et on se doit d'y entendre de la musique. Dilemme total.

La productrice qui a travaillé huit ans avec Jean-Noël Jeanneney (4) connait et aime les archives et sans doute connait-elle aussi la musique et la chanson ? Mais l'exercice reste difficile car moins d'un an après le décès d'Artur et dix ans après la fin du Pop ce qui reste dans la mémoire collective des plus de quarante ans (5), c'est Artur et Reggiani, Artur et Dali, Artur et la Callas, Artur et Renaud… Artur et son irrépressible besoin de séduire et de draguer les femmes (6). Artur qui dès l'origine du Pop avait confié la programmation de la musique à de talentueux jeunes hommes (7). 

Au cours de ces quatre émissions de "Culture Musique", la musique est en "arrière plan". Même si à l'origine du concept du Pop, elle a été, comme son nom l'indique, au premier plan. J'ai bien sûr écouté la musique choisie par la productrice, mais j'ai surtout écouté Artur pour "voir comment il faisait".

Si des "jeunes" ont écouté cette série, en quoi ont-ils pu être surpris qu'un animateur bavard interpelle des vedettes, des pipoles, accepte un certain brouhaha, une ambiance "foutraque", fraternise avec les artistes et se sente en complicité avec chacun. Tout le monde fait ça aujourd'hui et il aurait sans doute fallu "montrer" qu'en 1965 c'est à peu près aussi improbable que de tenter de survivre sur une île déserte comme l'a fait, en 1963, Georges de Caunes (le père d'Antoine). 

Il ne faudrait surtout pas laisser imaginer qu' "hier c'était pareil que maintenant" mais bien plutôt affirmer qu' "aujourd'hui c'est pareil qu'avant". Aujourd'hui des Pascale Clark et des Laurent Goumarre tiennent leur émission avec un conducteur rigide. Artur tenait son émission avec son bon sens, sa fantaisie et son sens inné de la conversation et du temps qu'il s'accordait lui-même pour parler.


© Roger Picard… sans doute















En 1964, la radio publique dite aussi "la radio d'État" était encore empesée et servile même si le jeune Roland Dhordain, patron de la radio à l'ORTF, était prêt à presque tout pour faire sauter les verrous. En 1965, la décontraction banale d'un Artur est, et jusqu'au détour des années 80, un style, une marque de fabrique et surtout un modèle inimitable (et sûrement inimité). 

On peut constater qu'il s'avère difficile aujourd'hui de (re)mettre en scène le Pop-Club sans en faire toucher du doigt la "fabrique". En inventant, sur place, à la Maison de la radio un lieu, "Le bar noir", en utilisant le carnet d'adresses du secrétaire de François Perrier qu'Artur avait été quelques années auparavant, en décentrant un lieu où l'on cause théâtre, cinéma, cabarets, music-hall loin des grands boulevards parisiens, Artur a inventé la méthode qui pourrait porter son nom. Et pour comprendre ça, pour le contextualiser, quatre émissions n'auraient pas été de trop.

Ça n'enlève rien au travail de recherche, de production et de "mise en ondes" de Moneghetti mais cela induit que, s'attaquer à la mémoire de la radio et de ses acteurs est une entreprise radiophonique à elle toute seule. Qu'il est difficile de faire "l'impasse" sur un producteur qui, autant qu'Artur, a incarné une émission.

Merryl & Patrice ©Pascaline Bonnet






















La dernière émission invitait Patrice Blanc-Francard, jeune programmateur du Pop (8) et toujours jeune connaisseur de la musique d'hier comme de celle d'aujourd'hui. Patrice a pu montrer comment le Pop mais aussi France Inter était dans les années 70 (9) une famille et ça ça change beaucoup de choses pour la Fabrique de la radio. Il a précisé que le Pop-Club n'était absolument pas un talk-show. Il a montré l'immense liberté d'un José Artur liberté que ce dernier rendait aux programmateurs qui ont de fait fait l'histoire du Pop avec cette patte musicale dans l'air du temps qu'on entendait nulle part ailleurs (10). 



(1) Désolé je n'ai pas retrouvé la source…
(2) France Culture, du lundi au jeudi 15h-15h55, 
(3) C'est sur ce principe que j'interpellerai Marie Kopp à l'issue des 4 émissions de la semaine dernière,

(4) "Concordance des temps", France Culture, le samedi 10h, 
(5) J'aurais bcp aimé j'aimerai connaître des jeunes qui auraient écouté l'émission pour entendre leur point de vue,
(6) Comme dans son émission "À qui ai-je l'honneur ?"

(7) Patrice Blanc-Francard, Bernard Lenoir, Claude Villers entre autres, mais aussi le "dandy" Pierre Lattès, comme le surnomme le surnommé PBF (Patrice Blanc-Francard),
(8) Sur la platine de marque "Clément" qui équipait alors le "studio" de l'émission,

(9) Pierre Wiehn, directeur de 1973 à 1981, a participé à créer cette esprit de famille,

(10) Alors que certains se plaignent de la trop forte rotation de disques en "promotion" sur Fip ou Inter, le "disque de la semaine" au Pop c'était 15 passages en 5 jours concentrés sur 5 fois 3 heures. Autant dire qu'ensuite le disque en question pouvait s'attendre à une belle carrière.








1 commentaire:

  1. Je me retrouve sur l'essentiel du billet mais je serai moins indulgente. Je comprends les écueils d'une telle entreprise. La vérité c'est qu'à l'annonce de cette série d'émissions j'ai effectivement focalisé sur José Arthur et oublié le pourquoi du Pop Club. Je m'interroge sur cette méprise. Je pense que c'est parce que chez José la musique était un des éléments de l'émission. Pour info je suis trop jeune pour avoir connu le PoP Club des années 60 et 70. Dans ma mémoire il y avait une émission un peu foutraque, avec un José qui osait beaucoup (osons le dire, parfois un peu dévergondé),ça draguait à fond et dans certaines émissions ça ne tétait pas que du glaçon. Et ça je ne l'ai pas du tout retrouvé dans cette série d'émissions. Tout d'abord pourquoi avoir choisi de focaliser sur des artistes si reconnus Brassens, Barbara ou Régiani ? Surtout que comme tu le dis rien n'a été contextualisé. Ok Brassens chante Fernande, mais encore ? Pour qui n'a pas connu cette période on ne peut saisir l'impertinence d'une telle interprétation, comme ça en direct, sans filet. J'aurais aimé connaître d'avantage les cuisines de cette émissions, entendre les techniciens qui ont œuvré, et pourquoi pas des spectateurs qui ont assisté dans le Bar Noir (comment ça se passait avant l'émission, après). Bref que l'on me raconte la radio que fabriquait tous ces dingos. Mais oui effectivement j'avais perdu de vue qu'il s'agissait d'une émission SUR la musique. Mais en prenant cet angle de vue, pour le coup je trouve que ce qui a été choisi a été bien pauvre. Vraiment pas représentatif de la richesse de ce qu'on pouvait entendre au Pop Club. Je suis navrée d'être aussi critique, mais c'"est vrai que j'ai été très déçue.

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