Le Nagra de Jouffa (capture d'écran, LCP) |
Il ne sera pas dit que, sur ce blog, je n'aurais pas, au moins une fois, cité Pierre Bellanger, fondateur et Pdg de "Skyrock". Le titre de ce billet reprend un de ses propos sur l'avenir de la radio, à l'occasion du débat sur "La chaîne parlementaire" (LCP) qui réunissait, hier soir, 18 février, Fabienne Sintès (France Info), Guillaume Durand (Radio Classique), Pierre Bellanger, et Olivier Poivre d'Arvor (Ambassadeur, chargé de l'attractivité culturelle), suite au documentaire "Les temps de la radio" diffusé à 20h35 (1).
Ce documentaire nous permet de réentendre "La tribune de Paris" (Chaîne nationale), Jean-Marie Périer (photographe des "vedettes" yé-yé) qui raconte bien comment "Salut les Copains" (Europe n°1) était en phase avec l'époque (l'info) et la jeunesse du baby-boom (musique). Mais aussi le putsch d'Alger (1961), et les "événements" de Mai (1968) où le Général de Gaulle, chef de l'État saura utiliser les ondes comme en 1940. François Jouffa, (Europe n°1) fait son show pour décrire le fonctionnement et l'autonomie que procure le Nagra, l'enregistreur qui bouleversera le reportage radio (2).
Il est bon de se rappeler que c'est Chaban-Delmas, premier ministre, qui en 1971 supprimera le ministère de l'information. Mais c'est en 1967, la radio privée RTL qui inventera Ménie Grégoire et libèrera la parole des femmes. Daniel Cardon, sociologue, d'expliquer que pour cette libération "La voix va être centrale" alors que "l'image (télévisuelle) l'aurait trahie".
Si Isabelle Veyrat-Masson, historienne, date de l'arrivée de Coluche sur les ondes, la diffusion du langage populaire, ce serait un peu vite passé sous silence Maurice Biraud et Francis Blanche (Europe n°1), Jean Yanne et Jacques Martin (Radio-Luxembourg), qui dégoupillent la radio dès les années 60. Et l'on apprend que "Lorsque l'enfant paraît" l'émission de Françoise Dolto, avec Jacques Pradel sur France Inter (1976-1979), est préparée par Catherine Dolto, sa fille.
Pierre Bellanger, Pdg d'une radio privée, croit "au service public, il y a une vraie liberté, et pas la même que dans les radios privées. Il y a plusieurs parfums à la liberté".
(1) Radio France étant partenaire du documentaire, surprenant qu'il n'y ait eu en plateau qu'un seul représentant du groupe public ?
(2) Jouffa, avant de faire une longue carrière à Radio France, créera fin 68,
sur Europe N°1, "Campus" qui, trois semaines plus tard, sera reprise par Michel Lancelot.
"Droit de suite", le débat animé par Jean-Pierre Gratien,
J'aime fixer ici ce que les invités ont eux-même accroché à leur mémoire. Guillaume Durand, "SLC-Salut les Copains" et Gilles Schneider (Europe n°1) sur les barricades de 68. Et de découvrir que ce sont Frank Tenot et Daniel Filipacchi (1), à la création de Skyrock, qui ont soutenu Pierre Bellanger pendant quatorze ans. Pour Bellanger le moteur de la création radiophonique "c'est la liberté". Pour Fabienne Sintès, la légende de la radio c'est Europe n°1 en 68 (Gilles Schneider dans une cabine téléphonique).
Guillaume Durand dira très bien comment le "couple magique" programmes/infos, à Europe n°1, à l'époque dirigée par Maurice Siegel, a formidablement fonctionné. Et de rappeler comment Chirac a viré Siegel en 1974. Mais Durand cite aussi le Pop-Club et Patrice Blanc-Francard qui programmait la musique rock de l'émission. Et Sintès, très lucide, de se demander si les appels, tels celui de l'Abbé Pierre en 54 sur Radio-Luxembourg, ne seraient pas aujourd'hui pour l'image, diffusés sur une chaîne d'info.
On pardonnera à Fabienne Sintès qui, écoutant "Kiss Fm" et Bohringer "C'est beau une ville la nuit", imagine qu'"Artur est déjà parti, que Lenoir est déjà parti". Bellanger estime qu'on a vécu "L'âge de fer de la radio et que l'âge d'or c'est devant". Et pour enfoncer le clou "L'âge d'or c'est maintenant". Pour ceux qui n'auraient pas de mémoire où ne connaîtraient pas France Culture, d'Arvor considère que "la radio manque de créativité". Manque pas de toupet ! (2)
Le débat abordera la question de l'image. Celle de France Info, dans la future chaîne publique d'info en continu, en collaboration avec France Télévision. Et c'est Bellanger qui aura le bon mot de la fin : "La force de la radio c'est l'absence d'image. Le cœur [de la radio] c'est la voix, c'est le son."
(1) "Pour ceux qui aiment le jazz", Europe n°1, 1955-1968, 22h,
(2) Quand il était directeur de France Culture, il n'a eu de cesse de multiplier le temps d'antenne de l'info, de copier France Inter aux heures de prime-time (6h30/9h et 18h-19h) et de brider la créativité d'émissions comme "Les passagers de la nuit", "Movimento", "Carnet nomade"… et d'"offrir" une part très congrue au documentaire,
re-bonjour M'sieur Fanch,
RépondreSupprimerune petite question indiscrête : mais finalement, qu'avez-vous pensé de cette émission ???
Cette question car la lecture de votre billet m'a laissé sur ma faim sur ce point. Et je n'étais déjà pas en reste (de faim) après le visionnage préalable du documentaire et de ce qui lui servait vaguement d'épilogue.
Sur le premier (documentaire), j'avoue ne pas avoir compris: de quoi est-il question ? de la radio ? du politique ? de la Société ? On pourra toujours s'en sortir avec une pirouette sophiste du type "la politique est partout dans la Société et la radio n'en est que le témoin et c'est de tout cela que le documentaire a voulu rendre compte", mais sur le fond quel était le fil conducteur de ce documentaire ??? Un soupçon de politique et de 4eme république (cela doit faire partie du cahier des charges LCP), un autre de Dolto, un zeste de Mai-ni-Grégoire 68, etc... Ces soupçons de tout m'ont paru faire un ensemble de rien. Si la radio était un sujet abondamment traité à la TV/LCP, pourquoi pas ! Un angle très "personnel", une subjectivité revendiquée pour sortir d'un sujet rabaché. Mais comme le prochain documentaire sur LCP portant sur la radio sera probablement pour 2030, la radio ne valait-elle pas un peu mieux ??? "Radio et politique" seulement avec un traitement moins superficiel n'aurait-il pas été suffisant ?
A défaut, je me suis consolé en écoutant des extraits d'émissions que je ne connaissais pas ... c'est déjà ça, c'est déjà ça.
Quant à l'épilogue ... outre cette manie insupportable de faire réentendre des extraits d'un documentaire entendu 10 minutes plutôt (nous, auditeurs/téléspectateurs sommes-nous à ce point considérés comme oublieux voire lobotomisés pour que cela soit perçu comme nécessaire ?), quelle superposition d'interventions de personnages hétéroclites qui ni ne s'opposent, ni se complètent, voire pire qui ne s'écoutent pas face à un journaliste/animateur qui semble plus préoccupé par le remplissage de ses 30 minutes que d'un quelconque souci de cohérence. Face à cet amoncèlement, Guillaume Durand m'a semblé pour la première fois audible. C'est dire !
Excusez cette saute d'humeur passagère. A nouveau, si le sujet était abondamment traité à la TV, mais comme ce n'est pas le cas ...
Sans faire dans la flagornerie facile, après tant d'énervement, l'écoute de votre quadrilogue a fait office (malgré lui) de baume réparateur ! :)
A bientôt,
Eric
Bonsoir M'sieur Éric,
SupprimerSi des fois j'imaginais m'ennuyer ce samedi soir… Me voilà donc à vous répondre par le menu. Vous faites bien de m'interroger. Je n'attends rien de la TV ni même du cinéma pour raconter la radio. Après le désastre du clip de Nicolas Philibert "La maison de la radio" (vous trouverez 3 billets en avril 2013) : ode à France Inter à 85%, à l'information de cette chaîne à 70%, il ne restait plus pour 4 autres chaînes (2 sont absentes du clip) que 15%, dont 1 plan de parapluies qui sèchent dans un couloir. N'importe quel stagiaire de l'Idhec ou de la Femis aurait été envoyé aux "galères" pour moins que ça !
Bien! Passé ma hargne et mon courroux, je poursuis. J'ai rien appris avec ce documentaire mais j'ai eu du plaisir à suivre le cheminement du réalisateur. Ce dernier répond pour 1% à la question "toujours de bonnes ondes ?". Ce qui m'a surpris c'est qu'au titre du partenariat Radio France, le groupe radiophonique n'ait été représenté que par une personne et que le responsable éditorial ait invité un ex-directeur récemment limogé par Mathieu Gallet, Pdg actuel de Radio France. Laurence Bloch, directrice d'Inter y aurait eu toute sa place.
Durand connaît la radio et s'exprime juste et simple. Bellanger distille son discours super-rôdé et flatte la radio publique dont l'audience de Mouv' doit lui faire à peu près autant d'effet qu'une pluie diluvienne sur les plumes d'un canard ! D'Arvor n'a rien à dire et Sintès imagine le meilleur futur pour France Info en association avec FTV !
La question de fond "Quelle radio pour demain avec quels moyens de production" ne pouvait pas être posée par un journaliste TV qui a sûrement une vision simpliste de la radio : salle de bains, transport, retour au foyer… et qui de fait a simplifié le débat à l'extrême. Ce sujet de la radio permettant de remplir une case parmi toutes les cases des sujets qui doivent être abordés.
Je n'attends donc rien de la TV pour répondre à des questions qu'elle ne se pose pas et qu'elle ne sait pas poser. Quant au cinéma il faudrait des pointures qui aient envie d'aller plus loin que la série de clichés que Philibert nous a fait voir. Qu'un réalisateur ou une réalisatrice comprenne que la radio ne commence pas à 7h mais quand on l'allume.
Alors que la radio, toutes chaînes confondues, ne passe pas une journée sans lui cirer les pompes et la promouvoir outrageusement, la TV, une fois tous les dix ans, sur une seule chaîne, s'essaye à comprendre une mécanique pour laquelle elle n'a que de la condescendance…
Voilà M'sieur Éric mon point de vue. Je ne vous cache pas que je regarderai à nouveau les deux vidéos publiées avec mon billet, pour mieux encore dire demain à la TV qu'elle est médiocre et surtout qu'elle a la mémoire courte. Mais c'est une autre histoire…
À bientôt…
Salut à tous.
RépondreSupprimerAfin de (dé)montrer que mon Nagra est solide, je l'ai jeté par terre.
Idiot que je suis, depuis il est en réparation chez Nagra. Et, par conséquence, n'ayant pas pu l'emmener avec moi -comme d'hab'- en voyage, j'ai raté quelques enregistrements de gamelans à la cour du sultan de Yogyakarta, à Java. Uniquement pour avoir voulu faire le malin devant une caméra de LCP.
François Jouffa