La République nous appelle
Si la République nous appelle, nous les lointains Français de la Place du même nom, sise à Paris, c'est parce que @RadioDebout nous parle. Nous ne sommes ni en mai 36 (Front Populaire), ni en mai 68 (événements et grève générale), mais le 38 mars 2016. La France dispose de moyens médiatiques gigantesques, et pourtant l'événement de la République, l'événement de la "NuitDebout" (des "NuitDebout" partout en France) ne font que quelques minutes à la radio, à la TV et, dans la presse, peu de très longs papiers.
C'est là qu'"on" prend toute la mesure du "phénomène" médiatique de l'info, institué et corseté. Rappelez-vous l'hystérie "en live" pour couvrir la mort de Bowie un matin blafard de janvier, les directs "breaking news" d'une nuit de novembre 15, à Saint-Denis dans le chaos d'une chasse à l'homme ? Les radios, les TV, la presse, sur le front, hagards et tétanisés par la violence.
Et là pourtant, ici et maintenant, il existe un mouvement de fond, une parole riche, singulière, différente, égale. Elle se vit depuis huit nuits à Répu et @RadioDebout émet pour son deuxième "grand soir". Alors où sont-ils les journalistes, les animateurs de radio si prompts à se rendre sur les lieux qui "bougent" ? Comment vont-ils pouvoir justifier leur absence physique sur ce moment d'histoire pour ne pas dire sur ce moment historique ?
Ici et maintenant
Il n'y a pas de feux, pas de bagarres, pas de vitres cassées, pas de magasins pillés. Il y a le peuple, un peuple fraternel, une parole agile, des mots sensibles, la responsabilité individuelle en porte-drapeau. La responsabilité d'être là, d'écouter, de participer, d'échanger. La responsabilité collective de partager, d'aller beaucoup plus loin que la contestation, d'inventer, de confronter, d'imaginer, de bricoler, de solidariser, de fraterniser. Ce que je/nous écoutons sur @RadioDebout est fascinant pour ce que ça génère, infuse, diffuse, débat, percute, et démultiplie d'ondes positives en ondes positives.
La radio c'est la vie
La radio servirait donc à dire LA vie réelle ! A sortir des grilles, des chaînes, et des cellules (de montage) pour sortir du "statique". Ce statique que, ce soir sur #RadioDebout, Nicolas Philibert à "pointé du doigt", constatant une "radio de studio qui ne sort plus". Le même Philibert qui a filmé une "Maison de la radio" qui fourmille en vase clos. Et, tout d'un coup on prend conscience de s'être "endormi" et de ronronner avec les vedettes du micro, de sourire avec les amuseurs, de réfléchir de teure à teure, de swinguer entre deux et, de se laisser porter par les penseurs qui pensent et ceux qui leur tendent le micro, sûrs de leurs positions de médiateurs.
Mais pourquoi tous ces guetteurs de parole, ces guetteurs de pensées nouvelles, ces guetteurs de vie sont-ils absents de l'événement ou du Mouvement ? Et, où l'on constate, amers, que les médias ont définitivement des réflexes d'exotisme aiguë. "On" court vers les révolutions arabes, on file à Timisoara, à Sarajevo, à Kigali, on s'infiltre au Liban, en Palestine, en Afghanistan, au Pakistan et en Syrie. "On" court le monde, on fuit le pas de sa porte et on se referme sur soi.
Mais, mais, mais, il y a pourtant ICI, de quoi "faire du son", d'enregistrer des témoignages, vivants et/ou poignants, de donner une autre image de la "jeunesse", des ouvriers, des salariés, une autre image de la responsabilité, de l'engagement citoyen et de la démocratie. De la lucidité brillante et contagieuse. Une autre image du "vivre ensemble. Si près de ce "foyer" en pleine ébullition, les plus grandes rédactions médiatiques françaises sont distantes, absentes, ailleurs. Il faudra compter sur les artistes, les créateurs, les photographes et les journalistes indépendants, sur le passant qui passe pour "rendre compte" des nuits du 31 au 38 mars et, plus si affinités.
Un sacré coup de vieux
Les médias, tous les médias qui ont pignon sur rue, viennent, sans s'en rendre compte, de prendre un sacré coup de vieux. Le laboratoire républicain de la République (place de) est grisant, révoltant, féministe, dynamisant, pétillant, imaginant, délirant, engageant, militant, débordant, enthousiasmant, vivant. Tellement vivant. Ici j'écoute @RadioDebout. Au bout du monde, le vent se lève...
Pour Carné (Marcel, cinéaste) "Le jour se lève" en 1939, pour Renoir (Jean, cinéaste) "La vie est à nous" en 1936 (1), comme pour Doillon (Jacques, cinéaste) "L'an 01" en 1973 (2) et son slogan engagé " On arrête tout, on réfléchit et c'est pas triste".
Ce 38 mars de l'An 02 aussi, "On réfléchit et c'est pas triste". Viendra bien le temps où il faudra tout arrêter pour repartir autrement. Radio France sur des événements exceptionnels a su créer des radios éphémères : Radio Urgences (1994, Daniel Hamelin), Radio Mondial (1998, Jacques Vendroux), M'Toulouse (oct 2001) suite à l'explosion AZF ...
Radio de nuit
Alors pourquoi le service public ne pourrait-il pas créer une "Radio de nuit" pour donner la parole, pour créer du lien, pour être en phase avec la société qui bouge ? Mathieu Gallet, Pdg de Radio France, avait suggéré après les attentats de Charlie, que Mouv' soit aussi une radio du débat vivant. Mais aujourd'hui les sept chaînes du service public n'ont-elles pas un rôle majeur à jouer ?
Mathieu Gallet, vous avez là une opportunité exceptionnelle d'ouvrir les ondes aux "ides et aux idées de mars". Avec une telle initiative, Radio France, redonnerait aux nuits radiophoniques du service public, une couleur, une vie, une tribune à un formidable mouvement de société. Mouvement qui, par sa dignité et sa tenue, force le respect. Alors M. Gallet, chiche ? Où bien resterez-vous, et avec vous, les 4600 salariés de Radio France à côté, en dehors, très loin de ce mouvement-là que les 14 millions d'auditeurs de la radio publique ont besoin d'entendre et de comprendre pour, avec toute la population en France, sûrement mieux le partager
Exceptées la photo de tête et la photo N&B du stand "Radio Debout", les photos sont de ©Gilles Davidas
(1) Film de propagande pour le Parti Communiste Français (PCF),
(2) Inspiré de l'histoire dessinée par Gébé, publié en Folio (Gallimard).
C'est grâce à Gébé que j'ai eu envie de "décréter" "L'an 02". Où tu es Gébé j'espère que tu vois ça ! Salut et fraternité !
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RépondreSupprimerÀ la personne qui vient de m'envoyer un commentaire qui commence par "Qui dit que c'est un moment historique ?". Merci de me renvoyer ce commentaire en le signant ou en en envoyant un autre en déclarant signer le précédent (je publierai alors l'initial et le deuxième) ! Merci
RépondreSupprimerC'est fou comme un événement comme celui-ci met 6 ans d'écoute radiophonique au clair.
RépondreSupprimerJ'ai découvert la radio grâce au football, aux multiplex Ligue 1 où l'on tâte l'ambiance dans chaque stade, voyageant ainsi les vendredi et samedi soirs grâce à des voix très vite devenues familières.
On tombe ensuite dans un autre voyage : celui des gens. Voir là-bas comment c'est, si j'y suis. La claque. Que l'on soit en Bolivie dans des mines ou dans une usine du nord (qui est presque aussi loin que l'Amérique du Sud quand on vient de l'extrême sud de la France). Quelques larmes, des sourires.
Puis l'on s'approprie une radio et des voix ; on s'enchaîne à une station. On grandit, car on est jeune - même si on l'est de moins en moins. On critique. On déplore. On désespère. Ce qui nous émeut disparaît : ému, on l'est de moins en moins. Alors on va visiter la grande maison du son pour la comprendre ; comme un poisson dans l'eau.
Et là l'horreur : se sentir vieux car trop jeune. Son émotion mise au ban. Une grille radio qui ne capte que les gros morceaux, laissant passer au travers les fines idées qui se perdent on ne sait où.
Puis la rue, où les sons ont plus d'écho que dans un studio calfeutré. La fluidité d'une balade et d'une pensée loin de la grille.
La justesse des paroles.
"L'heure a sonné"
Moustaclem