mercredi 8 juillet 2015

Les radios régionales… 6/24




















Un feuilleton d'été en 24 épisodes, du mardi au vendredi
par Gérard Coudert


Le privé : moteur de la radio régionale ?
Si ces chroniques estivales rapportent essentiellement "une" petite histoire de la radio régionale du secteur public en France, ce n'est pas pour bouder le secteur privé ! On voit bien en cours de route que l'un n'exista pas sans l'autre… Ce qui est frappant, c'est l'émergence entre 1920 et 1930, d'une multitude d'initiatives de la part de clubs amateurs souvent épaulés par les autorités locales et régionales, qui ont abouti pour certaines à de belles réussites. L'un des exemples les plus surprenants est celui de Radio-Normandie. "Le poste créé par des auditeurs, géré par des auditeurs et qui n'existe que pour l'auditeur" disait la brochure de présentation. 

Ce poste voit le jour à Fécamp sous le nom de Radio-Fécamp en 1926 grâce à Fernand Le Grand du Radio-Club de Fécamp et petit fils du fondateur de la distillerie Bénédictine. Malgré l'activité de son port de pêche hauturière et la construction navale, Fécamp à l'époque avec ses 17000 habitants n'est pas une grande capitale… A force de ténacité et d'astuces (la première station était installée dans la maison du fondateur, studio dans la salle à manger, émetteur de 20w sur la terrasse, antenne sur le toit…) Fernand Legrand s'attire la sympathie de tous, développe son affaire, obtient en 1929 l'agrément définitif de l'Etat. Sa radio (1) prend de l'ampleur, ouvre de nouveaux locaux, réunit une troupe théâtrale et des musiciens, rayonne par de nombreux relais émetteurs sur Caen, Le Havre, Rouen, Cherbourg et même jusqu'à Paris, avec des programmes dignes d'une grande station : matinées enfantines, concerts, retransmissions sportives, romans parlés, informations (avec le journal Paris-Soir)…

Radio-Normandie s'éteint définitivement le 7 septembre 1939, émetteurs réquisitionnés, quatre jours après la déclaration de guerre. Seul son souvenir demeure, entretenu par l'Association des Amis du vieux Fécamp et du Pays de Caux. La Normandie attendra 1966 pour que s'ouvre un petit centre ORTF à Cherbourg et les années 80 pour Caen et Rouen.
Mais pourquoi raconter cette histoire ? Parce que chemin faisant, nous vient l'idée que la radio est née en province ! Ce sont des gens opiniâtres, convaincus qu'il fallait "parler du pays" et valoriser son patrimoine, ses traditions, sa vie locale et ses initiatives, qui de chez eux ont aiguillonné les pouvoirs publics. 

Bien sûr, il n'est pas innocent que des revendeurs de matériel radio-électrique soient souvent à l'origine de ces postes : une industrie nouvelle voyait le jour, donc un commerce. Mais ces pionniers ont toujours su trouver dans leurs régions (2), des soutiens dont l'intérêt résidait dans la seule valorisation du "pays". La radio est née en province d'une volonté d'expression locale, d'un désir d'exister. A cela, l'administration des PTT ne pouvait résister ; et le politique suivit plus ou moins, jusqu'à ce qu'éclate la seconde guerre mondiale.

Et l'on se surprend à sourire aujourd'hui de voir comment l'histoire se répète… Devant le privé, l'Etat ne trouva au cours des années 20 et 30 d'autres solutions que de développer ses stations PTT pour endiguer la concurrence. Et voici que 50 ans plus tard dans les années 80, c'est l'éclosion des radios "libres" qui pousse Radio France à développer son réseau de stations locales…

Demain, la radiodiffusion française nationale…

(1) L'indicatif de la station : "Nos vieux pommiers" de Alfred Rossel,
(2) Radio-Sud Ouest à Bordeaux obtient en 1928 le soutien de la presse locale, du Conseil Général et du Préfet.

© Gérard Coudert/Radio Fañch

6 commentaires:

  1. Gérard, tu seras intéressé par ce film amateur de 1939, sur le site du Pôle Image Haute Normandie archivesenligne.
    http://www.poleimagehn.com/films-archives/archives-en-ligne
    Il faut ensuite aller dans Thématiques, à la rubrique Quotidien et Innovation, puis cliquer sur "1939, la radio". Jean Martin, qui tient boutique à Aumale (Seine Inférieure, comme Fécamp) y fabrique et répare les postes radios de son invention depuis 1931 ! ... Et bravo pour la série ! Christian Clères

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour Christian, merci pour ces précisions qui vont ravir Gerard... J'espère que pour le feuilleton du mois d'août tu interviendras aussi ;-) Le sujet que tu connais bien j'espère te fera sourire (teasing)...

      Supprimer
    2. Christian, tu es bien le seul à savoir dénicher des histoires comme celle-là !!

      Supprimer
  2. y'a pas de quoi ! :) Christian Clères

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En fait plutôt que d'imaginer un feuilleton sur les radios régionales, j'aurais du vous demander à chacun Christian et Gérard de m'écrire une grande saga (avec des photos N&B). On aurait appelé ça "Nous deux" ;-)

      Supprimer
  3. Gérard est parfait et légitime pour raconter cette histoire des radios régionales. Je ne fais qu'apporter une modeste contribution quand il m'est possible de le faire, comme j'espère que bien des passionnés de ce blog le feront cet été ! Et mon premier commentaire s'adressait à Gérard, mais également (et surtout) à tous les abonnés de Radio Fanch. J'espère qu'ils ont été nombreux à cliquer sur cette archive du Pôle Image Haute Normandie ! C C

    RépondreSupprimer